Fun on Thames

Malgré la saison médiocre de Fulham, l’ex-Anderlechtois est très heureux de sa première année au sein du petit club londonien.

En ce jeudi après-midi, New Malden, une banlieue vivante de Londres, est baignée par les premiers rayons de soleil printaniers. Juste en dehors du centre, les terrains d’entraînement de Fulham FC viennent d’être tondus. Il est tentant d’y jeter un coup d’£il mais les visiteurs n’y sont pas les bienvenus. Please note all training is closed to members of the public. Le panneau est clair. La presse doit attendre dans le container transformé en salle d’accueil jusqu’à ce que l’attaché de presse conduise les journalistes aux joueurs.

La séance est plus longue que prévu mais cela ne pose pas le moindre problème aux représentants des journaux. La patience du soussigné, elle, est mise à rude épreuve. Lorsqu’il vient nous chercher personnellement, TomaszRadzinski s’excuse :  » Je pensais qu’il s’agissait d’une interview télévisée et je voulais donc être soigné « . La plupart des joueurs ont déjà quitté les lieux quand l’ancien avant du Germinal Ekeren, d’Anderlecht et d’Everton nous entraîne vers la terrasse du foyer des joueurs. Le Canadien n’a rien perdu de sa verve.

Radzinski revit à Londres. Il est heureux d’avoir quitté Liverpool où, avec Everton, il a connu de bons et de moins bons moments.  » Je voulais quitter Everton pour des raisons essentiellement privées. J’en avais vraiment marre, même si Liverpool est une formidable ville de football. Le problème, c’est qu’il n’y a que ça, même si l’offre culturelle s’est élargie depuis quelque temps. En Belgique, on roule d’une ville à l’autre en un rien de temps. Si Bruxelles ne vous plaît pas, Anvers n’est qu’à une demi-heure. Ici, c’est plus difficile. Liverpool était aussi trop extrême : bleu ou rouge. Everton ou le FC Liverpool. Dans la ville, vos propres supporters vous abordent avec trop d’insistance tandis que ceux de Liverpool tentent de vous intimider.

On est moins importuné à Londres. Dès que vous prenez l’ underground, vous plongez dans l’anonymat. On vous respecte plus dans la rue. Certes, on vous adresse parfois la parole, mais de manière plus distante. Hélas, c’est aussi le cas de nos supporters. Notre petit stade, Craven Cottage, dont les trois quarts sont rénovés, est un des plus idylliques du pays, grâce à sa situation, aux bords de la Tamise, mais l’ambiance est un peu trop décontractée. Notre public constitue rarement un véritable douzième homme. Il nous soutient certes mais ne le montre pas assez. Or, nous avons besoin de son aide, surtout quand l’équipe tourne moins bien. Cela nous manque souvent. Nos supporters sont des gens bien élevés. Evidemment, notre stade se trouve dans un quartier très onéreux de Londres « …

Cool

Il n’a pas regretté son transfert un seul instant.  » La vie ici est dix fois plus agréable qu’à Liverpool. Je le remarque au nombre d’amis qui nous rendent visite. A Liverpool, nous ne voyions personne. Maintenant, nous n’habitons pas très loin du vrai centre de Londres. Notre appartement est situé tout près de Hammersmith Bridge. De ma fenêtre, j’aperçois notre stade.

Mon contrat à Everton, pour lequel je jouais depuis trois ans, était encore valable une saison mais nous n’avons pas évoqué de prolongation. Mon avenir sportif était donc incertain. Je n’étais pas le seul : 13 autres joueurs partageaient mon sort. Fulham avait déjà fait une proposition et j’avais déjà davantage la tête à Londres qu’à Liverpool. J’ai pratiquement tout vécu à Everton : j’ai failli jouer la Ligue des Champions et failli être relégué. Deux de mes coéquipiers, Mark Pembridge et Brian McBride, se trouvaient déjà à Fulham. Ils ont influencé mon choix par leur enthousiasme quant à la vie londonienne et à l’intensité des entraînements de Fulham « .

Le régime sur les rives de la Mersey, où David Moyes impose une discipline de fer à ses footballeurs, était nettement plus rigoureux qu’au bord de la Tamise.  » Moyes ne supportait pas le plus léger manque de concentration. J’avais aussi l’impression de ne plus avoir la moindre vie privée. Il voulait contrôler chacun à tout moment et partout. C’était étouffant. C’était comme si, sans le demander directement, il voulait savoir ce que vous aviez l’intention de faire de votre journée après l’entraînement. C’était particulièrement pénible pour les anciens, qui savent s’autodiscipliner « .

Chris Coleman, le coach de Fulham, est nettement mieux. A la fin de l’année dernière, après quelques résultats décevants, il a été mis sous pression mais les joueurs ont pris sa défense.  » Son renvoi « , explique Radzinski,  » n’a jamais vraiment été à l’ordre du jour, en fait, même s’il aurait sans doute démissionné si les résultats étaient restés mauvais, mais les joueurs voulaient le garder. Cookie, comme nous l’appelons, ne peut pas partir « .

Cette saison, Fulham joue au yoyo. Systématiquement, une petite série de bons matches est suivie de contre-performances.

 » Un bon début est très important pour la mentalité, ici. Notre confiance s’est envolée et avant que nous l’ayons compris, nous étions dépassés et nous nous retrouvions dans la seconde colonne du classement, sans plus d’objectifs. Nous étions trop loin pour lutter encore pour une place européenne et trop haut pour être menacés de relégation. La préparation mentale des matches est donc totalement différente. Une autre sorte de pression émerge. Nous jouons actuellement sans guère d’objectifs, si ce n’est de terminer le plus haut possible, car les dix premiers du championnat reçoivent un bonus financier de la PremierLeague « .

Voilà des ambitions bien modestes pour un club qui, dixit le président Mohammed El Fayed, veut devenir le Manchester United du sud du pays.

Radzinski soupire :  » Notre noyau est trop étriqué pour le moment. Nous n’avons que 20 professionnels. C’est nettement moins que Chelsea ou United. Il faut augmenter le budget de manière substantielle. Si le président y est prêt ? J’aimerais lui poser la question mais ce n’est pas facile pour lui non plus. Fulham est son hobby, sa passion. Il veut y injecter de l’argent, en éprouver du plaisir mais sans courir trop de risques non plus. Lui aussi a ses limites.

Si nous pouvons renforcer l’équipe à une ou deux positions, nous pourrons certainement lutter pour une qualification européenne. Le gardien Edwin van der Sar et Boa Morte ont resigné, ce qui nous a rassérénés. Cela démontre que le club n’a pas revu ses ambitions à la baisse. Si nous terminons à une place convenable cette saison, nous pourrons entamer la préparation de la suivante avec plus de sérénité « .

El Fayed en hélico

Selon la rumeur, Al Fayed veut vendre le club. Radzinski n’en sait rien : les joueurs n’ont pas encore posé la question au président, bien qu’ils le voient régulièrement, même si ses apparitions sont brèves.

 » Il atterrit en hélicoptère sur le terrain d’entraînement « , explique Radzinski en montrant une croix rouge sur une des aires de jeu.  » Une fois par mois, il vient dire bonjour. Cinq minutes plus tard, il est déjà reparti. Par contre, il assiste à chaque match à domicile et il vient bavarder pendant que nous effectuons notre stretching. Il vient de temps en temps dans le vestiaire aussi. Malgré la mort de son fils dans l’accident de voiture de Paris en 1997 avec la princesse Diana, Mohammed Al Fayed me fait l’effet d’un homme plein d’entrain « .

Radzinski est très satisfait de ses prestations personnelles, même si Coleman réserve le poste d’avant-centre à Andy Cole dans son 4-5-1. L’ancien Anderlechtois évolue dans l’entrejeu droit ou permute avec le Portugais Boa Morte, qui occupe le flanc gauche :  » Je fais avec. Je reçois suffisamment l’occasion de jouer. Jusqu’à présent, j’ai été titularisé environ 25 fois mais joué une trentaine de matches. Coupes et championnat confondus, j’ai marqué dix buts. Donc, tout va bien. Je n’obtiens plus les statistiques d’Anderlecht ou du Germinal Ekeren mais il s’agit aussi d’un championnat autrement plus relevé.

Une chose me manque depuis que j’ai quitté Anderlecht : la Ligue des Champions. Everton nourrissait des ambitions en ce sens mais n’a pu les concrétiser. Même si on affirme que le niveau de la Premier League équivaut à celui de la C1, il y a une différence. Je rêve de rejouer une Coupe d’Europe « .

L’interview terminée, Radzinski dispose d’un après-midi de liberté. Un clin d’£il :  » Le temps est idéal pour fainéanter à une terrasse avec quelques coéquipiers devant une eau minérale ou un café. Bientôt, je vais aussi me mettre au golf. Edwin van der Sar habite à proximité d’un terrain mais il n’a pas d’adversaire. La saison prochaine, je vais jouer avec lui. J’ai sciemment attendu la trentaine parce que je suis d’un naturel trop impulsif pour ce sport « .

Stefan Van Loock

 » La Ligue des Champions AVEC ANDERLECHT me manque  »

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