Déesse de France

Le coach de Valenciennes parle d’Ann Wauters et du Final Four de l’Euroligue Féminine.

A 39 ans, Laurent Buffard possède déjà une carte de visite bien fournie. Il débuta en 1986 comme assistant-coach à Cholet. En 1989, il devint coach principal à Sceaux, puis à Gravelines (91-95) et à Toulouse (95-99). Parallèlement, il s’occupa également de l’équipe de France masculine des -20 ans de 1998 à 2000. Depuis 1999, il est le coach de l’USVO (Union Sportive Valenciennes Olympic) et donc d’Ann Wauters.

Entraîner des filles ou des garçons, est-ce très différent?

Laurent Buffard: Personnellement, je n’ai rien modifié à mes méthodes d’entraînement. Je dispense les mêmes séances, avec la même intensité, la même envie, la même détermination. Certes, il existe une différence au niveau physique. Les garçons sont plus aériens, plus doués pour le un-contre-un. Les filles doivent plus compter sur le collectif. Il y a aussi une différence au niveau de l’approche psychologique. Avec les filles, il faut faire attention à son vocabulaire. Elles sont sensibles. Mais j’aime bien coacher les filles. A Valenciennes, je dispose du gratin. La saison dernière fut exceptionnelle, avec quatre titres remportés: championnat de France, Coupe de France, Tournoi de la Fédération et Euroligue.

Contrairement à l’an passé, lorsque l’USVO avait organisé – et remporté – le Final Four à Liévin, vous défendrez cette fois votre titre européen à Bourges, chez votre rival national…

Oui, avec d’emblée une demi-finale contre Bourges, précisément. Valenciennes-Bourges, c’est un peu Charleroi-Ostende sauf qu’ici, cette rivalité se prolonge jusqu’en Euroligue. C’est Bourges qui, en 2001, nous avait battu de deux points lors du Final Four en Sicile. Loin de nous décourager, cet échec a provoqué un déclic et une immense envie de revanche, qui s’est concrétisé l’an passé. La victoire à Liévin a donné lieu à une fête inoubliable. Si, par bonheur, nous battons Bourges vendredi, il faudra encore se farcir les Russes Ekaterinburg en finale, qui font figure d’épouvantail avec leurs sept championnes ou vice-championnes du monde.

Qu’y a-t-il de changé à Valenciennes par rapport à la saison dernière?

L’effectif a été modifié, à commencer par Teresa Edwards. Elle avait été trois fois championne olympique et deux fois championne du monde et acceptait mal son statut de dixième joueuse du club. Timea Beres est désormais une joueuse majeure de l’équipe hongroise de Pecs. Nathalie Lesdema est partie en Italie. Isabelle Fijalkowski a pris sa retraite. L’internationale française Nicole Antibe et l’Australienne Suzy Batkovic sont arrivées. L’équipe a été rajeunie. Nous pensions être moins performants, mais nous avons déjà remporté deux trophées: l’Open de la Ligue et le Tournoi de la Fédération.Numéro un continentale

Et Ann Wauters, dans tout cela?

Elle est la n°1 européenne incontestée. Son palmarès est évocateur: deux fois MVP du Final Four européen, deux fois Joueuse Européenne de l’Année, draftée en n°1 de la WNBA voici deux ans. Je l’entraîne depuis quatre ans. Elle est encore jeune, mais déjà expérimentée. Elle est désormais surveillée de près, mais répond toujours présente. Lorsqu’elle rate un match, c’est généralement parce qu’on a gagné de 30 points et qu’on n’avait pas besoin d’elle. Elle a le mental d’une gagneuse. Elle fait jouer les autres, mais apporte aussi ses points, ses rebonds, ses contres et sa défense. Elle a une vitesse exceptionnelle pour sa taille et une détente qui ne l’est pas moins. Elle a aussi une folle envie d’aller le plus loin possible. Elle est très réceptive, toujours à l’écoute des conseils qu’on peut lui prodiguer.

Financièrement, demeure-t-elle abordable?

Ce qu’elle gagne, elle le mérite. Je refuse de juger des gens sur des sommes d’argent, je préfère le faire sur le travail. Le budget de Valenciennes est d’à peine deux millions d’euros. Cela demeure appréciable, même si les Russes, les Hongroises et les Polonaises commencent aussi à avoir de gros budgets. Ann pourrait peut-être gagner plus ailleurs, mais serait-elle heureuse en jouant loin de chez elle, devant 150 personnes et entourée d’autres joueuses d’un niveau inférieur qui lui feraient porter tout le poids de l’équipe?

La sentez-vous un peu fatiguée après plusieurs saisons d’affilée sans répit?

Elle a sans doute besoin de souffler. C’est un choix qu’elle-même doit effectuer. Elle commence à bien se connaître, mentalement et physiquement. Elle fera sans doute l’impasse sur la WNBA cet été, afin de préparer le championnat d’Europe avec la Belgique. Je pense d’ailleurs que votre équipe nationale pourra faire très bonne figure en Grèce. J’étais présent à Namur, en novembre, lors de la qualification. C’était une très belle prestation, face à des Lituaniennes pourtant habituées de l’Euro. La Belgique a beaucoup progressé. La présence de cinq joueuses belges dans le championnat de France en atteste.

Comment se débrouillent les autres joueuses belges en France?

Pas mal. A Mondeville, Nele Deyaert s’affirme comme une ailière moderne. A Villeneuve-d’Ascq, Anke De Mondt est une n°2 adroite et Kathy Wambe est l’une des meilleurs meneuses du championnat. A Clermont, Dana Boonen a énormément joué suite aux blessures qui ont décimé son équipe.

Daniel Devos, envoyé spécial à Valenciennes

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