HALTE AU FEU

L’Irlandais Pat McQuaid (55 ans) a succédé à Hein Verbruggen à la présidence de l’UCI. Champion d’Irlande sur route en 1974, professeur d’éducation physique, il a entraîné les Juniors de son pays et organisé diverses épreuves en Grande-Bretagne avant d’accéder à la présidence de la fédé irlandaise en 1994. Il a également été président de la commission des courses sur route à l’UCI.

Elu par 31 voix sur 42, McQuaid (surnommé Hein II) tente surtout d’apaiser les tensions qui déchirent le monde du cyclisme.

Les trois grands tours vous ont-il surpris en lançant l’idée d’un trophée commun, doté de quatre millions d’euros ?

Pat McQuaid : Je ne les comprends pas. Ils ne veulent que 14 équipes de l’UCI Pro Tour en 2007 alors que 20 équipes et sponsors ont consenti d’énormes efforts pour s’engager à long terme dans ce circuit. Ceux qui ont lancé cette idée ne comprennent pas le cyclisme. L’argent pose plus de problèmes qu’il n’en résout. Offrir un pont d’or aux trois premiers relève par exemple presque de l’incitation au dopage. Le cyclisme n’est pas le tennis ou le golf. Il ne tourne pas autour des primes. La solidarité des équipes avec l’UCI prouve que nous avons raison. Le Tour, la Vuelta et le Giro sont des courses importantes du Pro Tour et doivent se dérouler selon nos règlements.

Quels sont les principaux points de désaccord ?

Les grands tours estiment que le Pro Tour est un circuit fermé et ils veulent aussi plus de wildcards. Or, nous avons donné des licences de quatre ans pour garantir aux investisseurs une participation durable. Nous devons tendre vers une rotation, afin que plusieurs licences prennent fin chaque saison et nous serions déjà au travail si tout le monde s’était assis à la même table. Les grands tours sont intéressés par l’argent, par l’exploitation commerciale. Amaury Sport Organisation (Tour de France, Paris-Nice, Flèche Wallonne, Paris-Roubaix, etc) croit que le Pro Tour va réduire ses futurs gains parce que les Tours d’Allemagne et de Suisse voient leurs revenus croître. Or, c’est profitable à tous. On est plus fort en groupe.

L’UCI n’a donc jamais tenté de vendre le Pro Tour en package et de gérer tous les droits TV ?

Non. Le Pro Tour n’a rien à voir avec la Ligue des Champions. Il comporte des épreuves parfois vieilles de 100 ans auxquelles nous ne toucherons jamais. Mieux : compte tenu de l’expérience d’ASO, nous aurions été prêts à la laisser mener des négociations pour l’ensemble du Pro Tour. Bref, on a dû rappeler aux grands tours que leurs courses restaient dans le Pro Tour cette année, comme ce fut décidé lors de l’établissement du calendrier 2006. C’est l’UCI qui régit le calendrier et les règles. J’espère que les grands tours vont réfléchir à la situation et prendre leur décision dans l’intérêt du sport. L’année passée, le Pro Tour s’est déroulé dans un climat négatif qui ne profite à personne. Arrêtons la guerre et essayons de collaborer ! Les grands tours peuvent rester dans le Pro Tour avec leur propre vision. Ils doivent nous faire confiance et cesser de croire que nous convoitons leurs droits TV.

Pas plus de jours de Pro Tour pour les Belges

Comment le calendrier va-t-il se développer ?

Nous allons procéder à une évaluation cette année, pour déterminer le profil du Pro Tour 2007. Les équipes nous demandent de ne pas dépasser 157 jours de course. De grands sponsors souhaitent cependant pénétrer d’autres marchés européens, comme la Grande-Bretagne et la Scandinavie. Pour ajouter des courses, il faudra en raccourcir ou en supprimer d’autres. Nous pourrions demander aux épreuves par étapes de supprimer une journée. Faut-il d’ailleurs que tous les tours durent trois semaines ?

L’Espagne, la France et l’Italie ont plus de trente jours de course. La Belgique, un pays de tradition, n’a que quatre jours de Pro Tour plus un demi-Tour du Benelux.

La Belgique a beaucoup de bonnes organisations mais vit aussi un certain déséquilibre, partiellement dû à l’organisation de grands tours dans les pays que vous citez. Il y a peu de chances que la Belgique obtienne plus d’épreuves du Pro Tour. Notre réforme veut organiser des épreuves internationales dans différents pays et former des équipes qui puissent devenir autonomes. Avant, nous laissions ce travail aux fédérations. Nous encourageons maintenant les équipes continentales, qui sont obligées de chercher de l’argent pour fonctionner. Mais le Pro Tour reste européen, pour le moment. On ne peut parcourir le monde en cyclisme comme en tennis ou en golf : il faut déplacer des équipes entières, du matériel, des véhicules… Cependant, nous avons accompli un pas important en veillant à ce que les grands pays des calendriers continentaux puissent participer au Mondial. Il y a deux ans, l’Argentine n’avait pu déléguer qu’un coureur contre cinq lors de la dernière édition, car elle était leader du calendrier américain. L’Iran aussi a pu envoyer cinq coureurs. Je regrette que tous les pays n’aient pas utilisé toutes leurs places car il faut motiver les coureurs, les équipes et les fédérations en offrant aux meilleurs de chaque continent des places pour le Mondial et les Jeux.

Où ils affrontent des coureurs trois fois supérieurs…

On peut estimer que les meilleurs mondiaux font partie du Pro Tour et se disputent le sacre mondial. Cela doit-il priver d’autres, qui ont atteint certains objectifs, d’obtenir leur chance ? Je n’accepte pas qu’on critique la présence de l’Iran et du Venezuela au Mondial. L’UCI a le devoir de veiller aux intérêts du cyclisme dans le monde entier. D’ailleurs, le cyclisme est le sport numéro deux, après le football, au Venezuela et en Colombie.

Se libérer du dopage

L’Equipe a mis la main sur les échantillons positifs d’Armstrong au Tour 1999. Vous avez mené une enquête à ce propos. Pour savoir si Armstrong avait pris de l’EPO ?

Nous ne le pouvons pas car la procédure de contrôle antidopage n’a pas été respectée. Il s’agit d’échantillons collectés à des fins scientifiques et non pour un contrôle.

Le fait est que les soupçons qui pèsent sur le septuple vainqueur du Tour discréditent le cyclisme. L’UCI doit quand même réagir…

Pour l’instant, nous n’avons que le rapport d’un journal, qui a perdu tout crédit depuis longtemps à mes yeux.

Vous avez quitté la présentation du Tour quand Patrice Clerc a parlé de dopage.

Il m’a énervé, non parce qu’il parlait de ça mais parce qu’il aurait dû parler de tout ça ici, à moi et aux responsables de la commission antidopage, pas devant 2.000 journalistes.

Sur quels points êtes-vous d’accord ?

Chaque course doit être libérée du dopage, les équipes doivent respecter le code éthique et il faut plus de contrôles en-dehors des compétitions. Il ne faut pas qu’on prenne des échantillons sanguins sur la ligne de départ mais nous prônons la tolérance zéro. Je n’éprouve aucune sympathie pour les coureurs pris.

David Millar, contrôlé à l’EPO, a signé chez Saunier Duval. N’est-ce pas une infraction au code éthique du Pro Tour ?

Je connais bien David Millar. Il a commis quelque chose de très regrettable mais il a avoué sa faute et purgé sa peine. J’espère qu’il pourra servir de modèle dans la lutte contre le dopage. Sa suspension a débuté avant le Pro Tour. Il n’en est donc pas exclu à vie. Par contre, Roberto Heras l’est.

LOES GEUENS

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