Du neuf pour l’élite

Neuf ans après la fusion de trois équipes louvanistes, voilà OHL aux portes de la D1. Radioscopie d’un club d’avenir.

Trois lettres : OHL. Elles signifient OudHeverleeLeuven. Trois couleurs : le noir (de Oud-Heverlee), le rouge (du Daring Louvain) et le vert (du Stade Louvain). Comme la combinaison des trois couleurs n’est pas très gracieuse, l’équipe actuelle évolue tout en blanc.  » En fait, le blanc est la couleur officielle, agrémentée de trois bandes sur l’écusson : une noire, une rouge et une verte « , précise le porte-parole du club, ChrisVandebroeck, Cet avocat fut jadis un dirigeant du FC Assent, club d’un petit village proche de Diest qui se hissa en D2 grâce aux investissements d’un mécène local et qui compta dans ses rangs un certain Bert Van Marwijk, actuel coach des Pays-Bas.

OHL est donc le fruit d’une fusion. L’idée a germé en 2002 dans l’esprit de l’échevin des Sports de Louvain, qui proposa au Stade (qui jouait en D3) et au Daring (en P1) d’unir leurs forces. Le bourgmestre d’Oud-Heverlee (dont les DiablesNoirs jouaient également en D3) entra à son tour dans la danse. Quelques semaines plus tard, un accord était signé entre les trois clubs, malgré les réticences du Stade qui avait 99 ans d’existence en 2002 et aurait bien aimé fêté son centenaire un an plus tard. Mais ses dirigeants firent fi d’un accès de sentimentalisme. Fait cocasse : le Stade joua le dernier match de son existence (qu’il gagna 2-0) contre… Oud-Heverlee. Le club fusionné adopta le matricule 6142 d’Oud-Heverlee, alors que le matricule 18 du Stade disparut.

Un exemple de fusion réussie

A l’image de Genk, OHL est donc un exemple de fusion réussie. Trois ans après sa naissance, en 2005, le nouveau-né fut promu de D3 en D2. Et le voilà aujourd’hui aux portes de la D1 : à deux journées de la fin, il compte cinq points d’avance.

 » Louvain n’a plus eu de club en D1 depuis 1950 « , rappelle Vandebroeck.  » C’était le Stade. Différentes études, dont celle réalisée par TrudoDeJonghe, tendent à démontrer que le Brabant flamand est la dernière province susceptible d’encore accueillir un club professionnel viable en D1. Le potentiel public existe, car il y a un vide aux alentours. On lorgne vers Haacht, Aarschot et Diest, mais aussi vers le Brabant wallon : Wavre, Jodoigne, etc.  »

Le stade Den Dreef, où évolue l’équipe Première, est d’une capacité de près de 8.000 places. Il a été modernisé en 2005 et pourrait déjà convenir pour la D1. La Ville a promis 2 millions d’euros pour les dernières améliorations en cas d’accession à l’élite. Les entraînements de l’équipe Première, ainsi que des Espoirs et des élites des différences catégories d’âge, ont lieu au complexe d’Oud-Heverlee. Les autres équipes de jeunes, qui sont nombreuses car la Ville demande au club de jouer également un rôle social, s’entraînent à Kessel-Lo, dans les anciennes installations du Daring.

En D2, le budget d’OHL est de 2,5 millions d’euros cette saison. Le président JanCallewaert est à la tête du groupe d’informatique Option, qui officie comme sponsor principal.

Après deux saisons en demi-teinte, OHL a porté son dévolu sur l’entraîneur RonnyVanGeneugden, sans emploi depuis son limogeage de Genk en mars 2008.  » Depuis mon éviction, j’avais eu quelques contacts mais je ne voulais m’engager que dans un projet crédible « , explique-t-il.  » Avec OHL, j’ai directement eu un bon feeling. Au départ, on m’a simplement demandé de poursuivre la professionnalisation du club. Le projet visait à atteindre la D1 dans un délai de trois ans. On est tout proche d’atteindre l’objectif après une saison seulement. La clef du succès ? L’ambiance qui règne dans le groupe. L’ambition de ce groupe, également. On essaie de produire du beau football, d’être dominant à chaque match, ce qui n’est pas courant en D2 où beaucoup d’équipes tablent d’abord sur leur engagement. On a marqué au moins un but à chaque match, sauf lors du déplacement à Tirlemont. Le public s’est pris au jeu. Lors du premier match à domicile, on a joué devant 2.000 spectateurs. En fin de saison, on tournait à 4.500. Samedi passé contre Tirlemont, on a dépassé les 7.000. Et ce sera encore le cas lors du match de clôture, contre Lommel.  »

De 55.000 à 100 spectateurs

Deux des principaux animateurs d’OHL furent le Verviétois JordanRemacle (24 ans et 22 assists jusqu’à présent) et le Tunisien HamdiHarbaoui (26 ans et 22 buts cette saison). Il y a cinq ans, Remacle était aux portes de l’équipe Première de Genk lorsqu’il alla se perdre en D2 néerlandaise : RKC Waalwijk, Helmond Sport et RBC Roosendaal.  » En fait, Jordan était la doublure de ThomasChatelle à Genk « , explique Van Geneugden.  » Il était prévu que, lorsque Chatelle partirait, il prendrait sa place. Mais il n’a pas eu la patience d’attendre « .

Harbaoui, lui, avait été engagé par Mouscron en 2008, mais c’était la période tourmentée de l’Excelsior et il dut se recaser à Visé, en D3, pour rebondir. L’été dernier, les deux hommes ont cru au projet louvaniste.  » Quand j’ai vu Jordan à l’£uvre pour la première fois, je me suis demandé : – Mais qu’est-ce que ce mec-là fout en D2 ? Il a largement sa place en D1… « , clame Harbaoui.  » Il est très rapide, très intelligent dans le jeu. Avant de recevoir le ballon, il connaît déjà l’usage qu’il va en faire.  »

 » Ce que je fous en D2 ? C’est simple « , explique Remacle.  » Si j’ai signé à Louvain, c’est en premier lieu pour son entraîneur, qui m’a formé à Genk. Il y a cinq ans, lorsqu’il m’avait conseillé d’attendre mon tour, je ne l’avais pas écouté et je m’en suis mordu les doigts. L’été dernier, j’avais sous la main une proposition mirobolante d’un club chypriote, mais c’est à peine si j’y ai prêté attention. Lorsque Van Geneugden m’a proposé de le rejoindre à OHL, j’ai signé les yeux fermés, je n’ai même pas demandé combien je pourrais gagner. Oui, on peut dire qu’il y a cinq ans j’avais choisi l’argent plutôt que le projet sportif, et que cette fois c’est l’inverse. Cela dit, il faut se mettre à ma place : à l’époque, la proposition du RKC était difficile à refuser, d’un point de vue strictement financier. Et même d’un point de vue sportif. Je ne m’étais pas engagé avec un club de D2, mais avec un club de D1. J’ai même joué une demi-finale de Coupe, contre l’Ajax. Mon entraîneur, les six premiers mois à Waalwijk, était un certain AdrieKoster, avec lequel j’ai toujours entretenu de bonnes relations et qui a d’ailleurs pris de me nouvelles lorsque j’ai été blessé, alors qu’il venait de signer à Bruges. Mais après six mois, il a été limogé, faute de résultats. Cela ne s’est pas amélioré avec son successeur et on est descendu en D2. Là, j’ai connu le revers de la médaille et cela m’a forgé le caractère. Après les 55.000 spectateurs amassés sous le toit de l’Arena d’Amsterdam, j’ai appris ce que cela signifiait de jouer à Haarlem ou à IJmuiden devant… 100 spectateurs et sous la neige.  »

Star à Tunis, réserviste à Mouscron

Harbaoui a aussi connu quelques mésaventures.  » De 7 à 22 ans, j’ai été formé à l’Espérance Tunis, le plus grand club tunisien. L’équivalent d’Anderlecht, en quelque sorte. Ce club a tout gagné, sauf la Ligue des Champions d’Afrique. J’ai était retenu en équipe nationale jusqu’en sélection olympique et j’ai joué deux matches amicaux avec l’équipe A. Puis, j’ai eu l’opportunité de partir en Belgique. A Mouscron, je n’ai joué qu’un seul match comme titulaire : contre Mons. C’est difficile de débarquer dans un club où tout va mal, sportivement et financièrement. J’aurais dû me renseigner avant de signer au Canonnier, car je me suis rapidement rendu compte que je n’avais pas fait le bon choix. Visé m’a tendu la perche. Il se fait que JoséRiga était l’entraîneur de Mons lorsque j’ai joué mon seul match comme titulaire en D1. Et lorsqu’il a pris Visé en charge, il s’est montré très intéressé par mes services. Pour moi, c’était dur mentalement de redescendre de D1 en D3, mais c’était reculer pour mieux sauter. J’ai été meilleur buteur de D3 la première saison avec 22 buts, à nouveau meilleur buteur mais en D2 avec 19 buts la saison suivante, et me voilà actuellement encore en tête du classement des buteurs de D2 avec 22 buts.  »

 » Lorsqu’on est le meilleur buteur trois saisons d’affilée, ce n’est pas le fruit du hasard « , affirme Remacle.  » Hamdi n’a pas besoin de dix occasions pour mettre un ballon au fond. Physiquement, il est impressionnant également. Je pense que c’est l’attaquant le plus physique avec lequel j’ai évolué durant ma carrière. Très technique aussi : là où la plupart des joueurs remettraient le ballon, lui va l’amortir d’un contrôle de la poitrine. Hamdi et moi, on s’est rapidement trouvés sur le terrain. Il a inscrit 22 buts, j’ai distillé… 22 assists. Les trois quarts d’entre eux lui étaient destinés. « 

Harbaoui a sans doute, lui aussi, le potentiel d’un joueur de D1.  » J’aurais pu signer à Courtrai ou à Saint-Trond la saison dernière « , révèle-t-il.  » Mais le projet louvaniste m’a séduit. Lorsque j’ai parcouru la liste des joueurs qui ont transité par OHL dans le passé, j’ai considéré qu’il pouvait s’agir d’une très bonne rampe de lancement. Je n’ai pas été déçu. « 

PAR DANIEL DEVOS

 » Le potentiel public existe, car il y a un vide aux alentours. Et on lorgne aussi vers le Brabant wallon.  » (le porte-parole, Chris Vandebroeck)

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