INNOVANTE ET EXCITANTE

Entre tradition et modernisme, culture et football, bière et espaces verts, la capitale de la Bavière dispose d’un grand pouvoir d’attraction.

Plus besoin de messes ni de prières pour le succès économique de Munich. Le Münchner Kindl (petit moine qui a donné son nom à la ville et qui en est devenu le symbole) est devenu grand et peut désormais contempler du haut de la tour de l’hôtel de ville toute la puissance d’une métropole. Mais que les curés se rassurent : ils ne risquent pas de perdre leurs fidèles. Car si Munich offre un visage résolument moderne, elle peut également verser dans le conservatisme et la tradition. En souvenir de sa place de bastion catholique lors des guerres de religion, elle est restée fort attachée à la religion en général, au catholicisme en particulier. Signe de cette singularité, c’est ici que les conservateurs politiques, via la CSU, branche bavaroise de la CDU, ont longtemps réussi leur meilleur score.

C’est tout cela, Munich : une ville tournée vers l’avenir mais qui n’oublie pas son passé ; une métropole moderne aux traditions vivaces ; une cité où il n’est pas rare de rencontrer à la même table de brasserie un costard cravate et un habit traditionnel bavarois.  » La spécificité de Munich, c’est d’arriver à concilier l’esprit d’un village avec celui d’une ville d’importance mondiale « , explique Marc De Vestele, diplomate belge actif dans le commerce extérieur et qui réside dans la deuxième ville d’Allemagne.  » La culture et l’identité bavaroise sont très prononcées mais c’est aussi le siège de plusieurs entreprises de grande renommée. Si en semaine, on côtoie les personnes les plus branchées, en semaine, les habitants sortent leur costume traditionnel, culottes de cuir pour les hommes et Dirndl pour les femmes « .

Succès économique

Le visage le plus visible aujourd’hui est celui du miracle économique permanent. Celui dont s’enorgueillissent tous les habitants. C’est ici que Siemens, BMW, MAN, Allianz et de nombreuses entreprises de nouvelles technologies ont construit leur succès.  » Munich offre l’image d’une place forte économique « , affirme Wolfgang Nickl, membre du comité d’organisation de la Coupe du Monde local,  » On y trouve des sociétés bien connues mais également un pôle très actif dans les computers et la nanotechnologie. C’est également la région allemande au plus bas taux de chômage. La ville a une grande zone d’influence économique qui va jusqu’à Augsbourg, à 60 km à l’ouest « .

Cela attire, évidemment. Les commerces sont légion et le centre-ville est animé d’une foule toujours plus avide de goûter aux derniers concepts ou magasins à la mode.

 » Il y a un grand pouvoir d’achat ici et cela se sent. Pour faire ses courses, il faut passer par le Fünf-Höfen, galerie commerçante new-look au caractère très exclusif avec des nombreuses enseignes chics. Pourtant, cela grouille de monde « , ajoute De Vestele,  » Il n’est pas rare d’y rencontrer les plus grandes vedettes du monde et que ce soit à l’opéra ou dans les concerts de rock, les plus grands chanteurs font un détour par la ville « .

Depuis la fin de la guerre, Munich a réussi sa transition :  » La région est sortie de son caractère agraire dans les années 60 en menant une politique axée sur l’automobile, l’aviation et les grandes technologies. Certes, il y a eu une crise dans les années 1999-2000 à cause de l’éclatement de la bulle internet en Bourse ou de la pauvreté du marché immobilier des bureaux mais le sud de l’Allemagne est toujours considéré comme la région ayant les meilleures perspectives. Avec l’émergence de l’Europe de l’Est, Munich est devenu la plaque tournante des grands salons internationaux axés sur ce marché-là. C’est également une destination de tourisme médical. C’est ici que viennent se faire soigner les cheiks arabes. La ville est très fière de ce succès et on insiste énormément sur les compétences régionales. Tout le monde sait qu’elle est prospère et cela peut parfois agacer. Sur la scène politique, Munich pèse aussi très fortement. Il suffit de voir le nombre de consulats encore présents « .

La FAN FEST à l’Olympiapark

Quand elle décrit sa ville, Else Gebauer qui travaille à l’Office du Tourisme tient un discours que l’on pourrait croire de rigueur :  » C’est une ville innovante, excitante et amicale « . Et pourtant, cela se vérifie. A l’allure arrogante, Munich se montre accueillante dès que l’on franchit les portes de ses brasseries toujours animées. Munich aime également emprunter des chemins non balisés. Dans le domaine culturel notamment. Nickl :  » La dernière mode est d’investir des anciens lieux industriels pour les transformer en endroits branchés. On ne reste que cinq, six ans et puis la jeunesse va voir ailleurs. Pendant quatre ans, l’ancien aéroport était à la mode. Maintenant, c’est la Kultfabrik et Optimol, une ancienne raffinerie d’huile « .

Sur le plan architectural, Munich fait également preuve d’ingéniosité. La tour BMW en est un premier exemple mais le plus frappant demeure ce que les Munichois ont réalisé avec leur parc olympique. Si les deux clubs de foot les plus populaires de la ville ont déménagé vers l’énorme pneu qu’est l’ Allianz Arena, l’Olympiastadion conserve toute sa magie. Ses formes rebondies, son toit particulier (il se visite !) et son harmonie avec la foire et la piscine olympique – le tout étant recouvert d’une énorme toile-, attirent une foule de curieux.  » Le parc olympique demeure un grand lieu de rendez-vous. Le jardin fut construit sur les débris de la Seconde Guerre mondiale que l’on avait entassés là-bas « , continue Marc De Vestele,  » Tout cela a formé des talus artificiels couverts, aujourd’hui, de verdure. On vient s’y promener ou participer à l’une des nombreuses manifestations. Le stade accueille des concerts, le village olympique a été transformé en campus universitaire, la piscine fonctionne toujours et le dôme sert pour les colloques ou les foires « . Lors de notre visite, la foule se pressait à une brocante géante, à un meeting international de natation et à une exposition d’anciennes voitures allemandes.

Durant la Coupe du Monde, c’est à l’Olympiapark que se dérouleront la FAN FEST et les publics viewings où l’on pourra assister à la retransmission des matches sur grand écran.  » On disposera un square derrière l’ancien stade « , explique Nickl,  » On a choisi le parc olympique comme lien avec la dernière Coupe du Monde en Allemagne. C’est ici, en 1974, que s’est déroulée la finale. Sans compter que nous sommes dans un endroit unique sur le plan architectural. Cette idée nous est venue directement à l’esprit et nous nous sommes uniquement focalisés sur ce lieu. Pour les retransmissions, on installera un podium sur le lac avec un écran géant de 60m2. Des concerts, des débats, du football de rue et toute une série d’animations seront prévus durant le mois de juin. Et en guise d’inauguration officielle, les trois orchestres philharmoniques de la ville ( Bayerisches Staatsorchester, Münchner Philharmoniker et le Symphonieorchester des Bayerischen Rundfunks) donneront un concert unique, le 6 juin « .

Culture et football

Ce concert offre une fois de plus un exemple de cette image caméléon que revêt la ville. Car, si la bière coule à flot dans les innombrables jardins ( Biergarten) aux quatre coins de Munich, si l’on s’engouffre dans les boutiques du centre-ville, la capitale de la Bavière est également une cité de culture, qui offre peut-être moins de richesses architecturales que d’autres capitales européennes mais le nombre de musées et la qualité des £uvres exposées permet à Munich de rivaliser avec Londres, Paris, Berlin, Rome ou Florence. Les plus grands peintres se bousculent pour accrocher une de leurs toiles dans l’ Alte Pinakothek, la Neue Pinakothek ou la Pinakothek der Moderne. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si le mouvement du Blaue Reiter (le Cavalier Bleu) a été formé ici. L’antiquité trouve grâce à la Glyptothek et les sciences et techniques au Deutsches Museum, le plus grand d’Europe consacré à la science. Soit un petit éventail de l’offre énorme (plus de 40 musées).

La Coupe du Monde ne sera pas qu’un événement de plus pour une ville qui les voit défiler. Au contraire ! La tradition footballistique est vivace et la rivalité entre le Bayern et Munich 1860 tenace.  » Le Bayern est un club de contradictions. Il est un peu à l’image de la ville. Il veut s’ancrer dans la culture régionale mais ne rêve que de conquérir l’Europe « , commente Nickl,  » C’est le club le plus riche et au palmarès le plus éloquent d’Allemagne alors qu’au départ, il s’agit du club des laisser pour compte. Désormais, on dit que Munich 1860 est l’équipe des habitants de la ville. Il profite simplement de l’arrogance du Bayern. Comme il milite en D2, il suscite davantage de sympathie que le Bayern que tout club rêve de détrôner « .

Depuis 1972, les deux formations jouent dans le même stade : d’abord le stade Olympique, quand Munich 1860 était en D1 ou pour ses matches au sommet de D2, et depuis le début de la saison, l’ Allianz Arena, qui a coûté 340 millions d’euros.  » Les deux équipes voulaient un vrai stade de football. L’Olympiastadion, avec sa piste d’athlétisme, ne permettait pas de sentir l’ambiance. A ce niveau, l’ Allianz Arena est vraiment réussie. Franz Beckenbauer et Günther Netzer ont d’ailleurs dit du nouveau stade qu’il s’agissait du plus agréable au monde « .

Plus que toute autre ville, Munich a donc réussi à intégrer les dernières modes tout en conservant son cachet original. Gebauer :  » Ici, il se passe toujours quelque chose. On dit d’ailleurs de Munich qu’il s’agit de la ville italienne située le plus au nord. Pourtant, on a l’impression que rien ne bouge. C’est un village d’un million d’habitants « .

STÉPHANE VANDE VELDE, ENVOYÉ SPÉCIAL À MUNICH

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