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 » Il était grand temps « 

A bientôt 60 ans, Michel De Wolf est enfin de retour sur la terre de ses racines, Tubize, pour y entamer une histoire d’amour qu’on a longtemps crue platonique. On a presque envie d’écrire que sa venue au stade Leburton, c’était écrit…

Il a le sourire, comme toujours. Et pas un kilo en trop. Michel De Wolf se porte comme un charme, merci pour lui. Le T2 floqué sur son survêtement rappelle qu’il n’occupe qu’un rôle secondaire au sein de l’AFC Tubize alors qu’il est cent fois plus connu que le coach principal, Sadio Demba, mais il n’en a cure. La modestie et la discrétion font partie de l’ADN du Clabecquois.

 » Enfin « , glisse-t-il.  » C’est le premier mot qui me vient à la bouche. Il fallait bien que cela arrive un jour. Beaucoup de gens du coin me demandaient quand j’allais venir travailler à l’AFC Tubize et la seule chose que je pouvais leur répondre, c’était : Quand on me le proposera ! Disons que cette fois-ci, les choses ont été extrêmement rapides puisque l’équipe avait déjà repris le chemin des entraînements quand Philippe Thys m’a contacté. Je le connaissais depuis plusieurs années par le biais de l’Olympique de Marseille, où nous avions tous deux joué.

J’étais sur le point de me rendre à Pairi Daiza en famille quand mon téléphone a sonné et j’ai dit à ma femme que c’était une aubaine que je ne pouvais pas manquer. On m’a proposé d’être adjoint, ce qui me bottait bien, mais je n’avais pas envie que mon rôle se résume à placer des cônes alors j’ai simplement demandé à pouvoir rencontrer le coach principal et comme le contact a été excellent, je n’ai pas hésité une seule seconde. Et me voilà !  »

Le voilà donc dans un club qu’il semble déjà connaître comme sa poche alors qu’il vient d’y débarquer officiellement. Mais dans le fond, même si le rachat de l’écurie Sang et Or par un consortium sud-coréen l’a nettement poussé vers le professionnalisme et permis à des acteurs importants de sa gestion quotidienne d’y pénétrer, il demeure une  » vieille garde  » intacte et fidèle au fil des décennies.

 » C’est indiscutable « , narre Michel De Wolf.  » Je connais Théo Buelinckx et Michel Lekime depuis de nombreuses années, tout comme Thierry Berghmans, l’entraîneur des gardiens, avec lequel j’avais bossé au FC Brussels. J’avais même déjà fait la connaissance de Josselin Croisé, le directeur général, il y a deux ans. A ce moment-là, nous avions eu des pourparlers pour que je prenne en charge les U21 mais cela n’avait pas abouti. C’est donc tout sauf un saut dans l’inconnu pour moi et mon acclimatation a été extrêmement rapide.  »

 » Certains sont allés voir mon parcours sur internet  »

Pour peaufiner sa connaissance de l’effectif, l’ancien Diable Rouge a pu profiter d’un stage de préparation intensif en Alsace, et plus précisément à Molsheim, non loin de Strasbourg. Le noyau mis à la disposition de Sadio Demba n’est certes pas encore complet mais pour Michel De Wolf, pas question de parler de sa confection ou des postes qui sont encore à pourvoir.

 » Je ne veux pas me mêler du recrutement. Ce n’est pas mon rôle et je ne suis pas venu à Tubize pour marcher sur les plates-bandes de quelqu’un d’autre. Mon job, c’est d’aider le coach à réussir sa mission parce que c’est un magnifique challenge qui s’offre à lui. Je connaissais une partie du noyau parce que lors des derniers mois, il m’est arrivé de venir voir Tubize à l’oeuvre quelques fois et même si certains joueurs sont partis, la base est toujours là.  »

Si Michel De Wolf connaît visiblement les joueurs qu’il a partiellement sous ses ordres, l’inverse n’est pas forcément vrai. Aussi étonnant que cela puisse paraître, la majorité des joueurs de l’effectif tubizien ne sait pas que le bonhomme a disputé les Coupes du Monde au Mexique, en Italie et aux Etats-Unis ! Et pour tout vous dire, ça le fait sourire.

 » Certains m’ont demandé qui j’étais et quand je leur ai dit, ils sont allés voir sur internet « , dit-il en riant.  » Puis ils sont revenus vers moi en me disant que j’avais eu un parcours incroyable. C’est gai à entendre, même autant d’années plus tard. Je dirais que cela me confère un crédit important à leurs yeux et c’est chouette parce que je sais que je suis écouté quand je dis quelque chose. Mais je n’ai jamais été du genre à faire de la pub et vous ne m’entendrez jamais dire à un joueur : Tais-toi, j’ai fait trois Coupes du Monde alors que toi, tu n’as jamais rien fait. Je n’ai jamais été ainsi et je ne le serai jamais. Ce serait aller contre mes principes et mes idées.  »

 » La politique, c’est pire que le foot  »

Si depuis son passage-éclair au FC Brussels il y a quelques années, Michel De Wolf avait moins fait parler de lui, il n’en était pas resté inactif pour autant.

 » J’occupais toujours un rôle d’ambassadeur pour le BX Brussels, le club de Vincent Kompany. Je gérais notamment le site d’entraînement de Forest où de nombreux jeunes viennent shooter dans le ballon tous les jours. Je viens d’y mettre un terme pour pouvoir m’occuper pleinement de Tubize mais j’ai pris beaucoup de plaisir à le faire.

La politique ? Oui, c’est vrai que j’y avais replongé un peu il y a trois ans (NDLA : il avait déjà été conseiller communal à Tubize avant cela) en acceptant de me remettre sur la liste du PS à Molenbeek-Saint-Jean, ce qui m’avait obligé à déménager, mais j’ai définitivement compris que ce n’était pas fait pour moi. Je pensais que le football était un monde de requins mais la politique, c’est encore pire. Je ne m’y replongerai plus jamais. Ma femme et moi sommes revenus dans le coin depuis deux ans et sommes ravis. La vie ici nous avait manqué.  »

Et si la vie dans ce coin tranquille du Brabant wallon lui a manqué, c’est parce qu’il y a puisé sa détermination et son envie de réussir tout au long de sa carrière. L’ancien arrière-gauche de l’équipe nationale n’a jamais renié ses racines qui plongent au coeur de la sidérurgie locale et des fameuses forges qui ont fait battre le coeur de la ville jusqu’en 1996, date d’une faillite qui fut considérée comme un drame social.

Michel De Wolf a vu son père, ses frères et beaux-frères y travailler ardemment presque toute leur vie et il en a tiré les leçons : pouvoir jouir des choses simples et profiter de la chance que l’on a.

 » En 1974, moi aussi j’ai travaillé deux ans aux Forges alors que j’étais encore assez jeune et que j’évoluais en réserve au RWDM « , se souvient-il.  » Peut-être que si je n’avais pas réussi dans le football, j’y serais resté toute ma vie sans jamais me plaindre. Mais je sais aussi que ces deux années m’ont remis les yeux en face des trous et m’ont permis de comprendre que j’étais un privilégié.  »

 » J’aurais pu jouer jusqu’à 45 ans  »

Passer une heure avec Michel De Wolf, c’est véritablement prendre un bain d’humilité et de bonne humeur. Il n’aime pas la demi-mesure et quand il a quelque chose à dire, il n’est pas du genre à mettre des gants. C’est de la même façon qu’il a un jour décidé de mettre un terme à sa carrière, à la plus grande surprise de son épouse.

 » J’avais 37 ans et je sortais d’une bonne saison à Marseille. Physiquement, j’étais vraiment en très bonne forme et je suis certain que j’aurais encore pu jouer deux ou trois ans, peut-être même jusqu’à 45 ans, sans ressentir la moindre douleur ou l’effet de la vieillesse. Mais le football était en pleine mutation et je m’y reconnaissais de moins en moins. La mentalité changeait trop vite à mon goût et un jour, je suis rentré et j’ai dit à ma femme : C’est fini. J’arrête.

Georges Leekens, qui était alors à Mouscron, a tout tenté pour que je revienne sur ma décision et que je vienne jouer à l’Excel mais je n’avais plus envie. Plus tard, j’ai bien rechaussé les crampons à Nivelles notamment, mais c’était uniquement une question de plaisir.  »

Marseille, le Sud de la France, Manosque, le Mont Ventoux : autant de noms qui reviennent fréquemment dans la bouche de notre interlocuteur et qui nous rappellent que les vacances battent leur plein, sauf pour les footballeurs et autres sportifs de haut niveau.

 » Ma femme et moi adorons le sud de la France et il est probable qu’un jour, nous allions nous y installer. Je pourrais ainsi aller voir les matchs de l’OM plus souvent « , glisse-t-il.  » J’y suis encore allé la saison passée, dans ce nouveau stade exceptionnel, et j’ai toujours la chair de poule. Puis, j’ai envie de faire le Ventoux à vélo et de pouvoir profiter du soleil. Mais ce n’est pas pour tout de suite.

En fait, signer à Tubize m’a permis de me rendre compte que j’avais toujours besoin de cette adrénaline. C’est un peu comme si j’avais eu besoin de me tester pour voir si j’avais encore envie et besoin de ça pour vivre ? Et la réponse est oui. Le football n’a pas tellement changé. En tout cas pas autant que les hommes qui le pratiquent et la mentalité qu’ils ont. Toute la complexité du football moderne se cache derrière cette constatation.  »

 » Tubize aura une équipe compétitive  »

 » Je m’en rends compte ici, à Tubize, dans un contexte qui n’est tout de même pas le football de l’excellence  » poursuit-il.  » La saison dernière, l’effectif était très bon et l’équipe a passé une majorité de la saison dans le Top 4 et finalement, parce que certains semblent avoir levé le pied ou qu’ils n’avaient plus envie, le club a dû sauver sa peau dans les derniers matchs ! C’est assez fou. C’est ce qui explique certainement que la direction ait passé un petit coup de balai dans l’effectif.

Ce genre de données fait toutefois partie du football moderne. Tout comme ce championnat de D1B où l’on affronte quatre fois la même équipe avant que le classement ne soit scindé en deux. Je suis contre cette formule parce qu’elle n’apporte rien de très constructif mais bon… Ce qui est certain, c’est que nous aurons une équipe compétitive et que j’ai hâte que les choses sérieuses reprennent parce que je m’éclate ici. Je suis heureux d’y être… enfin.  »

PAR DAVID DUPONT – PHOTO BELGAIMAGE

 » Je m’éclate ici.  » Michel De Wolf

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