GILBERT BODART ET PETER SCHMEICHEL

Et pourtant ce fut son Septembre noir.

Gilbert Bodart :  » Paradoxalement, l’échange qui m’a le plus marqué coïncide avec le pire souvenir de ma carrière sportive : la rencontre Belgique-Danemark du 6 septembre 1995, en qualification pour le Championnat d’Europe des Nations, l’année suivante, en Angleterre. J’honorais à cette occasion ma 12e cap pour le compte des Diables Rouges. J’étais loin de me douter qu’il s’agirait là de ma dernière apparition à ce niveau. Jusque-là, malgré la concurrence sévère des Jean-Marie Pfaff, Michel Preud’homme et autre Filip De Wilde, j’avais toujours réussi à tirer mon épingle du jeu au sein d’une sélection avec laquelle je m’étais signalé pour la toute première fois face à la Bulgarie, neuf ans plus tôt.

Mais là, au stade Roi Baudouin, devant les Danois, j’allais malheureusement vivre mon Septembre noir. Tout commença par une mésentente entre mon équipier d’alors au Standard, Gunther Schepens, dont profita le génial Michaël Laudrup pour ouvrir la marque. Par la suite, je dus encore m’avouer vaincu à deux reprises sur des essais de Kim Vilfort. Malgré le but de raccroc de Georges Grün, ce fut 1-3 et il était acquis que la phase finale de l’EURO, de l’autre côté de la Manche, se déroulerait sans nous. Pour ne pas m’être montré toujours à mon avantage, ce soir-là, je me sentais en partie responsable de cette élimination. Et c’est la tête basse que j’avais regagné les vestiaires.

La seule véritable lueur dans la grisaille, ce furent les mots de réconfort de mon vis-à-vis, Peter Schmeichel. L’ultime rempart du grand Manchester United me consola en me disant que lui aussi, dans sa prestigieuse carrière, avait déjà vécu un match maudit. Ces épisodes ne l’avaient cependant jamais empêché de repartir du bon pied et il m’encouragea à m’inspirer de son exemple. En guise de consolation, il eut la délicate attention de me remettre sa vareuse, tout en quémandant la mienne. Ce geste de celui qui pouvait être considéré, à ce moment, comme le meilleur portier actif en Europe, voire dans le monde, m’était évidemment allé droit au c£ur. C’est pourquoi il conserve une dimension à nulle autre pareille pour moi.

Tout au long d’une trajectoire sportive de plus de 20 ans, il va de soi que j’ai distribué et récolté des dizaines et des dizaines de vareuses. Ma première remonte à une joute amicale que j’avais disputée avec le Standard, dirigé à l’époque par le coach autrichien Ernst Happel, face au Cosmos de New York, en 1979. Je venais tout juste de souffler 17 bougies et, en guise de souvenir, j’avais eu droit après coup au maillot du célèbre meneur de jeu allemand Gunther Netzer. Moi-même, encore fort timide à mes débuts, n’avais pas osé faire la démarche. C’est l’ancien Diable Rouge François Van der Elst, qui évoluait dans les rangs de club américain, qui avait sollicité son partenaire de club.

Durant ma carrière, il est peut-être amusant de noter que je ne me suis pas seulement borné à récolter les tricots de mes adversaires. Mes équipiers aussi ont été l’objet de requêtes. Comme Roberto Baggio, avec qui j’ai joué à Brescia, ou encore Marc Wilmots au Standard. Je présume que ma propre tenue aura souvent contribué également à faire le bonheur de joueurs dont j’ai croisé la route lors de parties amicales. Comme contre Bayonne ou Briançon lorsque j’évoluais dans le sud de la France. Mais l’épisode le plus cocasse, je l’ai vécu à Ostende, où j’entraîne depuis cette saison. A peine confirmé dans mes fonctions, le kiné du club me montra un maillot dédicacé de ma part que je lui avais offert quand je défendais encore les couleurs du Standard. Il a toujours été un de mes plus fidèles suiveurs et était manifestement ravi de me retrouver à ses côtés dans le club côtier « .n

Propos recueillis par Bruno Govers

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