D’un extrême à l’autre

Le RSCA a redressé la barre au Cercle Bruges après le double affront subi contre le BATE Borisov d’abord, puis au Standard.

Après son éviction européenne contre le BATE Borisov et sa défaite en Supercoupe face au Standard, le RSCA s’est pleinement racheté lors de sa première sortie en championnat au Cercle Bruges. Certes, tout n’était pas encore parfait dans les rangs des Mauve et Blanc, et personne n’y aurait d’ailleurs trouvé à redire si, par le truchement d’Oleg Iachtchouk, les visités avaient pris l’avantage en tout début de rencontre. Mais, à force de caractère et de volonté, deux qualités qui avaient singulièrement fait défaut, depuis l’entame de cet exercice, les gars d’Ariel Jacobs ont pris progressivement le meilleur sur l’équipe qui faisait figure de révélation de la défunte saison. Jelle Van Damme, à partir d’un heading vigoureux, montra la voie à suivre avant que Jonathan Legear ne double la mise, en seconde période, au terme d’un mouvement superbement agencé par Mbark Boussoufa. En fin de rencontre, ce fut au remplaçant du Liégeois, Thomas Chatelle, de fixer les chiffres définitifs, sur penalty.

Thomas Chatelle : Le Sporting se devait de réagir et il l’a fait. Peut-être pas de manière académique mais avec les tripes, ce qui ne s’était pas toujours vérifié jusqu’ici, loin s’en faut. Cette victoire éclatante dans les chiffres face à une valeur montante de notre football, va nous faire un bien fou. Elle est susceptible, en tout cas, de nous remettre complètement en selle suite aux déboires que l’on sait. A nous, à présent, de confirmer ces bonnes dispositions devant La Gantoise. Avec un 6 sur 6, c’est sûr que nous repartirions sur de bonnes bases.

On ne peut quand même se départir de l’impression qu’Anderlecht n’était pas prêt à l’heure des premières échéances de la saison.

A l’issue de notre ultime match d’entraînement face à Roda JC Kerkrade, la plupart des observateurs, dans la presse, s’accordaient pourtant à dire que le Sporting était paré. Il aura suffi d’une contre-performance face au BATE Borisov pour que ceux-là remettent soudain tout en cause. Personnellement, je dis et je maintiens que si nous avions éliminé les Biélorusses au deuxième tour préliminaire de la Ligue des Champions, les journalistes n’auraient absolument rien trouvé à redire concernant notre intersaison. A présent, de la modestie des équipes défiées en période de préparation, jusqu’à la campagne de recrutement du club elle-même, tout, absolument tout, a été dénigré. S’il y a un aspect que je déplore auprès des suiveurs, c’est précisément cette propension à passer d’un extrême à l’autre. Au lendemain de notre qualification face aux Girondins Bordeaux, les medias évoquaient ni plus ni moins un renouveau anderlechtois. Quelque temps plus tard, après notre dégelée contre le Bayern Munich, nous étions voués aux gémonies, avant d’être encensés une nouvelle fois suite à la victoire obtenue contre toute attente à l’Allianz Arena. Ce manque de nuance m’interpellera toujours.

L’histoire repasse les plats

Vous avouerez quand même qu’une élimination face à BATE Borisov fait désordre ?

Toutes proportions gardées, elle est exactement du même tonneau que notre propre victoire en Bavière. Sur le papier, en principe, nous n’avions aucune chance de nous imposer là-bas. Mais nous n’y sommes pas moins parvenus, au même titre que notre adversaire biélorusse chez nous. C’est la glorieuse incertitude du sport qui le veut. Si on l’accepte quand elle nous est favorable, je crois qu’il faut pouvoir l’admettre dans l’adversité aussi. Même s’il convient de réduire sa marge aux proportions les plus infimes possibles. A cet égard, il y a des éléments que l’on a en main, comme la forme du moment, par exemple. D’autres, par contre, émargent à la chance ou sont du ressort du directeur du jeu. Si l’arbitre n’accorde pas un penalty pour une faute commise par Marcin Wasilewski à l’extérieur de la surface de réparation, jamais le BATE Borisov n’aurait, sans doute, obtenu un résultat aussi flatteur chez nous. Avec les conséquences désastreuses que l’on sait entre-temps. Petite cause, indéniablement mais énorme effet. A partir de là, c’est l’engrenage et on en vient à se poser des questions dans l’optique de la Supercoupe au Standard. Tout est nettement plus simple quand on part du bon pied. La preuve par ces mêmes Rouches qui se sont sublimés à Liverpool après avoir obtenu une victoire de prestige contre nous.

Jamais deux sans trois veut le dicton : avant les Biélorusses, vous aviez déjà connu les affres d’une élimination au premier tour avec Genk face au Litex Lovech et Sarajevo ?

Je pensais être quitte de cette fâcheuse tendance, d’autant plus que j’avais pris le train européen en marche l’hiver passé. Mais l’histoire s’est hélas répétée dans un contexte que je n’attendais pas, ou nettement moins, en ce sens que le RSCA a une autre dimension que le club limbourgeois. Vu ces déboires, j’étais un joueur averti au moment où le sort nous avait couplé au BATE Borisov. A priori, en effet, ce nom ne m’était guère plus familier que celui des deux opposants que j’avais rencontrés. J’étais donc logiquement sur mes gardes. Je savais qu’il y avait un danger potentiel face à cette opposition inconnue. Avec le recul, d’un point de vue purement individuel, je ne pense pas avoir été surpris. Tant à Bruxelles qu’à Borisov, j’ai fait ma part de travail. Si je regrette de ne pas avoir pu apporter davantage au plan offensif, j’ai quand même contribué à ce que l’équipe n’encaisse pas de but lorsque j’étais au jeu. Je suis dès lors plus ou moins réglo par rapport à ce qu’on attendait de moi. Même si je suis bel et bien forcé de constater que comparativement au deuxième tour de 2007-08, que j’ai terminé en boulet de canon, à l’image de l’équipe, je n’étais cette fois qu’à 75 ou 80 % de mes moyens. La faute à un manque de compétition et de rythme face à une formation biélorusse qui, elle, était rudement bien en jambes. C’est une leçon à retenir. Si nous voulons lutter à armes égales, il faudrait peut-être reconsidérer l’agencement du calendrier de football. Moi-même, je n’y serais pas réfractaire. Après trois évictions d’entrée de jeu, il y a de quoi se poser légitimement des questions et souhaiter du changement.

Pour une compétition de février à novembre

Il y aura déjà du changement cette saison avec un championnat ramené à 16 équipes en 2009-10 et des playoffs.

Je ne sais trop si cette orientation-là sera réellement heureuse. L’introduction des playoffs entraînera inévitablement un prolongement des activités sur le terrain et d’aucuns plaident déjà résolument en faveur de rencontres au cours de la période des fêtes de fin d’année, comme il en va en Angleterre notamment. Je ne pense pas que ce soit la panacée. Cette formule ne remédiera pas, en tout cas, à l’absence de répondant mesurée, en été, face à des adversaires plongés en plein championnat. A mes yeux, l’idéal, comme l’a d’ailleurs suggéré Marc Degryse, consisterait à imiter la formule en vigueur dans le Nord ainsi que dans certains pays de l’Est de notre vieux continent avec des matches agencés de février jusqu’en fin novembre par exemple. Avec une reprise fixée en janvier, cela permettrait à tous les joueurs, belges ou étrangers, de passer la Noël et le Nouvel An en famille, ce qui n’est quand même pas négligeable. En outre, avec cette mouture-là, nos représentants engagés sur la scène européenne ne seraient plus pris de court. Désolé, mais lorsqu’on se penche sur les résultats de nos clubs, à ce niveau, on est bien obligé de constater qu’aucun d’entre eux, quasiment, ne passe l’hiver au chaud. Au plan international, le football belge se résume davantage aux tours préliminaires qu’aux stades avancés des épreuves européennes. Il convient donc d’être prêts plus tôt si nous voulons mettre tous les atouts de notre côté. Pour moi, il y a matière à réflexion dans ce domaine. Et je serais pleinement favorable à cette modification. Comme tout pro qui se respecte, j’ai envie de progresser. Les matches européens sont un moyen d’y parvenir. Mais quand, comme moi, on en est malencontreusement privé d’année en année, il y a de quoi pester. C’est pourquoi une réforme serait peut-être bienvenue. Et qu’on ne dise pas que cette formule priverait les joueurs belges de vacances avec leur famille en été. Dans la plupart des clubs, la reprise a été programmée le 30 juin cet été. C’est précisément le jour où l’année scolaire se termine pour les enfants. Il n’y a de toute façon pas moyen de partir en congé avec eux dès ce moment. Et puis, le foot en été, c’est quand même plus gai pour tout le monde.

Une autre façon de durer en Europe, c’est peut-être aussi de changer de club. L’année passée, il avait été question, pour vous, des Girondins Bordeaux. Vu qu’Anderlecht compte dégraisser et que vous occupez une place où il y a l’embarras du choix, vous sentez-vous concerné ?

C’est vrai qu’avec Legear et Stanislav Vlcek, pour ne citer qu’eux, je suis soumis à une concurrence qu’on ne rencontre pas à d’autres postes et qu’il pourrait donc être tentant, pour la direction, d’élaguer à ce niveau. Mais hormis Roland Lamah, qui a régulièrement émis son désir de tenter sa chance ailleurs, et qui est parti pour Le Mans, personne n’a envie de changer d’air. De Lucas Biglia à Mbark Boussoufa, en passant par tant d’autres, je pense qu’on sent tous qu’on a une dette vis-à-vis du club. Celui-ci, l’année-même de son centenaire, s’éveillait à de grandes ambitions mais les joueurs, n’ont hélas pas répondu à cette attente. Certains, dans le même cas de figure, seraient peut-être tentés de prendre la tangente. Ici, j’ai l’impression que tout le monde assume. Et sûrement moi. Je viens à peine de débarquer au Parc Astrid et que je suis encore loin d’avoir fait le tour du propriétaire et loin aussi d’avoir donné ma pleine mesure. Si je m’en vais un jour, ce sera avec le sentiment du devoir bien accompli, ce qui n’est pas le cas jusqu’à présent. Tant que je n’aurai pas fait mon trou, je ne serai pas entièrement satisfait.

Stimulé par la concurrence

Vous étiez une valeur sûre à Genk. Au RSCA, vous êtes réserviste plus souvent qu’à votre tour. Comment vivez-vous cette situation ?

La saison passée, nonobstant une blessure, je pense avoir apporté ma petite pierre à l’édifice. Cette fois, la mise en train a été un peu plus laborieuse mais le meilleur est à venir, j’en suis certain. La concurrence ne me rebute pas, en tout cas. Au contraire, elle me stimule.

Comme joker, il vous est arrivé à plus d’une reprise de faire basculer le cours d’un match. On a pu le vérifier lors de la finale de la Coupe face à Gand, où vous aviez été décisif, au même titre qu’Ahmed Hassan.

Titulaire ou réserviste, je ne vise qu’une chose : être irréprochable. Je veux toujours pouvoir quitter le terrain la tête haute. C’était le cas face à mes anciennes couleurs, c’est un fait.

Vous retrouvez ces mêmes Buffalos le week-end prochain. Cela reste un match spécial ?

Rencontrer Genk, le club où j’ai passé 8 saisons avant de passer dans les rangs du RSCA, c’est quand même autre chose. La Gantoise, c’est déjà loin dans ma mémoire. J’ai connu ce club au moment où Jean Van Milders en était encore le président et Johan Boskamp l’entraîneur, c’est tout dire. Mais j’en conserve de bons souvenirs, malgré tout. Et je tiens son nouvel homme fort, Ivan De Witte, et le manager Michel Louwagie en très haute estime.

Que vous inspirent les Gantois dirigés à présent par Michel Preud’homme ?

Je pense que l’ex-coach du Standard est susceptible de leur conférer une nouvelle dimension. Gand sera sûrement une des équipes à suivre cette saison, à l’instar du Standard, du Club Bruges et Genk. Et d’Anderlecht, évidemment ( il rit).

par bruno govers

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