» J’ai connu l’enfer « 

Eupen donne sa chance à un joueur qui donne l’impression de toujours jouer de malchance.

Il se morfondait depuis l’hiver dernier. Prié par le manager de Beveren de se chercher un autre employeur à la fin du premier tour, parce qu’il grevait le budget du club, Frédéric Pierre (29 ans) avait noué des contacts en Chine. Il aurait normalement dû s’y produire. L’épidémie de SRAS, qui a induit l’interruption du championnat, a bouleversé ses projets. Depuis, il s’entraînait, chez lui, comme il le pouvait, à la recherche d’un club, comme tant d’autres footballeurs, frappés de plein fouet par la crise.

Fin août, l’attaquant a trouvé un employeur : l’AS Eupen, en D2, une AS qui vit un début de saison pénible, quelques mois à peine après avoir flirté avec la D1. A l’euphorie du titre en D3 et d’une saison dernière disputée sur le même mode, enthousiaste et conquérant, a succédé un brutal retour sur terre, sans doute teinté d’un brin d’amertume, car d’aucuns s’étaient pris à rêver à l’élite, via le tour final.

C’est Eric Depireux, le fils d’ Henri, qui a mis Pierre en rapport avec Eupen.

Pierre :  » Il m’a demandé si ça m’intéressait. Pourquoi pas ? L’essentiel, pour moi, est de jouer. Tout a été réglé en dix minutes. L’argent n’est pas important. J’avais envie de rejouer, de sortir de mes quatre murs, le club voulait faire quelque chose « .

Voilà des propos nouveaux, dans le chef d’un joueur qui n’a jamais caché qu’il voulait rentabiliser sa carrière au maximum.  » Ces six mois ont été un enfer. En me disant que je ne devais plus jouer, Beveren m’a mis dans le trou car les clubs à la recherche de renforts choisissent des éléments qui jouent. On m’a oublié alors que j’avais bien entamé le championnat. Seulement, il fallait mettre les Africains en vitrine. Maintenant, je veux me donner à 100 % pour mon club. Le reste suivra naturellement. De toute façon, il n’est certainement pas déshonorant de jouer en D2, surtout dans un club de ce niveau. Il faut aussi relativiser l’intérêt financier de certains clubs. Prenez Beveren : nous n’avions pas de prime. Il fallait atteindre 38 unités pour en toucher « .

Rentrée à l’automne

Frédéric Pierre devrait effectuer sa rentrée le 27 septembre, voire le week-end suivant. L’entraîneur ne souhaite pas brûler les étapes. Pierre participe aux trois séances hebdomadaires obligatoires, ainsi qu’aux entraînements facultatifs du mardi matin et du vendredi soir. Il a aussi disputé un match amical :  » Je m’entraîne beaucoup physiquement. Professeur d’éducation physique, Claudy Chauveheid est prudent. Il ne me fait pas jouer en Réserve, pour éviter que je ne me blesse. Les premiers jours ont été durs mais je me sens déjà mieux, même si je manque encore de rythme. Je ne suis pas venu à Eupen en touriste. Nous voulons que je joue bien dès mes débuts « .

Frédéric Pierre nourrit-il des ambitions particulières ? Il s’en défend :  » Je veux avant tout faire profiter l’équipe de mon expérience, lui apporter quelque chose. Devenir le meilleur buteur ou le meilleur passeur ne serait évidemment pas déplaisant mais je m’efface devant l’intérêt de l’équipe « .

Le Brabançon a déjà tâté de la D2, au RJ Wavre. Il avait alors 16 ans.  » Il y a une grosse différence de rythme, on vous laisse moins jouer à cet étage. Je sais que les défenseurs adverses vont m’attendre de pied ferme. Ça ne m’effraie pas. Mes coéquipiers pourront profiter de l’intérêt que me porteront nos adversaires. J’espère ainsi leur créer des brèches. Eupen est un club sérieux mais un peu amateur. Beaucoup de joueurs travaillent encore et les entraînements n’ont lieu que le soir, à 18.30 heures. Il n’y en a que trois par semaine, contre quatre à Wavre. Eupen n’est pas le Brussels ni Heusden-Zolder, sans oublier Ostende, très ambitieux cette année. Son premier terrain est formidable, le stade est très bien aussi mais nous n’avons pas d’aussi bons terrains d’entraînement « .

Pas de pression

Le nouvel attaquant d’Eupen ne se risquera pas à porter de jugement sur son équipe. Il serait trop hâtif. Une chose est claire : Eupen a raté son début de saison et a essuyé un nouvel échec samedi dernier à Roulers (0-2). Il marque le pas, après s’être cassé les dents contre Heusden-Zolder durant le tour final. Le club est certainement victime de ce contrecoup mais Pierre pointe d’autres causes aux résultats décevants de cette fin d’été :  » Les autres équipes l’abordent nettement plus défensivement, plus rudement, que la saison passée. L’entraîneur est privé de pas mal de gars dont Thierry Habets, le gardien, ChristianCouturier, qui a un problème osseux, doit toujours laisser la préséance au jeune Nicolas Heynen tandis que Marc Chauveheid et d’autres joueurs n’ont pas encore retrouvé leur niveau habituel… pas plus que moi. Le coach attend le retour de beaucoup de joueurs « .

A Eupen, Frédéric Pierre a découvert un club convivial, qui se garde de formuler tout haut ses ambitions, même si on l’imagine mal se contenter d’un rôle anonyme. Après tout, il a n’a pas transféré Philippe Lenglois puis Frédéric Pierre pour se satisfaire d’une place anonyme. L’attaquant veut se remettre en évidence. Le Brabançon s’attendait d’ailleurs à plus de pression qu’il n’en a ressentie depuis son transfert : » Ça ne m’empêchera pas de me donner à fond. Cette absence de pression nous permet de travailler sereinement. Un autre exemple du calme dans lequel l’entraîneur peut travailler, c’est le temps qu’on me laisse pour retrouver mes sensations. Si Eupen vise à nouveau le tour final ? Sans doute, mais la direction ne m’en a rien dit. Lors de notre premier entretien, elle m’a expliqué qu’elle souhaitait terminer parmi les six ou sept premiers. Elle n’a pas changé son fusil d’épaule. Vous savez, finalement, je préfère jouer la tête en D2 que de moisir ailleurs. J’ai eu plusieurs possibilités mais il m’est difficile de trouver un club en Belgique. Ma réputation me précède et ça ne changera pas. Je n’ai eu aucun problème à Beveren mais cette étiquette me reste. C’est tellement facile de cataloguer quelqu’un… Que les gens racontent ce qu’ils veulent « .

Le Cercle l’a contacté :  » Ce n’était pas intéressant financièrement, compte tenu des trajets et tout ça. Pour rejoindre Eupen, je n’ai qu’une heure de route. C’est moins que pour aller à Beveren. En revanche, les enfants rentrent de l’école à 15.30 h et je les quitte à 17 h. Enfin, avant, j’étais parfois absent toute la journée, jusqu’en début de soirée. Chaque horaire a ses avantages et es inconvénients « ..

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