IBOU 3 – BACCA 1

Le duel OHL-Club Bruges a également été celui des Taureaux d’Or. Ibou Sawaneh a remporté aux points le match des meilleurs buteurs face à Carlos Bacca Qu’est-ce qui les rapproche ? Une analyse.

Le but de Carlos Bacca à Louvain, après quatre minutes de jeu, est entré dans les annales du Club. C’est son douzième goal de la saison, le neuvième en championnat. Une fois de plus, il a marqué sur une passe de Victor Vazquez, son partner in crime. Les deux hommes se trouvent les yeux fermés. Si le but inscrit à l’OHL mérite sa place dans l’histoire, c’est parce que jamais un footballeur brugeois n’était parvenu à marquer huit matches de suite. Bacca a le sens du but, comme le reconnaît volontiers Wesley Sonck :  » Il n’est pas nécessaire d’être un connaisseur pour s’en rendre compte !  »

Gert Verheyen en est un. Comme Bacca, il a évolué en pointe et sur le flanc droit. Verheyen :  » Au début, je ne l’ai pas trouvé bon, surtout sur le flanc. Je n’appréciais ni sa course ni son jeu de position. Par contre, en pointe, il n’était pas mal du tout. C’est un excellent finisseur. On remarque que ses buts ne relèvent pas du hasard. Il paraît qu’il rate pas mal d’occases à l’entraînement mais, en match, il a un rendement phénoménal. Il possède les qualités requises pour jouer contre la défense. Il est rapide et déroutant. Certains de ses buts sont faciles, d’autres très beaux. Il a amélioré son jeu sur le flanc et surtout ses choix. Avant, il convergeait vers l’axe ou retournait vers le flanc au mauvais moment. Il n’est pas un ailier pur-sang mais le Club écarte bien le jeu et il en profite. En revanche, il a une marge de progression dans son jeu collectif.  »

Van Gool contre Balette

Roger Van Gool, jadis très rapide sur son flanc, sous le maillot du grand Club, pense que c’est notamment pour cela que Bacca joue aussi peu au centre – à Louvain, il l’a quand même fait pendant une heure.  » Pour cela, il faut mieux conserver le ballon ou mieux combiner mais ce ne sont pas les principaux atouts de Bacca. C’est pour cela que je continue à douter de lui – j’espère pour le Club que je me trompe. Tous les attaquants connaissent des périodes durant lesquelles tout rentre. Bacca traverse-t-il une période faste ou va-t-il continuer sur sa lancée ? Je doute de lui pour plusieurs raisons. Un : à l’entraînement, il n’a pas l’air d’être un killer. Deux : question engagement, il est à la limite. Personne ne lui en veut tant que le ballon rentre mais que se passera-t-il s’il ne trouve plus le chemin du but ? Il peut y remédier en améliorant encore sa condition physique. Un avant qui ne joue qu’à 90 % sélectionne ses efforts. Si Bacca est à 100 %, il sera sans doute plus actif. Trois : avec le réseau actuel de scouting, qui repère les meilleurs talents dès 17 ou 18 ans, on ne reste pas en Colombie jusqu’à 25 ans. Ce n’est pas le Brésil ! Pourquoi, donc ? Ceci dit, il ne manque pas de qualités. Il est un killer et il est très explosif. De ce point de vue, il possède plus de qualités que Joseph Akpala. Nous en saurons davantage en janvier. S’il continue à marquer, le Club aura une vraie machine.  »

A l’arrivée du Colombien en Belgique, en janvier, Peter Balette, l’adjoint du Standard, a interrogé Luis Seijas. Le Vénézuélien s’est produit pour Santa Fe, en Colombie. Selon lui, Bacca était fantastique dans le rectangle. En revanche, il était égoïste et ne pensait qu’à son succès personnel. Off the record, Balette, qui a travaillé quatre ans à Bruges, a appris que les attaquants du Club ne se tracassaient pas vraiment au sujet de leur nouveau concurrent. Balette :  » Il paraît qu’il a eu beaucoup de mal à se faire à notre hiver, venant d’une température de 40° en Colombie, et que sa condition physique était loin d’être satisfaisante. Je ne suis donc pas surpris qu’il ait eu des difficultés à se faire une place.  » Bacca a travaillé d’arrache-pied pour pallier cette lacune, avec succès. Balette :  » Mais il évolue à droite, à une position à laquelle on ne le destinait pas. Sur papier, ce n’est pas sa meilleure place car il est un joueur de rectangle mais ça marche, parce qu’il s’infiltre souvent au milieu. Il s’est défait de son côté égoïste, ce que j’apprécie énormément. Je suppose que l’entraîneur a beaucoup insisté sur ce point.  » Comment arrêter un joueur pareil ? Balette :  » Par un marquage à la culotte car il est très rapide. Il faut donc l’empêcher d’entreprendre une action. Mais bon, les entraîneurs disent ça de tous les avants. Il a besoin d’espaces. Si on l’oblige à jouer collectivement, il est moins dangereux.  »

Leur différence ? Un jour !

Bacca a entamé sa série de buts lors de la quatrième journée, contre le Beerschot. Il a pris TomislavMikulic de vitesse, sur une passe de Lior Refaelov.  » Un avant typique, qui est au bon endroit au bon moment « , se rappelle le défenseur du Beerschot.  » Il n’est pas facile à contrer car il décèle la moindre brèche. Il s’éloigne du défenseur. Il est plus facile de tenir un véritable avant-centre qui reste près de vous car vous sentez où il se trouve. Bacca, lui, bouge beaucoup. Il faut vraiment être très concentré contre lui.  »

Mikulic est le premier à établir spontanément un parallèle avec Ibou.  » Ils sont comparables, si ce n’est qu’Ibou préfère opérer de la gauche. Mais Bacca est un meilleur finisseur. Il a aussi des points communs avec Jérémy Perbet. On a beau penser les tenir, il suffit d’un instant de distraction et ils sont partis.  »

Ervin Zukanovic partage ce sentiment. Courtrai neutralisait Bruges jusqu’à ce que Bacca égalise.  » J’ai eu peu de contacts physiques avec lui. Il était donc difficile de le neutraliser. Il dépend d’un bon passeur mais il l’a en Victor Vazquez. Ibou joue dans le même registre mais il peut forcer plus d’actions en solitaire.  » Van Gool :  » Il est certainement capable de faire mieux car une équipe comme Louvain se forge moins d’occasions que le Club. Je pense qu’en fait, Ibou est encore plus efficace que Bacca.  »

Samedi, les deux avants se sont livré un duel, sous le regard attentif de Jonas De Roeck (OHL). Bacca l’a impressionné :  » Sa technique est brillante. Il combine, il peut passer un homme, il est rapide et possède une bonne vista. Il exploite bien sa vitesse, il se démarque constamment, bouge beaucoup… Il espère qu’on va le perdre de vue et il choisit intelligemment sa position. Nous avons eu la chance qu’à l’heure de jeu, quand BjörnVleminckx est entré, il ait retrouvé l’aile. Il est moins redoutable de là.  »

Ibou (26 ans), qui a un jour (sic) de plus que le Colombien, a également été l’homme du match. De Roeck :  » Il a vécu une soirée prodigieuse. Il a le sens du ballon et il est bourré de confiance. Il a éprouvé quelques difficultés après quelques journées, quand l’adversaire a commencé à le surveiller plus attentivement, mais il a retrouvé ses sensations. Il ne cherche plus le duel. Pour le moment, c’est incroyable : tout lui réussit. Bacca travaille pour marquer, une étape qu’a également franchie Ibou. Dans ces conditions, un avant peut toujours être dangereux et je crois donc qu’ils vont continuer sur leur lancée. « 

Deux phénomènes

L’entraîneur d’OHL a le dernier mot. Il a complètement remanié son équipe mais n’a ouvert les cordons de sa bourse que pour deux footballeurs : le médian EvaristeNgolok et.. Ibou. Ronny VanGeneugden :  » Je croyais en lui. Ibou a besoin de se sentir très bien dans sa peau, d’être dans un bon vestiaire. Il l’a chez nous car nous y avons accordé beaucoup d’importance. Il a aussi atteint un âge où on comprend beaucoup de choses. J’étais certain qu’il s’intégrerait. Encore fallait-il avoir la chance qu’il soit déterminant et qu’il marque dès la première journée.  »

Ibou a raté les matches contre le Lierse et Lokeren. A l’exception de Waregem, il a trouvé le chemin des filets lors de chaque match. Est-il un vrai buteur ? Van Geneugden :  » C’est un phénomène, en tout cas. Il faut l’être pour être meilleur buteur en jouant sur l’aile gauche, comme Bacca l’est en jouant à droite. C’est plutôt la mission de l’avant-centre. C’est peut-être dû aux espaces qui se créent, la plupart des équipes alignant des arrières latéraux offensifs. Il suffit de détourner l’attention d’un défenseur central pour engendrer des situations prometteuses. « 

PAR PETER T’KINT

 » Bacca doit encore progresser sur le plan collectif  » (Gert Verheyen)

 » Bacca dépend de Vazquez. Ibou, lui, force des actions en solitaire « (Ervin Zukanovic)

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