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En quête de la Terre Promise

La NBA reprend ses droits mardi soir. Tous les regards sont tournés vers LeBron James et sa nouvelle équipe, les LA Lakers. Est-il capable de lui rendre sa gloire d’antan ? Que vont faire les nouvelles vedettes et équipes de NBA ? Présentation, sur base de quatre thèmes.

1. Le nouveau royaume du King

 » LeBron James, quadruple MVP, All Star à 14 reprises, double médaille d’or olympique, a signé un contrat de quatre ans, d’une valeur de 154 millions de dollars, aux Los Angeles Lakers.  » Le 1er juillet, le premier jour de la période free agent, il n’a pas donné de conférence de presse ni de party holywoodienne, se contentant d’annoncer son transfert attendu par un communiqué. Sciemment, pour ne pas accroître encore un peu plus la pression et pour éviter toute controverse, comme lors de la Décision I, en 2010, lors de son passage de Cleveland à Miami. Et aussi, selon certains commentateurs, pour copier Michael Jordan. En 1995, celui-ci avait en effet annoncé son premier come-back très platement :  » I’m back.  »

LeBron James veut toujours dépasser Michael Jordan, le plus grand de tous les temps.

James veut toujours dépasser Jordan, le plus grand de tous les temps. Pour devenir un GOAT. Pour y parvenir, il doit conduire les LA Lakers, champions à seize reprises mais en plein désert, sans même de participation aux play-offs depuis cinq ans, à la Terre Promise, pour reprendre les termes bibliques du président des Lakers, l’ancienne star Magic Johnson. Il serait alors le troisième joueur et la seule vedette à avoir enlevé un titre NBA avec trois clubs (après Miami et Cleveland).

Il y a peu de chances que The King remonte sur son trône au bout d’une saison. L’ambitieux James a en effet prôné la patience lors du media day, disant qu’avec l’équipe actuelle, il pouvait tout au plus viser une qualification pour les play-offs. La deuxième star qui devait l’accompagner en Californie (voir le thème quatre) n’est pas arrivée. Donc, LBJ doit se débrouiller avec un mix de jeunes prometteurs tels que Lonzo Ball, Kyle Kuzma et Brandon Ingram – que les observateurs dépeignent comme le nouveau Scottie Pippen, le bras droit de Jordan à l’époque – et de vétérans comme Rajon Rondo, JaVale McGee, Lance Stephenson et Michael Beasley. LeBron a qualifié le quatuor de MUD, l’acronime de misunderstood (mal compris), under-appreciated (sous-estimé) et determined (déterminé). De fait, ils ne manquent pas de tempérament. Rondo et Stephenson se sont d’ailleurs déjà disputés avec James dans le passé.

Tout dépendra de la vitesse avec laquelle la mayonnaise de ce noyau bizarre prendra. L’équipe devra surtout miser sur un up tempo game avec beaucoup de fast breaks pour camoufler ses faiblesses défensives et son manque de gabarit et de puissance. Une chose est certaine : même si les Lakers ne gagnent pas souvent, ils offriront du spectacle. Durant la pré-saison, James a prouvé qu’à 34 ans, il n’avait rien perdu de ses qualités et qu’il pouvait s’adapter à n’importe quel rythme, à n’importe quel style de jeu.

L’été prochain, les Lakers, qui ont encore une marge avant d’atteindre le plafond salarial, veulent engager un second gros poisson. La rumeur fait état de Kawhi Leonard (voir point 4), d’ Anthony Davis (New Orleans), qui vient de rejoindre le manager de James, et même de Kevin Durant (Golden State).

La machine médiatique est en branle. Les journalistes de Los Angeles et de toute l’Amérique ont fait le siège de la Californie pendant la préparation, à l’affût du moindre geste, de la moindre déclaration de James.  » We’re going to have a LeBron-a-thon. All LeBron, all the time « , a déclaré Fred Roggin, journaliste de la chaîne KNBC.

The King aime cette répartie car il se bâtit un second royaume, à côté du basket : à Hollywood. Sa SpringHill Entertainment Company a déjà produit différents programmes TV et James vient d’annoncer qu’en 2019, il occuperait le premier rôle de Space Jam 2, la suite du légendaire film sur le basket en 1996, avec un certain Michael Jordan dans le rôle principal…

2. Les Warriors, encore invincibles ?

Le troisième sacre en quatre ans des Golden State Warriors, en juin, n’a surpris personne. Ils alignent le Fab Four Kevin Durant, Stephen Curry, Klay Thompson et Draymond Green. Mais nul ne s’attendait à ce qu’en juillet, le club agrandisse encore le fossé qui le sépare des autres. Le Golden State a en effet enrôlé DeMarcus Cousins, un des centres les plus dominateurs de NBA. À la demande du joueur, en sus. En janvier, Cousins s’est déchiré le tendon d’Achille, il n’a pas obtenu de max contrat à la Nouvelle-Orléans et a donc décidé de signer pour une saison chez le champion en titre, pour cinq petits millions de dollars.

À l’issue de sa longue revalidation, Cousins réapparaîtra probablement en fin d’année. S’il retrouve son ancien niveau et parvient à s’intégrer au système de Steve Kerr, comme passeur et spécialiste des longs tirs, la machine de guerre des Warriors disposera d’une arme supplémentaire. On connaîtra alors l’identité du champion avant même le début des play-offs.

À moins que le Golden State ne soit battu par l’adversaire qui l’a fait vaciller plus souvent que prévu la saison passée : l’ennui. Au grand désappointement de Kerr. Dans les play-offs, cette nonchalance a failli coûter sa qualification à l’équipe face à Houston, qui avait achevé le championnat régulier en tête, grâce à son nouveau duo, plus performant que prévu et formé par James Harden, élu MVP, et Chris Paul. Les Rockets ont craqué le code du Golden State, en aménageant leur défense. Puis Chris Paul s’est blessé et les Warriors, pourtant privés d’un joueur décisif, Andre Iguodala, ont scellé le sort d’Houston (4-3), avant de massacrer les Cleveland Cavaliers en finale.

Réveillés par l’arrivée de Cousin, un brin dérangé mais toujours joyeux, les Warriors devraient se défaire de leur ennui. Les contrats de Kevin Durant et de Klay Thompson, qui arrivent à échéance, peuvent servir de divertissement. Les analystes spéculent déjà sur un départ de KD, en quête d’un nouveau défi. Vers la Terre Promise des Lakers ? Ou peut-être sur un autre gros marché, New York, où les Knicks rêvent depuis une éternité d’embaucher une super star.

Si les Warriors perdent des plumes, les Rockets semblent prêts à les saisir, dans la Western Conference. Reste à savoir si Houston a pu compenser le départ de Luc Mbah a Moute et Trevor Ariza, cruciaux dans le démantèlement de l’attaque des Warriors. Ils ont été remplacés par Carmelo Anthony, qui n’a jamais trouvé ses marques à Oklahoma City, au rang de numéro trois et d’éternel égoïste, aux côtés de Russell Westbrook et Paul George. Mauvais défenseur, va-t-il s’adapter, cette fois, aux côtés de deux joueurs aussi dominants avec le ballon que Harden et Paul ? Va-t-il se muer en Olympic Melo, le rôle qu’il a tenu au sein du Dream Team lors des derniers Jeux Olympiques. Anthony avait surtout marqué des trois-points. Or, c’est la spécialité des Rockets.

3. Les nouveaux rois de l’Est

L’année passée, la première soirée a d’emblée fourni la scène la plus atroce de la saison : Gordon Hayward, le nouveau joueur de Boston, s’est cassé la jambe en deux. Un scénario d’horreur pour les Celtics, qui ont encore perdu leur autre star, Kyrie Irving, touché au genou, en fin de saison. C’eût été fatal à beaucoup d’équipes mais pas à Boston : ce forfait a permis à des jeunes comme Jayson Tatum (20), Jaylen Brown (21) et Terry Rozier (24) de s’ériger en joueurs-clefs. Les Celtics ont même disputé la finale de l’Eastern Conference et sans un LeBron James divin, Cleveland ne les aurait peut-être pas battus en sept manches.

Kawhi Leonard
Kawhi Leonard© BELGAIMAGE

Quatre mois plus tard, Hayward et Irving sont quasi prêts. Adjoindre deux All Stars à une équipe qui a loupé de peu la finale de NBA revient à s’assurer le succès, d’autant que James a rejoint la Western Conference. Il y a quand même un point d’interrogation : dans quelle mesure le retour de Hayward et d’Irving va-t-il freiner l’épanouissement de Tatum et de Brown ? Ceux-ci vont-ils accepter de jouer moins ?

D’un autre côté, le génie qu’est Brad Stevens, considéré comme le meilleur coach de NBA après Gregg Popovich, a l’art de souder un groupe, défensivement et offensivement. Gordon Hayward est un caméléon, il s’adapte à tout et le reste de l’équipe est intact. Il y a notamment l’énergique Marcus Smart. Kyrie Irving a déclaré que l’année prochaine, freeagent, il resignerait, ce qui désamorce une bombe possible.

Si une équipe de l’Eastern Conference possède un noyau suffisamment étoffé pour rendre la vie dure au Golden State dans une éventuelle finale, c’est bien Boston. Dans l’enquête menée auprès des general managers des trente clubs de NBA, les Celtics ont obtenu 7 %, comme les Houston Rockets. Évidemment, c’est quelque 80 % de moins que les Warriors… Mais il y a un an, ils se détachaient encore plus avec 93 % des suffrages.

Boston devra se jouer des Philadelphia 76’ers, sur la route de la finale. Il leur manquait une pointure en demi-finale de l’Est face aux Celtics mais ils ont probablement comblé ce retard en été : le centre Joel Embiid (24) et le distributeur Ben Simmons (22) vont briller de tout leur éclat cette année. En plus, les 76’ers ont une nouvelle étoile potentielle : Markelle Fultz (20), le numéro un du draft 2017, qui a raté 68 des 82 matches la saison passée suite à une blessure à l’épaule et des problèmes mentaux. Il a toutefois beaucoup travaillé sa technique de tir cet été. Ce n’était pas du luxe puisque la saison passée, il n’a quasiment pas marqué de trois-points. Cette technique, avec son explosivité, lui permet de former avec les athlétiques Embiid et Simmons un trio capable de balayer beaucoup d’équipes sur le plan physique.

Ce sera certainement le cas en Eastern Conference, même si Toronto peut devenir un concurrent (voir point suivant). A moins que Giannis The Greek Freak Antetokounmpo, remodelé par le nouvel entraîneur, Mike Budenholzer, ne propulse les Milwaukee Bucks dans le top trois. L’année dernière, à 23 ans à peine, il était sixième au classement MVP. Beaucoup de spécialistes pensent que le prodige grec va devenir intenable, maintenant qu’il a perfectionné ses trois-points.

4. Le rire de Kawhi Leonard

Le gif du souriant Kawhi Leonard (27) lors du media day des Toronto Raptors a fait le buzz sur les réseaux sociaux. Le rire de la plus grande énigme de NBA, le sérieux personnifié, est en effet exceptionnel. D’autant que Leonard se produit pour un club qui ne figurait pas sur sa liste. Il y a un an encore, il était même impensable qu’il quitte un jour San Antonio, dont il était la nouvelle figure de proue, dans l’ère post- Tim Duncan.

Leonard, un des cinq meilleurs joueurs de NBA, a alors été victime d’une mystérieuse blessure au quadriceps, qui l’a écarté des terrains presque toute la saison et qui a provoqué des frictions entre le joueur, la direction, les entraîneurs et le staff médical de San Antonio, qui est pourtant une oasis de tranquillité. Finalement, Kawhi a demandé à partir, de préférence à Los Angeles, sa ville natale, aux Lakers ou aux Clippers. San Antonio s’est révélé très dur et a négocié avec les Toronto Raptors : Leonard allait au Canada et DeMar DeRozan rejoignait le Texas. The Claw – son surnom, qu’il doit à ses mains énormes- s’est empressé de déclarer qu’il ne resterait qu’une saison pour retourner à sa terre Promise, Los Angeles, en 2019, en tant que free agent.

D’ici là, Leonard, parfaitement rétabli, devra se contenter de Toronto. Il va devoir y montrer pourquoi on le considère comme le meilleur joueur two way de NBA, un élément qui mêle aisément attaque et défense. Il débarque dans une équipe qui a emmené le classement de l’Eastern Conference la saison passée mais s’est ensuite heurtée à LeBron James, en demi-finale des play-offs.

Les Raptors espèrent conserver leur futur joueur libre s’ils réussissent leur campagne, sous la direction de Nick Nurse, l’ancien entraîneur d’Ostende. Après tout, l’été dernier, Oklahoma City Thunder a bien réussi à convaincre Paul George de rester avec son copain Russell Westbrook alors qu’il avait une proposition des Lakers.

San Antonio a la gueule de bois et entame une nouvelle ère, puisque sa figure de proue, Manu Ginobili, a pris sa retraite en août et qu’une autre icône, Tony Parker, a rejoint les Charlotte Hornets. Gregg Popovich doit maintenant former un nouveau duo d’attaque avec DeMar DeRozan et LaMarcus Aldridge, la star qui est restée, s’il veut conserver le record de 21 saisons d’affilée avec plus de victoires que de défaites.

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