Duel liégeois

Le président de Liège dresse le bilan des trois premières saisons en D1 et évoque l’effet Bozzi.

Avec le match de samedi dernier à Charleroi, qui marquait le retour de Giovanni Bozzi au Spiroudôme, et le derby de ce soir contre Pepinster, Euphony Liège se trouve au coeur de l’actualité. « Notre objectif n’est toutefois pas de faire l’actualité de façon éphémère, mais plutôt de façon durable, grâce à des résultats tangibles », précise d’emblée le président Jean Joly.

Globalement, le bilan de ce club promu au printemps 2000 par la voie des playoffs de D2 est positif. L’ancien Fléron a réussi son déménagement vers le Sart-Tilman et est devenu une valeur sûre de l’élite. Mais le public se lasse vite des sixièmes et septièmes places…

La première saison en D1, avec Yvan Fassotte et son « équipe de guerriers », est sans doute celle qui laisse le meilleur souvenir?

JeanJoly: Effectivement. Tout était neuf et nous bénéficiions encore des effets positifs engendrés par la montée. L’esprit fléronais, un peu folklorique, prévalait toujours. Nous avions bâti l’équipe avec quelques joueurs de D2, complétés par certains que l’on disait sur le retour comme Barry Mitchell ou Mark McSwain, et d’autres qui étaient très contents de venir parce qu’ils ne trouvaient rien d’autre, comme Marc Schiltz. La sauce a pris. Mon seul regret est qu’Yvan Fassotte ait dû jeter l’éponge pour des raisons de santé.

La deuxième saison, avec John Van Crombruggen, fut la meilleure au niveau des résultats…

Nous avons gagné une place au classement. Ce fut pourtant, à mes yeux, une saison terne. A l’image du personnage de Van Crom, introverti, avec lequel les échanges étaient difficiles. Il a critiqué le choix de joueurs qu’il avait lui-même cautionné. Michael Huger n’a pas été épargné. Brian Heinle en a pris pour son grade. Selon lui, il n’était pas un vrai pivot, mais il prenait une masse de rebonds et je n’ai pas oublié son tir à trois points qui nous avait valu la victoire à Charleroi.

En 2002, pour construire l’avenir, vous aviez signé un bail de trois ans avec Julien Marnegrave… rompu au bout de six mois. Qu’est-ce qui n’a pas marché?

Je n’avais pas misé sur Julien uniquement parce qu’il était Liégeois. Je voulais un bon coach, tout simplement, et je pense qu’il l’était. Mais il sortait d’une période très négative à Louvain, dont il avait sans doute gardé des séquelles. Par malchance, il a perdu quelques matches en début de championnat, ce qui l’a replongé dans un doute latent qui s’est reflété sur l’équipe. Dans ces conditions, cela devenait dur. Je me souviens du match disputé au Sart-Tilman contre Louvain, son ancien club. A la mi-temps, nous menions avec 12 ou 13 points d’écart… mais il est ressorti des vestiaires, crispé. Nous avons été battus d’un point.

Lorsque Van Crom m’avait annoncé qu’il ne continuerait pas, j’avais d’abord eu un contact avec Eddy Casteels. Il coachait déjà Ostende, mais n’avait pas encore signé son contrat. Dans un premier temps, il avait marqué son accord pour venir à Liège… à des conditions financières astronomiques, mais soit. Puis, il s’est rétracté, expliquant qu’il était moralement engagé vis-à-vis d’Ostende et que Johan Vande Lanotte ne lui pardonnerait pas une fuite à l’anglaise.L’effet Bozzi va durer

Qu’attendez-vous de Giovanni Bozzi?

Le fait qu’il était libre sur le marché nous a offert une opportunité exceptionnelle. Giovanni Bozzi est un peu au basket ce que Robert Waseige est au football. C’est, déjà, un premier gros transfert dans l’optique de l’avenir. Sa philosophie correspond à la nôtre: il veut construire sur le long terme. Il n’a encore signé que jusqu’à la fin de la saison, mais tacitement, c’est comme s’il était déjà lié pour une durée indéterminée. Avant qu’il vienne à Liège, je le connaissais un peu de l’extérieur, comme tout le monde. Plus je le découvre en profondeur, plus je l’apprécie. L’effet Bozzi s’est déjà fait sentir, mais pas au point de déclencher un raz-de-marée… Nous sommes conscients qu’il faudrait continuer à grandir, mais sans brûler les étapes. Notre objectif n’est pas d’égaler Charleroi dans les deux ans, mais de nous en rapprocher progressivement. Vous savez, tout récemment, on nous a proposé Arijan Komazec: un joueur croate qui a joué en NBA. Oui, il était payable… pendant cinq mois. Mais était-il sage de casser sa tirelire pour essayer de gagner une ou deux places en milieu de classement, alors que nous pourrions avoir besoin de cet argent pour la saison prochaine et plus tard?

Est-il possible d’avoir, dans un petit pays comme la Belgique, quatre ou cinq équipes disposant d’un budget équivalent à celui de Charleroi ou d’Ostende?

Selon moi, oui. A condition qu’elles soient bien réparties: une à Bruxelles, une à Anvers et une à Liège, en plus de Charleroi et d’Ostende, par exemple. Le problème est l’organisation d’un championnat pour ces équipes-là. La D1 compte 11 clubs cette saison. Qui sait si, la saison prochaine, elle ne se limitera pas à dix équipes? La création d’une Ligue Benelux pourrait être une solution: huit clubs belges, quatre ou cinq néerlandais, et un ou deux luxembourgeois. Nous avons failli avoir un club grand-ducal cette saison, j’étais d’ailleurs à la base de l’idée. Cela ne s’est pas fait, et aujourd’hui on n’en parle plus guère.

Ce soir, c’est le derby de la province. Quels sont vos rapports avec Pepinster?

Ils sont nuls. Notre présence gêne Pepinster… plus que la présence de Pepinster ne nous gêne. Certes, nous sommes un peu titillés par la réussite de nos voisins qui nous devancent au classement, mais nous regardons surtout dans notre jardin. L’enthousiasme est plus palpable au Hall du Paire qu’au Sart-Tilman? C’est possible, mais sans vouloir offusquer nos hôtes de ce soir, je dirais que Pepinster est un club de village. Il serait plus intelligent de collaborer que de se mettre des bâtons dans les roues. La province de Liège pourrait parfaitement se satisfaire d’un seul club qui jouerait le top en D1, et dans cette optique Liège Ville possède davantage d’atouts. Victor Bosquin, mon collègue de Pepinster, est d’accord avec moi mais s’il décidait de déménager ou de fusionner, il ramasserait un pavé dans ses carreaux.

Le championnat n’a-t-il pas besoin de derbies?

La D2 et la D3 ont besoin de derbies. En D1, l’important, c’est le niveau du basket. Malgré la disparition de certains clubs, je trouve qu’il s’accroît en Belgique. Avec notre équipe de la première saison, qui avait terminé septième, nous détiendrions la lanterne rouge actuellement. Je regarde souvent la carte de France. Les clubs sont disséminés aux quatre coins de l’Hexagone. Ils sont tous séparés par 300 kilomètres et recrutent leurs spectateurs dans un rayon de 60 bornes. C’est vers cela que nous devons tendre. Mais pour cela, il faut afficher un label de qualité. Aussi longtemps que nous viserons uniquement la suprématie régionale, nous ne passionnerons jamais qu’une foule locale.

Daniel Devos

« Nos relations avec Pepinstersont nulles »

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