COUPS D’ÉTAT

Du limogeage d’Alain Tirloit au retour de Roland Louf en passant par les rumeurs concernant Jean-Pierre Detremmerie : la vie mouscronnoise est agitée.

Dimanche prochain 8 octobre, les électeurs se rendront aux urnes afin de se prononcer sur les personnes les plus à même de diriger leur commune. Le résultat du scrutin pourrait-il avoir une influence sur l’avenir de l’Excelsior Mouscron ?  » Non « , assure le président EdwardVanDaele.  » L’Excel essaie de réduire sa dépendance vis-à-vis des pouvoirs publics, et je veux faire de ce club, celui d’une région, davantage que celui d’une ville « .

Selon certains sondages, JeanPierreDetremmerie risque fort de devoir abandonner son fauteuil maïoral. Ce serait un petit tremblement de terre dans la Cité des Hurlus, où l’on s’était habitué à le voir exercer son influence. On chuchote que Detrem’ accepterait relativement facilement de se retirer des hautes sphères politiques. Par contre, cela lui ferait très mal de devoir abandonner son club. D’aucuns prétendent qu’il envisagerait très sérieusement d’y reprendre la présidence. D’autres, au contraire, qu’il souhaiterait se retirer, à la fois de la vie politique et de la vie sportive.

L’actuel bourgmestre aurait déjà trouvé de nouveaux investisseurs (ce que l’équipe dirigeante en place n’est pas parvenue à faire) et, dans la situation financière que connaît le club, c’est un argument de poids. Mais, mercredi passé, il a envoyé une lettre au conseil d’administration, dans laquelle il annonçait sa démission de toute fonction à l’Excelsior.

Le retour de Louf

Cela nous amène au curieux retour aux affaires de RolandLouf. L’ancien manager, démissionnaire en septembre 2005 mais toujours affilié à l’Excelsior, va être présenté par le club comme candidat au Comité exécutif de l’Union Belge, au même titre que LucianoD’Onofrio (Standard) et AlainLommers (Mons).

 » Il nous paraît avoir les compétences requises pour ce poste « , explique Van Daele. L’avocat, qui a repris la présidence de l’Excelsior depuis un an et trois mois, et que l’on avait tendance à considérer au départ comme un gentil intérimaire, s’est plutôt bien tiré d’affaire jusqu’ici. Il est respecté dans le milieu, où on le considère comme un homme honnête et compétent, même si – il l’avoue lui-même – ses compétences ne sont pas nécessairement footballistiques. Il a pris goût à la fonction de président et entend imposer ses idées, quitte à déplaire à son prédécesseur. L’une de ses idées est de réinstaller Louf au poste de directeur général, ça confirme sa volonté de rendre le club moins dépendant des pouvoirs publics, puisque l’ancien manager de La Louvière a toujours voulu gérer un club de football comme une entreprise privée et se disait surpris du caractère politisé de l’Excelsior.

Certains voient dans ce retour en grâce de Louf une man£uvre destinée à dissuader Detremmerie de reprendre la présidence. Si tel était l’objectif, c’est réussi puisque la lettre de démission de Detrem’ était précisément motivée par le possible retour du Brabançon. Les deux hommes s’entendent comme chien et chat. Ils ont eu quelques sérieuses altercations verbales dans le passé, lors des réunions du conseil d’administration. Ce ne sont pourtant pas elles qui avaient conduit Louf à démissionner, mais des  » raisons personnelles « .

Ces raisons personnelles étaient liées à GeertBroeckaert. Alors que Louf avait pris une semaine de congé après la fin du mercato estival de la saison dernière, l’entraîneur de l’époque avait outrepassé ses droits en allant demander à un sponsor le versement d’une prime de victoire aux joueurs alors que le manager – vu la situation financière désastreuse – l’avait refusée.

Broeckaert n’est plus l’entraîneur et Detrem’ n’est plus le président du club : la voie était donc libre pour un retour de Louf. Est-ce une bonne ou une mauvaise chose pour l’Excelsior ?

Louf a certes été le premier à tirer la sonnette d’alarme en constatant la situation financière dans laquelle se trouvait le club, alors que d’autres préféraient la politique de l’autruche. Il s’est aussi efforcé de trouver des solutions, et y est parvenu dans une large mesure puisque, au printemps 2005 – et malgré un sérieux séisme en décembre 2004 – l’Excelsior avait obtenu sa licence sans problèmes. Sportivement, il s’est bien débrouillé aussi. Si l’équipe Première tient la route cette saison, il n’y est pas étranger : AdnanCustovic et KevinHatchi, c’est lui qui les a attirés au Canonnier. Il avait d’ailleurs déclaré que lorsque l’équipe aurait fait sa mue, elle aurait le potentiel nécessaire pour tenir la route en D1.

Mais il n’a pas idéalement cerné la vocation d’un club comme Mouscron. Pourquoi aller chercher 14 joueurs à l’étranger lorsqu’on dispose d’un outil comme le Futurosport ? Dans la reconstruction de l’équipe, pourquoi n’avoir pas d’abord gardé DaanVanGijseghem et PacoSanchez puis cherché à les entourer par des joueurs d’expérience, qu’ils soient français, bosniaques ou autres ?

Gil Vandenbrouck ne verrait pas d’un très bon £il l’intrusion de Louf dans la gestion sportive. Or, dans l’esprit de Louf, un directeur général s’occupe de tout. Vandenbrouck avait réussi à rétablir un pont entre le Futurosport et l’équipe Première. Louf n’est pas loin de considérer qu’investir dans les jeunes n’est pas rentable. Il faut espérer que cette situation ne débouche pas sur une crise sportive, alors qu’une certaine sérénité avait été rétablie dans ce domaine.

Y a-t-il un lien avec Peter Harrison ?

Si la voie était libre pour Louf, c’est évidemment parce qu’ AlainTirloit a été viré mardi dernier, lors d’une réunion du conseil d’administration. Il ne se doutait apparemment de rien. A-t-il été viré pour faire de la place à Louf ou pour d’autres raisons ? Un lien existerait avec l’affaire PeterHarrison, ce manager anglais que la BBC avait filmé en caméra cachée dans un programme qui a fait grand bruit parce qu’il mouillait plusieurs personnes outre Manche. Harrison avait également été filmé en conversation avec MogiBayat, du Sporting Charleroi. Par l’intermédiaire de MarkTalbut, un ancien joueur du Beerschot et du FC Malinois, Harrison se serait renseigné auprès de Tirloit sur les possibilités de reprendre le club frontalier. Contacté, Talbut nous a confirmé qu’il travaillait bien pour Harrison, mais a aussi déclaré qu’il n’y avait eu aucune négociation avec Mouscron. Par contre, il a avait bien eu une conversation avec Tirloit :  » Mais cela remonte à un certain temps. Je trouve que cet homme a une bonne vision du football, d’où mon coup de fil. Il a été viré entre-temps ? Vous me l’apprenez « .

Le directeur sportif français était, semble-t-il, sur le point d’entamer les négociations sans en référer à sa direction, ce qui n’aurait guère été apprécié. Cela explique pourquoi Van Daele est tombé des nues lorsque la RTBF l’a interviewé à ce sujet, il y a dix jours, et cela aurait été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Car Tirloit était déjà sur la sellette depuis un certain temps. En début de saison, lors d’une restructuration qui avait également vu le président Van Daele reprendre la gestion financière jusque là dévolue à FrancisD’Haese, il avait été privé de son poste de manager général pour devenir simple directeur sportif.

 » Vous savez, ce n’est pas une mise à l’écart « , nous avait glissé Tirloit à l’époque en essayant de nous convaincre. Que lui reprochait-on à l’Excelsior ? De ne pas avoir trouvé de solutions aux maux dont souffre le club, mais il n’est évidemment pas le seul à s’être cassé les dents sur ce problème. Mais aussi, et c’est plus grave si cela se vérifie, d’avoir – indirectement, par l’intermédiaire d’anciens associés – facilité le passage à Lens de l’un ou l’autre jeune du Futurosport, dont un certain Pottier, 16 ans, présenté comme un grand talent et qui était également convoité par l’Inter Milan. Ce petitservice lui aurait d’ailleurs valu d’être invité à la table d’honneur du président GervaisMartel lors des festivités du centenaire du RC Lens, il y a dix jours. Info ou intox ? Tirloit était, effectivement, invité à Lens et a d’ailleurs défilé sur la pelouse du stade Felix Bollaert avant le match Lens-Monaco. Normal puisqu’il a porté le maillot Sang et Or autrefois et que 250 anciens joueurs du club – dont BenoîtThans et WagneauEloi – étaient également présents. Il faut donc être prudent avant de chercher un éventuel lien de cause à effet avec de soi-disant transferts douteux. Mais certaines réactions de l’intéressé interpellent et s’expliquent peut-être plus facilement aujourd’hui.

Tirloit, ange ou démon ?

Qui est Alain Tirloit ? Nous ne le connaissons que depuis un an, lors de son engagement par l’Excelsior. Il apparaît souvent comme un homme jovial, au contact facile (mais est-ce désintéressé ou éprouve-t-il le besoin de se trouver des alliés ?), toujours prêt à rendre service et qui semble heureux lorsqu’il y est parvenu. Mais il peut, aussi, avoir des réactions épidermiques. Nous l’avons constaté après la parution d’un article sur DembaBa, en début de saison. Le directeur sportif de l’Excelsior a immédiatement pris son téléphone et s’est emporté. En cause ? Tout simplement, une déclaration du joueur affirmant que c’était StéphanePauwels qui l’avait découvert alors qu’il officiait comme recruteur pour Metz. Est-ce un crime de lèse-majesté que de déclarer cela ? Selon Tirloit, la venue de Demba Ba à Mouscron s’était déroulée de manière très différente, mais il n’a pas pu expliquer comment. Cela laisse penser qu’il a surtout voulu s’approprier les mérites d’un transfert réussi alors qu’il sentait, déjà, que sa position se fragilisait au Canonnier.

Dans le Nord de la France, il n’a pas que des amis. Il y a un an, MichelSeydoux, le président de Lille qui l’avait remercié avait coupé court : – Désolé, jen’airien àdiresurAlainTirloi : iltravailleenBelgique, désormais, etcen’estplusmonproblème ! Tirloit, qui avait appris – par on ne sait qui – que nous téléphonions en France, était véritablement paniqué et nous avait appelé en catastrophe avant la parution. Il semblait soulagé en apprenant que nous n’avions pas de témoignages lillois ou valenciennois, mais heureux que nous avions recueilli celui de Gervais Martel, le président de Lens. Il ajouta ensuite : – Etpuis, mêmesivousavezquelqu’un àLilleou à Valenciennes, jenepeuxpasvousempêcherdefairevotremétier ! Bizarre…

Jusqu’à nouvel ordre, Tirloit n’est donc plus le directeur sportif de Mouscron. Nous écrivons : jusqu’à nouvel ordre, car il se chuchote également que l’homme ne serait pas disposé à s’en aller sur la pointe des pieds et que Mouscron n’aurait pas nécessairement les moyens de verser une grosse indemnité de licenciement, comme l’avait fait Lille à l’époque. Il pourrait être conservé comme recruteur.

Ramaël s’en va

Enfin, une autre mauvaise nouvelle pour l’Excelsior : le jeune VincentRamaël ne signera pas de contrat pro à Mouscron, mais a signé – ou est sur le point de le faire – à l’AS Monaco. Tiens ? C’est précisément le club pour lequel Stéphane Pauwels exercera ses talents de recruteur à l’avenir !  » Exact, mais je tiens à préciser que je suis totalement étranger au passage de Ramaël en Principauté « , assure Pauwels…

L’homme à la base de la transaction serait le manager danois MikkelBeck, ancien joueur de Lille. Au fond, qui est Ramaël ? Et bien, c’est un jeune attaquant français de 17 ans, qui fréquente le Futurosport depuis quelques années et que l’on dit très doué. D’autres clubs, dont La Gantoise, étaient sur les rangs. GilVandenbrouck envisageait de l’intégrer dès à présent dans le noyau A, étant donné l’étroitesse de la division offensive. Raté, donc.

Avec le départ d’un tel à Monaco, d’un tel à Lens et d’un autre à Anderlecht alors qu’ils ne sont pas encore majeurs, on comprendra sans doute aussi pourquoi on retrouve aussi peu de jeunes du Futurosport en équipe Première.

DANIEL DEVOS

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