» DANS MA TÊTE, J’ÉTAIS LE FILS DE BECKHAM « 

Fils du chanteur Marka, Roméo Elvis ne pouvait grandir autrement qu’en amoureux de la langue française, du rouge et du RWDM. Entre des délires solos et reptiliens, le rappeur linkebeekois de 21 ans vient donner un peu de Morale dans ce monde de brutes.

Dans Nostalgie, tu te surnommes  » Romelu Elvis « . Et sur 2013, tu rêves de  » barrer la route à Wayne Rooney « . Ça fait pas mal de références à Everton et United, faut que tu t’expliques…

ROMÉO ELVIS : C’est vraiment con mais quand j’entends  » Romelu ! « , ça me titille l’oreille. Je me sens proche du joueur. Son prénom ressemble au mien donc je voulais faire un jeu de mots par rapport à ça. Pour Wayne Rooney, dans le morceau, j’explique que  » j’étais vraiment nul au foot en club « . Je jouais au KHVC Linkebeek. J’avais aucune place sur le terrain, aucune science du jeu, je me faisais pas vraiment de potes… Je détestais ça en fin de compte. Du coup, pendant un moment, j’en étais dégoûté. Et puis, après, j’ai commencé à redevenir fou amoureux du foot. Je suis retourné en club et j’étais de nouveau avec des connards, toute cette merde de groupe. Cinq ou six ans après, j’étais toujours la pire tête…

Comment t’as fait du coup ?

ELVIS : J’ai commencé à jouer seul. Encore tard hein, à 15 ans. Vu que le fils de Beckham s’appelait Roméo, dans ma tête, je me disais :  » Je suis le fils de Beckham « . Je m’imaginais toute une carrière, j’étais à Liverpool. Vu que je suis fan de Liverpool, Wayne Rooney m’a toujours énervé.

Mais s’imaginer fils de Beckham en étant à Liverpool, c’est pas un problème ?

ELVIS : Non, parce qu’à partir du moment où t’es assez calé pour t’imaginer que t’es le fils de David Beckham, y a plus trop de limites (rires). C’était juste un prétexte pour me rapprocher d’une réalité. Je m’imaginais que j’avais été racheté par ce club-là. Mais c’était même pas parce que c’était Beckham, c’était juste pour l’histoire du prénom. A partir de là, je me suis fait tout un trip. Quand j’étais gamin, j’avais des amis imaginaires et mon plus gros trip, c’était celui-là.

Et tu t’imaginais quel poste ?

ELVIS : Un truc complètement inimaginable en plus : attaquant. Un grand attaquant, tout fin, à la pointe. Un mec qui mettait tous les goals. Chaque fois que je jouais, je me faisais la passe, je dribblais Wayne Rooney, je tirais et ça faisait but. Normal, y avait pas de gardien (rires). Après, j’entendais le commentateur, le cri de la foule… ça allait vraiment loin. Quand il y avait des gens qui arrivaient, ça me bloquait complètement. Et le meilleur dans tout ça, c’est qu’à force, j’ai commencé à devenir technique, un peu meilleur, voire bon. A la fin, j’ai fini par avoir ma place sur un terrain. C’était vraiment grâce au fait que j’avais joué seul. J’ai dû faire ça pendant deux ans, presque tous les jours, dès que j’avais fini d’étudier.

Pourquoi Liverpool ?

ELVIS : 2005, le 3-3 à Istanbul. C’est là que mon intérêt pour le foot a commencé à grandir. Je regardais le match avec mon daron (le chanteur Marka, ndlr) et à la mi-temps, il m’a envoyé me coucher. C’était 3-0, il m’a dit que de toute façon, c’était fini. Moi, j’ai la haine, je vais dormir. Et le lendemain, cet enfoiré me fait :  » Tu sais pas ce que t’as raté !  » J’étais choqué. Mais à partir de là, je suis vraiment devenu fan. C’est vraiment le club qui ne lâche jamais rien. Puis, il y a la ferveur, l’ambiance de ouf et je trouve qu’il y a encore quelque chose de noble. Pas comme les Manchester, qui sont vraiment devenus des gros monstres.

Justement, en parlant de ton père, dans Serpent de Fer, tu évoques un match potentiel Brussels-Barça…

ELVIS : L’idée, c’était de faire une référence à un match qui n’est pas celui-là mais Brussels-Galatasaray. C’était en 2006, après la Coupe du Monde, au Roi Baudouin. Le Galatasaray, champion de Turquie à l’époque, nous avait pété (1-4). C’était un match amical, mais je trouvais ça absurde comme rencontre. Faire jouer un des plus mauvais clubs belges contre le plus gros d’un autre pays… C’est pour ça que je dis  » c’est plié  » dans le morceau, c’était un petit clin d’oeil.

C’est une histoire de famille, le RWDM ?

ELVIS : Ma mère et ma soeur s’en battent les couilles, mais mon père est un gros fan, donc moi aussi. Le RWDM, c’est un club qui fait mal au coeur. C’est un club qui a brillé pendant des années, puis qui a perdu son nom plein de fois. Cette référence, c’est aussi pour faire plaisir à mon père. Lui y a joué quand il était jeune, il avait sa carte après, il a même été parrain du FC Brussels… C’est quelque chose de viscéral pour nous. Alors que quand il y a eu Union-RWDM (le 10 janvier dernier, ndlr), j’étais du côté de l’Union Saint-Gilloise. J’ai un pote qui est pour l’Union et qui m’avait chopé une place à la dernière minute. Mon père était en face, il m’a bien chambré après la victoire (0-1).

T’allais souvent voir des matches avec lui ?

ELVIS : Ouais, quand c’était le RWDM, puis le Brussels. J’y suis moins allé après. J’avais été voir Belgique-Portugal au Heysel aussi, en 2007 (1-2). Ce qui m’a surtout marqué, ce sont pas des matches, mais des rencontres. J’avais rencontré Robert Waseige à l’époque de la Coupe du Monde 2002. La même année, j’ai vu Cantona à Ostende pour du beach-football. Je leur avais serré la pince et tous ces gens-là, tu vois que ce sont des gens qui travaillent dans le milieu sportif. Quand ils te serrent la main, ils te la défoncent ! C’est pas du :  » Ça va ou quoi, mon frère ? « , c’est vraiment des poignées de mains de gros porcs, à l’ancienne. Alors que les footballeurs d’aujourd’hui, eux, c’est vraiment des petites caresses, en mode tarlouze. Cette différence entre les deux m’a marqué.

PAR NICOLAS TAIANA

 » Le RWDM, c’est quelque chose de viscéral pour mon père Marka et moi.  » – ROMÉO ELVIS

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