CROIZET DES CHEMINS

Homme en vue d’un OHL soudain ambitieux depuis l’arrivée d’Emilio Ferrera, Yohan Croizet (23 ans) rêve aujourd’hui des PO2.

Parti en croisade contre Jacky Mathijssen suite à une série de cinq revers consécutifs concédés par OHL au mois de novembre, YohanCroizet revit depuis l’arrivée d’EmilioFerrera dans le Brabant flamand. Il ne lui avait d’ailleurs pas fallu plus de 75 secondes pour manifester sa joie de travailler avec le cadet de la fratrie. C’était à Anderlecht, le 29 novembre dernier. Débarqué trois jours plus tôt à Louvain, Ferrera avait manifestement su trouver les mots pour remobiliser ses troupes, à commencer par son numéro 10, son métronome. L’homme par qui toutes les actions passent dorénavant. Buteur en début de match, mais surtout brillant passeur décisif au Parc Astrid, Yohan Croizet venait, malgré la défaite (3-2), de jeter les bases d’une nouvelle partie de saison qui a pour but d’éviter une fâcheuse 15e place au décompte final :  » Dans ce cas-là, la saison se finirait très tôt (le 12 mars, NDLR). Et même si beaucoup disent que les PO2 ne sont pas très excitants, nous c’est notre gagne-pain, il y a toujours des primes et de l’argent à prendre. Et puis, on dégage une grosse confiance en ce moment, ce serait dommage de ne pas en profiter.  »

Visiblement regonflé à bloc par le départ de Mathijssen ou l’arrivée de Ferrera, c’est selon, Yohan Croizet jubile. Et il a de quoi, parce qu’à l’entendre, ses doutes à l’encontre de Jacky Mathijssen ne datent pas d’hier :  » L’an dernier, déjà, les résultats étaient peut-être là, mais notre jeu était moche. Il faut dire ce qui est, on n’était pas élégant à voir jouer. Je ne peux pas lui enlever qu’on est monté avec lui, mais la D1, c’est un autre monde et à chaque match, tout le monde s’apercevait qu’on changeait de tactique, que l’équipe n’était plus la même, ce n’était pas facile.  »

Surtout pour lui, qui était jusqu’il y a peu le dépositaire du jeu d’une équipe en crise de confiance. Poste ingrat s’il en est :  » Je me posais des questions. Parce que quand les résultats ne suivent pas et que tu es titulaire, ce n’est pas évident et ce n’est pas en te faisant crier dessus pour des trucs inutiles que tu reprends le dessus. L’ancien coach (il ne dira jamais son nom, NDLR) voulait que j’aille voir un psychologue pour parler de mes problèmes, ce que j’ai fait. Malheureusement pour lui, le psy m’avait donné raison. Non, franchement son départ, ça nous a enlevé un poids parce qu’on ne prenait plus de plaisir sur le terrain.  »

PAS UN SABOTEUR

Reste qu’en allant de leur plein gré voir la direction louvaniste pour demander la tête de leur entraîneur, les petits gars d’OHL savaient qu’ils n’auraient plus le droit à l’erreur face à un nouveau mentor. Parce qu’on ne sabote pas sciemment deux coachs la même année.  » Honnêtement, je ne pense pas avoir participé à un sabotage. Je ne pense pas m’être donné moins avec Mathijssen qu’avec Ferrera, mais la vérité c’est qu’on fait des petits déplacements qu’on ne faisait peut-être pas avant parce qu’on nous parle beaucoup. Mais dans les deux cas, tu joues quand même toujours pour le club, pour tes primes de matchs,… On reste des professionnels.  »

Et en Belgique, un professionnel est souvent un homme comme les autres, il a besoin de sous. Parce qu’avant d’atteindre le sommet du football belge grâce ou à cause de Jacky Mathijssen, le joueur formé à Metz a pas mal galéré. Et comme beaucoup de Français à la peine dans l’Hexagone, le détour par la Belgique s’est imposé à lui-même. A l’été 2013, Croizet débarque donc à Virton. Un club, une division et des ambitions à mille lieues de ses rêves de gamins :  » On ne va pas se mentir, à mon arrivée en Belgique et comme tous Français qui débarquent, mon objectif, c’était de faire une saison à Virton et puis de partir.  »

MERCI, FRANK DEFAYS !

Ses premiers galops d’entraînement ne lui donnent pas tort. La qualité de la formation reçue pendant près de dix ans à Metz lui suffit à surnager à l’entraînement. Une palette technique assez large que pour se mettre d’entrée de jeu son nouveau mentor dans la poche. L’histoire raconte même qu’après le premier entraînement, FrankDefays est allé trouver PhilippeEmond, président de Virton, pour lui dire toute son admiration devant sa nouvelle recrue.  » Président, il y a un loup ! L’autre là, il fait des gestes qu’on ne voit même pas au Barça !  » Yohan Croizet n’est pas là depuis une semaine qu’il semble déjà être en passe de réussir son pari : quitter Virton au plus vite pour s’offrir les sommets.

Avec le recul d’un garçon bien dans sa peau et fier de sa réussite, Croizet reconnaît qu’il doit beaucoup à Frank Defays :  » Il a su me cerner par rapport à mon jeu, à mon caractère aussi. Sur le terrain, j’ai faim, je peux crier sur les autres alors que je suis très réservé dans la vie. Lui, il a su me dire de me calmer, d’apprendre à gérer mes émotions en match, il m’a fait comprendre que ça me faisait perdre beaucoup d’énergie de m’agiter en permanence sur les autres. Sans lui, je ne serais peut-être jamais parti à l’OHL.  »

BIENVENUE EN PROXIMUS LEAGUE

En apprenant à se ménager des plages de repos plus importantes, Yohan Croizet va donc tout doucement prendre le chemin du professionnalisme et commencer à faire parler de lui en Belgique. Le Saint-Trond de Yannick Ferrera s’intéressera à lui, mais n’ira pas au bout de ses idées : pas encore assez pro pour le dernier des Ferrera.  » Il faut dire qu’à l’époque, je n’étais pas encore au top. Je ne me couchais pas forcément à de bonnes heures, par exemple. C’est des choses qu’il a su et qui ne lui plaisaient pas.  » Jacky Mathijssen fera moins de cas des heures de sommeil perdues.

 » J’ai appris à l’intersaison qu’OHL me visionnait. Je crois qu’ils sont venus me voir 12 ou 13 fois parce que j’avais du mal à reproduire en match ce que je faisais à l’entraînement. Je ne vais pas dire que c’était facile à l’entraînement, mais c’est vrai que je n’avais pas énormément de difficulté. En match, c’était plus compliqué parce que ça jouait super physique et que les matchs étaient très fermés.  » Bienvenue en Proximus League.

TOMBÉ SOUS LE CHARME

S’il a beau reconnaître qu’il y a un monde entre la D2 française et son équivalent belge –  » ça n’a rien à voir. En France, il y a des équipes qui jouent au ballon, il y a des clubs qui ont des vrais belles infrastructures « , le Français est aussi obligé d’admettre qu’il est entre-temps tombé sous le charme du football belge :  » Il y a quelques années, personne ne parlait de vous et puis voilà que vous êtes numéro 1 mondial et que Gand élimine Lyon en coupe d’Europe, forcément, ça impressionne. Quand on voit ça, on ne peut plus dire que la Belgique est inférieure à la France.

Mais bon, la Ligue 1, faut pas la nier non plus. Que ce soit Guingamp, Laval ou n’importe quel club de Ligue 1 qui m’appelle, j’en serai honoré. En même temps, maintenant, j’ai l’avantage de connaître la Belgique alors que la Ligue 1 pour moi, c’est l’inconnu.  » Depuis qu’il a rejoint la Belgique, Yohan Croizet est surtout devenu un vrai pro. De ceux qui, tous les lundis, analysent solennellement chacun de leur match en vidéo pour apprendre de leurs erreurs. Il paraît même que l’homme est devenu un couche-tôt. Tout ça pour plaire à Emilio Ferrera. À moins que ce ne soit pour son neveu…

PAR MARTIN GRIMBERGHS – PHOTO BELGAIMAGE

 » L’ancien coach voulait que j’aille voir un psy pour parler de mes problèmes. Je l’ai fait et le psy m’a donné raison.  » YOHAN CROIZET

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