Full sentimental

A chaud, le Footballeur Pro de l’Année de Sport/Foot Mag jongle avec les formules fortes. A froid, qu’en pense-t-il ?

« Dieu et mon droit – Honni soit qui mal y pense  » : la maxime du Royaume-Unipourrait aussi être celle de Milan Jovanovic. La une du prestigieux quotidien The Times porte ces mots et son envoyé spécial à Standard-Everton ( Kavah Solkehol) conseillait aux agents de joueurs de découvrir le football belge avant le prochain mercato d’hiver…

Un Jova des grands soirs lui a tapé dans l’£il tout au long du match avec ses raids, ses passes précises, son travail dans la ligne médiane ou en pointe, son assist sur le but d’ Axel Witsel, son calme au moment de transformer un penalty qu’il força au bout d’une cavalcade dont il détient le secret. Milan is back. Cela se voit et cela s’entend comme en 2007-2008, tout au long des batailles de la conquête du titre.

Une saison qui avait déclenché chez lui des torrents d’émotions et de déclarations plus fracassantes les unes que les autres. Explications…

 » Je pars, c’est sûr à un milliard de pour cent « 

Le commentaire de Milan Jovanovic :  » Oui, j’avais lancé cette affirmation car c’était une certitude à l’intersaison. Même plus que cela, c’était carrément acquis et j’avais des offres du PSV, surtout, et d’autres clubs que j’ai écartés car je désirais aller aux Pays-Bas. J’apprécie le jeu hollandais. Dans ma candeur, j’ai cru que le Standard voulait mon bonheur et mesurait ce que j’avais apporté : jouer huit mois en étant blessé, le titre, mes buts, ma disponibilité, mon ambition individuelle et collective, le titre de Footballeur professionnel de l’année, etc. Il était temps de me rendre quelque chose. Je me suis trompé, le Standard a dit non. Même pour 3,5 millions d’euros, je pensais que le Standard me remercierait en me permettant d’être heureux. Le PSV a proposé5 millions d’euros. Refus. Je ne sais pas pourquoi. Je n’ai exercé aucune pression. Je ne plains pas, j’adore le Standard qui restera le club le plus cher à mon c£ur pour toujours. C’est lui qui a donné une belle impulsion à ma carrière.  »

 » Mais je perds beaucoup d’argent en restant ici. J’apprécie les bravos et les tapes dans le dos mais il y a le financier aussi : je me demande pourquoi certains éléments défensifs d’Anderlecht gagnent trois fois plus que moi. Et que dira-t-on si je me cassais un jour la jambe ? Ah, c’était un génie. Je veux bien mais l’enjeu est énorme : il y va de ma carrière, de mon avenir, de ma famille. Si le Standard s’alignait sur ce qu’on offre au PSV ou à Everton, je resterais ici jusqu’à la fin de ma carrière. Je n’en veux à personne et je ne nourris aucun sentiment de revanche. Je suis un idéaliste et j’ai cru que c’était important dans le football. J’étais à côté du sujet, je me suis trompé. Je rêvais de régler ce problème en famille. Un transfert à ce niveau, c’est d’abord du business. On ne peut pas mélanger les amitiés, les estimes et le monde des affaires. Je le savais mais j’ai trop vécu dans l’émotion. Or, il faut gérer un tel dossier froidement, en laissant la chaleur humaine à la maison. Je ne serai plus jamais aussi sentimental. « 

 » Si je ne trouve pas d’autre club, j’arrête ma carrière. « 

Le commentaire de Milan Jovanovic :  » Cela prouve combien j’étais sûr que j’allais partir. La prochaine fois, je serai moins naïf, je penserai d’abord à moi, puis au club. Mais, c’est clair et net, je souhaite que tout le monde soit content : moi et le Standard. S’il s’avère que c’est impossible, mes priorités passeront avant tout le monde. Je suis sous contrat jusqu’en 2010. Je resterai peut-être jusqu’au bout : on verra mais j’ai retenu la leçon. Je n’ai jamais caché ce que j’avais sur le c£ur. C’est dans ma nature mais, bon, il faudra que je sois plus prudent à l’avenir.  »

 » Bölöni m’a bien aidé à retrouver mon jeu après ma double opération. « 

Le commentaire de Milan Jovanovic :  » Notre coach a de l’expérience à revendre. Il savait que j’étais obnubilé par le désir de marquer au plus vite en championnat. C’est important pour la confiance quand on a souffert physiquement et mentalement après deux interventions chirurgicales en fin de saison. Les médecins estimaient qu’il me faudrait quatre mois pour retrouver mon niveau. Cela s’est vérifié mais c’est très long. En pointe, on vit de buts. Il y avait la pression et le regard des autres. C’est lourd car celui qui ne confirme pas recule. Bölöni n’a jamais rien exigé et a vu à l’entraînement que je faisais tout ce qui était possible pour revenir. Personne n’a aussi bien mesuré mon désarroi que lui. C’est un ancien grand joueur et il sait ce qui se passe dans la tête d’un joueur qui revient de loin et ne marque pas. J’étais rongé intérieurement et la presse s’interrogeait. Allait-on revoir le vrai Jova ?  »

 » Le coach a dédramatisé en me demandant de penser d’abord au collectif. Pour lui, le reste suivrait automatiquement. Il avait raison et j’ai retrouvé mon football en bossant beaucoup pour les autres. Comme Michel Preud’homme, il a décortiqué et compris ma personnalité, mon caractère, mon mental. Quand on exprime cette confiance à mon égard, je la rends car je suis tout sauf un égoïste. Je suis le premier à évoquer les mérites des autres. Bölöni a rendu hommage à Preud’homme après notre qualification européenne. En évoquant le bel héritage laissé par son prédécesseur, il a souligné la grandeur de ses propres valeurs.  »

 » Cet effectif peut être champion cinq fois s’il est préservé. Mais j’ai entendu que Steven Defour et Axel Witsel rêvent d’un transfert… Marouane Fellaini est parti. Il a été hyper-important pour nous. Mais la page est déjà tournée et le Standard a trouvé des formules de remplacement avec Defour, Witsel et Benjamin Nicaise. Bölöni met petit à petit ses idées au point en respectant les acquits dont un 4-4-2 pas très différent avec, peut-être, en prime, plus de jeu collectif. Le titre a ma-gnifié notre talent. Avant, on le devinait, maintenant, on sait que c’est une réalité. Cela s’appelle la confiance. Mais je ne veux pas comparer : c’était exceptionnel la saison passé, maintenant aussi. Un grand entraîneur, ne peut améliorer qu’une bonne équipe. Un bon coach est impuissant si l’effectif n’est pas de qualité.  »

 » Je suis persuadé que le Standard jouera de mieux en mieux. Je préfère évoluer en pointe, c’est certain, mais je prouve actuellement que mes atouts sont plus variés qu’on le pense. Bölöni savait que je pouvais jouer sur le flanc gauche. C’est le cas en équipe nationale de Serbie. Je suis également capable de bien me débrouiller à droite. Quand je décroche, il faut me juger autrement. C’est loin du but et je dois plus distribuer le jeu, donner des assists, même récupérer des ballons. Cela ne signifie pas que je bossais moins la saison passée. C’est différent et je veux bien assumer cette diversité : c’est une richesse, un capital important pour l’équipe. Un grand club me recrutera peut-être parce que je suis polyvalent alors qu’on ne parlait que du Jova attaquant la saison passée. « 

 » Je donnerais ma vie pour le Standard « .

Le commentaire de Milan Jovanovic :  » Je n’ai rien à ajouter, je ne retire pas un mot : cela se voit sur le terrain.  »

 » Michel Preud’homme était mon coach, c’est un ami pour la vie. « 

Le commentaire de Milan Jovanovic :  » Je ne sais pas ce qu’il pense de moi ou s’il considère que je suis son ami. On a vécu tant de choses avec lui : le titre, mais aussi le travail, les succès, les doutes, les problèmes, la mise en place d’un superbe effectif. J’ai progressé sous sa direction et je n’oublierai jamais son staff : Manu Ferrera, Stan Vandenbuijs, Jorge Veloso, Guy Namurois ( ndlr : seul ce dernier est resté). Ils ont porté et développé un projet avec succès. C’était génial comme c’est le cas actuellement. Il y a eu des discussions, on n’a pas toujours été d’accord, Preud’homme et moi, mais c’est bien et même riche d’échanger des idées. Moi, je lui demandais de me faire confiance de la première à la dernière minute de jeu car un attaquant peut aussi marquer durant le temps additionnel. Je l’ai prouvé récemment contre Anderlecht. Michel est vraiment un ami pour la vie…  »

 » J’ai risqué ma carrière pour le Standard « .

Le commentaire de Milan Jovanovic :  » Tout à fait. Jouer aussi longtemps avec une pubalgie, ce n’est pas rien. On m’a donné mais j’ai beaucoup rendu. Je suis heureux d’avoir répondu à l’attente placée en moi.  »

 » J’ai réalisé le match presque parfait à Everton « .

Le commentaire de Milan Jovanovic :  » Avec un peu de chance, j’aurais même pu marquer. Hélas, Igor De Camargo a touché la balle qui prenait le chemin des filets. J’étais bien dans le match et j’ai galopé, galopé, galopé. Le Standard n’avait pas peur d’Everton. Et face à Liverpool, le groupe avait prouvé qu’il était digne de la Ligue des Champions : quelle pub pour le football belge. Quand on réalise ça, c’est une force. Il y a eu la déception de l’élimination face à Liverpool mais on a vite oublié. Pour moi, à Everton, c’était quasiment parfait.  »

 » Je ne me suis jamais senti aussi détendu qu’avant le match retour contre Everton. Bölöni ne nous a pas demandé de jouer aussi bas. C’est plus la vie du match qui l’a exigé. Everton n’a pas séduit mais je trouve que cette équipe est plus forte qu’Anderlecht. Le Standard n’a pas permis à Everton de développer son jeu. A Sclessin, j’ai été dangereux tant comme médian qu’attaquant. Bölöni a donc raison de me demander de varier les coups. Je ne sais si je suis plus fort que la saison passée. Il est trop tôt pour le dire. Pour le moment, je suis à 75 % de mes possibilités et je n’ai plus mal ; ma pubalgie est oubliée. Il faut croire que mon retour en forme n’a pas été perçu dans mon pays. Je n’ai pas été retenu pour le prochain match de la Serbie. Mystère… « 

par pierre bilic

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