Dopage et conséquences

A l’heure d’écrire ces lignes, un médecin belge, célèbre car s’occupant notamment de sportifs de haut niveau, se trouve incarcéré à la prison de Lantin sous les liens d’un mandat d’arrêt. Il est soupçonné d’avoir participé ou facilité une pratique de dopage.

Cette rubrique n’a pas pour vocation de juger ou de commenter des affaires pénales en cours. Rappelons toutefois que jusqu’à preuve du contraire, toute personne est présumée innocente, et surtout que détention préventive ne peut pas être synonyme de preuve de culpabilité.

Cette actualité nous amène toutefois à poser une importante question: en droit belge, que risque un médecin suspecté d’avoir participé à, ou d’avoir facilité, une pratique de dopage?

Disons-le d’emblée: un tel comportement est aujourd’hui très sévèrement réprimé.

Au niveau pénal, ce médecin contrevient à plusieurs interdits:

-tout d’abord, il y a violation de l’arrêté royal n° 78 du 10 novembre 1967 sur l’exercice illégal de l’art médical et de l’art pharmaceutique, qui définit l’art médical ou pharmaceutique comme l’ intervention liée à un traitement curatif ou préventif. Administrer des substances -licites ou illicites- à un athlète en parfaite santé ne répond pas à cette exigence.

-en outre, depuis peu, un décret du 8 mars 2001 de la Communauté Wallonie-Bruxelles prévoit qu’est passible d’un emprisonnement de 6 mois à 5 ans et/ou d’une amende toute personne qui facilite, organise ou participe à l’organisation d’une pratique de dopage. Les travaux préparatoires du décret indiquent la volonté du législateur de traiter les sportifs dopés comme des « victimes », passibles uniquement de sanctions disciplinaires de la part de leur fédération; au contraire le staff médical au sens large (médecin, kiné, soigneur…) est devenu la cible de l’incrimination pénale, car considéré comme la source du fléau.

Au niveau disciplinaire, l’Ordre des Médecins sera probablement enclin à prononcer des sanctions « très dissuasives » envers des praticiens condamnés pour des faits de dopage.

Enfin, au niveau civil, rien n’empêche les sportifs victimes, à leur insu ou de leur plein gré, des effets indésirables d’une pratique de dopage organisée ou facilitée par leur thérapeute, de porter plainte contre celui-ci du chef de coups et blessures involontaires (articles 418 et suivants du Code pénal). Sont visés les coups et blessures causés par le « défaut de prévoyance », lequel est défini par la jurisprudence comme la faute, « aussi légère soit-elle ». Dans un tel système, on le répète, le sportif tient le rôle de victime et le médecin celui de coupable. Professionnel de l’art médical, il est logique que le législateur lui fasse peser une responsabilité accrue en la matière.

Luc Misson

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire