Etape intermédiaire

Pour le jeune Cinacien, Wevelgem est presque un passage obligé pour s’imposer en D1.

Il a fêté ses 22 ans ce mois-ci. Originaire de Ciney, où il joua jusqu’en Cadets, ce fils d’un boulanger très connu à Namur partit ensuite pour l’Ajax Team d’Ostende. Puis, ce fut Charleroi, qui le prêta d’abord une saison à Pepinster avant de l’inviter à poursuivre sa formation pendant trois ans dans le club satellite de Gilly. Il a donc fréquenté les écoles de jeunes des deux principaux clubs du pays pour se retrouver aujourd’hui à Wevelgem, lanterne rouge de la D1. D’aucuns diront que c’est mieux que la D2, où beaucoup échouent. Il est toujours lié à Charleroi, mais avec quel espoir de retour? Au-delà de son cas personnel, c’est toute la problématique des jeunes Belges qui est mise en exergue. Quel avenir leur réserve-t-on dans un championnat où, pour une question de talent dans le meilleur des cas ou de taxation dans le pire, on fait la part belle aux étrangers?

« Honnêtement, cela devient dur de s’imposer », reconnaît JulienDefossé. « Wevelgem est encore l’une des rares équipes, avec Pepinster, qui accorde une chance aux jeunes mais cela n’a pas empêché le club de tester plusieurs Croates pendant la trêve de l’équipe nationale. Des joueurs qui acceptent des contrats très bas, parce qu’ils n’ont rien d’autre, et qui coûtent aussi moins cher au club parce qu’ils sont moins taxés que les Belges. S’ajoute à cela le fait que les coaches n’osent pas trop lancer des jeunes, parce qu’ils sont liés à une obligation de résultats. Dès lors, beaucoup de Belges préfèrent chercher un emploi et arrondir, parfois grassement, leurs fins de mois en jouant en D2 plutôt que de devenir professionnel en D1. Ce n’est pas encore mon cas. J’ai décroché un graduat en informatique en juin, mais même si l’on me propose un travail, je préfère miser sur le basket. Pour l’instant, l’argent n’a pas d’importance. J’investis dans ma carrière ».

Et, pour viser plus haut, Wevelgem apparaît comme un passage presque obligé. « Pourquoi ai-je choisi Wevelgem alors que la plupart des joueurs sous contrat avec Charleroi ont été placés à Louvain? D’abord, parce que Wevelgem a été le plus prompt sur le ballon en m’adressant tout de suite une proposition. J’étais demandé alors qu’à Louvain, on est placé, presque contraint et forcé. En outre, Louvain disposait déjà de suffisamment d’ailiers de mon style. Wevelgem m’apparaissait comme ambitieux et m’offrait la garantie de bénéficier d’un temps de jeu intéressant ».

Un malentendu avec Van Kers

Mais Wevelgem a loupé son début de championnat. Et Julien Defossé, après des débuts encourageants, a sombré avec l’équipe lui aussi. Au point qu’il n’a pas été repris avec l’équipe nationale A’, en novembre. « Il y a eu un malentendu: je n’avais pas participé au stage de juin, parce que j’étais en stage à l’école, mais LucienVanKersschaever l’ignorait et a mal accepté mon absence. Tant pis: mon objectif n’est pas d’atteindre les A’, mais l’équipe nationale A. Je demeure persuadé d’avoir fait le bon choix en optant pour Wevelgem. Ce n’est peut-être pas perceptible dans l’immédiat, mais sur le long terme, cela devrait porter ses fruits. Ce club m’offre la possibilité de jouer en D1, c’est déjà beaucoup. Je manque encore d’expérience et d’explosivité. J’y travaille. Evidemment, Wevelgem ce n’est pas Charleroi. En voyant le nouveau Spiroudôme, je ressens un pincement au coeur. L’an passé, je jouais encore là-bas, dans ce qui était toujours la Coupole. Avec Gilly, mais parfois aussi avec les Spirous grâce à la double affiliation. Mes meilleurs souvenirs? Mon premier match européen, en Coupe Saporta, à Saratov dans le fin fond de la Russie. JacquesStas et DavidDesy étaient blessés, j’ai beaucoup joué ce soir-là. J’ai aussi participé à l’Euroligue, au Maccabi Tel Aviv notamment, et j’ai affronté des joueurs comme AntoineRigaudeau et StéphaneRisacher. J’aimerais revivre des moments comme ceux-là. Je suis seulement prêté à Wevelgem, pour une année avec option pour une saison supplémentaire, et j’espère toujours retourner un jour à Charleroi. Avec, au besoin, un passage par un autre échelonintermédiaire, du style de Mons par exemple ».

Pepinster, seule erreur d’aiguillage

Perspective réaliste? L’avenir l’apprendra, mais on découvre la difficulté des jeunes Belges à s’imposer en D1, et à plus forte raison dans un club à vocation européenne. Pourtant, Julien Defossé s’est farci le parcours du combattant pour arriver à ce niveau, au départ de son petit club de Ciney, où tout a débuté. « J’ai joué à Ciney jusqu’à 16 ans », se souvient-il. « Dans les équipes d’âge, avec quelques apparitions en D4. Je suis alors parti à Ostende. FransDeBoeck me connaissait car il coachait les sélections nationales de jeunes, où j’évoluais depuis mes 12 ans. J’ai été retenu pour l’Ajax Team après un tournoi de jeunes disputé à l’Arena Mister V. L’éloignement de la famille ne m’a pas posé de problèmes, car j’avais déjà vécu en internat au sport-études de Soignies. Mais il fallait être motivé pour suivre ce régime. Lever à 6 heures, entraînement de 6h3O à 7h30 avant d’aller à l’école, puis retour à l’entraînement à 13 heures. Cela a porté ses fruits: sur les huit joueurs qui étaient en dernière année Juniors, sept ont atteint la D1. C’est une belle réussite. L’Ajax Team a produit des joueurs comme DimitriLauwers et GerritMajor. Malheureusement pour ce genre d’initiative, l’arrêt Bosman est intervenu et MarkVanmoerkerke n’est plus là pour tout diriger. Le basket m’a aidé à m’épanouir. J’allais à l’école en néerlandais. C’était difficile au début, mais ce fut utile. Aujourd’hui, les gens de Wevelgem apprécient que je puisse leur adresser la parole dans leur langue. Je n’ai qu’un regret: celui d’être parti trop tôt à Pepinster. Ce fut ma seule erreur d’aiguillage. J’avais deux possibilités: soit rester à Ostende chez les jeunes, soit me lier à Charleroi, qui m’a fait miroiter la perspective de me placer dans un autre club de D1. J’ai opté pour la deuxième solution. A Pepinster, j’ai été utilisé comme distributeur. Etre meneur de jeu en D1, c’était une trop lourde responsabilité pour le gamin de 18 ans encore frêle que j’étais. C’était la première fois que je devais me mesurer à des adultes. Cela s’est mal passé. Si c’était à refaire, je serais resté à Ostende, en acceptant d’être parfois dixième homme comme BobMenama actuellement. Après une saison à Pepinster, Charleroi m’a placé à Gilly, son équipe satellite qui évolue en D2. C’est là que je me suis reconverti en ailier-shooteur. Gilly prépare-t-il les joueurs à évoluer à Charleroi? La façon de procéder est bonne. Avec FulvioBastianini, on travaille beaucoup les fondamentaux. C’est ce qu’il faut faire. Malheureusement, qu’on le veuille ou non, l’écart entre la D2 et Charleroi est trop grand. D’où l’idée de placer, cette année, quelques joueurs à Louvain. Une étape intermédiaire est indispensable. Et même en passant par là, cela reste difficile de s’imposer chez les Spirous. La preuve avec DimitriJorssen, qui est arrivé cette saison de Pepinster et qui joue très peu. Charleroi doit toujours gagner. Le club ne peut pas se permettre d’être patient et d’accepter des erreurs de jeunesse. J’ai vécu cela la saison dernière. Même lorsque l’équipe ne tournait pas, c’était dur d’obtenir une chance. Cela demeure une déception, mais pas un échec: j’estime avoir livré deux très bonnes saisons, tant sous le maillot de Charleroi que sous celui de Gilly en D2. J’aurais encore pu bénéficier de la double affiliation cette saison, mais j’estimais qu’il était préférable pour moi de jouer régulièrement en D1, dans un club plus modeste, plutôt qu’en D2 avec accessoirement des apparitions au plus haut niveau ».

Daniel Devos

« En voyant le nouveau Spiroudôme, je ressens un pincement au coeur »

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