Espagne, la finale du lendemain

Depuis trois semaines, j’ai un fou rire. Impossible de l’arrêter. Je repense sans cesse à la Hollande. Ridicule. Les Oranges ont trop le melon. Le talent ne suffit pas pour faire une grande équipe. La preuve avec l’Espagne. Et pourtant, elle a moins charmé parce que le moins charmant n’était pas là. Rien que pour ça, cet EURO, je l’aime.

Le roi de la cogne et de la gagne, le moins talentueux des siens était blessé. Et alors, c’est quoi le talent ? Eh bien, c’est CarlesPuyol. Rendre les autres meilleurs et tout gagner avec eux. Tellement que, même en tribune, il fait son effet. Que sans lui, GerardPiqué et SergioRamos n’ont fait que défendre. L’Espagne peut jouer sans attaquant spécifique mais pas sans défenseur spécifique. C’est aussi une des leçons de cet EURO. L’Espagne, c’est la victoire d’un système. Plus fort que tout. Plus fort qu’ AndreaPirlo noyé dans son (manque) de jus et dans la jugeote des Espagnols. Car c’est avant tout avec leur tête qu’ils raflent tout. Leur gestion des événements est phénoménale. Exemple : contre la France, il fallait seulement paraître sans trop le laisser apparaître. Ils ont déroulé pour arriver en finale pendant que les Italiens ont roulé pied au plancher pour finir cramés. Mais on se réjouit de la noblesse retrouvée des Italiens. Manque juste un peu de vécu.

Les Espagnols ne jouent pas les finales, ils les gagnent. Ils savent comment faire. Des 23 à l’EURO, 11 ont disputé et gagné celle de 2008 et le Mondial 2010. Sept ont joué les trois finales. Et à Kiev, DavidVilla et Puyol étaient en tribune. En fait, ce n’est pas une sélection, c’est une équipe. Qui vit aussi bien sur qu’en dehors des terrains. Et surtout, qui gère à merveille les différents régionalismes. Chaque année, début juillet, je suis en Espagne. Donc je sais que tous les deux ans, j’aurai droit à une grosse fiesta, une apothéose.

Grâce aussi à la TV espagnole. 10 heures de direct le jour de la finale. On a tout vu ! Quand Mondovision rend l’antenne, nous, on continue de voir. Après les bibises avec madame et les enfants, chaque joueur prend le drapeau de sa région. Sur les épaules ou autour des hanches. Et on fait des photos par petits groupes. Les Catalans, les Basques et les Madrilènes (les seuls avec le drapeau espagnol). On s’affiche mais on ne revendique rien. C’est franc, poli, joyeux. Pour une fois, la raison d’Etat oubliée, la déraison indépendantiste est rappelée mais elle s’affiche avec bonheur.

Et puis, histoire de mettre tout le monde d’accord, IkerCasillas et Xavi posent ensemble. Le capitaine du Real et celui du Barça. Tout est dit. La Liga peut commencer. Quoique la fiesta est loin d’être terminée. Ramos revient sur la pelouse avec une muleta et fait mine de toréer. 8.000 oléééés l’y encouragent. Même les Catalans qui m’entourent rigolent. Même pas une provoc d’un Andalou qui joue à Madrid vis-à-vis d’une région qui refuse la corrida. C’est l’union nationale. C’est le foot. Y a aussi Piqué qui pique ou plutôt découpe les filets. Sûrement un fan de basket. Et le lendemain même chose, huit heures de direct. Et la visite au Roi. On se croirait sur le terrain. L’homme ressemble souvent au joueur qu’il est. Après la photo officielle, le premier à aller au marquage de Son Altesse ? Sergio Ramos ! On lui a pas dit que Juan Carlos n’a jamais joué attaquant. Et Piqué, le premier à tailler la causette avec la femme du futur roi.

Et puis FernandoTorres, seul au milieu du bonheur. Pensif, l’air de se demander ce qu’il fait là mais, aussi, l’air heureux. Il a marqué en finale de CDM, finale de l’Euro et on a l’impression qu’il se demande s’il ne gêne pas. On comprend mieux ses problèmes à Chelsea. Et puis y a AndresIniesta qui sourit. La routine pour lui. La fin d’une saison de fous commencée le 10 août à Bari contre… l’Italie. 322 jours et 80 matches plus tard, même pas fatigués. Le foot espagnol n’a pas fini de régner.

Un foot qui n’a pas fini de régner.

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