Coupe de l’America

Le Brésil a remporté sa troisième Coupe des Confédérations. Bilan de la quinzaine sud-africaine.

La huitième Coupe des Confédérations a vécu. Dans un anonymat relatif, comme les éditions précédentes. On retiendra toutefois quelques sons et images forts. Comme ces fameuses trompettes locales qui font un vacarme tellement infernal. Côté images, il y a eu ces supporters colorés à outrance. Ainsi que des clichés inhabituels lors d’un grand tournoi : certains Brésiliens ont joué avec gants et col roulé ! C’est l’hiver dans l’hémisphère sud…

Dunga se découvre un nouveau buteur : Luis Fabiano

Dunga, le sélectionneur brésilien, jouait gros. Au pays, beaucoup ne lui avaient toujours pas pardonné l’échec aux derniers Jeux Olympiques, où on avait dit que le Brésil avait tout en main pour enfin décrocher sa première médaille d’or. Ce fut un petit flop. Son équipe avait aussi assez mal commencé les éliminatoires pour le prochain Mondial, avant de se reprendre lors des derniers matches. Si le Brésil s’était troué à la Coupe des Confédérations, son siège aurait pu vaciller. Mais il s’est retrouvé in extremis pour empocher sa troisième victoire en huit éditions de cette compétition qu’il organisera en 2013.

En Afrique du Sud, il a misé sur Kaká pour animer le jeu : une réussite. Le nouveau Galactique est devenu le patron XXL du Brésil.  » Dunga a profité du tournoi pour redynamiser son équipe « , constate Benoît Thans, consultant pour la RTBF durant ce tournoi.  » Il a donné pas mal de temps de jeu à des gars qui ne sont pas encore des stars : Ramires, Andre Santos, Felipe Melo. Ils se sont fondus au milieu de vedettes confirmées comme Lucio, Kaká ou Robinho. J’ai directement vu un Brésil qui voulait aller loin. Cette équipe a abordé la Coupe des Confédérations comme une Coupe du Monde. Les Italiens et les Espagnols n’ont pas été capables d’afficher ce comportement-là dans tous leurs matches.  »

Autre initiative : la titularisation de Luis Fabiano comme seul attaquant de pointe. Depuis les graves blessures de Ronaldo, le Brésil se cherchait un nouveau buteur attitré. Il est là : le puncheur du FC Séville a marqué cinq des 14 buts brésiliens en Afrique du Sud.

Le miracle américain

La grosse surprise, c’est l’équipe américaine : après deux défaites sans appel en poule (contre l’Italie et le Brésil), elle est passée en demi-finale avec 3 points sur 9 et un goal-average négatif. Exceptionnel dans l’histoire des grands tournois. Et dans leur demi-finale, les Stars and Stripes ont écarté l’Espagne (qui restait sur 15 victoires d’affilée et 35 matches consécutifs sans défaite).

Le New York Times a annoncé la victoire contre l’Espagne dès la fin du match sur son site – où le soccer n’a jamais occupé qu’une place anecdotique – en parlant de  » miracle  » et en faisant allusion au  » miracle sur la patinoire  » aux Jeux Olympiques de 1980 à Lake Placid, lorsque les hockeyeurs sur glace amateurs américains avaient battu l’invincible URSS. Le NYT parla aussi de  » la plus grande victoire de l’histoire de l’équipe nationale de football. Personne au sein de notre Fédération n’osera affirmer que notre football est parvenu à maturité, mais un grand pas en avant a été fait.  » Les hommes de Bob Bradley ont réussi ce que deux équipes seulement (la Finlande et l’Italie) avaient réalisé en deux ans et demi : ne pas encaisser de but face à l’infernal duo offensif espagnol formé par Fernando Torres et David Villa.

Thans a été impressionné :  » Le plus frappant était l’état d’esprit des Américains. On a vu dès les premières minutes qu’ils jouaient sans complexes. Ils se sont donnés à fond pendant toute la rencontre. Leur flegme sautait aux yeux. Ils prennent le sport de haut niveau comme un amusement. L’Afrique du Sud a un peu joué avec le même tempérament insouciant, ce qui lui a permis d’arriver en demi-finale. Alors que dans des équipes comme l’Espagne et l’Italie, on ressentait une obligation de résultat, avec tout le stress que cela suppose. « 

Onyewu superstar

Si le Standard espérait encore (un peu) prolonger Oguchi Onyewu avant cette Coupe des Confédérations, c’est râpé. Il a fait des matches de fou, notamment contre l’Italie et surtout l’Espagne. Lu sur le site de la FIFA :  » Onyewu est l’un des joueurs les plus intimidants du football mondial. Ce gaillard apporte à la fois solidité et hargne au centre de la défense. De par sa carrure, Onyewu paraissait prédisposé au football américain. Mais il n’en fut rien et pour un athlète aussi costaud, il est étonnamment mobile et habile balle au pied.  »

Le milieu de terrain US Ricardo Clark a dit :  » Onyewu et Bocanegra ont défendu comme si leur vie en dépendait, comme des morts de faim.  » Contre l’Espagne, Bocanegra (Rennes) a joué à gauche et neutralisé tous les raids de Sergio Ramos :  » C’était spectaculaire. L’un d’entre nous faisait un tackle glissé pour faire barrage et un autre défenseur arrivait pour dégager. Nous avons fermé la porte à double tour.  »

 » Sans Onyewu, les USA n’arrivent jamais en finale « , tranche Thans.  » Son positionnement a été exceptionnel. Il a annulé à lui seul au moins six ou sept actions espagnoles qui auraient pu amener des buts. Il n’est toujours pas très esthétique mais ce n’est pas ce qu’on lui demande. Le résultat était là : on n’a pas vu les attaquants espagnols. C’était comme si Torres et Villa n’étaient pas sur le terrain. Onyewu était systématiquement sur le ballon avant eux. Il avait déjà tué Torres en Ligue des Champions avec le Standard contre Liverpool : il a remis ça. Il a été impérial dans les airs mais il a aussi été fantastique dans le jeu au sol. Récemment, j’ai parlé d’Onyewu avec Antoine Sibierski, qui l’a eu comme coéquipier à Newcastle. Il m’a dit qu’Onyewu avait pas mal de lacunes et que le jeu à ras de terre lui avait posé beaucoup de problèmes. Il a énormément progressé sur ce plan-là et il s’est énormément amélioré dans ses relances. On l’a souvent comparé à Daniel Van Buyten en disant qu’ils s’illustraient tous les deux plus par leur apport offensif sur les phases arrêtées que dans le jeu purement défensif. Ils ont entre-temps mieux compris. D’un pourcentage 50/50 en jeu défensif/jeu offensif, ils sont passés à 80/20. Quand il entame un match aujourd’hui, Onyewu se dit : -Mon attaquant ne marquera pas, je vais même m’arranger pour qu’il ne passe pas. Il n’était sans doute pas prêt quand le Standard l’a prêté à Newcastle, mais aujourd’hui, il peut viser le top dans ce pays. Il ne lui manque rien par rapport à un Sami Hyypiä qui a tenu la baraque pendant 10 ans à Liverpool. Et je ne le trouve pas beaucoup moins bon qu’un Jaap Stam qui a fait fureur avec PSV, Manchester United, Lazio, AC Milan, Ajax. Onyewu vient de terminer la meilleure saison de sa carrière. Il avait la mainmise sur le noyau du Standard, sur le terrain et en dehors. On voit qu’il assume le même rôle en équipe américaine. C’est malheureux pour notre championnat, mais un joueur pareil arrivé en fin de contrat ne peut pas rester au Standard.  »

Italie et Espagne en faillite

L’autre grand enseignement est la déroute de deux géants : l’Espagne et l’Italie. Manque d’envie ? Complexe de supériorité ? Après la déroute contre les Etats-Unis, le quotidien espagnol Marca a titré :  » Leçon d’humilité pour la Roja. Nous sommes les meilleurs mais il vaut mieux perdre maintenant que l’année prochaine.  » Commentaire d’un autre quotidien ibérique, As :  » Comme ça fait drôle de perdre.  »

En Italie, des voix s’élèvent pour un rajeunissement. A 35 ans, le capitaine Fabio Cannavaro n’est pas le moins visé. Il réplique :  » Arrêtons avec ces histoires sur les vieux, c’est devenu une mode et ça me fatigue. Comme Marcello Lippi, je crois que les joueurs qui sont là sont les meilleurs de notre football.  » Parmi les trentenaires que la presse italienne voit filer vers la porte de sortie, il y a Cannavaro, Gianluca Zambrotta, Fabio Grosso et Luca Toni.

Lippi a répondu après l’élimination face au Brésil :  » Je ne sais pas de quoi vous parlez, nous avions des jeunes joueurs. Vous voudriez les jeter au feu dans des matches pareils ? Il faut les introduire petit à petit. Rien ne change à nos plans. Nous avons des jeunes mais il faut les laisser mûrir. Vous croyez que j’ai les yeux fourrés au jambon ? »

par pierre danvoye

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