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 » J’ai besoin de liberté « 

Rencontre avec le capi français d’Ostende avant la réception du Standard. Elle est où la langue de bois ?

Calé aux portes du Top 6, à deux points du leader, après avoir déjà affronté Anderlecht, Bruges et Gand : pour Ostende, ça roule. Samedi, c’est le Standard qui se déplace à la Côte. Alors, on est allé voir un meuble de ce club. Kévin Vandendriessche. Capitaine. Cinquième saison là-bas. Près de 150 matches en championnat de D1 avec le KVO – deux joueurs seulement (Fernando Canesin et Sébastien Siani) ont fait mieux.

 » Les premières saisons, ça a pourtant été compliqué « , lance le Kev.  » J’étais rarement dans les plans de l’entraîneur quand le championnat commençait, puis je finissais par arracher ma place. Je me suis toujours défoncé pour faire le boulot, c’est ma marque de fabrique. Et depuis un peu plus d’un an, je sens qu’on me fait vraiment confiance, tout le temps. Je me doute que si j’aligne quatre mauvais matches, je vais me retrouver sur le banc. Mais sans ça, je suis d’office dans l’équipe.  »

Comment tu as vécu ces débuts de saison difficiles ?

KEVIN VANDENDRIESSCHE : Je me consolais en voyant qu’on avait une vraie équipe de foot ! Il y avait Sébastien Siani, Franck Berrier, Andile Jali, Michiel Jonckheere, tous des gars que tu ne déloges pas comme ça. Pour n’importe quel joueur de foot, c’est dérangeant d’être sur le banc, mais tu dois toujours voir qui est devant toi. Et puis on partait pour jouer les play-offs 1, et ça aussi, ça console un peu. Mais finalement, j’ai reçu ma chance assez vite, et chaque fois, j’ai su la prendre.

Qu’est-ce que ça fait de jouer deux fois de suite les play-offs 2 quand on a pris goût pendant deux ans aux play-offs 1 ?

VANDENDRIESSCHE : On n’était pas aveugle, on voyait que le club commençait à aller moins bien, ça se remarquait à plein de choses. Mais bon, ça te fait quand même drôle de jouer le maintien après avoir connu l’enthousiasme des PO1. Parce que oui, pendant deux ans, on a vraiment bataillé pour rester en première division. Là, maintenant, on fait le boulot, on a bien réussi notre départ. On essaye de prendre le plus possible de points, le plus vite possible, puis on se fixera un objectif.

 » Quand tu as connu la période Coucke, ça fait encore plus mal de jouer le maintien  »

Il y a eu pas mal de remous au niveau de la direction, du staff, du noyau. Tu crois que ça a eu une incidence sur vos performances ?

VANDENDRIESSCHE : Ah oui, clairement. Ça a parfois été compliqué. Après le départ de Marc Coucke, le train de vie du club a subitement changé. Je te donne un bête exemple : quand il était là, on pouvait offrir nos maillots aux supporters, on était censé les payer mais on ne devait pas, au bout du compte. La direction oubliait ou faisait semblant d’oublier. Maintenant, si tu donnes un maillot, tu le paies, point barre. Et ce n’est pas plus mal. Je vois qu’il y a une nouvelle stabilité dans le club, tout est plus clair, mieux balisé, on sait où on va. A tous les niveaux, on remarque que les décisions sont réfléchies, et ça n’a pas toujours été comme ça.

Chaque année, je reçois un courrier dans lequel on me demande si je prolonge ma pause carrière ou si je reprends mon poste à la mairie de Wasquehal…  » Kévin Vandendriessche

Tu veux parler du recrutement, des salaires, tout ça ?

VANDENDRIESSCHE : Oui. Quand Marc Coucke a remis le club à Peter Callant, on ne savait toujours pas où on allait, c’était vraiment une période de transition. Aujourd’hui, chaque arrivée a été bien étudiée, c’est intelligent. Je te cite deux exemples : Ronald Vargas et Ari Skulason. C’est plein d’expérience. Et il y a encore d’autres nouveaux joueurs qui font du bien au groupe.

L’ombre de Coucke plane toujours sur le club ou c’est définitivement terminé ?

VANDENDRIESSCHE : Je ne te cache pas que pendant les premiers mois qui ont suivi son départ, on continuait à parler beaucoup de lui. Mais entre-temps, il y a pas mal de joueurs de son époque qui sont partis, alors on en parle moins. Les anciens, on continue à l’évoquer de temps en temps. Normal, on ne peut pas tout jeter, on ne peut pas oublier tout ce qu’il a fait ici. On a joué deux fois les play-offs 1, on a joué en Coupe d’Europe, on a fait une finale de Coupe de Belgique. Tout ça en peu de temps. C’est logique qu’on y pense encore. Et c’est pour ça que ça fait encore plus mal de jouer le maintien.

Verheyen et Broos ne tiraient pas dans le même sens.  » Kévin Vandendriessche

 » 400 bornes pour voir ma fille à la maternité le jour de LA demi-finale de Coupe  »

Tu joues la finale de la Coupe contre Zulte Waregem, vous la perdez aux tirs au but. Un bon ou un mauvais souvenir ?

VANDENDRIESSCHE : Une vraie déception parce qu’on était plus forts que Zulte Waregem, on avait les joueurs pour la gagner. Simplement, on s’est planté. Ils ont été meilleurs le jour J, mentalement, tactiquement. De notre parcours, je retiens plutôt le match retour des demi-finales, quand on se qualifie sur le terrain de Genk. Le matin, sur le coup de 7 heures, ma femme me prévient qu’elle est sur le point d’accoucher. On est en mise au vert dans le Limbourg, la maternité est à Villeneuve d’Ascq, près de Lille. C’est à plus de 200 bornes. Yves Vanderhaeghe me dit : Tu peux y aller mais tu ne traînes pas pour revenir parce que tu es dans l’équipe ce soir. C’est un adjoint qui prend le volant, on fonce. J’arrive trois quarts d’heure après la naissance de ma fille, il ne m’a pas manqué grand-chose. Mais pas de chance, ça a été très vite. Je reste une demi-heure à l’hôpital puis on reprend la route. Je joue tout le match et on se qualifie.

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Ne pas avoir joué les deux matches contre Marseille, c’est ton autre grande déception avec Ostende ?

VANDENDRIESSCHE : Ouais… Imagine, un club français, l’OM a toujours été dans ma jeunesse. Ces soirs-là, je n’ai pas compris tous les choix de Vanderhaeghe, surtout qu’on s’aime bien… Mais je n’ai rien dit. Je voulais qu’on se qualifie, ce n’était pas le moment pour mettre des bâtons dans les roues de tout le monde ! On devait aller à la guerre, tous ensemble.

 » Le plus fort, c’était Berrier  »

Tu as joué ici avec Silvio Proto, Jordan Lukaku, Franck Berrier, Ronald Vargas, Landry Dimata, Gohi Bi Cyriac… Qui te laisse les meilleurs souvenirs ?

VANDENDRIESSCHE : Sans hésiter, Berrier. Lui, franchement, c’était la grande classe. Dans le foot et en dehors. S’entraîner avec lui, c’était un plaisir, je n’avais jamais vu ça. Il avait une technique, un passing, une vision du jeu, il savait dribbler, donner des passes millimétrées du gauche comme du droit. Presque toutes ses passes étaient parfaites tout le temps ! Dommage qu’il ait dû arrêter subitement à cause de ses problèmes cardiaques. J’ai tout vécu aux premières loges parce qu’on est devenu amis à Ostende et on l’est resté.

Tu n’es pas étonné qu’il soit devenu consultant en télé ? Ce n’était pas le plus grand communicateur quand il jouait !

VANDENDRIESSCHE : Tu as raison, il ne parlait pas beaucoup aux journalistes, il n’aimait pas ça, il ne donnait à la limite des interviews que quand son club l’obligeait. Il était dans sa bulle. Ce qui faisait sa force, c’est que sans parler beaucoup, il était tellement bon que tout le monde parlait de lui… A côté de ça, dans la vie de groupe, il y avait des moments où il savait bien se lâcher.

On a cru à un nouveau départ pour Ostende il y a un an, avec le ticket Gert Verheyen – Hugo Broos. Pourquoi ça n’a pas marché ?

VANDENDRIESSCHE : Il faudrait leur poser la question mais j’ai ma petite idée. Je peux me tromper mais je ne pense pas que leur entente était très bonne, en tout cas ils ne nous donnaient pas l’impression de tirer dans le même sens. Verheyen avait ses idées, Broos avait les siennes, et elles n’étaient pas identiques ! Les joueurs ressentaient vraiment les choses comme ça.

Les divergences concernaient les compos, les tactiques ?

VANDENDRIESSCHE : Oui, tout ça. Je crois que le coach ne pouvait pas faire ce qu’il voulait. Va les voir, demande-leur ce qu’ils en pensent, ils te diront peut-être l’inverse mais je n’en suis même pas certain…

 » Vanderhaeghe était fou par moments mais il avait une patte sympa  »

Le nouveau duo Kare Ingebrigtsen – Franky Van der Elst, c’est comment ?

VANDENDRIESSCHE : On a l’impression qu’ils tirent dans le même sens, de toute façon c’est une clé pour que ce club rebondisse.

Quand tu as appris que ton nouveau coach était Ingebrigtsen, avoue que tu es allé voir sur Google parce que tu ne savais rien sur lui…

VANDENDRIESSCHE : Pas grand-chose, c’est vrai. J’espérais juste que ce n’était pas un gars trop strict. Je n’ai jamais eu un coach vraiment dur et je n’ai pas envie de connaître l’expérience. J’ai besoin d’un peu de liberté, notamment en début de saison.

On te comparait à Vanderhaeghe quand tu étais à Mouscron. Tu l’as entre-temps côtoyé ici, et tu as eu la confirmation que vous aviez des points communs ?

VANDERHAEGHE : Je sais qu’il avait une réputation de joueur qui mettait tout le temps le pied et qui ne lâchait rien. Il s’arrachait sur tous les ballons, il paraît. Alors oui, je me reconnais en lui. Mais Vanderhaeghe, ce n’était pas que ça non plus. Techniquement, ce n’était pas un manchot. Il jouait parfois dans nos matches d’entraînement. Il taclait, c’était un fou par moments, mais il avait aussi une bonne petite patte sympa et il savait donner une bonne passe.

 » J’avais fini par laisser tomber mon rêve  »

Tu avais pris une pause carrière de dix ans à la mairie de Wasquehal pour tenter ta chance avec Mouscron en D2. Tu y penses encore ?

VANDERHAEGHE : Oui, chaque année quand je reçois un courrier dans lequel on me demande si je prolonge ou si je reprends mon poste à la comptabilité là-bas… Il me reste trois ans de pause, je crois. Je t’avoue que quand je bossais là-bas, je n’espérais plus trop devenir pro. J’avais fait quelques saisons en CFA et CFA2, je trouvais que j’étais plus que correct mais rien ne bougeait, donc j’avais fini par laisser tomber mon rêve. J’avais bien passé les 20 ans et aucun club pro ne s’intéressait à moi. J’avais eu une chance quelques années plus tôt à Guingamp, j’avais fait des entraînements avec le noyau A qui était en Ligue 2, et j’avais eu la conviction qu’ils n’avaient rien de plus que moi. Mais il n’y avait pas eu de suite.

Je me suis toujours défoncé pour faire le boulot, c’est ma marque de fabrique.  » Kévin Vandendriessche

Tu as des origines hollandaises, donc maintenant tu dois au moins te débrouiller en néerlandais ?

VANDENDRIESSCHE : Désolé, pas un mot, je n’y arrive pas. C’est très dur comme langue pour un Français, et les langues, ce n’est déjà pas mon fort. OK, j’ai des origines aux Pays-Bas mais ça remonte assez loin, même mes parents ne parlent pas du tout le néerlandais.

Propriétaire d’un canasson avec Franck Berrier

Kevin Vandendriessche a une passion qui le démange depuis qu’il est gosse : les courses de chevaux. Et les chevaux eux-mêmes. Un héritage.  » Mon père jouait le dimanche, il allait au bar PMU du coin, c’était une tradition. Il buvait sa petite bière, moi je buvais mon petit coca et je faisais mon petit quinté sur un coin de sa gazette. Mon petit frère est à fond dedans aussi, on n’arrête pas de parler de chevaux, tous les jours ou presque.  »

Le Français lit la presse spécialisée, mate des courses à la télé, fréquente occasionnellement l’hippodrome d’Ostende et joue régulièrement. Avec modération.  » Jamais des grosses sommes et je m’interdis de jouer en ligne. J’ai toujours été raisonnable, mais pour moi, c’est sans Internet ! Je vais dans des bars PMU dans le Nord de la France, je peux y passer rien que quelques minutes juste pour jouer, ou y rester trois heures pour regarder des courses à la télé et discuter avec d’autres gars qui ont la même passion. Je peux dire que j’en connais un bout sur la question ! A force de regarder des courses tous les jours, de lire ce qu’on écrit sur les chevaux, je les connais presque tous, et presque tous les jockeys.  »

On l’avait interviewé au moment où il se préparait à quitter Mouscron pour Ostende. Il nous avait fait cette confidence :  » Je pourrais investir un jour dans un cheval de course.  » Entre-temps, ça a été fait. Mais mal fait…  » J’ai acheté un cheval avec Franck Berrier, on a mis chacun 5.000 euros. Franck était tombé sur un agent qui avait soi-disant une bonne affaire. Le cheval était dans le sud de la France, un entraîneur le louait et le montait en course. On ne devait rien lui payer, simplement il devait prendre 70 % sur les gains, Franck et moi on devait se partager les 30 % restants. On n’a jamais rien touché parce que le cheval n’a jamais fait un résultat. En fait, on s’était bien fait avoir. Il n’avançait plus, il n’avait plus envie. Il avait fait quelques performances quand il était jeune, puis il avait eu des gros soucis de santé que l’agent nous avait cachés. C’est comme dans le foot, tu peux être bon en catégories d’âge et ne jamais percer chez les adultes. Et tu peux tomber sur des agents véreux qui te refilent de la camelote. On a vite revendu ce cheval, on a récupéré un peu d’argent. Il est possible que je refasse l’expérience, mais maintenant je suis mieux au courant de ce qui se passe dans le monde des chevaux, je connais les bonnes personnes.  »

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