« Ils ne l’ont pas volé »

Le Jeune Pro, l’Entraîneur, le Gardien et l’Arbitre de l’Année, ainsi que le vainqueur du Prix du Fair-play vus par des personnalités.

Koen Daerden (Jeune Pro) vu par Franky Vercauteren

Vercauteren: « Il a des possibilités, surtout à une position où la Belgique n’a pas tellement de choix. Il est souvent difficile de trouver un bon médian gauche, voire un arrière gauche, capable d’évoluer à un haut niveau chaque semaine. Koen Daerden est déjà à l’avant-plan. Il m’a souvent plu même s’il n’est jamais parvenu à s’imposer face à Anderlecht.

Il a des atouts importants: une technique supérieure à la moyenne, du physique, un bon passing, de l’endurance. Il a aussi une bonne pénétration et est capable d’amener un but ainsi que de marquer. Il n’a pas peur de revenir loin derrière pour resserrer les lignes. Il n’est par contre pas très explosif. Il a besoin d’espace pour réaliser une action.

Il est l’exemple-type du joueur qui sait ce dont il est capable et ce qu’il doit éviter. Il pense en termes collectifs. Il ne dribblera jamais trois adversaires dans un mouchoir de poche. Il préférera chercher un partenaire, il tentera une combinaison. Il ne force jamais une situation. Il ne se risque pas à des mouvements qui ont peu de chances d’aboutir. C’est positif.

Dans les grandes lignes, on peut le comparer à Goor, même si je n’aime pas ce genre d’exercice. Chaque footballeur est différent. Bart a plutôt évolué du centre-avant au médian gauche, tout en continuant à marquer beaucoup de buts. Il n’est pas explosif non plus. Bart est capable d’écarter un adversaire et il a un large rayon d’action.

La remarque vaut pour tous les jeunes mais Koen doit être davantage présent, s’imposer, prendre des initiatives, exiger le ballon. Ça viendra avec les années. Ce sont des choses qu’on apprend au fur et à mesure. On ne doit pas attendre trop de régularité d’un jeune joueur. Je ne pense pas que Koen soit souvent en proie au doute. Il affiche toujours une bonne dose d’assurance.

Il sera tôt ou tard confronté à une mauvaise passe. Aucun joueur n’est capable d’évoluer au même niveau pendant dix ans. Tout le monde est passé par là. Il doit être sur ses gardes. Heureusement, il peut compter sur son père. Koen m’a l’air d’être un garçon serein, apte à relativiser les choses. Sur le terrain, il est la modestie personnifiée.

Il est capable de gérer son flanc tout seul, bien qu’il soit toujours mieux d’être couvert par un défenseur. Plus tard, quand il aura amélioré son jeu de position, Koen devra être en mesure de tirer son plan tout seul sur le flanc, par exemple si l’entraîneur opte pour un trio défensif.

S’il doit être du Mondial? Je dirais oui. Dans ces grands tournois, 16 à 17 joueurs seulement sont alignés. Les autres jouent peu, voire pas du tout. Il a sa place dans le noyau. Reste à savoir s’il est bon de l’emmener pour lui faire découvrir l’ambiance, sans plus. Le sélectionneur doit avoir ses raisons d’emmener Boffin, éventuellement. S’il privilégie le rendement et les qualités, il doit plutôt prendre Daerden ».

Sef Vergoossen (Entraîneur) vu par Nol Hendriks (président de Roda JC)

Hendriks:  » Sef Vergoossen est un coach accompli. Impossible de trouver mieux. Les entraîneurs doivent mériter leur salaire. Mais Sef travaille trop. Il regarde tous les matches, il connaît le club sous tous ses aspects. Dès le début de la saison, il place ses joueurs dans une ambiance détendue. Personne ne s’ennuie. Il fait la connaissance des femmes des joueurs, leur explique sa vision de la vie d’un footballeur professionnel. C’est un adepte du team-building.

Après un match, il ne porte personne aux nues, pas plus qu’il n’enfonce un joueur. Il sait s’entourer. Il pense même à un psychologue du sport ou à un diététicien. Il agit en conformité avec sa pensée. S’il estime pouvoir apporter un petit plus, il le fait. Mais jamais il n’adaptera son équipe. Oui, il avancera ou reculera peut-être l’entrejeu de dix mètres mais c’est tout.

Sef se lève plus souvent du banc en Belgique. Il s’est très bien adapté. A Roda, c’était un problème vis-à-vis du public. Comme il restait constamment dans son dug-out, les supporters pensaient qu’il ne vivait pas le match. Il peut se fâcher. Notamment quand il estime qu’on est injuste ou qu’on se comporte de façon incorrecte à son égard. Mais il ne montrera jamais ses sentiments en présence du groupe. Pas plus qu’il ne va hurler à l’entraînement. Il rendra plutôt visite au joueur chez lui. Vous pouvez être sûr que Sonck a progressé grâce à ce dialogue. Dagano est un produit typique de Sef. Je suis convaincu qu’on n’aurait pas entendu parler de lui s’il avait eu un autre entraîneur. Il n’a pratiquement pas marqué durant les cinq premiers matches. Il a dû rater 30 occasions! Mais Sef lui a maintenu sa confiance et ne l’a pas critiqué. Avec un autre entraîneur, Dagano aurait été hué et aurait perdu ses moyens ».

Francky Vandendriessche (Gardien) vu par Jacky Munaron

Munaron: « Il y a gros à parier que la toute dernière impression aura joué un rôle non négligeable dans sa désignation comme Gardien de l’Année. Si le referendum avait dû avoir lieu à la fin de l’année civile, il y a de fortes chances que les deux autres nominés dans cette catégorie, Filip De Wilde et Frédéric Herpoel, auraient obtenu davantage de suffrages. Car, à cette époque, Flup a tenu Anderlecht à bout de bras tandis que Fred prit une part prépondérante dans le départ tonitruant de La Gantoise en championnat. Dans le même temps, Mouscron filait du mauvais coton. A ce moment-là, personne n’aurait donné cher des chances de son gardien d’être élu par ses pairs.

Francky Vandendriessche a, en quelque sorte, suivi la même courbe exponentielle que les Hurlus au deuxième tour. Il a largement contribué à cette remontée en réalisant un keeping souvent éblouissant, qu’il agrémentait de la meilleure manière qui soit en sauvant plus d’une fois ses couleurs sur penalty. Un portier qui s’illustre dans ce genre d’exercice, ne peut que frapper les imaginations. Il prétend qu’il a un truc pour déjouer ces tentatives. Mais j’ai quand même mes doutes à ce sujet. Je reste d’avis que, quand un ballon est bien botté, tout gardien, aussi bon qu’il soit, n’a aucune chance de s’imposer. Si Francky excelle dans ce domaine, c’est sans doute parce qu’il sait comment son adversaire s’y prend, ou qu’il utilise toute son influence pour le pousser à opter pour tel ou tel coin, rien de plus. Mais il ne me fera pas croire que c’est en fixant l’opposant dans les yeux qu’il a déjà cause gagnée.

A 31 ans, il incarne à la fois la patience et le travail récompensés. Sans oublier une formidable force mentale. Il lui aura fallu quand même pas mal de courage et de persévérance pour revenir au plus haut niveau après la double opération au genou qu’il a subie. S’il est devenu capitaine à Mouscron, cela en dit long, aussi, sur l’impact qu’il exerce sur ses partenaires. Comme gardien, il est arrivé à la plénitude. Rapide sur sa ligne, il excelle aussi dans les duels. Deux aspects demeurent perfectibles chez lui: les sorties aériennes et le jeu au pied. C’est peut-être une question d’audace, en match, car dans le cadre de l’équipe nationale, il a fait montre de bonnes choses, dans ces deux domaines, à l’entraînement. Compte tenu de ses dispositions, de son ardeur et de sa mentalité, il constituera le troisième homme idéal au Japon ».

Frank De Bleeckere (Arbitre) vu par Frans Van den Wijngaert (ancien referee)

Van den Wijngaert:  » Frank De Bleeckere est arrivé jeune parmi l’élite belge, sous la direction plutôt sévère de son père, qui avait d’ailleurs été arbitre aussi. A peine avait-il commencé à arbitrer en D1 qu’il a fait impression. Il était en parfaite condition physique et savait écouter les autres. J’ai immédiatement vu ce qu’il avait dans le ventre, qu’il était sérieux. J’ai eu la nette impression que s’il restait les pieds sur terre, il irait loin.

Frank a eu la chance de trouver une femme qui aime le football. C’est important. Un arbitre peut être extrêmement doué, mais si sa famille n’apprécie pas le sport et n’accepte pas ses nombreuses absences, il ne peut pas réussir cette carrière difficile. Je prévoyais qu’il deviendrait international, ce qu’il est effectivement. Malheureusement, il n’y a pas vraiment de relève à la génération des Loraux, Ponnet, Van Langenhove, Costantin, Goethals, Van den Wijngaert… Toutefois, nous pouvons nous prévaloir de deux très bons arbitres, De Bleeckere et Allaerts, qui se tiennent de près.

Il est également important d’avoir un bon travail. C’est le cas de Frank (NDLA: il vend des cravates). Tous les employeurs ne sont pas disposés à accorder autant de jours de congé à un arbitre, auquel on demande de plus en plus, actuellement. De Bleeckere est strict, difficile à déséquilibrer. Lorsqu’il a pris une décision, il n’en démord pas mais il essaie toujours de la faire passer de manière humaine. Il ne donne pas trop de cartes jaunes. Il a même l’audace de ne pas en montrer systématiquement, même quand c’est justifié. C’est sa façon d’arbitrer, c’est dans son caractère. Il est plutôt diplomate ».

Marc Degryse (Prix du Fair-play) vu par Pär Zetterberg

Zetterberg: « Au départ, je pense que le fair-play est une qualité innée. Certains naissent avec le souci de respecter scrupuleusement l’étiquette, le règlement et l’opposant. Et Marc Degryse a toujours été de ceux-là. Pour l’avoir côtoyé de près pendant de longs mois, je n’ai jamais décelé chez lui le moindre mouvement d’humeur vis-à-vis d’une autorité -que ce soit le coach ou l’arbitre-, d’un adversaire ou d’un coéquipier. Il aura toujours été la droiture faite joueur de football.

Bien sûr, il aura peut-être été servi, comme moi, par la place occupée sur le terrain. Car il tombe sous le sens qu’en tant que demi offensif ou attaquant en retrait, les deux rôles qu’il a joués dans sa carrière, il a été nettement moins contraint à devoir faire le ménage qu’un récupérateur, un défenseur ou même un avant de pointe qui, pour se faire respecter, a parfois besoin de distribuer des coups autant qu’il n’en encaisse. Marc s’en est toujours gardé, et il faut bien avouer qu’au nom de son comportement exemplaire, il n’a à aucun moment, non plus, été la cible d’agressions caractérisées. Sans quoi, il n’aurait jamais tenu le coup pendant près de 20 saisons.

Ce qui m’épate chez lui, c’est qu’il soit toujours là, aujourd’hui, à près de 37 ans, avec les mêmes qualités qu’à ses débuts. En général, un footballeur est sur le déclin à cet âge ou passe le plus clair de son temps à contester les décisions arbitrales. J’ai cru comprendre que ces tendances-là n’étaient toujours pas d’application à Marc, et la meilleure preuve en est non seulement sa désignation comme joueur modèle de la saison mais aussi sa nouvelle apparition parmi les nominés au Footballeur Pro de l’Année. C’est sûr que le football belge et ses acteurs seront orphelins de lui dans les mois à venir. Marc, ce n’était pas seulement un talent exceptionnel et un footballeur d’une correction exemplaire, mais aussi un conseiller et un guide fabuleux. C’est fou, en tout cas, le nombre de gars qui se seront étoffés à son contact. Kenneth Brylle à Bruges, Luc Nilis à Anderlecht, Wesley Sonck au GBA: tous ces attaquants doivent une fière chandelle à la présence de Marc à leurs côtés. Sans oublier moi-même car compte tenu des cinq ans qui nous séparent, il m’a abreuvé de conseils lui aussi. Il aura vraiment été une référence à tous points de vue ».

Raoul De Groote, Bruno Govers, Christian Vandenabeele et Frédéric Vanheule,

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