Dos au mur

Le spectacle offert par Franck Berrier vendredi dernier au Gaverbeek, quand son équipe a obtenu un penalty, est affligeant : il a d’abord eu une discussion avec son coéquipier Mbaye Leye pour savoir qui allait le botter et quand celui-ci a refusé de lui laisser cet honneur, il a shooté dans le ballon, déjà placé au point de penalty. De la touche, Francky Dury n’a pas réagi. Ensuite, Leye, énervé, a tiré trop haut et s’est tourné vers Berrier, furieux, pour lui donner une (petite) claque. Francky Dury, qui n’était déjà pas dans un grand soir avec ses changements peu heureux, n’a toujours pas bronché. C’est étrange dans le chef d’un entraîneur qui insiste tant sur l’unité et la discipline.

Depuis le début de la saison, Zulte Waregem a la réputation de former un ensemble soudé, qui cultive la pensée collective. L’incident qui a opposé un footballeur arriviste, Berrier, à Leye, habituellement intelligent, ne doit pas assombrir la superbe campagne de Zulte Waregem mais il rappelle que certains footballeurs pensent surtout à eux-mêmes, en cette fin de saison et que, dans ce monde d’individualisme et d’égocentrisme, il n’est pas facile de conserver le contrôle d’un vestiaire.

John van den Brom est dans la même situation à Anderlecht. Matias Suarez a clamé qu’il ne jouerait plus jamais pour Anderlecht, Lucas Biglia, retenu par une migraine tenace au pays, n’a pas participé au stage hivernal, Dieumerci Mbokani n’est pas revenu à temps de la Coupe d’Afrique des Nations, son… fils ayant des problèmes de visa. Il faut pouvoir recadrer tout ça sans toucher à ces messieurs, qui bénéficient souvent du soutien de la direction. Il y a encore les caprices de Milan Jovanovic, qui a mal réagi à son remplacement dimanche contre le Standard. Il s’occupait de sa petite personne dans un match durant lequel Anderlecht jouait gros. C’est ainsi, quand on se prend pour le centre de l’univers.

Le soulagement n’en a pas moins été énorme au Parc Astrid, même si les Mauves, entre doutes et titre, n’ont pas brillé contre un Standard moyen. Les Rouches, dans une composition très prudente, semblaient miser sur le point, une étrange stratégie dans cette phase cruciale du championnat. La motivation d’Anderlecht offrait un contraste saisissant. Quand un club est au bord du gouffre, ce sont les meilleurs joueurs qui font la différence. C’est et cela demeure une question de mentalité. John van den Brom n’est pas le premier entraîneur à y être confronté.

Les play-offs 1 restent une fameuse loterie. Voilà maintenant que le Club Bruges revient parmi les candidats au titre. Les orages s’y sont apaisés, le Club a retrouvé sa personnalité mais son jeu reste trop stérile… Quant à Genk, qui accusait douze unités de retard sur Anderlecht au terme du championnat régulier, il peut réussir le doublé. Incroyable mais vrai !

Tout est possible dans la formule actuelle. Le Cercle, qui prend 14 points sur 90 lors de la phase classique, peut même assurer son maintien. Par ailleurs, il est étrange que les Vert et Noir n’aient pas confié plus tôt leur équipe à un Lorenzo Staelens manifestement très motivé. Il peut même ouvrir les portes de l’Europe s’il réalise un exploit contre le RC Genk. Foeke Booy, piqué au vif par son limogeage, pense-t-il toujours que cela aurait été possible sous ses ordres ?

On dirait que tout le monde découvre le football allemand, après avoir ignoré son évolution pendant des années. Jusqu’il y a peu, d’aucuns n’avaient en bouche que les clichés qui poursuivent le football allemand depuis des années, clichés qui le disaient puissant, physique mais manquant de technique et de finesse. Comme si nul n’avait réalisé que depuis l’an 2000 et un EURO décevant, l’Allemagne a concocté un plan de réformes, plaçant d’autres accents et, surtout, mettant en place une tout autre formation des jeunes.

Les résultats en sont maintenant visibles. Les talents affluent et la finale de la Ligue des Champions est allemande, opposant le Bayern au Borussia Dortmund. Quant à la Bundesliga, elle exerce un attrait de plus en plus magique, grâce à ses nouveaux temples et à ses prix démocratiques, même si les meilleurs footballeurs émigrent. On l’a encore constaté le week-end dernier : alors que presque tous les prix sont attribués et que le champion est connu, les stades ont eu une assistance moyenne de 49.000 personnes. L’Allemagne n’a pas besoin de play-offs…

PAR JACQUES SYS

Quand un club est au bord du gouffre, ce sont les meilleurs joueurs qui font la différence.

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