Doit mieux faire !

La seule connaissance du français ne suffira pas dans cette Europe qui enfle, dominée par l’anglais. Il est temps de réagir.

L’image d’un Jean-Marie Happart ringard, avouant son incapacité à lire un important contrat automobile rédigé en anglais. Reconnaissons-le : on en a bien ri dans les chaumières. Pourtant, le jumeau Happart, 60 ans, est loin d’être un cas isolé. En Wallonie, la connaissance des langues est nettement insuffisante. Les économistes Victor Ginsburgh (ULB-UCL) et Shlomo Weber (UCL) ont décortiqué les meilleures études internationales sur le sujet. Quelques chiffres. 17 % des Wallons seulement connaissent le français et le néerlandais, 16 % manient le français et l’anglais, 7 % sont trilingues. Les Flamands font beaucoup mieux : 42 % d’entre eux seraient trilingues.  » Parler de technopoles et de technologies de pointe comme le font les dirigeants wallons, alors que 57 % de la population est unilingue, peut paraître paradoxal « , résument les deux universitaires avec un soupçon d’ironie.

Bref, il faut se secouer. Dans une Europe de 450 millions d’habitants comptant 21 langues, l’anglais a pris un ascendant décisif. Chez nous, le néerlandais serait bien utile sur le marché du travail, notamment pour obtenir de meilleurs salaires (des études l’attestent !). Or la jeunesse d’aujourd’hui semble étrangement passive. Pas de progrès naturel en vue, donc.  » Les (jeunes) Wallons n’apprennent ni la langue de la majorité des Belges, ni l’anglais, qui, à tort ou à raison, est devenu la première langue internationale « , clament Ginsburgh et Weber. Que faire ? Le plan Marshall et ses bourses aux apprentis bilingues vont dans le bon sens. Il reste à voir si cela permettra un réel changement des mentalités et si un nombre assez important d’élèves en profitera. Améliorer la qualité de l’enseignement, endiguer la pénurie de profs de langue, relancer la concertation avec les autres Régions et, surtout, refédéraliser l’enseignement des langues (belle utopie !) : autant d’objectif que fixent les deux auteurs pour guérir le malade. Ils lancent un cri d’alarme.  » Les Wallons risquent de s’isoler « .  » La meilleure défense (face à l’anglais), c’est l’attaque « , renchérirait le philosophe Philippe Van Parijs, ce chantre du multilinguisme.

les réactions des partis

Nous proposons de rendre obligatoire l’apprentissage du néerlandais dès la 1re primaire. L’éveil précoce à d’autres sonorités est un sésame pour l’apprentissage d’autres langues. Il faudrait revoir les critères et l’encadrement des classes en immersion, de façon qu’elles soient accessibles à tous.

En Wallonie, le PS a mis en place le  » plan langues « , doté de 60 millions d’euros, et surtout orienté vers l’apprentissage du néerlandais. Il faut intensifier ces efforts. Il faudrait organiser des écoles bilingues, par le biais d’un accord de coopération entre les Communautés. A la différence des écoles en immersion, les écoles bilingues accueilleraient des enfants francophones et néerlandophones. Le CDH prône l’apprentissage d’une deuxième langue dès le plus jeune âge, et l’acquisition d’une troisième langue au début du secondaire. Nous voulons, depuis des années, lever les obstacles à l’inscription des enfants dans une école d’un autre régime linguistique. Le CDH veut modifier la loi relative au régime linguistique de l’enseignement, de façon que les parents puissent inscrire leurs enfants dans une école bruxelloise ou dans une commune à facilités, et ce même s’ils n’y résident pas. Nous voulons renforcer l’enseignement en immersion, tout en garantissant le maintien d’un apprentissage  » classique  » des langues, le plus précoce possible. Il faut renforcer les échanges linguistiques. Les efforts du plan Marshall sont dérisoires, comparés aux besoins. Le MR veut permettre aux demandeurs d’emploi de bénéficier d’une formation individuelle et intensive en langue auprès d’instituts privés, par le biais d’une subvention ou de chèques-langue.

Ph.E.

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