Des favelas au Maracana

Entre les blagues de Nicolas Lombaerts, la vie autour du camp de Mogi das Cruzes et Copacabana.

Dans la foulée d’une première victoire face à l’Algérie, retour sur toutes les petites anecdotes qui ont émaillé le séjour des Diables durant une semaine.

Une réalité ignorée des Diables

Un petit tour dans les environs de l’hôtel des Diables nous révèle tout le paradoxe de la société brésilienne. L’hôtel cinq étoiles est situé un peu à l’écart de Mogi das Cruzes, cité sans attrait, qui cumule tous les inconvénients des villes (bruit, pollution, trafic). Ça ne sert donc à rien aux Diables Rouges de faire le mur, ils ne trouveraient rien de bien charmant de l’autre côté de leur bulle de verre. A peine êtes-vous sorti de l’hôtel que vous tombez sur un champ de pylônes électriques, véritable insulte au paysage. En face, trônent une petite chapelle et un cimetière abandonné.

A 500 mètres, à peine, de l’hôtel des Diables, vous découvrez une petite favela : routes cendrées, maisons en dur mais toits en tôle, avec des râteliers en bois comme conteneurs à poubelles. La pancarte Brasil a beau donner de la couleur à tout cela, cela reste des supports pour poubelles ! Un peu plus loin, vous avez des vendeurs de pneus (on en voit plus que des restaurants ou des épiceries) qui arborent le drapeau belge. Quand on demande au patron pourquoi il a mis nos couleurs, il nous répond :  » C’est un clin d’oeil à la présence de vos joueurs dans notre ville. Vous êtes journaliste ? Dites à vos collègues que s’ils tombent en panne, ils viennent chez nous. On les accueillera avec le sourire.  » Le message est directement transmis à MarcDegryse, qui, le matin même, alors qu’il partait voir Uruguay-Angleterre au stade Itaquerao de Sao Paulo, avait découvert qu’un des pneus de sa voiture, était crevé.

Alors que l’on traverse le centre de Mogi das Cruzes, dépassant quelques vendeurs de fruits sur le bord de la route, on voit un énième restaurant aux couleurs belges. Fermé à chaque fois qu’on passe devant, on décide de revenir à la Casa de Assados en début de soirée. On nous accueille les bras ouverts.  » C’était une façon de dire aux Belges – bienvenue mais on est surpris : on ne voit aucun Belge. Où sont les supporters ? Ils viennent quand même tous les jours aux entraînements, non ?  » Quand on lui explique que l’entraînement n’est ouvert qu’aux journalistes et que la plupart des supporters belges sont basés à Rio, il exprime sa déception.

Le one man show

Quand il s’agit de parler de la Russie, on envoie évidemment NicolasLombaerts en conférence de presse. Alors que je vous racontais que la semaine passée, il nous avait offert une conférence de presse pour rien, en répondant… sans vraiment répondre, le défenseur du Zenit a corrigé le tir en sortant plusieurs blagues. A la question de savoir dans quel état la Russie pouvait prendre une élimination directe, il a répondu :  » Je pense qu’ils vont aller plus loin, dans leur élan de l’Ukraine, et envahir toute l’Europe ! « . Avant cela, il avait déjà fait rigoler toute l’assemblée, en affirmant qu’il avait été surpris par les choix tactiques de FabioCapello.  » Si j’étais le sélectionneur russe, j’aurais mis IgorDenisov à tous les coups. Mais je connais les joueurs russes depuis plus longtemps que Capello, c’est peut-être pour cela que j’aurais agi de la sorte.  » Il a également allumé quelque peu IgorAkinfeev en disant :  » Normalement, c’est un bon gardien. Il ne commet pas ce genre d’erreurs. Il aurait mieux fait de commettre cette faute en championnat, ce qui nous aurait permis d’être champion.  » Enfin, à la question d’un journaliste qui demandait si c’était dans la mentalité russe de spéculer, il a répondu en rigolant :  » Ils sont stupides ou quoi ? Tu penses qu’ils ne savent pas compter ? Capello le fera pour eux, alors.  »

Pour le reste, il a montré beaucoup de recul par rapport aux choses, affirmant qu’il n’avait pas de stress et qu’il avait d’autres centres d’intérêt que le football, ce qui lui permettait de bien vivre le fait de ne pas occuper une place de titulaire. D’ailleurs à la question de savoir si, après ses prestations en Ecosse et en Croatie, il ne s’attendait pas à rester dans l’équipe, il a été très clair :  » Non. Il y a une hiérarchie. C’est comme cela et cela va rester comme cela.  » Dernière saillie : quand on lui demande si la Russie constituerait un adversaire spécial pour lui :  » Oui, si je joue « . Toujours avec le sourire avant de conclure par un  » On a quand même bien rigolé « . Bref, la conférence de presse de Lombaerts rentre au panthéon des meilleures conférences de presse du séjour brésilien. Comme celle de VincentKompany, au stade Mineirao, la veille du match. Mais dans un tout autre style.

Salve Rainha

Sur la route qui mène de Guararema, notre camp de base, à Mogi das Cruzes, le camp des Belges, une petite chapelle bleue, intitulée Salve Rainha et dédiée à la Sainte Vierge se situe à flanc de rocher et dans un endroit couvert de végétation luxuriante. Un jour, alors qu’une famille avait pris possession des lieux, nous nous sommes arrêtés pour demander la signification de l’endroit. La conversation s’est rapidement portée sur notre nationalité et sur le football.  » La Belgique a de bons joueurs mais si vous voulez aller loin dans le tournoi, vous devez au moins mettre toutes les chances de votre côté. Et la Vierge ne sera pas de trop. Si j’étais vous, je brûlerais un cierge pour les Diables Rouges.  »

Romelu Lukaku a gambergé

Suite à son non-match face à l’Algérie, RomeluLukaku a subi un flot de critiques. Il a revu son match, a parlé avec MarcWilmots avant de repartir du bon pied et retrouver facilement le chemin du but à l’entraînement. Il a notamment expliqué que la semaine précédant la rencontre, il n’avait pas ressenti de bonnes sensations. D’où une certaine frustration de gâcher son entrée en Coupe du Monde.  » C’est normal de se sentir frustré quand on sort après une heure de jeu « . Cependant, il n’a pas voulu lancer trop de fleurs à son concurrent, DivockOrigi, bien mieux dans son match.  » Le contexte était plus facile pour lui. Il y avait plus de mouvements, plus de circulation de balle et on jouait donc davantage dans la profondeur à ce moment-là.  »

Rio, Copacabana et Maracana

Deux jours avant le match face à la Russie, alors que l’on venait d’arriver à Rio, on a croisé plusieurs Belges très confiants (d’autres au bout du rouleau, voir cadre) quant à la suite de la Coupe du Monde.  » De toute façon, on est venu ici pour faire la fête. C’est extraordinaire de se retrouver avec des supporters mexicains, équatoriens, honduriens. On sent qu’on est en Amérique du Sud car on voit beaucoup plus de supporters de ces pays que d’Européens « , explique l’un d’eux. Toujours sur Copacabana, pendant qu’une partie des suiveurs belges croisaient MichelD’Hooghe, nous faisions la causette avec Georges Grün, arrivé quelques instants plus tôt, et qui venait de passer une semaine avec les sponsors de la Fédération à Buzios.

Le lendemain matin, il y avait une ambiance différente dans le bus nous menant au Maracana. Beaucoup de journalistes n’arrivaient pas à cacher leur excitation de pénétrer dans l’arène la plus célèbre du monde, multipliant les selfies. Pendant toute la semaine, les joueurs avaient avoué développer un sentiment comparable vis-à-vis du Maracana. Vincent Kompany a d’ailleurs déclaré :  » J’ai visité beaucoup de stades en Europe et pour moi, il y en a deux mythiques : Wembley et le Maracana.  » Si de l’extérieur, ne ressort du Maracana qu’une masse de béton, le stade prend tout son ampleur vu du haut, du Corcovado ou de l’avion. Et on remarque alors que tout Rio gravite autour de ce temple. L’intérieur rénové offre une sensation d’équilibre. On ne se sent jamais oppressé par la grandeur de ce stade.

La déclaration

On la doit à Vincent Kompany appelé à commenter l’élimination de l’Angleterre :  » Ma femme est anglaise. Je pense que mes enfants sont belges et elle pense qu’ils sont anglais.  »

Bière belge bloquée à la douane

Les fûts de bière belge qui devaient approvisionner le camping des supporters ont été bloqués à la douane de l’aéroport de Rio de Janeiro. En cause ? La non-conformité des fûts à la loi brésilienne (les fûts sont en effet des fûts réutilisés). Il a fallu l’intervention d’AB Inbev, un poids lourd de l’économie brésilienne, pour débloquer la situation.

PAR STÉPHANE VANDE VELDE AU BRÉSIL – PHOTOS: BELGAIMAGE/YORICK JANSENS

 » Vous croyez que les Russes sont stupides et qu’ils ne savent pas compter ?  » Nicolas Lombaerts

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