En vacances toute l’année

Pierre Danvoye
Pierre Danvoye Pierre Danvoye est journaliste pour Sport/Foot Magazine.

L’entraîneur des Loups est de plus en plus surpris par la sympathie que dégage son club.

Les joueurs de La Louvière ont repris l’entraînement dans la bonne humeur et sur un ton ludique, samedi dernier. « Nous avons directement recommencé avec ballon », explique Daniel Leclercq. « Je ne voulais pas leur imposer dès le premier jour un jogging à un rythme fou et leur donner l’impression qu’ils ne pourraient pas tenir le coup ».

Depuis lundi, les Loups sont en stage à Liévin. Et là, c’est tout différent. « Maintenant, ils dégustent », sourit l’entraîneur français. « C’est le prix à payer pour être performant dès le premier match de championnat ».

La saison de Daniel Leclercq a recommencé depuis plusieurs semaines déjà. Sa rutilante Jaguar, cadeau du président Gaone, était sur le parking du Tivoli chaque matin dès 7h30. L’homme a une conception bien à lui des vacances.

Daniel Leclercq: Je suis en vacances toute l’année. Je ne pense pas au foot 24 heures sur 24 car on ne peut pas être totalement performant si on n’a que son métier à l’esprit. Quand je rentre à la maison, je coupe complètement. Cela me permet de ne pas vivre continuellement sous pression. J’ai terriblement besoin de moments de liberté, de décompression. Je n’étais pas sur les genoux quand le championnat s’est terminé. Je n’ai pas eu besoin d’une cure de sommeil (il rit). J’ai joué au tennis, j’ai fait des balades en VTT, je suis allé voir des matches de jeunes et je suis parti avec ma famille dans le Midi de la France. J’ai retrouvé avec énormément de plaisir un petit village que je fréquentais quand je jouais à Marseille. J’y ai toujours mes amis. Je les ai défiés à la pétanque. Mais pas au Pastis, parce qu’à ce jeu-là, je n’avais aucune chance…

On vous a vu souvent au stade durant l’été.

Je suis venu presque tous les jours. C’est la preuve que je ne considère pas mon métier comme une corvée. Plus la reprise des entraînements approchait, plus tôt j’arrivais ici et plus j’étais impatient. Je venais toujours avec la même bonne humeur, car les gens de La Louvière me mettent véritablement de bonne humeur. Le climat qui règne dans ce club est vraiment exceptionnel. Je vois des sourires partout et c’est la meilleure façon de commencer une journée. C’est grâce à cela que je peux me lever dès 5h15 sans ressentir aucune fatigue. Et on avale facilement des centaines de kilomètres quand on sait qu’on va trouver des gens sympathiques. Jean-Jacques Goldman m’accompagne dans la voiture et le trajet ne me semble jamais long.

Quelle a été votre plus grande satisfaction, la saison dernière?

Nous avons parfaitement concrétisé l’objectif à atteindre. Je retiens l’euphorie qui a suivi notre sauvetage, à Gand. Mais aussi une excellente collaboration avec tout le staff technique, Jean-Claude Verbist et le président. Ces deux hommes ont toujours été aux petits soins pour moi. C’est important de se sentir soutenu. Il y a évidemment eu des moments plus difficiles, mais j’ai toujours tout pris sur moi pour éviter de décourager les joueurs et les gens du club.

Pourquoi estimez-vous que le sauvetage de La Louvière était plus beau que le titre avec Lens?

Parce que j’avais eu moins de mérite à conduire Lens au titre. Là-bas, je connaissais les joueurs et tout le club. J’avais bâti moi-même l’effectif. Lors de la conférence de presse d’avant-saison, le président avait déclaré que le maintien était le seul objectif de Lens. Moi, j’étais persuadé dès le départ que nous pouvions nous qualifier pour une coupe d’Europe. Nous avons fait encore mieux, mais j’avais le matériel humain pour y parvenir. Le groupe avait parfaitement adhéré à mes idées et c’est ce qui nous avait permis de dépasser nos objectifs.

Le sauvetage de La Louvière m’a rendu encore plus heureux car la mission était méchamment plus ardue. Où est le plaisir pour l’entraîneur dont les joueurs s’imposent par huit ou neuf buts d’écart? Personne ne nous a fait de cadeau au deuxième tour. Lors de chaque match, j’ai constaté un vrai respect vis-à-vis de La Louvière.

Quel classement auriez-vous pu atteindre si vous étiez arrivé dès le début de la saison?

Il n’est pas simple de répondre… Nous n’aurions déjà pas pu tenir le même rythme durant tout un championnat. Pendant une demi-saison, mon équipe a été à la limite de la rupture. C’est une des leçons que nous avons tirées de notre aventure commune. Nous en avons tenu compte dans le recrutement, en faisant venir des joueurs capables de tirer encore un peu plus l’ensemble vers le haut. Ceux qui ont participé au sauvetage auront une pression supplémentaire. C’est un élément à ne pas négliger. Pour répondre à l’attente, nous devrons confirmer notre état d’esprit, affirmer encore un peu plus notre prétention dans le jeu, toucher encore mieux le ballon, renforcer la notion de plaisir (qui n’est complète qu’en cas de victoires répétées) et viser une plus grande constance. Si tout le monde adhère, La Louvière ne peut que progresser. Mais confirmer le maintien sera aussi difficile que la saison de confirmation que j’ai connue avec Lens, après le titre.

Vous aviez exprimé deux conditions pour rester à La Louvière: les infrastructures devaient être améliorées et vous demandiez des renforts. Avez-vous obtenu ce que vous souhaitiez?

Je ne peux pas me plaindre. Notre complexe d’entraînement devient très intéressant. La commune nous a aménagé un terrain synthétique parfait. Le terrain 2 a été amélioré et nous aurons bientôt une autre pelouse d’entraînement très valable. Tout a été cadenassé. C’est vraiment un très bel espace de foot.

Pour ce qui est du recrutement, j’ai été frappé par une constante dans les négociations : ce club dégage un incroyable courant de sympathie. Aucun de nos renforts ne s’est fait tirer l’oreille. Ils ont tous été réceptifs dès le premier contact. Je connais Djim (Charleroi) et Suray (Beveren). Dias (Charleroi) aussi, car je l’ai eu sous mes ordres au centre de formation de Lens. Par contre, je ne sais pas grand-chose de Karagiannis (GBA), Tidman (Gand), Lecomte (Charleroi), Endo (Malines) et Di Franco (Mouscron).

Le transfert d’Endo a surpris car il ne s’est pas imposé à Malines.

Il fallait aller vite pour réaliser ce transfert. Le président et le manager ont eu l’opportunité de le faire venir au moment où j’étais en vacances. Je leur ai dit de foncer s’ils avaient de bons rapports sur ce joueur. Je tiens toujours compte des commentaires venant de personnes autorisées. Je ne connaissais pas non plus le jeune Di Franco. Mais on m’en a dit le plus grand bien: il est doué et passionné, et il vit dans un entourage très sain. Je vais le prendre sous mon aile, j’en fais une affaire personnelle.

Le revers de la médaille, ce sont tous les joueurs que le club a expédiés dans le noyau B!

Je ne peux pas travailler avec un groupe de 40 joueurs. Si nous les avons écartés, c’est parce que nous avions des raisons de le faire. Cette décision peut s’expliquer par un niveau footballistique insuffisant, une mentalité qui laisse à désirer ou encore un problème physique. C’est chaque fois un déchirement, je n’ai pas sauté sur les tables le jour où j’ai donné les noms de ceux dont je ne n’ai plus besoin. C’est la vie. Même si nous ne comptons plus sur ces joueurs, nous n’oublierons pas ce qu’ils ont fait pour le club. Et nous leur souhaitons beaucoup de réussite ailleurs. A eux de comprendre qu’ils seront mieux dans un autre environnement. Moi, si on ne me promettait qu’une place sur le banc, je ne m’obstinerais pas: j’irais voir ailleurs. Je veux arriver à un groupe de 22 joueurs, avec les trois gardiens.

Le courant ne passe apparemment pas entre Simundza et vous. Pourquoi?

Ce joueur a commis une erreur professionnelle très grave en ne se présentant pas au premier entraînement. Il avait apparemment des raisons privées, mais il devait être au rassemblement, point à la ligne. Son comportement est inacceptable. Je ne le raye pas définitivement, mais je vais devoir réfléchir. J’exige de tous mes joueurs qu’ils soient concentrés à 100% sur le défi louviérois et je ne supporte pas que certains ne considèrent ce club que comme un tremplin. D’un point de vue purement sportif, je n’ai pas grand-chose à reprocher à Simundza. Il a des qualités de buteur. Je voudrais toutefois qu’il s’engage plus dans les duels. On voit qu’il a longtemps évolué dans des championnats trop conciliants, où il ne fallait pas mettre le pied de la première à la dernière minute.

Comment avez-vous accueilli la décision de Didier Xhardez? Son analyse du football professionnel est étonnante.

Elle n’est pas étonnante mais réaliste! Sa décision s’explique aussi par une raison qui n’a rien à voir avec le foot: il a accompagné son grand-père jusqu’au dernier jour et lui avait promis de faire quelque chose pour les personnes âgées. Il va vendre du matériel médical aux maisons de retraite notamment, ce sera sa façon d’honorer la promesse qu’il avait faite à ce vieil homme. Didier nous manque déjà car il a une profondeur d’âme extraordinaire. Il n’a pas quitté La Louvière pour l’argent, cela mérite encore plus notre respect. Sur le fond, je ne peux pas lui donner tort car j’ai les mêmes griefs que lui par rapport au football belge. Simplement, je sais prendre plus de distance et c’est pour cela que je suis toujours en Belgique.

La Louvière ne possède aujourd’hui qu’un seul gardien d’expérience et il a été étiqueté numéro 3: n’est-ce pas dangereux?

Tidman et Proto ont toute ma confiance. Lecomte a été transféré en tout premier lieu comme préparateur des gardiens. Il n’y a pas à remettre en question son statut de numéro 3. Je lui ai demandé de faire de Tidman un des meilleurs gardiens suédois, et de Proto un des meilleurs Belges. En désignant Lecomte comme troisième homme, j’enlève une partie de la pression qui pourrait peser sur les épaules des deux autres. Je connais Proto et j’ai reçu de très bons rapports concernant Tidman. Leur manque de vécu en D1 pourrait être un handicap, mais j’ai un bon pressentiment et je compte sur eux.

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Pierre Danvoye

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