Entre joie et tristesse

Bien lancé vers la Ligue des Champions, leader en championnat, le Sporting a perdu Jestrogoal pour de longs mois.

La victoire conquise mercredi dernier face au Wisla Cracovie aura un arrière-goût amer. D’abord, parce qu’après avoir eu la qualification pratiquement assurée à 3-0, le Sporting a stupidement concédé un penalty qui modifie considérablement la donne. Ensuite, et surtout, parce que son buteur NenadJestrovic s’est blessé pour longtemps.

Lorsque le buteur serbe quitta le terrain, personne û sauf peut-être le principal intéressé qui avait entendu un craquement û ne pensa que c’était aussi grave. On parla, dans un premier temps, d’une indisponibilité de deux à trois semaines. La résonance magnétique qu’il a passée le lendemain rendit un verdict bien plus alarmant : déchirure des ligaments croisés internes du genou gauche.

L’attaquant serbe ne reviendra pas avant le début 2004. Une catastrophe pour le club, pour l’intéressé et aussi pour HugoBroos, qui estime n’avoir pas d’équivalent dans son noyau.  » C’est à croire qu’à Anderlecht, je ne vivrai jamais une période sans connaître de problèmes « , se lamente- t-il.  » Alors que tout allait pour le mieux, que j’avais trouvé un dispositif qui fonctionnait et les éléments pour chaque place, voilà qu’une nouvelle tuile me tombe sur la tête. Nenad Jestrovic est un joueur qui, compte tenu de ses qualités, est difficile à remplacer. On n’en trouve pas 25 sur le marché qui ont un sens du but aussi aiguisé. En outre, on sait qu’un bon attaquant coûte toujours très cher « .

Anderlecht va-t-il prospecter le marché à la recherche d’un remplaçant ? En principe, pas directement. La direction n’est pas pressée, même si l’entraîneur verrait d’un bon £il l’arrivée d’un renfort.  » Actuellement, nous n’avons pas les moyens de réaliser un transfert onéreux « , affirme Hugo Broos.  » Mais, si nous accédons à la Ligue des Champions, nous disposerons sans doute de moyens plus importants et un attaquant supplémentaire ne serait, dans ce cas, pas superflu pour affronter les toutes grosses cylindrées « .

Quelles sont les solutions possibles ?

Bref, en ce qui concerne l’engagement d’un attaquant supplémentaire : ce sera oui si Anderlecht se qualifie la semaine prochaine en Pologne, non en cas contraire. Hugo Broos a-t-il déjà des noms en tête ?  » Pas précisément, mais nous disposons d’une cellule de scouting qui, je le suppose, n’a pas attendu la blessure de Nenad Jestrovic pour se mettre en action « . Pour ArounaKone, en tout cas, c’est trop tard : il a signé à Roda JC et, de toute façon, il ne répond pas au profil voulu pour remplacer l’infortuné Serbe.  » L’Ivoirien représentait surtout un pari sur l’avenir « , explique Hugo Broos.  » L’échange, un moment pressenti avec le Lierse, nous aurait permis d’acquérir un bon joueur pour le futur tout en résolvant le cas posé par GillesDeBilde « .

S’il faut se satisfaire d’une solution interne, quelles sont les possibilités ? D’abord, il y a celle utilisée en deuxième mi-temps contre le Wisla Cracovie : faire glisser Seol du flanc gauche vers l’attaque.  » Un duo Seol- Aruna en pointe tient la route « , estime le coach brabançon.  » Mais on déplace alors le problème dans le couloir : dans les circonstances présentes, je suis obligé de faire jouer ChristianWilhelmsson û un droitier û sur le flanc gauche. Je pourrais aussi y faire jouer MarcHendrikx. Mais, d’une part c’est aussi un droitier, et d’autre part il est sifflé par une partie du public avant qu’il n’ait touché le moindre ballon. Cela mine le moral du joueur et indirectement celui de l’équipe. Ce serait plus simple si je disposais de MartinKolar. Mais le jeune Tchèque souffre du genou et ne sera pas opérationnel avant trois semaines « .

Une autre possibilité est celle utilisée samedi à Gand : conserver Seol sur le flanc gauche, et confier à Christian Wilhelmsson le poste d’attaquant de pointe.  » Pour une premier essai, le Suédois s’est bien débrouillé devant « , concède Hugo Broos.  » En l’associant à Aruna Dindane, je disposais de deux attaquants très rapides. On a d’ailleurs eu le tort de spéculer un peu trop sur leur pointe de vitesse. L’expérience doit être considérée comme positive. Cela ne signifie pas qu’elle sera renouvelée pendant six mois « .

A part cela, que reste-t-il en réserve pour le poste d’attaquant ?

Gilles De Bilde ? Un retour en grâce semble exclu.  » Une décision a été prise à son sujet. Nous ne reviendrons pas en arrière. Pour moi, le chapitre est clos « , rétorque Hugo Broos.

OlegIachtchouk ? Pourquoi pas ? Il est d’ailleurs monté au jeu, avec un certain bonheur, en fin de match à Gand.  » Mais il n’a pratiquement plus joué depuis trois ans. Il manque forcément de rythme. En outre, ne risque- t-il pas de rechuter après toutes ses blessures ? On ne peut pas tout miser sur lui « .

IvicaMornar ? La porte, apparemment, ne serait pas fermée.  » Personnellement, je n’ai aucun problème avec lui « , affirme Hugo Broos.  » C’est surtout lui qui vit très mal le fait d’être considéré comme le quatrième attaquant. J’ai été clair avec lui : je lui ai expliqué que je disposais de Jestrovic, d’Aruna et de Seol, et qu’il devrait attendre son tour. Si l’on n’accepte pas de s’asseoir sur le banc, il ne faut pas signer pour Anderlecht. Même PärZetterberg l’a mieux compris qu’Ivica Mornar « . ( sic).

Fidèle au 4-4-2

Enfin, dernière option possible pour pourvoir à l’absence de Nenad Jestrovic, évoquée par une partie de la presse : Hugo Broos pourrait être enclin à modifier son système de jeu. Connaissant le personnage, ce serait étonnant. La saison dernière, il avait commis l’erreur de chercher pendant des mois un dispositif lui permettant d’intégrer tous les principaux joueurs du noyau. La machine n’a commencé à fonctionner que lorsqu’il a procédé de façon inverse : en partant d’office d’un 4-4-2, puis en remplissant les cases avec des noms de joueurs, quitte à faire des mécontents. La leçon a été retenue.  » Je répète ce que j’avais déclaré au départ de cette saison : je m’en tiendrai toujours au 4-4-2 en championnat et je ne ferai éventuellement une petite exception à la règle qu’en compétition européenne « .

L’exception, ce fut le match retour face au Rapid Bucarest. Et les modifications, apportées en dernière minute, ont failli tourner au cauchemar. Quelle mouche avait donc piqué Hugo Broos qui, après concertation avec FrankyVercauteren, décida subitement d’aligner Pär Zetterberg et WalterBaseggiodans un schéma tactique modifié ? Une option qu’il avait toujours écartée jusque-là.  » Franky et moi estimions tous les deux qu’en jouant comme d’habitude, nous risquions de rencontrer un problème face aux Roumains : avec leur défense à cinq, ils risquaient de neutraliser Walter Baseggio. La présence de Pär Zetterberg apportait un élément créatif supplémentaire. Je dois reconnaître qu’en première mi-temps, cela n’a pas bien fonctionné. Mais la critique est toujours facile après coup « .

Avec le recul, on peut se dire que l’erreur ne fut pas d’avoir aligné le Suédois, bien sûr, mais de l’avoir fait en lieu et place de GoranLovre, en maintenant BesnikHasi dans l’équipe. Dans ce dispositif, Baseggio, Zetterberg et Hasi se sont marchés sur les pieds au centre du terrain, alors qu’Aruna Dindane devait délaisser son poste d’attaquant de pointe pour occuper le couloir droit, laissé vide par l’éviction de Lovre.  » J’avais besoin de Besnik Hasi afin de conserver un élément à vocation défensive dans l’entrejeu « , se défend Hugo Broos.  » Et, s’il est vrai que j’avais demandé à Aruna Dindane de combler le couloir droit, cela n’aurait pas dû poser de problèmes : à Bruges, on procède aussi de cette manière, avec le succès que l’on sait « .

Deux Suédois ou pas du tout

Il n’empêche : c’est l’entrée au jeu de Christian Wilhelmsson qui fut décisive. Avec lui, le Sporting disposa à nouveau d’un véritable ailier, tout en conservant deux attaquants de pointe. L’équipe était mieux équilibrée. Bref, on serait tenté de dire : Zetterberg, oui, mais avec Wilhelmsson. Deux Suédois ou pas du tout, en quelque sorte.

 » Là encore, c’est un jugement prématuré « , estime Hugo Broos.  » Face à l’Antwerp, en championnat quatre jours plus tard, j’ai renouvelé l’expérience. Et pourtant, elle ne fut pas concluante : dans le même dispositif et avec les mêmes joueurs, nous n’avons pas du tout reproduit la même prestation qu’en deuxième mi-temps contre le Rapid Bucarest. Heureusement, la victoire a sauvé les apparences « .

Face au Wisla Cracovie, Hugo Broos en est donc revenu à ce qu’il faut bien considérer û ne lui en déplaise û comme son équipe-type : avec Lovre à droite, Seol à gauche, Hasi en demi défensif et Baseggio en demi offensif. Et donc, forcément, Zetterberg sur le banc. Avec le succès que l’on sait : le Sporting a livré une grande prestation contre les Polonais. De quoi apporter de l’eau au moulin du coach brabançon qui, depuis le départ, estime que Walt et le Suédois ne sont pas faits pour cohabiter sur le terrain ?  » Là, je vous arrête immédiatement « , corrige Hugo Broos.  » Je n’ai jamais déclaré que ces deux joueurs ne pouvaient pas jouer ensemble. J’ai simplement déclaré qu’ils ne pouvaient pas toujours jouer ensemble. Le toujours est important. Quand pouvaient-ils cohabiter ? Contre l’Antwerp, par exemple « .

Face au Wisla Cracovie, Hugo Broos a pris ses responsabilités et la tournure des événements lui a donné raison. Mais quelles auraient été les réactions en cas de résultat défavorable ? Jusqu’à quel point la pression du public et d’une partie de la presse, voire du président RogerVandenStock, pour qu’il aligne le Suédois, estûelle susceptible d’empoisonner la viede l’entraîneur ?  » J’ai expliqué mon point de vue au président « , assure Hugo Broos.  » Il lui arrive, c’est vrai, de me demander pourquoi Pär Zetterberg ne jouait pas plus souvent. Mais cela ne va pas au-delà. Le joueur, lui, se comporte de façon très professionnelle. Il ne s’est jamais répondu en déclarations fracassantes et n’a jamais essayé de semer la zizanie dans le groupe. Certes, en son for intérieur, il râle, mais le contraire serait anormal. S’il acceptait sa situation de réserviste avec le sourire, cela signifierait qu’il est revenu au Parc Astrid pour vivre une fin de carrière dorée et se remplir une dernière fois les poches. Ce n’est pas le cas, heureusement : il est toujours ambitieux et c’est très bien ainsi. J’ai plus de difficultés à accepter la cette polémique alimentée par la presse. Depuis la reprise des entraînements, il n’y a que deux noms de joueurs qui sont apparus dans les journaux : Pär Zetterberg et Walter Baseggio. Comme s’il n’y avait que deux joueurs à Anderlecht. J’ai expliqué au Suédois les raisons de mon choix avant le match face au Wisla Cracovie. Je ne reviendrai pas là-dessus. Pour moi, le chapitre est clos « .

 » On engagera éventuellement un remplaçant pour Jestrovic si l’on se qualifie pour la Ligue des Champions « 

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