IL FAUT DU FLAMAND !

Thomas Bricmont

32 ans et 17e saison comme pro : l’avis du Belgo-Brésilien vaut de l’or.

La victoire à domicile de samedi face au Germinal Beerschot permet à José Riga et ses troupes de respirer. Si la mission est accomplie, l’Albert s’est fait peur et a, une nouvelle fois, fait preuve de maladresse en zone de conclusion. A l’avenir, des services involontaires du type Ninoslav Milenkovic, auteur de deux floches, ou de l’arbitre Stéphane Breda ne risquent pas de se répéter souvent. Tout est donc loin d’être parfait, même si les dernières rencontres plaident en faveur des Montois. Suspendu pour cette rencontre, Wamberto était d’un optimisme aveugle.

Que peut-on attendre de vous dans de ce deuxième tour ?

Je suis en pleine forme. Le stage en Espagne m’a fait énormément de bien. Etant donné que j’avais raté la préparation estivale suite aux pépins liés à mon avenir, je n’ai jamais atteint le rythme escompté.

Pourtant vos débuts cette saison ont été marquants.

Oui, c’était à Lokeren lors de la 7e journée. J’avais inscris deux buts qui nous avaient permis de l’emporter (0-2). Mon envie de retrouver les terrains était énorme, je voulais apporter quelque chose à ce groupe, leur donner le maximum.

La suite est moins glorieuse : vous n’inscrivez plus de but.

L’attention que l’on m’a portée après ces débuts en fanfare a peut-être joué en ma défaveur…

Votre manque d’efficacité est contagieuse : depuis le début de saison, Mons éprouve les pires difficultés à tromper la vigilance des gardiens.

C’est difficile de répondre à cette question. Nous développons un beau football, nous avons une défense fiable. Mais nous n’arrivons pas à concrétiser nos possibilités pour enfin sortir de la zone rouge. On n’a pas non plus été vernis jusqu’à présent…

Difficile de tout mettre sur le facteur chance.

La concentration nous fait cruellement défaut dans les moments importants. Le match à Saint-Trond en est un exemple éloquent. Combien d’occasions avons-nous eues lors de ce match ? Facilement dix, et pourtant, on repart sans but et sans point. C’était incroyable !

La solution peut-elle venir d’Aliyu Datti et d’Ilija Stolica, deux joueurs sur qui l’on ne comptait plus chez des concurrents directs à savoir Saint-Trond ou Zulte Waregem ?

Leur position n’est pas facile. La presse a beaucoup critiqué ces transferts mais je suis convaincu qu’ils vont nous apporter un plus. Ils l’ont d’ailleurs déjà montré, mais la réussite les a lâchés. Une fois encore…

José Riga ne parie-t-il pas trop sur un jeu léché, construit mais qui, en bout de course, manque d’efficacité ?

On a un groupe humainement formidable et dont les qualités sont indéniables. Nous devrions nous situer dans le Top 10. Malheureusement, dans le football moderne, être doué et technique ne suffit plus. Regardez le Brésil à la dernière Coupe du Monde. Il avait les meilleurs joueurs et il s’est planté. L’Italie, elle, a montré que c’était en jouant en bloc que l’on allait au bout.

Riga est plus fort que Dominique D’Onofrio

Trop d’éléments ont le même profil, surtout dans le milieu du jeu. Ne vous manque-t-il pas quelqu’un qui puisse faire le ménage ?

L’aspect physique est primordial : il nous manque des joueurs costauds, des joueurs du type flamand. Au Standard, j’ai eu le bonheur de côtoyer Karel Geraerts et, on a beau souvent le dénigrer, c’est quelqu’un d’incroyablement utile. Avec son abattage et sa rage de gagner, il vous facilite la vie sur le terrain. C’est sans conteste le meilleur infiltreur qui évolue en Belgique…

Les concepts exploités par votre coach ne sont-ils pas inappropriés compte tenu de la situation ?

Non, certainement pas. Tactiquement, il est très fort, bien plus fort, par exemple, que Dominique D’Onofrio. D’ailleurs, je n’ai jamais compris pourquoi le Standard l’avait laissé filer. Il me fait penser à José Mourinho, les résultats mis à part ( il rit). Je le place dans mon top 3. Derrière Ronald Koeman, que j’ai connu à l’Ajax et qui était le top en matière de coaching et Georges Heylens qui m’a guidé lors de mes premiers pas à Seraing et m’a permis à 16 ans de devenir un homme.

Riga est connu pour être proche de ses joueurs. Trop ?

C’est quelqu’un d’extrêmement correct avec tous les joueurs. Y compris les réservistes, qui lui sont reconnaissants pour cela. C’est vrai que certains sont surpris qu’il soit si gentil. Humainement, il est formidable.

La demande de Leone

Après le match perdu à Anderlecht, vous avez émis le désir de quitter Mons. Qu’est-ce qui vous a fait changer d’avis ?

L’amour que j’ai pour ce club… Si nous n’étions pas en position si délicate au général, je serais parti. J’avais des offres de l’AEK Athènes et de Bochum. Si je ne suis pas retourné au Brésil pendant les fêtes, c’est parce que je voulais être fixé sur mon sort. C’est le président, Leone, qui m’a demandé de rester pour sauver l’Albert. Je ne pouvais pas lui dire non. C’est grâce à lui que j’ai pu retrouver un club alors que le mercato d’été était fini. Et c’est aussi grâce à lui que j’ai la nationalité belge aujourd’hui.

Imputez-vous votre première moitié de saison difficile au fait que vous avez si peu joué avec les Rouches ces deux dernières années (21 matches) ?

Ma première année au Standard a été gâchée par une fracture à la jambe et lors de la deuxième, malgré mes bonnes performances en Réserve et aux entraînements, on m’a rarement fait confiance. Mais le Standard restera, avec Mons, le club de mon c£ur. Je suis particulièrement attaché à ses supporters et la ville dont je suis amoureux. Même à l’époque de l’Ajax, je revenais régulièrement à Liège. Et dès mon arrivée en Belgique à 16 ans, je m’y suis directement plu. Aujourd’hui, je connais cette cité dans ses moindres recoins.

Igor De Camargo, un autre Brésilien, vous a succédé dans le c£ur des supporters liégeois. Vous n’êtes pas étranger à sa venue.

L’an dernier, il était proche d’un accord avec Bruges. Je l’ai appelé pour le convaincre de nous rejoindre. Mon argument était qu’il allait trouver au Standard une atmosphère incroyable créée en grande partie par leurs supporters qui sont les meilleurs en Belgique. Aujourd’hui, je ne suis pas étonné de sa réussite. Au-delà de ses dispositions techniques ou physiques, c’est quelqu’un de très intelligant. Malgré sa blessure, il est revenu dans le parcours sans s’affoler. Avec Igor et Sergio Conceiçao, le titre ne nous aurait jamais échappé.

Jouer avec son fils

Vous venez à peine de fêter vos 32 ans et pourtant vous êtes présent depuis le début des années 90. Quand comptez-vous vous arrêter ?

Quand je regarde ma carrière, je pense être plus vieux ! J’ai vécu tellement de belles choses. Et pourtant, je ne compte pas m’arrêter. Mon fils vient tout juste d’intégrer la Réserve de l’Ajax et mon rêve est de jouer en équipe Première avec lui. Si j’y arrive, je penserai à tirer un trait sur le football. Je suis persuadé que si un jour, je souhaite retourner à l’Ajax pour réaliser ce rêve, les dirigeants m’accueilleraient sans hésiter.

Vos deux autres fils, Wambertinho et Wanderson, évoluent en catégorie de jeunes à l’Ajax. Pourquoi ne pas avoir choisi de les inscrire dans un de nos clubs ?

C’est une question de formation. C’est incomparable avec ce qui se fait chez nous. En plus de vous encadrer et de vous apprendre parfaitement les bases du football, on vous fait plus facilement confiance. Regardez Rafael van der Vaart ; j’ai joué en Ligue des Champions avec lui alors qu’il avait à peine 17 ans. En Belgique, les jeunes baissent les bras parce qu’en leur proposant des contrats ridicules, on leur montre indirectement qu’on ne compte pas vraiment sur eux. Dans ces conditions, beaucoup arrêtent ou se tournent vers la Hollande. Quand je vois l’exemple de Thomas Vermaelen, titulaire à l’Ajax, je me dis qu’il y a beaucoup de gâchis dans nos clubs.

En dehors du peu de confiance qu’on leur accorde, où se situent les problèmes en matière de formation ?

La technique n’est pas notre point fort en Belgique. Quand je vois certains des formateurs de clubs dans lesquels je suis passé, je me pose des questions ! Il n’était pas rare qu’ils n’aient jamais joué au football ou alors à un niveau très bas. Quand Simon Tahamata était entraîneur des jeunes au Standard, les jeunes ont émergé, ils ont appris plein de petits trucs qui font la différence au haut niveau. Simon est à l’Ajax aujourd’hui…

C’est donc par la formation que l’équipe nationale sortira de son marasme.

Ça me fait mal au c£ur de voir les Diables jouer de la sorte. J’ai décidé tout récemment de suivre des cours pour être entraîneur. C’est ma femme, pourtant loin d’être une passionnée de foot, qui m’a convaincu. Après ma carrière, je compte m’impliquer auprès des jeunes, pour le bien de la Belgique. Déjà maintenant, je joue le coach auprès de mes fils en visionnant les vidéos de leurs matches que mon épouse filme. J’essaye de rectifier leur jeu de position, de leur apporter mon expérience.

Que reste-t-il du trio magique de Seraing Edmilson-Isaias-Wambi ?

On se voit toujours autant, on restera des amis pour la vie. Nous jouons encore ensemble de temps à autre avec le FC Gospel. À ce sujet, on compte préparer une grande fête du football brésilien en fin de saison en organisant un match de gala. Tous les Brésiliens de Belgique seront présents. On essaye de rallier quelques grands noms. Maxwell, avec qui j’ai joué à l’Ajax et qui évolue maintenant à l’Inter Milan, sera de la partie. Grâce à lui, j’espère attirer d’autres stars comme Kakà, qu’il côtoie régulièrement à Milan. Les bénéfices de ce match iront à une ASBL qui s’occupe de gens défavorisés au Brésil et, au-delà de l’apport financier, tente de construire des écoles, de fournir des livres…

THOMAS BRICMONT

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