» Dans la vie, tu peux te rater… « 

Le gardien des Eléphants termine la compétition sans but encaissé mais sans trophée. Retour sur une nouvelle énorme désillusion.

Il aurait pu être le héros de la finale, le sort en a décidé autrement. Copa avait jusqu’à la séance des tirs au but tout sorti. A l’image de ces deux ballons brûlants, l’un dès la première minute, l’autre dans les prolongations. La Côte d’Ivoire pensait avoir trouvé le digne de successeur d’Alain Gouaméné, victorieux sans concéder le moindre but de la seule CAN victorieuse des Eléphants en 1992 au Sénégal. Quelques heures après la finale, le sosie de Tupac Shakur tente de relativiser cette énième désillusion qui frappe la séléfantino ivoirienne et revient sur sa propre CAN.

Comment analyses-tu cette finale ?

C’est les tirs au but, ça ne veut rien dire. C’est une loterie. Mais il faut reconnaître que, dans le jeu, la Zambie était meilleure. Il n’y a pas photo. Il faut leur tirer un grand coup de chapeau. Une CAN, ça se gagne, la Zambie avait la recette. Pas nous. En face, il y avait une très bonne équipe qui nous a posé énormément de problèmes. Sur cette finale, ils nous ont été supérieurs. Tant mieux pour eux, tant pis pour nous. Ce n’est pas la fin du monde même si on est tous déçus.

Tu considères cette seconde place comme un énorme échec ?

On court après la victoire depuis 2006. C’est un échec mais on ne peut pas rester là-dessus. L’année prochaine, on sera peut-être victorieux en Afrique du Sud. A présent, il faut tirer les leçons. Le bilan est quand même positif : on finit meilleure défense, meilleure attaque. Dommage, au final, on n’a rien en mains…

Même si c’est le gardien zambien Kennedy Mweene qui se retrouve dans le meilleur onze de la CAN, beaucoup d’observateurs te considèrent comme le meilleur gardien de la compétition. As-tu aussi le sentiment d’avoir particulièrement brillé dans ce tournoi ?

Toutes ces louanges, ça fait évidemment plaisir, on va pas se mentir. D’autant qu’en Afrique, le poste de gardien est très sensible, et beaucoup discuté. Il n’y a pas si longtemps encore, j’étais visé par la critique, une critique ivoirienne qui peut parfois être très dure. Je ne joue pas dans un grand championnat comme la plupart des joueurs de la sélection, c’était peut-être plus facile de s’en prendre à moi.

Tu as souffert de ce manque de reconnaissance ?

Non jamais. Je sais d’où je viens. Le métier de gardien de but, je l’ai appris sur le tard à 20 ans. Arriver où j’en suis en débutant si tard, c’est plutôt pas mal non ? Dans la vie, tout est question de temps. Il faut savoir accepter l’instant présent même si ça rigole pas toujours…

Comment expliques-tu qu’il manque toujours ce petit quelque chose à la Côte d’Ivoire pour ramener le trophée ?

Le foot de haut niveau, c’est une histoire de détails. Cette fois, on avait le souhait de ne rien laisser au hasard. On s’est retrouvé autour d’une table et on a discuté de ce qu’il fallait faire et ne pas faire si on voulait aller au bout. Les trucs privés qui pouvaient créer des tensions, on les a laissés au vestiaire. Notre nouveau coach a mis de l’ordre, il a veillé à ce que l’on soit mis dans les meilleurs conditions. Ça n’a malheureusement pas suffi.

 » Tensions positives « 

Comment est perçu Didier Drogba par le groupe ?

Malgré son énorme carrière, Didier c’est quelqu’un de simple, qui trouve les mots justes pour nous galvaniser. Comme peut le faire aussi quelqu’un comme Kolo Touré avec qui j’ai partagé ma chambre, ou Didier Zokora. Ils sont plusieurs à se partager le rôle de leader de la sélection.

En conférence de presse, Zahoui a parlé des tensions qui ont été aplanies. Elles étaient de quel ordre ?

Faut pas non plus exagérer. S’il y avait des tensions, j’appelle ça moi des tensions positives, des tensions de gagneur. Comme il peut y en avoir à Lokeren ou à Anderlecht.

On a le sentiment que durant cette CAN tu as simplifié ton jeu prenant moins de risques qu’en Belgique. Est-ce parce que la pression est tout autre ici qu’à Lokeren ?

Non je n’ai pas changé. Je suis toujours le même Copa. J’ai l’impression qu’en Belgique on a voulu me coller une étiquette de gardien farfelu. Mais j’ai toujours été un gardien qui prend des risques parce que la vie est faite de risques. Regardez le gardien tunisien qui s’est loupé en quarts et a envoyé le Ghana en demi-finale, et bien vous êtes beaucoup à ne pas comprendre sa sortie, moi je la comprends parfaitement. Dans la vie, tu peux te rater, c’est comme ça.

En voyant le parcours de tes copains de l’ASEC Mimosas qui se sont pour la plupart retrouvés dans de grands championnats, les envies-tu ? Regrettes-tu certains choix de carrière ?

Je n’ai aucun regret. Aucun ! Je remercie le Bon Dieu de tout ce qui m’est arrivé même si ça n’a pas toujours été facile. Si je suis en sélection de la Côte d’Ivoire, c’est grâce à la Belgique. C’est votre championnat qui m’a permis de me mettre en valeur. Et je vous en remercie. Je suis fier d’être  » belge « .

PAR THOMAS BRICMONT, AU GABON

 » Il faut reconnaître que, dans le jeu, la Zambie était meilleure. Il n’y a pas photo. « 

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