Georgette, les seins nus comme Nora ?

M arcel rigole en lisant Foot Mag dans le divan :  » Tu as vu à Genk, l’arbitre a arrêté le match contre l’Olympic parce que les supporters scandaient Les Wallons, c’est du caca ! Moi, à la place des Carolos, j’aurais entonné Les Flamands, c’est du pipi !, on aurait bien rigolé…  »

–  » Pauvre vieux footballeur inconscient, c’est ainsi que s’allument les brasiers ! Mais sauras-tu jamais ce que sont la citoyenneté, le respect, simplement la POLITESSE ? », se scandalisa au quart-de-tour Georgette repasseuse, simulant le lancer de son fer à repasser vers le faciès de son vieux mari.

Elle la jouait diva outragée, faut dire qu’elle était sur les nerfs, Marcel-le-coach avait encore fait des siennes la veille au match de ses Minimes. Rencontre capitale entre les deux premiers, et il n’y avait pas d’arbitre. Marcel s’était dévoué. Tout se passait bien, sous les yeux inquiets de Georgette, venue voir évoluer leur petit-fils et qui s’attendait à tout, d’autant que Marcel avait pris quelques chopes avant le sifflet… Mais Marcel était impartial, outre qu’il mordait intensément sur sa chique pour s’abstenir de toute directive envers ses gamins. Georgette en fut même fière jusqu’à la 89′ incluse : hélas à 0-0, le petit-fils passa toute la défense en revue pour inscrire un but d’anthologie ! Fou de joie, le gamin courait en écartant les bras après avoir relevé sur son crâne l’avant de son maillot. Le problème fut alors que Marcel, ivre de bonheur au plus profond de ses gènes et sans gêne aucune, jeta son sifflet en l’air en hurlant et se recouvrit à son tour le crâne pour courir faire l’avion, son gros bide à l’air, en compagnie du rejeton de son rejeton ! Le grand-père avait oublié l’arbitre et les parents adverses voulurent lui faire la peau lors d’une rentrée aux vestiaires qui s’avéra chaude…

–  » Bof, la politesse, c’est quoi finalement ? Même quand tu te retiens, tu te fais engueuler ! Tiens, la preuve, cette histoire entre Marc Delire et Pierre François… « , s’entêta Marcel toujours le nez dans Foot Mag.  » Delire ne prononce pas caca dans la Gazette des Sports à propos de Sergio Conceiçao, il prétend seulement – à tort selon moi mais qu’importe – que le Portugais était un petit monsieur ! Et voilà que François pique sa crise, en affirmant que l’expression équivaut à traiter Sergio de m et trois petits points en langage populaire ! Mais où va-t-on ? Si j’ose dire demain que Lucas Biglia est selon moi un joueur moyen, Roger Vanden Stock va décréter contre moi une fatwa footeuse auprès du noyau dur mauve, en s’offusquant de ma grossièreté belliqueuse ? !  »

–  » Vanden Stock ne te connaît pas, tu n’es pas une VIP, Marcel… « , objecta Georgette fielleuse.  » Même si tu as défrayé la chronique villageoise en devenant le premier arbitre nu de l’histoire du foot… « 

–  » T’exagères toujours, j’ai à peine relevé le haut… « , grogna Marcel.

–  » C’était pire qu’à poil… « , s’entêta Georgette, qui venait de placer un slip marital sur sa planche à repasser.

–  » LE HAUT ! BON DIEU MAIS C’EST BIEN SUR ! C’EST TOI QUI DOIT ENLEVER LE HAUT ! « , cria soudain Marcel poursuivant ses lectures.  » Nora ! Nora Hardwick ! Tu dois faire comme Nora Hardwick ! Une Londonienne, qui vient de poser les seins nus derrière le comptoir de la buvette, pour un calendrier à vendre au profit des enfants du club local !  »

–  » Je ne suis pas une pute, Marcel. Et je te rappelle que j’ai 68 ans « , s’offusqua Georgette.

–  » Justement ! Nora a 102 ans, elle ! C’est ça le scoop ! C’est ça qui va faire vendre ! Nora pourrait même être ta mère ! « , continua Marcel en hoquetant de rire.  » Sois courageuse, chou ! Ce serait pour la bonne cause ! Pour la formation des jeunes ! Et nous pourrions l’an prochain offrir à nos Minimes une Saint-Nicolas de derrière les fagots ! « 

–  » Marcel… « , fulmina Georgette.  » Tu te souviens de cette grande blondasse voici trois ou quatre ans à Beveren, qui stripteasa durant la pause au beau milieu du rond central ? »

–  » Bianca ! Je crois qu’elle s’appelait Bianca ! « , eut le malheur de se souvenir Marcel.

–  » EH BIEN DEMANDE À BEVEREN DE TE LA PRÊTER POUR TES MINIMES ! « , hurla Georgette en armant son lancer…

Car cette fois, le fer à repasser partit vraiment. Marcel l’évita d’un joli réflexe du buste, prouvant qu’il avait gardé tout son sens de l’esquive. Le fer fit Bloum en rebondissant dans le divan, puis s’immobilisa, le sang n’avait pas coulé.

–  » Nora avait quand même un foulard rose autour du cou « , précisa Marcel qui terminait sa lecture…

par bernard jeunejean

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