Face au MUR

Le pilote est quasi obligé de s’imposer dans ce  » sommet  » de la saison belge.

Tenant du titre européen des rallyes, vainqueur à Ypres en 2002 et 2003, Bruno Thiry aborde le sommet de la saison belge dans un contexte délicat. Après deux abandons en Italie et en Bulgarie, il est quasi obligé de signer un gros résultat dans le Westhoek pour garder ses chances dans la course au titre. Une pression difficile à gérer ?

Bruno Thiry : L’expérience accumulée en une douzaine d’années au plus haut niveau me permet d’affronter ce genre de situation avec sérénité. Plus que le championnat, c’est la préparation de l’épreuve qui m’inquiète : je risque de prendre le départ sans avoir effectué les essais indispensables pour adapter ma monture au parcours.

Les spéciales yproises sont donc si spécifiques ?

Il suffit d’en parler aux pilotes étrangers qui les découvrent ! Ils se demandent ce qui leur a pris de s’engager dans un labyrinthe pareil où le repères sont difficiles à trouver tant le paysage est plat. Etroites, bordées de wateringues peu accueillants, les routes sont surtout très bosselées, ce qui pose de gros problèmes de réglages des suspensions. La motricité y est également capitale afin de négocier efficacement les relances en sortie de virages lents et les nombreux carrefours. Il y a un an, j’étais relax car je savais exactement quelles solutions techniques adopter sur la Peugeot 206 WRC. Avec la nouvelle Citroën C2 Super 1600, je pars d’une feuille blanche et j’aurais voulu dégrossir le travail lors d’une véritable séance de tests.

Et cela n’a pas été possible ?

Le team n’a pas obtenu les autorisations et a cherché jusqu’au dernier moment une autre base d’essai reproduisant les caractéristiques du Westhoek.

Le Championnat d’Europe étant désormais réservé aux petites Super 1600, tu as renoncé à une 4×4 WRC. Pas de regrets ?

Pourquoi en aurais-je ? Je conjugue métier et passion, je me sens parfaitement intégré chez Kronos et je me fais plaisir au volant. Si les tractions 1600cc souffrent dans les tronçons lents, sous les 70 km/h, en raison de leur manque de puissance, elles se révèlent par contre géniales à mener dans les passages rapides. Elles exigent un pilotage précis, tout en finesse. Pour faire des temps, il faut sans cesse flirter avec la limite, c’est très excitant. Et puis le bruit du moteur, super ! Un atmosphérique qui grimpe dans les tours, ça remue les tripes.

As-tu définitivement tourné le dos aux 4×4 ?

Je n’ai pas dit ça… Citroën Sport a confié à Kronos une Xsara WRC pour l’engager en Finlande aux mains de Juuso Pykälistö. Si on me la propose pour le rallye de Catalogne, je signe des deux mains. Je reste branché sur le championnat mondial grâce à Stéphane Prévot avec lequel je garde des liens privilégiés. Je suis devenu son supporter numéro 1, et par ricochet, celui de François Duval. Et je regrette sincèrement que Freddy Loix se retrouve dans un mauvais sketch. Mais personnellement, je n’ai pas le sentiment de régresser en disputant le titre européen sur une Super 1600.

4 points, c’est trop peu

Pourtant, le début de saison n’a pas répondu à tes attentes ?

Effectivement, si l’on s’en tient au seul bilan chiffré, mon actif actuel de 4 points ne peut pas me satisfaire puisque Luca Pedersoli en compte 28 et Simon Jean-Joseph 18. Cependant, au plan sportif, je suis étonné de l’évolution de la C2 par rapport à la Clio, référence de la catégorie. Je pensais être plus largué. En Bulgarie, je ne concédais qu’un ou deux dixièmes de seconde au kilomètre à Simon Jean-Joseph, c’est plutôt rassurant quand on sait que le développement de la Citroën débute alors que sa rivale bénéficie des enseignements accumulés depuis trois ans. En raffinant la mise au point, je dois réduire l’écart à néant. Il restera ensuite à inverser la tendance à mon avantage…

Venons-en au rallye d’Ypres. Dans quel état d’esprit l’abordes-tu ?

Je me pose plusieurs questions. La première concerne la compétitivité de ma voiture : je suis confiant mais je devrai attendre les premières spéciales pour être fixé. Ensuite, où situer les ténors du Groupe N, Patrick Snijers, Xavier Bouche et Chris Van Woensel ? S’il fait sec, ils devraient être derrière, mais en cas de pluie, ils disposeront d’un maître atout avec les 4 roues motrices de leurs Mitsubishi et Subaru. Autre interrogation : l’Italien Luca Pedersoli, leader du Championnat d’Europe après ses succès en Pologne et en Bulgarie, peut-il signer la passe de trois ? A mon avis, la réponse est non car la puissance de sa Peugeot 306 Maxi ne compensera pas sa méconnaissance des lieux. Simon Jean-Joseph sera-t-il plus dangereux ? Oui, certainement. Il s’adapte très vite à tous les terrains et bénéficie de l’expérience acquise en France sur certains tracés assez similaires, le Touquet notamment.

Au bout du compte, qui sont tes adversaires principaux ?

J’en pointe deux : Larry Cols et Pieter Tsjoen. Ce dernier connaît le tracé comme sa poche et a signé un excellent résultat au Saarland en Allemagne pour sa première sortie sur la Clio Super 1600. Quant à Larry, sa pointe de vitesse ne fait aucun doute. Il commet encore des erreurs mais rêve d’un gros résultat sur la Renault officielle. Et comme Jean-Joseph, il s’appuie sur des techniciens connaissant leur auto sur le bout des doigts qui corrigent directement le tir dès qu’ils constatent que les réglages sont inadaptés.

Es-tu logé à moins bonne enseigne chez Kronos ?

Non, la question n’est pas là. Je répète que la Citroën C2 est une voiture très jeune dont ingénieurs, mécanos et pilotes doivent découvrir toutes les facettes. Cela ne se fait pas en un jour.

Tu sembles comme un poisson dans l’eau au sein de ton team. Vraie ou fausse impression ?

L’ambiance y est géniale, et je pèse mes mots. Je tiens aussi à souligner la confiance qui s’est installée en quelques mois entre Kronos et Citroën Sport. J’évoquais plus haut la Xsara WRC engagée en Finlande : de nombreux teams étaient candidats mais l’usine a choisi la structure belge, c’est un signe.

Eric Faure

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