Fleur d’Ecosse

Le médian belgo-marocain s’épanouit chez les Loups après avoir exhalé ses premiers parfums à Aberdeen.

Né à Anderlecht le 20 octobre 1980 et domicilié depuis toujours dans cette commune, il était écrit que Rachid Belabed y jouerait aussi au football .

« Je me suis affilié au RSCA en Préminimes à l’âge de huit ans », dit-il. « Même si je n’ai finalement pas percé au Parc Astrid, je n’en suis pas moins fier d’avoir porté pendant une bonne décennie le maillot anderlechtois. Aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours été champion dans toutes les catégories d’âge là-bas. Mais la période qui m’a le plus marqué, fut à coup sûr la campagne 1997-98, en Juniors UEFA. Cette saison-là, sous la conduite de Manu Ferrera, nous avions bouclé le championnat sans concéder la moindre défaite. J’occupais la place de demi défensif dans cette équipe, aux côtés de Yannick Vervalle, que j’ai retrouvé à La Louvière à présent, et de Gica Luchenko, actif à Lausanne. Le quatrième homme dans l’entrejeu n’était autre que Lukas Zelenka, qui joue au Sparta Prague actuellement. Devant, il y avait Tom Soetaers, notamment, devenu titulaire indiscutable au Roda JC Kerkrade. Que du beau monde, vraiment ».

Contrairement aux deux derniers cités, qui se virent offrir un contrat professionnel à cette époque, Rachid Belabed ne fut pas logé à la même enseigne.

« J’ai encore disputé une année au cours de laquelle j’espérais faire la jonction avec la Réserve », observe-t-il. « Mais je ne suis malheureusement jamais parvenu à entrer de plein pied dans ce groupe. En fin de saison, je me suis fait la réflexion qu’il valait mieux rebondir ailleurs au lieu d’attendre une chance hypothétique au Sporting. J’ai alors chargé mon manager, Jacques Lichtenstein, de sonder les possibilités et d’emblée le RWDM se montra intéressé. Il est vrai qu’avec les Mauves, j’avais livré par le passé un bon nombre de derbies contre ce club et que ces matches m’avaient souvent réussi. Je me suis d’autant plus vite lié au club molenbeekois qu’une place m’était immédiatement réservée dans le noyau de la Première, qui jouait à l’époque en D2 sous la direction d’ Ariel Jacobs« .

La collaboration entre les deux hommes ne fut toutefois que de courte durée. Car après trois mois à la rue Malis, Rachid Belabed prit déjà le chemin de l’Ecosse.

« La direction m’avait proposé un bail de longue durée », précise-t-il. « Mais je n’avais souhaité m’engager que pour une année, afin d’avoir une échappatoire au cas où je n’aurais pas trouvé chaussure à mon pied chez les Coalisés. Pour tout dire, j’ai eu très vite tous mes apaisements car le coach m’a eu immédiatement à la bonne et je fus titularisé directement en équipe fanion. De plus, il régnait franchement une ambiance fantastique dans le groupe. En octobre, mon homme de confiance m’avisa que mes débuts n’étaient pas passés inaperçus et que deux clubs, Aberdeen en Ecosse et le Willem II Tilburg aux Pays-Bas, étaient intéressés par mes services. Au départ, j’en pris bonne note, sans plus. Mais du côté de la direction, cette nouvelle n’était pas tombée dans l’oreille d’un sourd. Comme j’étais libre en fin de saison, le RWDM n’était pas du tout opposé à un transfert. Et, personnellement, je n’ étais pas contre non plus. Si mon choix s’est en définitive porté sur le club écossais, c’est parce que j’étais d’avis que le style de football, là-bas, correspondait plus à mon tempérament de battant que le jeu néerlandais, plus technique ».

Nuages gris

A 19 ans fraîchement sonnés, Rachid Belabed quitta donc le giron familial pour tenter la grande aventure au Royaume-Uni.

« Au début, la transition fut vraiment abrupte », narre-t-il. « Du jour au lendemain, j’étais livré complètement à moi-même. Je ne baragouinais que quelques mots d’anglais, appris à l’école, et je n’avais personne à qui me confier sur place, dans la mesure où j’étais le seul francophone du groupe. La ville d’Aberdeen n’était pas très folichonne non plus. En Ecosse, on la surnomme d’ailleurs The Granit City. Une référence à ses maisons grises que les nuages, toujours abondants là-bas, rendent encore plus tristes. Les premiers jours, en automne, j’ai dû m’accrocher. Je résidais dans un Bed and Breakfast » et je ne savais pas trop comment tuer le temps. Journellement, j’étais pendu au téléphone avec mes parents. Mais après deux semaines, la glace était brisée. J’ai découvert des gens extrêmement chaleureux et serviables. Et, ce qui ne gâte rien, j’ai eu tôt fait d’être le chouchou du public de Pittodrie Park. Je ne sais trop pourquoi mais ils se sont pris directement de sympathie pour moi. Sans doute appréciaient-ils ma combativité et mon souci de m’intégrer au plus vite. Car dès les fêtes de fin d’année, quelques semaines plus tard, je me tirais déjà d’affaire en anglais. Dès ce moment, j’ai d’ailleurs quitté mon lieu de résidence pour vivre seul dans un appartementdu centre-ville ».

Rachid Belabed n’est pas près d’oublier les deux ans et demi passés dans un club où il s’est pleinement épanoui.: « Pour un jeunot, qui avait encore tout à prouver au plus haut niveau, j’aurai quand même eu la satisfaction de jouer une soixantaine de matches, toutes compétitions confondues », précise-t-il. « Mes souvenirs les plus beaux, je les ai vécus en Coupe d’Ecosse ainsi qu’en Coupe de la Ligue, deux compétitions où nous étions arrivés en finale en 2000 et 2001. A ce stade-là, nous avions cependant chaque fois dû nous incliner: d’abord 2 à 0 contre le Celtic puis 4 à 0 face aux Rangers. Il n’empêche, c’était fabuleux de jouer à Hampden Park, une arène mythique là-bas, et je n’oublierai jamais non plus les ambiances effrénées à Parkhead, où joue le Celtic et à Ibrox, l’antre des Rangers. Chez nous, ce n’était pas mal non plus. Car les 12.000 spectateurs qui ralliaient notre stade faisaient au moins autant de bruit que les 65.000 du Celtic ».

Roberto Bisconti

Aberdeen, qui eut la main heureuse avec Rachid Belabed, le premier joueur francophone de son histoire, continua à exploiter cette veine.

« J’ai ouvert la voie à deux joueurs français », dit-il. « D’abord l’ancien Toulousain Eugène Dadi puis le Strasbourgeois Alex Di Rocco. Il y a un an, un Belge s’est ajouté: Roberto Bisconti, qui a pris ma place au centre de la ligne médiane. Il me restait un an de contrat là-bas mais malgré les bons moments que j’ai passés à Pittodrie Park, j’avoue que la Belgique commençait tout doucement à me manquer. Et j’étais sur le banc. J’ai joué 14 matches sur la saison. Quand j’ai su que La Louvière était intéressée par mes services et que j’avais la possibilité de revoir là-bas d’anciennes connaissances, comme l’entraîneur, Yannick Vervalle ou encore Alan Haydock avec qui j’avais joué au RWDM, je n’ai pas hésité. Et je suis heureux de ce choix, même si je n’oublierai jamais ce qu’Aberdeen m’a apporté au cours des 30 mois passés là-bas ».

Titulaire au poste de milieu récupérateur au Tivoli depuis le début de la saison, Rachid Belabed est confiant en l’avenir des Loups: « Notre situation actuelle ne reflète pas notre vraie valeur. D’ici peu, nous devrions nous extirper de la zone rouge et remonter vers la mi-classement, plus conforme à nos possibilités réelles. Ce sera chose faite quand les nouveaux venus, comme le Nigérian Ode Thompson, se seront à leur tour intégrés. Avec ma connaissance de l’anglais, je m’emploie à l’y aider. Même s’il sursaute parfois à l’écoute de mon accent écossais (il rit)« .

Bruno Govers

« J’ai été heureux à Granit City »

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