Dollars, euros et odeur de sueur

Joueur : 6 clubs, 3 pays, 400 matches (1 bon), 2 buts en Coupe d’Europe. Batteur : 3 groupes, 130 concerts (1 sold out).

AAA, AA+, AA-, A+, A-… Ha-ha-ha qu’est ce qu’on rit avec leurs cotations. On pleure aussi avec ces cotations symboles de la déraison. Les Etats-Unis perdent un A et voilà 300 millions d’Américains qui entament God bless America les mains jointes et le regard porté vers les cieux. Des cieux plus cléments au Moyen Orient. Ceux qui rient, ce sont les Qataris. Pour l’instant, leur cote à eux, c’est AAAAAAAA++++++++. Question cash, pas de soucis. Mais ils le savent, le crash arrivera tôt ou tard. Il sera définitif. Plus de gaz, plus de pétrole mais déjà des idées. Alors on anticipe. On prévoit le dollar sans le pétro devant. On prévoit même de faire des p’tits avec des euros.

Leurs devises envahissent le foot jusqu’à remettre en cause d’autres devises. Plus noble, quasi mythique, voire séculaire. Comme celle du Barça. Il y a quelque mois, la devise collait à l’image du club. Més que un club. Absolument. Pendant 107 ans, un maillot vierge de tout. En 2006, la vierge devient effarouchée mais reste digne. C’est pour la bonne cause. On paye même deux millions d’euros à l’Unicef. En fait, on sponsorise le sponsor.

Et puis là, on passe de l’Unicef à la Qatar foundation. Comique et symbolique. Mésque un club mais plus pour les mêmes raisons. On donnait deux millions d’euros par an, on va en recevoir 33. Le début, peut-être, d’une crise de foi entre les socios et les boss du club. On s’en fait pas pour le Barça. Y aura toujours les joueurs et le jeu pour réconcilier.

Réconciliés comme nous le fûmes lors du Community Shield. Tout Manchester descend sur Londres, on n’aime pas faire le chemin pour rien. Même petit, y a un trophée en jeu. Là encore, l’argent du Moyen Orient était très présent. 46 minutes avec la cote au plus haut et puis, au bout de la séance, c’est le crash. A la fin, la bonne vieille livre gagne. Pleine de tradition, à l’image du coach et du club. Même si les dollars américains polluent les finances d’United, les gardiens du temple veillent au grain. On n’achète pas l’histoire, le vécu et le respect.

On parle de dollars US et je pense à ce voyage perdu. Je devais être à Arsenal-Udinese mais ça castagnait ferme à Tottenham, pourtant symbole de la richesse discrète. Voyage annulé. Trop dangereux. Un peu déçu mais heureux quand même. Mes patrons tiennent à moi. L’Emirates Stadium, ce sera une autre fois. Tiens, Emirates, v’là encore un fameux investissement des cheiks. 100 millions de livres pour que le stade porte ce nom pendant 15 ans… et les maillots jusqu’en 2014.

Tellement d’argent dans un sport où l’investissement est tellement à la merci de tellement de choses. Une latte, un mal de tête, un faux bond, un agent véreux, des parieurs magouilleurs. Fou, non ? Il semble bien que ces investissements extraordinaires se fassent pour des raisons extra financières.

Le foot ouvre toutes les portes, permet de serrer toutes les mains. Dans un stade, il y a de tout. Surtout de ce qui fait tourner le monde. Les financiers, les politiques, les peoples. Images, relations et connaissances car n’oublions pas que la Coupe du Monde 2022, ce sera là-bas. N’ou-blions pas que l’investissement qatari est estimé à 65 milliards de dollars. Y a donc intérêt à bien connaître ce tellement spécifique et bizarre monde du foot.

Un des meilleurs moyens est, en toute simplicité, de s’offrir un club. Après l’Angleterre, maintenant l’Espagne (Malaga et Santander) et la France (PSG) mais aussi et surtout les droits télé. Attirer les regards pour mieux attirer les touristes. Ils ont pensé à tout, les Qataris. Ils savent y faire pour s’acheter un savoir-faire. C’est, aussi, cela l’intelligence. Mais attention car, ici, il y a les nouveaux riches européens qui, faute de savoir faire avec les milliards, pourraient très vite se retrouver les nouveaux pauvres d’un monde voué au ballon rond qui tourne de plus en plus carré. Il ne resterait alors de rond que les zéros des comptes en… manque.

PAR FREDERIC WASEIGE, JOURNALISTE VOO FOOT – BE/TV

 » Quand tu donnes du black, tu te fais prendre. Idem quand tu en prends. Bref, tu te fais baiser tout le temps  » Rolland Courbis.

Pour préparer sa Coupe du Monde, le Qatar s’achète des clubs européens.

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