« Devant, je marque »

Le bilan sur ses 30 derniers mois à Sclessin où il a alterné galères et efficacité.

Lorsqu’il revint de Schalke 04 au Standard voici deux ans et demi, Michaël Goossens avait une idée bien précise derrière la tête: jouer régulièrement, relancer sa carrière en aidant son club de toujours à être enfin européen et repartir à l’étranger.

On pensait que l’heure du grand départ serait pour le début de la saison qui s’annonce mais Goossens sera toujours bel et bien présent sous le maillot rouge. En 30 mois, il eut certes de grands moments personnels mais connut également quelques traversées du désert, notamment parce qu’une blessure à l’épaule le priva d’une participation à l’EURO 2000 et parce que la fin de saison du Standard ne fut pas assez percutante pour convaincre Waseige de l’emmener avec lui au Japon.

Tant d’un point de vue individuel que collectif, Goossens a donc bien compris qu’à 29 ans, il n’est pas trop tard mais temps de se forger un palmarès. Marc Wilmots, son ami et modèle, n’a-t-il pas connu ses meilleures années en fin de carrière? Pas question pour autant de la jouer perso: « Tous mes objectifs passent toujours par le Standard », dit-il.

Dans quel état d’esprit abordez-vous la saison? Etes-vous prêt à respecter votre contrat ou guettez-vous la moindre opportunité de départ?

Michaël Goossens: J’ai un contrat à honorer et je suis prêt à le remplir jusqu’au bout. D’ailleurs, je n’ai jamais exigé de partir. J’ai juste rappelé qu’en cas d’offre intéressante, j’étais disposé à m’en aller. Le Standard était d’accord aussi, mais pas à n’importe quel prix. Ce qui était somme toute normal.

Vous étiez venu pour relancer votre carrière. Ne craignez-vous pas qu’elle s’enlise à Sclessin?

Quand on prend une décision, on n’est jamais sûr de ce qui peut arriver. J’étais bien revenu dans le coup lorsque mon épaule m’a joué un vilain tour et m’a privé de l’EURO 2000. J’ai repris plusieurs fois à zéro mais je n’ai pas encore 29 ans, il n’est pas trop tard.

Un prêt n’était-il pas envisageable?

C’est une solution qui ne m’arrange pas. De toute façon, en Belgique, je ne jouerai qu’au Standard. Et puis, un prêt, c’est souvent du haut vers le bas. Même en cas de transfert définitif, il est de plus en plus difficile pour un joueur belge d’atteindre directement le top. On n’a jamais vu un joueur du Standard à l’AC Milan. Notre championnat est dévalué et un joueur qui veut le quitter doit accepter de transiter par un club de deuxième zone.Pas de Coupe du Monde!

C’est d’autant plus vrai que vous n’avez pu prendre part à la Coupe du Monde. Avez-vous été déçu de ne pas figurer dans le groupe des 23 après avoir fait partie des 30 présélectionnés?

C’est logique car, même si tout le monde disait que mes chances étaient minces, je ne voulais pas partir battu d’avance. Mais d’un autre côté, sachant d’où j’étais revenu, j’étais déjà très content de faire partie de la présélection. Je n’ai donc éprouvé aucune difficulté à respecter le choix du sélectionneur. J’ai regardé tous les matches en supporter de la Belgique, j’ai même klaxonné dans les rues après la victoire contre la Russie et j’ai été très déçu au terme du match contre le Brésil car le but de Marc était valable. Mais je suis fier d’avoir vu la Belgique poser des problèmes au Brésil.

Vous retrouvez Waseige dans un autre contexte, celui d’un club dont vous êtes un des emblèmes. Avez-vous eu une discussion avec lui à son arrivée?

Non, du moins: pas encore. Jusqu’ici, le coach a beaucoup parlé au groupe et un peu à chacun. Je ne cherche d’ailleurs pas spécialement à discuter. Pour moi, il n’y a rien de bien spécial à dire. Monsieur Waseige me connaît mieux que personne d’autre, il sait quel genre d’homme je suis et il sait que je suis bien revenu dans le parcours après mon opération. Quant à moi, je sais exactement de quoi il retourne avec lui.

En début de saison, vous avez dû patienter un certain temps avant de disputer les matches amicaux. Cela ne vous a pas fait peur?

Non. J’avais commencé à passer les tests physiques puis j’ai souffert d’une contracture. Le staff médical a préféré que je ne prenne pas de risques et l’entraîneur m’avait prévenu que je ne jouerais qu’après avoir passé les tests. Tout était clair et, comme il ne s’agissait encore que de rencontres face à des adversaires de moindre niveau, je n’ai pas accumulé trop de retard dans le travail collectif.

Quelles leçons tirez-vous de la saison dernière?

Nous avons livré un bon premier tour puis plusieurs blessures nous ont affaiblis, notamment d’un point de vue offensif. N’oubliez pas qu’Aarst, Lukunku et moi avons tous été blessés pour une assez longue période. De plus, il y eut des problèmes qui auraient dû se régler en interne mais furent très vite étalés sur la voie publique. Pas par les joueurs, je tiens à le préciser.

Ces problèmes physiques du deuxième tour n’étaient-ils pas dû à une mauvaise préparation hivernale?

Non car c’étaient des accidents de match, pas des blessures musculaires. Il ne faut pas chercher les problèmes là où ils ne sont pas.

Les relations du groupe avec Preud’homme étaient plutôt tendues en fin de championnat. Que s’est-il passé?

Ce n’est pas à moi qu’il faut poser la question. Il y a eu beaucoup de pressions, des choses qui sont sorties du groupe. »Waseige garde toujours le même cap »

A-t-il trop souvent changé de cap?

Il a voulu bien faire, provoquer un déclic. Il a essayé des choses. Certaines ont marché, d’autres pas. Robert Waseige, lui, ne change pratiquement jamais. A mon avis, c’est une bonne chose. A Bruges aussi on ne modifie que rarement également la composition et cela lui permet de maintenir un certain niveau. Même après une mauvaise saison, le Club revient vite dans le coup parce que les bases restent les mêmes.

Vos relations avec Preud’homme sont-elles meilleures depuis qu’il est devenu directeur technique?

Personnellement, je n’ai jamais eu de gros problèmes avec lui. Chaque fois qu’on se croise, on s’adresse la parole.

Que répondez-vous à ceux qui disent que la baisse de forme du Standard a coïncidé avec la vôtre, ou vice-versa?

Ah non! Pas de nouveau ma faute! Du moins, pas moi uniquement. J’en ai marre que ce soit toujours mon nom qu’on cite dans des cas pareils. Nous avons tous failli à notre tâche après avoir abordé la trêve en tête. Il me semble que cela devrait être clair.

Beaucoup de gens partent du principe que, si vous êtes capable d’inscrire dix buts en deux mois, vous devriez arriver à 25 ou 30 réalisations en fin de saison, ce qui ferait de vous un buteur incontestable et ferait taire la critique.

Ceux qui connaissent le football voient tout de même que je ne joue pas toujours à la même place, non? Je vous mets au défi de trouver un ailier droit qui inscrive 30 buts par an. Or, j’ai joué à cette place. Ou à gauche. Ou encore au milieu du jeu. Je constate donc une chose: chaque fois que j’ai marqué beaucoup, c’est lorsque je jouais devant.

Vous êtes victime de votre polyvalence, alors?

Non, pas victime. J’estime plutôt que cela reste une arme. Mais à double tranchant. Dans le football moderne, un joueur doit être capable d’évoluer à plusieurs places. Mais alors, on ne doit pas attendre de lui la même chose selon qu’il joue devant ou au milieu. Et on doit tenir compte des gens qui l’entourent.

Les joueurs belges n’ont-ils pas tendance à trop accepter cette polyvalence? Zidane ne change pas constamment de place sur l’échiquier, que je sache?

On parle de Zidane, un talent mondial et un joueur très spécifique. Moi, je préfère comparer les choses au niveau belge: Wilmots a souvent joué les dépanneurs puis il s’est installé dans un rôle de médian offensif mais à la Coupe du Monde, il a joué devant.Vive le 4-4-2!

Vous sentirez-vous plus à l’aise dans le 4-4-2 de Waseige, qui semble vouloir vous utiliser en pointe ou éventuellement à la place de Walem?

Evidemment, c’est un système de jeu que je connais bien. Le Standard avait toujours joué comme cela auparavant et c’est comme cela que je me sens le mieux, surtout lorsqu’on pratique un pressing haut, qu’il y a du mouvement, des espaces et des duels. De plus, le dédoublement des flancs nous permet de recevoir beaucoup de ballons. Mais cela dépend également du type de partenaire que j’ai en pointe. Lorsqu’il s’agit d’un déménageur comme Ali, c’est extra. Si Moreira jouait à mes côtés, nous aurions peut-être des difficultés à nous faire respecter physiquement. Mais je me rappelle que, l’an dernier, nous fonctionnions très bien tous les trois dans un 4-3-3 où Moreira et moi changions régulièrement de côté.

Le retrait de Wilmots pourrait vous ouvrir de nouvelles perspectives au niveau de l’équipe nationale?

Marc a toujours été un peu mon père spirituel en football, il m’a bien conseillé et je lui suis redevable de pas mal de choses. S’il affirme que je peux lui succéder, je suis prêt à le croire mais tout passe par le Standard.

Sa décision vous surprend-elle?

Non car il me l’avait déjà dit. Il vient de subir sa onzième opération et quand on sait combien il se donne à fond pour revenir, ça use. Alors, s’il dit que ça ne va plus, on peut le croire sur parole. D’ailleurs, il entame sa dernière saison comme joueur.

Le Standard est-il plus fort, aussi fort ou moins fort que la saison dernière?

Ah, si j’avais une boule de cristal… Revenez me voir en fin de championnat, je vous donnerai une réponse précise. Tout ce qu’on peut dire actuellement, c’est du vent. N’en déduisez pas que je doute de nos capacités mais la seule vérité viendra du terrain. Et je pense qu’on y verra déjà plus clair après les sept premières rencontres de championnat car ce début de calendrier n’a rien d’un cadeau.

Quels enseignements pouvez-vous tirer des premiers matches amicaux?

Hormis Casablanca, que nous avons battu 1-0 grâce à un but de Lukunku, nous n’avons pas encore affronté suffisamment de grosses équipes. Dans les petits matches, nous avons beaucoup marqué et notre première demi-heure à Den Bosch était prometteuse mais le match a ensuite été arrêté par la pluie. On devrait en savoir beaucoup plus après notre rencontre face à Moenchengladbach, samedi prochain.

Le programme de matches amicaux est-il assez corsé?

Il n’est pas toujours aisé de trouver des adversaires. Il faut que les programmes coïncident, il y a des impératifs financiers. Casablanca, c’était viril et fort techniquement. Nous avons tout de même disputé des matches tous les trois jours, chaque fois à un bon rythme, même quand il y avait entraînement le matin.

Une saison sans Coupe d’Europe, c’est dur à vivre?

Bien sûr. Pour nous, ces matches sont la cerise sur le gâteau. C’est pour cela que nous devons tout faire pour y être. Je regarde toujours ces matches en me disant que nous devrions être là.

D’autant que vous êtes sans doute le joueur qui comprend le mieux les fans du Standard. Est-il difficile de porter le maillot du club dont on est supporter?

Non, au contraire, cela me donne des forces supplémentaires. Je me sens toujours mieux à domicile. Après le match, lorsque je me dirige vers leur tribune, je communie avec eux, j’en ai des frissons. Quelque chose de spécial se passe entre eux et moi. J’aimais bien les supporters de Schalke et je crois qu’ils m’appréciaient mais ce n’était pas encore pareil. Ici, c’est quelque chose qui vient du plus profond de mon coeur. Quand je ne jouerai plus, je retournerai au stade en supporter.

Au coeur du Hell Side, comme avant?

Quand je serai seul, oui. Mais j’ai deux filles, ce n’est pas une place pour elles, même si c’est beaucoup plus calme qu’avant.

Patrice Sintzen

« Je n’ai jamais demandé de partir »

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