FACE AUX QUOTAS ET CLICHÉS SUR LES AFRICAINS

L’histoire des quotas (une idée veillant à réduire le nombre de binationaux en sélection de jeunes) lancé par le Directeur Technique National, François Blaquart et soutenue par l’ex-sélectioneur, Laurent Blanc vous avait particulièrement choqué. Près de quatre ans plus tard, quel regard portez-vous sur cette affaire ?

Monsieur Blaquart, qui est encore DTN à la Fédé, disait qu’il ne fallait pas excéder les 30 % de binationaux. Ce qui est intéressant, c’est de voir comment on a géré l’affaire Nabil Fekir (ndlr, joueur lyonnais d’origine algérienne) et comment on l’a séduit alors qu’il y a quelques années, des personnes à la fédé voulaient diminuer le nombre de binationaux.

Considérez-vous comme un échec le fait de se poser la question du choix de l’équipe nationale quand on a grandi toute sa vie en France, à l’image de Fekir ?

Pourquoi un échec ? Le fait qu’on se pose la question, c’est humain, c’est légitime. Pourquoi sans cesse cette suspicion sur l’amour véritable de la nation ? Aux autres, on ne pose pas la question, c’est beaucoup plus simple parce qu’ils sont 100 % je ne sais pas quoi…. Se poser la question du pays est légitime par rapport aux personnes que vous aimez le plus au monde : vos parents. Et cela n’a rien à voir avec l’intégration. Les choix qui nous gouvernent sont souvent dictés par le regard que nos parents vont porter sur nous. C’est pour ça que je suis toujours surpris car ça n’intervient jamais dans la réflexion. Et puis, vous inquiétez pas, j’ai été joueur de foot et je n’avais aucun doute que Fekir allait choisir la France. Le footballeur est un compétiteur, toute sa vie il a grandi dans cette idée-là, alors si tu as le choix de prendre la meilleure équipe, tu prends la meilleure équipe.

Votre ex-partenaire chez les Bleus, Willy Sagnol, a récemment fait une sortie qui a fait du bruit (ndlr, l’avantage du joueur africain, c’est un joueur pas cher prêt au combat… Mais le foot, c’est aussi de la technique, de l’intelligence, de la discipline. Il faut de tout. Des Nordiques aussi, c’est bien les Nordiques, ils ont une bonne mentalité). Quels sont les effets de ce type de déclaration ?

Cela renforce les préjugés qui existent dans notre société. Ça revient à dire que le joueur africain est costaud sans oser dire la suite…

Sagnol, ne voulait-il pas exprimer le fait que les joueurs africains ne sont pas aussi bien formés tactiquement à cause d’un manque de structure ?

Je réagis sur ce qu’il a dit et non pas sur ce qu’il aurait voulu dire. Et ce qui a été dit renforce les préjugés. Ce qui est intéressant, c’est qu’il a opposé les Africains et les Nordiques. Quand on analyse ses mots, c’est clair pour moi, même si certains ne veulent pas l’entendre. Certains vous diront même qu’aujourd’hui on ne peut plus rien dire. Alors que dans un passé pas si lointain, on pouvait, il est vrai, dire que les Noirs étaient cons, et d’autres injures sur les femmes et les homosexuels.

On évolue dans une bonne direction selon vous ?

En France, quand quelqu’un fait une sortie raciste, il y a de plus en plus de personnes qui montent au créneau. Et plus il y en aura, mieux on se portera. Ça voudra dire qu’on est attentifs à ne plus reproduire les schémas du passé.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire