« Emile n’est pas à vendre! »

Rudi Assauer, le manager de Schalke, imagine très bien les quatre Belges ensemble dans l’équipe.

Le Parkstadion a vécu. Le stade où se produisait Schalke 04, imposant mais vétuste, va céder la place à un bijou technologique (l’Arena) dont l’inauguration aura lieu en août prochain. Un match contre le rival de la Ruhr, Dortmund, ne sera qu’un grand moment d’un programme copieux. Gerhard Schröder, Sepp Blatter, Lennart Johansson et d’autres personnalités ont confirmé leur présence.

Les Allemands estiment que l’Arena sera le stade le plus moderne d’Europe avec ses dimensions impressionnantes (225 x 187 mètres), ses 62.000 places (plus de 40.000 abonnements pour la saison prochaine ont déjà été vendus), son toit et sa pelouse escamotables, etc. Outre les matches de Schalke 04, il accueillera des concerts, des combats de boxe, des tournois de tennis ou encore des… rassemblements religieux. Coût des travaux: 7 milliards de francs!

Des dizaines de grues, de bulldozers et de camions sont en action pour préparer les abords et de nouveaux terrains d’entraînement, à quelques mètres de la pelouse où le noyau de Schalke a repris le travail en attendant le retour de certains internationaux, dont des Belges qui ont rejoint le groupe samedi dernier, en stage à Halle.

Huub Stevens, dont les supporters réclamaient le départ il y a un an, est redevenu un héros à Gelsenkirchen. Il est dans la Ruhr depuis octobre 96 et travaille aujourd’hui sur la base d’un contrat à durée indéterminée, résiliable chaque année par les deux parties sans dédommagement financier. Si l’entraîneur hollandais est à nouveau l’idole de tous les supporters, c’est grâce au fabuleux parcours de son équipe, la saison dernière: Schalke a terminé deuxième en championnat (avec la meilleure attaque et la meilleure défense) et gagné la Coupe d’Allemagne. Ce club va disputer la première Ligue des Champions de son histoire.

Pour faire bonne figure dans cette épreuve, le club a frappé fort sur le marché des transferts. L’arrivée de Sven Vermant et le retour de Marc Wilmots portent à quatorze le nombre d’internationaux de l’effectif. Nico Van Kerckhoven sort d’une bonne saison et Emile Mpenza a véritablement explosé. A Gelsenkirchen, on compte énormément sur les quatre Diables Rouges.

Un colossal cigare à la bouche, Rudi Assauer, le manager de Schalke, ne cache pas sa fierté d’avoir fait revenir dans la Ruhr ce monstre de popularité qu’est Wilmots.

C’est un vent belge qui souffle sur votre club…

Rudi Assauer: Les joueurs belges nous conviennent pour plusieurs raisons. Ils ont du caractère et du talent. De plus, ils restent financièrement abordables pour un club comme le nôtre.

Depuis quand rêviez-vous de faire revenir Wilmots?

Nous sommes restés en contact tout au long de la saison dernière. Il m’avait confié qu’il n’était pas heureux à Bordeaux. On connaît les qualités de Marc. De son côté, il connaît la Bundesliga, le club et les supporters. Il sera prêt dès son retour de blessure, il n’aura pas besoin d’une période d’adaptation. Quand il a décidé de quitter Bordeaux, sa priorité était de revenir chez nous. Nous étions donc faits pour nous retrouver.

Qu’appréciez-vous le plus chez lui?

Son style de jeu basé sur la puissance, l’engagement physique. Et sa mentalité de travailleur, de gars qui a l’impression de n’en avoir jamais fait assez, que ce soit à l’entraînement ou en match. C’est terriblement important aux yeux de notre public, qui compte beaucoup d’ouvriers. 90% d’entre eux ont réagi de façon très positive à son retour; les autres étaient sans opinion, mais certainement pas hostiles à ce transfert. La polyvalence de Marc est un autre atout: l’entraîneur sait que ce joueur peut relever le niveau de l’équipe en évoluant à plusieurs postes.

Vous prenez quand même un risque en transférant un joueur qui vient d’être opéré à la cheville et qui n’est plus tout jeune…

Je n’ai aucune crainte. Nos médecins ont bien étudié les résultats des examens que Marc a passés récemment, et nous lui avons fait subir un contrôle complet. Il retrouvera tous ses moyens.

Wilmots aura un fameux concurrent pour le poste de meneur de jeu: Andy Möller!

Ce n’est pas l’arrivée de Möller qui l’avait encouragé à partir, il y a un an. C’est ce qu’on a lu dans la presse, mais c’est faux. Aujourd’hui, Marc revient dans un autre rôle. Nous ne l’avons pas repris pour qu’il oriente le jeu. Non, nous le voyons comme un pur médian défensif.

Comment jugez-vous la saison d’Emile Mpenza?

Nous sommes très satisfaits de ce qu’il nous a apporté la saison dernière, mais je suis sûr qu’il peut encore faire beaucoup mieux.

Emile semblait dépressif suite au départ de Wilmots, il y a un an. Mais il a ensuite explosé.

Ce sont deux choses tout à fait indépendantes. Si Emile a réussi une telle saison, c’est dû à une modification de l’approche tactique de notre entraîneur. Le système est devenu plus offensif et Möller avait pour principale mission d’alimenter Emile et Ebbe Sand en bons ballons. Quand nous avons transféré Mpenza, j’ai déclaré que Schalke aurait, avec Sand et lui, le meilleur duo offensif de Bundesliga. Les faits m’ont donné raison.

Pour quelles raisons Emile est-il devenu une des plus grandes stars du noyau actuel?

Nos supporters adorent son jeu explosif et spectaculaire. En dehors du terrain, Emile est un garçon très calme, qui ne s’emballe jamais. Mais une fois qu’il enfile son maillot de footballeur, il se transforme complètement. Son caractère dans la vie de tous les jours est à l’opposé de son football. J’apprécie cette dualité.

Est-il déjà aussi populaire que Wilmots à Schalke?

He’s on the way…

Le club lui a imposé un chauffeur personnel après ses accidents de voiture…

Emile n’a pas besoin qu’on l’assiste dans tous ses faits et gestes. Ce n’est plus un gamin, quand même! Nous lui avons fait comprendre qu’il avait intérêt à se prendre en charge, à vivre comme un adulte responsable. Je pense que le message est passé. Aujourd’hui, il sait vraiment ce qu’est la Bundesliga. En arrivant ici, il ignorait beaucoup de choses quant à la valeur de notre championnat. Il était tenté de faire des comparaisons avec ce qui se passe en Belgique, mais il n’y a guère de points communs. Il pensait qu’il pouvait évoluer à un haut niveau durant toute la saison en rentrant en Belgique tous les deux jours. Il a entre-temps saisi que ce n’était pas faisable et il s’est installé dans la région de Gelsenkirchen. C’était indispensable. Il continue à apprendre tous les jours et c’est ce qui me fait dire qu’il peut encore beaucoup progresser.

Comment avez-vous réagi à la sortie de route qui aurait pu lui coûter la vie?

Depuis cet accident, nous avons décidé que plus aucune Ferrari n’entrerait sur le parking de notre stade! A force de flirter avec le danger, on risque très gros. Emile roule aujourd’hui en BMW et c’est beaucoup mieux comme ça.

Une BMW, c’est aussi une voiture rapide…

C’est un style Jeep et donc pas une bombe.

La Juventus a-t-elle vraiment essayé de transférer Emile, cet été?

Aucun club ne s’est manifesté officiellement pour l’acheter. De toute façon, les choses sont on ne peut plus claires: Emile Mpenza n’est pas à vendre.

Même pour une fortune?

Mpenza n’est pas sur le marché. Point à la ligne!

La saison dernière, on a enfin vu le vrai Nico Van Kerckhoven à Schalke.

Il a joué pendant de plus longues périodes que par le passé. C’est sans doute ce qui vous fait dire qu’il a enfin évolué à son niveau. En fait, il nous a toujours donné satisfaction quand il a figuré dans l’équipe. Je considère qu’il a été, cette saison, un des meilleurs joueurs de Schalke. Si nous pouvons compter sur le meilleur Van Kerckhoven durant tout le prochain championnat, le titre ne nous échappera plus!

On imagine Wilmots et Mpenza dans l’équipe de base, la saison prochaine. Vu la qualité du noyau, cela risque d’être plus délicat pour Van Kerckhoven et Vermant, non?

Nous aurons besoin de tout le monde car les matches vont s’enchaîner à un rythme fou. Pour moi, voir les quatre Belges ensemble dans l’équipe, dès le début de la saison, n’est pas du tout utopique. Nos internationaux disputeront entre 45 et 50 rencontres si nous ne les laissons pas souffler de temps en temps: c’est trop. Tous les joueurs recevront donc leur chance à un moment ou l’autre de la saison. Si Möller se blesse, par exemple, je considère que Vermant est parfaitement capable de le remplacer au pied levé, sans diminuer nécessairement la valeur de l’équipe. Nous l’avons transféré parce que nous savons que c’est un excellent demi offensif, capable d’inscrire entre dix et quinze buts chaque saison.

En Belgique, il a souvent connu un creux en hiver, au moment où les terrains se faisaient lourds.

C’est pour cela que nous avons prévu la possibilité de couvrir entièrement notre nouveau stade (il rit)

Vous aviez aussi approché Gert Verheyen?

Nous avons effectivement pensé à lui, mais notre intérêt n’était pas très concret car nous sommes déjà bien fournis sur le flanc droit. Le contact s’est limité à un coup de téléphone entre Schalke et le manager de Verheyen.

Pierre Danvoye, envoyé spécial à Gelsenkirchen

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire