« Ils sont déjà plus pros »

Du haut de ses 22 ans, l’arrière gauche veut apporter son expérience et son exigence à un Standard new look.

Il fêtera seulement ses 23 ans le 1er août prochain, mais en observant la trajectoire de Sébastien Pocognoli, on a l’impression qu’il a déjà… bouclé la boucle : parti du Standard à 16 ans, il a joué quatre saisons à Genk puis est parti à l’AZ pour revenir au Standard en janvier de cette année… alors que son plan de carrière, qu’il avait bien en tête depuis longtemps, prévoyait une ascension progressive, sans brûler les étapes.

 » Les circonstances orientent parfois les trajectoires d’une manière qu’on n’avait pas prévue « , dit-il.  » En décembre 2009, l’AZ a été éliminé de toute compétition européenne dans les conditions que l’on connaît. Le club traversait aussi des difficultés financières suite à la faillite de son sponsor principal, la banque DSB du président Dick Scheringa. Sans ces événements, il est possible que je serais toujours là-bas à l’heure actuelle. Libre à certains de considérer que j’ai effectué un pas en arrière en revenant au Standard. Moi, je ne vois pas les choses de cette manière. J’ai laissé parler mon c£ur, c’est tout. Le Standard représente mon enfance. C’est le club où j’ai effectué une partie de mon écolage et que j’ai continué à suivre même pendant mon exode. Pendant ce temps, beaucoup de choses ont changé. Le Standard actuel n’a plus rien à avoir avec celui que j’ai quitté en 2003, que ce soit au niveau des résultats, du professionnalisme ou des conditions de travail. Une seule chose n’a pas changé, c’est la ferveur des supporters. J’avais envie de connaître le club sous sa nouvelle mouture, avec ses nouvelles infrastructures. Je me disais aussi que, si le Standard avait été champion à deux reprises, ce n’était pas le fruit du hasard mais le résultat d’un gros travail. Paradoxalement, cette envie de revenir est peut-être née lors de cette fameuse soirée du 9 décembre qui, pour moi, avait été magique… jusqu’à la 93e minute et ce but de la tête de Sinan Bolat. J’ai quitté le terrain abattu, mais j’avais vécu un moment très spécial : revenir jouer un match de Ligue des Champions contre le club de son enfance et dans une ambiance pareille, c’était une sorte de consécration. C’est peut-être là que j’ai commencé à me dire que j’en reprendrais bien. Et que, tant qu’à faire, autant revenir au bercail lorsqu’on est encore jeune et qu’on peut apporter sa contribution aux succès. Si j’avais attendu 35 ans pour revenir, j’aurais vraiment eu l’impression de boucler la boucle. Pas maintenant. Lorsqu’on laisse parler son c£ur, on se trompe rarement. Et, effectivement, je n’ai pas été déçu.  »

 » Aux Pays-Bas, j’ai appris à défendre « 

Sur le terrain, ce retour aux sources ne s’est pas déroulé tout à fait comme prévu….

Poco : On a vécu une belle aventure en Coupe d’Europe, mais c’est sûr qu’en championnat, j’espérais mieux qu’une 8e place… Louper les play-offs I a été une grosse déception. Mais à part ce mauvais classement, je me suis bien épanoui à Sclessin. J’ai pris beaucoup de plaisir à travailler au quotidien dans ce club. Et à jouer avec le maillot rouche, surtout lors des matches à Sclessin.

Quitte à jouer jusqu’au bout ? Même lors du match amical de fin de saison à Roulers, destiné à préparer le club flandrien pour son tour final contre les clubs de D2 ?

Je trouve cela tout à fait normal. Lorsqu’on signe un contrat dans un club, c’est pour jouer. C’eut été d’autant plus malvenu de déclarer forfait que je venais à peine d’arriver. J’étais au Standard depuis cinq mois à peine, comment aurais-je pu dire : – J’arrête, j’enaiassez ? J’aurais d’ailleurs tenu le même raisonnement si j’avais été là depuis quatre ans.

Jouer arrière gauche aux Pays-Bas ou en Belgique, est-ce pareil ?

Pas tout à fait. J’ai dû m’adapter. Aux Pays-Bas, où l’on adore jouer avec des ailiers, les défenseurs se retrouvent souvent homme contre homme. Les Néerlandais ont la culture de l’offensive. Les arrières sont priés d’y collaborer, mais sans perdre de vue leur adversaire direct. Il faut donc rester concentré pendant 90 minutes et ce n’est pas toujours évident. Mais cela m’a beaucoup apporté de connaître une autre culture footballistique. A force de jouer chaque semaine contre des ailiers rapides, j’ai appris à… défendre !

Aujourd’hui que la page AZ est tournée. Que reste-t-il de ces deux ans et demi ?

Rien que des bons souvenirs. Avoir pu travailler avec un entraîneur de la trempe de Louis van Gaal, cela marque un joueur. Je pourrai aussi raconter plus tard que j’ai participé à l’un des deux titres de champion remportés par le club d’Alkmaar, le premier datant de 1981. J’ai vécu une belle aventure en compagnie de trois autres joueurs belges, tous titulaires, qui sont devenus des amis : Maarten Martens, Gill Swerts et Moussa Dembélé. J’ai aussi beaucoup appris au niveau humain, j’ai gagné en expérience et je me suis forgé un caractère au contact de ces Néerlandais qui n’hésitent jamais à vous dire vos quatre vérités en face. J’avais même appris à apprécier la région et le mode de vie en vigueur dans le nord des Pays-Bas. Cette expérience m’a enrichi, cela ne fait pas l’ombre d’un doute.

Et ce fameux plan de carrière, qu’il avait élaboré au début, il est tombé à l’eau ?

Non, pas du tout. A 22 ans, je suis loin d’être en fin de carrière. Je rêve toujours d’aller le plus haut possible, de jouer dans un grand club européen, de participer à une Coupe du Monde ou à un Championnat d’Europe. Mais je ne vais pas proclamer que le Standard ne sera qu’une étape et que je n’ai qu’une idée en tête : repartir au plus tôt. Ce serait malvenu. Je verrai d’abord comment va se dérouler la saison : quel résultat l’équipe obtiendra et quelles seront mes performances. Si je continue à me plaire et que l’équipe gagne, je pourrais rester longtemps.

Sergio et de Sart

Un prono pour la nouvelle saison ?

Je la sens bien. Lorsque je vois l’équipe qu’on peut déjà aligner actuellement, alors que des renforts doivent encore arriver, je me dis qu’elle a fière allure. C’est sûr qu’il est encore très tôt pour émettre un jugement, après deux semaines d’entraînement et des matches amicaux contre des équipes de divisions inférieures, mais les joueurs se comportent de manière plus professionnelle que lors des mois précédents. A l’entraînement comme en dehors.

C’est grâce à l’apport de Sergio Conceiçao ?

Je le découvre au fil des jours. J’apprends à le connaître. Il a joué au plus haut niveau, c’est un gros plus. Il connaît plein de petites choses qui peuvent aider les joueurs à atteindre leur meilleur niveau. En tout cas, il apprécie les joueurs qui s’investissent et c’est un bon complément de Dominique D’Onofrio.

Il est si différent de Jean-François de Sart ?

Moi, je ne peux dire qu’une chose : j’ai toujours considéré de Sart comme un très bon coach. Certains ont critiqué ses méthodes trop douces, mais chacun travaille à sa manière et je n’oublie pas qu’avec son style, de Sart nous a amenés à la 4e place aux JO. Et il ne faut pas négliger la nouvelle fonction qu’on lui a été attribuée au Standard : s’occuper de la formation des jeunes, c’est un aspect très important. Après, il me m’appartient pas de commenter les raisons qui ont poussé la direction à l’orienter vers cette autre fonction. Je ne les connais d’ailleurs pas.

Et les objectifs, quels sont-ils ?

Je ne veux pas parler d’objectifs en termes chiffrés. Je voudrais simplement partager des moments de joie, avec le staff, mes coéquipiers et les supporters, comme j’en ai vécus la saison dernière après Salzbourg et le Panathinaikos. Si l’on veut parler d’ambitions, la première sera de faire mieux, en championnat, que la saison dernière. C’est la moindre des choses. Je ne dis pas qu’il faudra absolument être champion, mais on devra résolument terminer à une place digne du statut du Standard. Renouveler l’exploit d’un quart de finale européen, ce sera forcément… impossible. Lorsque les coupes d’Europe recommenceront, c’est sûr qu’on ressentira un manque. Cela m’est déjà arrivé de vivre une saison sans matches internationaux : c’était à l’AZ en 2008-2009. Mais, au terme de cette saison-là, on avait été champion. C’est peut-être un heureux présage.

Guide sur le terrain et dans le vestiaire

Vous vous voyez endosser le rôle d’un patron, au même titre qu’un Steven Defour ou un Axel Witsel ?

Beaucoup de joueurs expérimentés sont partis. Un groupe assez jeune est en train d’être reconstruit. Il appartiendra donc aux joueurs dotés d’un peu plus d’expérience de guider les autres. Steven et Axel ont tous les deux été élus Soulier d’Or et comptent deux titres de champion de Belgique. Moi, je peux me targuer d’une expérience de deux ans et demi à l’étranger, ponctuée par un titre de champion des Pays-Bas. Si je peux faire office de guide, pourquoi pas ? Mais c’est surtout par mon attitude, sur le terrain et dans le vestiaire, que je peux montrer l’exemple. Davantage que par la voix, même si je n’hésite pas à la faire entendre lorsque quelque chose ne me plait pas. La discipline dans le vestiaire, c’est la base du succès. Je n’impose rien, mais si certains ont envie de me suivre, ils sont les bienvenus. En ce qui me concerne, je veux surtout rester moi-même.

Des déclarations qui contrastent avec l’image que certains confrères du Nord du pays se font de vous après un certain match en Bosnie-Herzégovine. On vous avait qualifié de pomme pourrie.

Peut-être me connaît-on mieux en Wallonie ? Il faut apprendre à connaître les gens avant de les juger. J’ai la conscience tranquille. Certains ont écrit des choses incorrectes. Je n’en fais pas un drame, même si ce n’est pas agréable. A côté de cela, il y a aussi beaucoup de gens qui m’apprécient, au nord comme au sud car je ne fais pas de distinctions. J’ai toujours fait l’effort de parler le néerlandais.

Vous êtes une icône pour les supporters, en tant que Liégeois ?

Je crois que les supporters m’apprécient surtout parce qu’ils ont vu que je continuais à me battre sur le terrain, même lorsque les circonstances étaient défavorables. Après, s’ils s’identifient aussi à moi parce que je suis liégeois, tant mieux. l

par daniel devos

« Les joueurs se comportent de manière plus professionnelle que lors des mois précédents. A l’entraînement comme en dehors. »

« Je n’impose rien, mais si certains ont envie de me suivre, ils sont les bienvenus. »

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