Foot tic-tac

Ex-joueur du Daring, Anderlecht, Union, La Louvière, RWDM et aujourd’hui adjoint à Beveren, il est impressionné par les Ivoiriens.

En son temps, médian créatif et offensif, Eddy De Bolle, 53 ans, porta les couleurs du Daring (de 58 à 72), d’Anderlecht (72-75), de l’Union (75-78), de La Louvière (78-79), du RWDM (79-81) et d’Alost (81-85). De retour à La Louvière, il y termina sa carrière et y entama celle d’entraîneur qui le mena aux Cadets nationaux d’Anderlecht, trois semaines à l’US Centre, (1re Provinciale), à Binche (Promotion), aux Francs Borains (D3), au RWDM de 95 à 2000, et, actuellement, à Beveren comme adjoint d’ Herman, Helleputte. Le duo belge y forme le staff technique avec le directeur sportif et ex-international français Jean-Marc Guillou et son compatriote Régis Laguesse.

Eddy est sous le charme de la jeune tribu ivoirienne :  » Leur foot en souples passes courtes me rappelle celui des Van Himst, Jurion et Hanon du Sporting des années 60. Ce jeu tic-tac, je l’avais aussi en moi. Nos Africains l’ont par nature, et Guillou stimule cette voie. A Abidjan, il prend en charge des gamins de dix-onze ans et les fait jouer trois heures ensemble après l’école du matin. Onze mois par an, ils vivent autour du ballon. En 4-4-2, et pas question d’en changer. Même pas à Bruges, on y a pris du 7-2, c’est le jeu. Une demi-heure après, ils chantaient dans le car et nos Anglais, eux, râlaient. Spécial à gérer, évidemment. A Beveren, j’ai aussi secondé Emilio Ferrera, et il me semble que nos Africains n’étaient pas sur sa longueur d’onde. Son analyse de l’adversaire est très pointue et il s’adapte mais, c’est différent de disséquer l’autre et de faire jouer. Question entraînement, notre petite bande ne traîne pas. Qu’il y ait deux ou trois séances, pas de problème, ils donnent à fond, mais toujours avec ballon. Sans ballon, ils rechignent. Au 3×12′ de décrassage, par exemple, ils essaient de raboter : -3×10 coach, ça va ? Pour eux, sans ballon, c’est un autre sport. Ils palabrent beaucoup, créent leur ambiance, et considèrent, comme la plupart des étrangers, qu’ils ne feront pas carrière ici « .

Daring

Né le 26 septembre 49 à Berchem-St-Agathe, près de la Basilique, Eddy fila, à neuf ans, au Daring CB, le stade le plus proche et encore dénommé Stade Oscar Bossaert, à l’époque :  » Jos Renders, père de Daniel, m’entraînait en Minimes du samedi, et a suivi mon groupe dans les autres équipes d’âge. En ce temps-là au Daring, le même entraîneur dirigeait plusieurs équipes de gamins. Le dimanche je supportais les internationaux d’alors, Bob Van Kerkhoven, Charlie Saeys, Roland Moyson, les Congolais Mayunga et Assaka, et plus tard, les Français Michelin et Salem. Pas mal d’entraîneurs défilèrent : Renders, le Français Lengrand, l’Anglais Bill Elliott et ses trois attaquants britanniques Etheridge, Westlake et Malloy, le Hongrois Beres, l’apatride Höfling et l’Allemand Hörnig. Je me suis révélé en 67 comme capitaine de l’équipe nationale des Juniors UEFA, avec des partenaires qui ont fait carrière, Van Binst, Volders, Velkeneers, Stevens, Van Herpe et Deraeve, et, en 68, après quelques essais, j’ai débuté en D1 contre Beringen, qui offrait une lampe de mineur au coup d’envoi ! Mes équipiers : le portier Francis Cuypers, Donald De Vlegelaere, Jenne Wouters, Etienne Coppens, Roger Foulon, Armand Randoux et l’international suédois Ingvar Svahn, entre autres. Et comme préparateur physique, Michel Verschueren. En 69, nous chutions en D2 et le nouveau président L’Ecluse engagea des joueurs cotés comme Jean Nicolay et Jean-Paul Colonval. La remontée fut loupée, mais la finale de la Coupe 70 contre le Club Brugeois reste pour moi un émouvant souvenir. Une raclée pourtant, 6-1, mais l’ambiance du Heysel ! Et quel parcours, le Lierse, Anderlecht et Berchem enterrés. En quarts, au Sporting, notre Mouscronnois Gilbert Libon marqua le but décisif. Les petits de D2 du Daring, tombeurs du grand Sporting de Van Himst et cie ! C’est pas rien. La préparation à la finale fut, malheureusement, bousillée, trop de hâte, trop de nervosité autour des transferts de dernière heure des Allemands Karl-Heinz Rühl et Heinz Hörnig et du libero tchécoslovaque Alex Horvat, juste revenu du Mondial 70, mais pas en ordre pour jouer. Cette finale-là je la préfère pourtant à celle gagnée en 75 avec Anderlecht sur l’Antwerp que j’ai vue du banc. Le plaisir est moins fort. Beaucoup d’émotion, par contre, pour Van Himst, qui faisait ses adieux, et Haan qui jouait son premier match officiel en mauve « .

Anderlecht

Quittant le Daring, Eddy avait rejoint le Sporting en 72 : » Cela me remet en mémoire la hargne d’un ancien délégué molenbeekois, Jean Destrijcker, contre l’ennemi mauve. Il accompagnait le Daring dans les plus petits patelins et aurait été jusqu’au bout du monde, mais n’a jamais franchi le kilomètre jusqu’au Sporting. Bij d’ander(lecht) jamais (chez l’autre jamais), disait-il. Ludo Coeck, arrivé en même temps que moi, durcit encore la concurrence dans la ligne médiane déjà forte de Lievens, Deraeve, Vander Elst, Dockx, Jantje Verheyen et Van Himst évoluant entre milieu et attaque. Aussi, ai-je été utilisé à différents postes en défense. Georg Kessler m’intronisa libero pour un déplacement au FC Liégeois, et trois jours plus tard, je tenais le milieu pour mes débuts européens en Coupe des Champions 72-73, au Spartak Trnava. Une défaite 1-0 après que Van Himst eut loupé un penalty. Kessler râlait. On le sentait devenir fou d’impuissance, ça tournait mal pour lui. La défaite au retour fut le début de sa fin, en octobre il était dehors. Parfois ça va très très vite, en mai il avait fêté le doublé titre-coupe. Polyte Van Den Bosch a dépanné jusqu’à la fin de la saison. Son successeur Urbain Braems m’a aligné plus souvent, et, parfois à l’arrière droit, pour un match gagné 1-4 à Beveren et décisif pour le titre 74. Mon bilan mauve n’est pas mal, le titre 74 et la coupe 75. Ce n’est pas le talent qui manquait dans cette équipe, Rensenbrink, Van Himst, Coeck, Vander Elst, Ladinszky, Dockx, Van Binst, Ejderstedt, Volders, Ruiter, Jan Verheyen, Denul… J’ai joué la Coupe des Coupes 73-74 comme médian, et vécu de près, dans un hôtel de Zürich, l’incident très connu entre Braems et Van Himst. A l’aller trois buts de Robby Rensenbrink nous avaient sauvés de justesse, 3-2, face au FC Zürich. Là-bas, à la théorie, Braems demanda à Paul de jouer en décalage sur la droite, et j’entends encore la réponse : -Pour ce rôle-là, Ejderstedt est meilleur que moi, et il refusa. Résultat : 1-0 sur un penalty de Broos, et la porte. La poisse pour Hugo, on venait tout juste d’être battu au Standard où il avait également commis un penalty sur Bukal. Comme la concurrence s’exacerbait, surtout celle de Swat Vander Elst, j’ai accepté une proposition de trois ans de l’Union St-Gilloise, rebaptisée alors Royale Union. J’ai gardé de bons contacts avec le Sporting, et, récemment, j’y ai fêté le 60e anniversaire de la section Vétérans « .

Royale Union

L’Union, une curieuse aventure : en 75, le club avait chuté pour la première fois de son histoire en D3. En cours de saison, un jeune président, Ghislain Bayet, apparemment cousu d’or, débarqua sur la Butte, et amena deux ex-internationaux anderlechtois avec lui : Georges Heylens, bombardé administrateur, secrétaire général, manager et entraîneur, et Jean Plaskie, adjoint. Trop tard pour éviter la chute, mais pour la saison suivante fut assemblé un noyau de joueurs de D1.

 » Je faisais partie d’un bloc mauve avec Barth, Denul, Verheyen, et plus tard, Lomme, plus quelques ex-anderlechtois comme Geys et Van Welle, le Malinois Deweerdt et l’avant-centre allemand Harald Nickel. On était payé comme en D1 et un simple match amical contre PSV ramena, en tout cas, 10.000 spectateurs sur la Butte, la pelouse fut retournée, la tribune aménagée… Nous avons survolé la D3 mais en D2, tout bascula : départs de Deweerdt, Vergote et Nickel, irrégularités dans les paiements, et plus de Bayet ! La faillite prononcée en 76 ne fut donc qu’une demi-surprise. Le club survécut pourtant, et nous avons même disputé le tour final 76-77, mais La Louvière est montée. La troisième saison fut quelconque « .

La Louvière

Bye bye l’Union, et cap sur La Louvière pour sa deuxième saison en D1, en 78-79 :  » Un club chaleureux et folklorique entraîné alors par Semmeling, mais Léon a été remercié en cours de championnat. Avec Caers, Dardenne, Wintacq, De Vriese et André Gorez l’équipe tenait debout et a surpris par deux succès inattendus sur Anderlecht (3-2, je marque deux buts) et le Club Brugeois et un nul face au Standard. Mais, mises à part ces grandes affiches, le reste… Bref, on s’est retrouvé en D2 et j’ai répondu à l’appel de Johan Vermeersch alors président du RWDM. Nous avions été partenaires au Daring et il supportait assez mal mes remarques. En m’engageant, il a rigolé. Deux bonnes saisons, troisième et septième avec trois entraîneurs, Jean-Pierre Borremans, Johan Boskamp et Cor Brom. En Coupe UEFA 80-81 j’ai réussi le dernier but européen du RWDM, contre Torino. Deux matches au couteau : 0-1 ici, et 2-2 là-bas. Plus tard, sous Vandereycken, le RWDM a encore été européen, contre Besiktas, mais n’a pas marqué. Après Molenbeek, à 32 ans, je me suis tapé quatre saisons à Alost en D2 sous Heylens, Gilbert De Groote, Ivic, un mois seulement, et Leo Canjels. Un club ambitieux, avec du public, un petit terrain qui en gênait beaucoup, mais les espoirs de montée sont restés vains. Parmi mes partenaires, Manu Ferrera vif et opportuniste. La Louvière, alors en D3, m’a rappelé et j’y ai bossé de 85 à 87. Comme joueur sous André Gorez et Jean Cornélis, puis adjoint, et enfin entraîneur lorsque Cornélis fut dégommé. A 38 ans, j’ai arrêté de jouer « .

Entraîneur !

Après deux saisons avec les Cadets nationaux anderlechtois, génération Frédéric Herpoel, trois à Binche de 90 à 93 et deux aux Francs Borains, Eddy retourna à nouveau à Molenbeek, comme adjoint au RWDM. De 95 à 2000, deux saisons en D1, trois en D2.

 » Durant plusieurs années, j’ai aussi complété ma carrière de joueur puis celle d’entraîneur par un job au magasin d’articles de sport de Heylens, à Anderlecht. Vandereycken entraînait le RWDM et m’a confié les Espoirs, nous avions peu de contacts. Il n’a pas terminé son contrat, parce qu’au retour d’un stage hivernal à Ténériffe nous avons subi un 5-0 contre Lokeren. Guy Vandersmissen fut nommé, une solution boîteuse, car à 39 ans, il était encore indispensable dans la ligne médiane. Il n’a pu éviter la chute, mais a conservé sa place pour la reprise. Il s’est fait jeter, alors qu’on était deuxième, pour cause de jeu trop défensif. Pas de sa faute pourtant, il y avait trop peu de talent créatif dans l’équipe, les deux avants Verschelde et Buelinckx étaient mal ravitaillés. J’ai compris que c’était fini lorsque des supporters ont houspillé le car des joueurs. Des retards de paiement d’un ou deux mois compliquaient aussi la situation. Guy est devenu manager de joueurs et je l’ai revu lors d’une tournée de bienfaisance en Croatie, l’été dernier, à Split, avec le BST (Belgian Start Tour), un groupe de vétérans avec Grün , Pfaff, Demol, Czernia, Veyt, Claesen…

Ariel Jacobs a repris l’équipe, et, personnellement, j’ai toujours apprécié ses qualités d’homme et d’entraîneur. Il a très mal démarré, quasi pas de points en sept matches, puis l’équipe s’est ressaisie, mais pas assez pour rejoindre la D1. Renders et moi, tous deux adjoints, avons été remerciés en même temps avec ce commentaire de la direction : – Impossible de continuer à vous payer tous les deux, mais nous ne voulons avantager personne, vous partez donc ensemble. Daniel est parti à Anderlecht, et moi à Beveren « .

 » Le foot en souples passes courtes de nos Ivoiriens, c’est le foot champagne de l’Anderlecht des années 60 « 

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