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Côte à l’OS

Entre désillusions extérieures et victoires à domicile, les Zèbres cherchent leur régularité au beau milieu d’une saison compliquée.

Comme si Felice Mazzù avait jeté un coup d’oeil dans le rétroviseur, et qu’il y avait vu un clin d’oeil. La référence se retrouve au plus profond de l’hiver 2016-2017, dans une Versluys Arena ostendaise refroidie par la température et la perspective d’un match en milieu de semaine. Quelques jours plus tôt, Charleroi est sorti du top 6 après une défaite à Gand, par le plus petit écart.

Devant les micros, Mazzù est une sorte de lieutenant Columbo. Quelques centimètres de plus et un imperméable de moins, mais cette même manie d’invoquer sa femme dès qu’une métaphore se présente à l’horizon. Au moment de raconter ces quelques jours qui avaient séparé un vendredi à Gand d’un mardi à Ostende, Felice est lancé :

 » C’est comme dans un couple : tu es avec ta femme pendant des années, mais à un moment, la flamme doit se rallumer. Et pour ça, tu dois la surprendre. Je ne sais pas moi, tu organises un super voyage, tu lui achètes une bagnole… En fonction de tes moyens, tu dois créer et surprendre. Et là, personne ne s’attendait à ce qu’on a fait à Ostende. Surprendre et avoir un nouveau challenge, ça a sûrement relancé la machine.  »

Près de deux ans plus tard, la machine zébrée est enrhumée. Le coach carolo profite donc du retour en forme de Steeven Willems après de longs mois de galère, ainsi que de la blessure de Massimo Bruno – le seul véritable ailier qu’il alignait en 4-2-3-1 comme en 4-4-2 – pour relancer cette fameuse défense à cinq, qui avait servi de déclic à Ostende.

Cette fois, la victime est trudonnaire. Sensation du début de saison, le STVV de Marc Brys trébuche sur le plan zébré.  » Dans notre tête, le top 6 reste un objectif « , reconnaît Willems après la rencontre. Dans les travées du Mambour, on recommence à parler de play-offs 1.

UNE FAIM DE CANARI

Quelques secondes avant le coup de sifflet final, Felice Mazzù harangue son public. Critiqué comme rarement, depuis le début de saison, le coach savoure ce succès face à Saint-Trond dans les bras de Samba Diawara et Michel Iannacone. L’autre partie de son staff, ainsi que tous ses joueurs, se rassemblent ensuite dans le rond central, autour d’un Mehdi Bayat visiblement ému. La veille, l’administrateur-délégué était descendu dans le vestiaire pour remobiliser ses troupes.

Quand on joue une mi-temps sur deux, on ne mérite pas le top 6.  » Felice Mazzù

 » C’était le bon moment pour aller voir mes gars « , affirme l’homme fort du club quelques minutes plus tard. Toujours affable après ce genre de victoire, Mehdi déroule un discours optimiste, où il rappelle que  » si tu gagnes un match sur deux toute la saison, tu es dans les play-offs 1  » (la saison dernière, 44 points sur 90 suffisaient pour finir dans le top 6, nlr) et que  » depuis le 1er septembre, date à laquelle on a vraiment commencé notre championnat, les résultats ne sont pas mauvais.  »

Au soir de la victoire contre Saint-Trond, Charleroi facture effectivement un bilan récent de 14 points sur 24, notamment grâce à un sans-faute à domicile (voir encadré).  » Quand ils appliquent à la lettre ce que le coach demande, finalement, c’est simple « , conclut dans un sourire l’administrateur-délégué.

Le début de semaine a été tactique. Toutes les séances d’entraînement entre les deux rencontres ont été consacrées au changement de système, choisi par le coach en concertation avec les cadres de son groupe. La colonne vertébrale de l’équipe, présente depuis plusieurs saisons, connaissait déjà les rouages défensifs de ce dispositif, avant tout élu par le vestiaire et le staff pour retrouver une sérénité défensive perdue.

La clean-sheet rendue par Nicolas Penneteau est seulement la deuxième de la saison. Un chiffre aux allures de mauvaise surprise, quand on connaît la réputation d’un Sporting qui, selon son gardien, a bâti ses plus grands exploits en regardant vers l’arrière :  » La marque de Charleroi, ça a toujours été l’organisation défensive, et il faut que ce soit encore le cas.  »

Buteur providentiel, sur un coup de tête placé au bout d’un centre millimétré de Marco Ilaimaharitra, Cristian Benavente semble avoir retrouvé le sourire. Les formats de poche font partie d’un trio – complété par le puissant Victor Osimhen – qui semble capable de porter le Sporting zébré vers une fin de phase classique heureuse. Le Péruvien ne prend même pas le temps de savourer :  » Maintenant, l’objectif, c’est d’enchaîner les victoires.  »

Cristian Benavente, auteur d'un but annulé à la Versluys Arena.
Cristian Benavente, auteur d’un but annulé à la Versluys Arena.© belgaimage

SUR LE FLANC

72 heures plus tard. L’homme est le même. Pas le discours :  » Ils frappent trois fois et ils mettent deux buts, c’est frustrant « , déplore Cristian Benavente, presque bousculé par l’homme qui amène un plateau de bières dans un vestiaire ostendais euphorique.  » On n’est pas arrivé à trouver les espaces en première mi-temps.  »

La défense à cinq ne survit pas au retour des Zèbres au vestiaire, menés 1-0 par un but de Richairo Zivkovic. Mazzù redispose ses hommes en 4-4-2, retire le capitaine Javier Martos – de moins en moins indéboulonnable – et lance l’ailier Ali Gholizadeh dans la bagarre.

Coutumier de pertes de balles dangereuses et d’indiscipline dans le replacement défensif, au point de rappeler le Benavente des premiers mois, le prometteur Iranien avait pris un coup sur la tête quelques jours plus tôt. Barré depuis plusieurs semaines par un Massimo Bruno pourtant loin de son meilleur niveau (il se raconte qu’il ne se serait jamais vraiment remis d’une pubalgie qui le perturbe encore de longs mois plus tard), Gholizadeh s’imaginait commencer face aux Trudonnaires, et a été la victime principale du changement de système. Le lendemain matin, à l’entraînement, il semblait complètement découragé, loin des sourires qui paraissaient faire office de dress-code sur les visages carolos.

Les flancs continuent à creuser les méninges du staff carolo. À gauche, Victor Osimhen a déjà rendu des services, mais la présence du Nigérian en pointe est précieuse, même s’il cherche un second souffle devant le but après un mois d’octobre prolifique. Benavente est plus utile dans l’axe, et tant Bruno que Gholizadeh sont plus à l’aise sur l’autre flanc. La solution pourrait bien venir de David Henen, buteur à la Côte et de plus en plus proche du onze de base :

 » Je suis en retard sur d’autres, parce que je n’ai pas eu de préparation. Mais j’espère être à 100 % bientôt, d’ici quelques semaines « , raconte le jeune Belge, percutant à souhait lors de ses montées au jeu.  » Je ne suis pas venu ici pour faire des passes en arrière « , glisse encore Henen, qui confesse que  » le coach me chouchoute, me parle beaucoup. Lui et son staff, à l’entraînement, ils ne me lâchent pas.  »

Au milieu des têtes basses, vissées sous les capuches pour affronter le vent frais entre le vestiaire et le car, pas de trace de Romain Grange. Débarqué l’hiver dernier avec le statut de joueur-phare de la Ligue 2 française, l’homme au pied droit soyeux semble même avoir perdu son éternel sourire. Désireux de quitter le club dès le mois de janvier prochain, il devrait rejoindre Sotiris Ninis dans la catégorie des joueurs qui n’ont jamais rempli les critères essentiels pour jouer dans une équipe de Felice Mazzù, et ce malgré une qualité sur phase arrêtée que d’aucuns regrettent à chaque corner approximatif botté par Gaëtan Hendrickx. Depuis le début de saison, les Zèbres n’ont marqué qu’un seul but sur phase arrêtée. Il a été inscrit par… Xavi Molina, joueur d’Eupen, contre son camp.

UNE MI-TEMPS SUR DEUX

Pendant qu’un membre du staff déplore un arbitrage  » pas exceptionnel « , quelques minutes après que Cristian Benavente eut partagé son incompréhension suite à son but annulé, Felice Mazzù fait le point dans la salle de presse.  » On a niqué notre match en première mi-temps, en étant trop amorphe « , analyse le coach des Zèbres, dépité par ce manque d’engagement à répétition dès que Charleroi sort du Mambour.  » Quand on joue une mi-temps sur deux, on ne mérite pas le top 6.  »

Face à un bloc ostendais plus courageux que bien organisé, les Zèbres ont souffert pour trouver la faille. Personne, au sein de la ligne arrière, ne semblait vouloir avancer balle au pied pour désarticuler les Côtiers, et le surnombre à la construction finissait toujours par un long ballon dont le sort dépendait des qualités athlétiques d’Osimhen. Travailleur mais pas buteur à la Versluys Arena, le Nigérian n’a plus suffi, après avoir porté les siens à bouts de bras et de buts pendant plusieurs semaines. Mazzù pardonne, évidemment :  » On ne peut pas demander à un gamin de 19 ans de tout changer constamment.  »

Le mercure chute. Dans la nuit ostendaise, le car zébré s’éloigne. Le top 6 aussi.

Un bilan de top 6 ?

Depuis plusieurs saisons, les derniers tickets pour les play-offs 1 se valident autour des 45 points, même si la cinquantaine peut-être nécessaire dans les années les plus folles. D’où cette déclaration de Mehdi Bayat, qui affirme en bon mathématicien que gagner un match sur deux suffit au bonheur final. Le bilan est-il bon pour autant ?

En ne remontant que jusqu’au 1er septembre, date fixée par l’administrateur-délégué comme le véritable coup d’envoi de la saison zébrée, Charleroi affiche un bulletin de 14 points sur 27, légèrement supérieur à la moyenne. Les Zèbres ont fait le plein à domicile (12/12), mais souffert en déplacement (2/15), dans une configuration qui se joue toujours sur des détails : les huit dernières rencontres des hommes de Felice Mazzù se sont jouées à un seul but de différence. Et contrairement à la saison dernière, la pièce ne tombe plus systématiquement du bon côté.

Le véritable problème, pour les Carolos, c’est que le classement n’a pas attendu le 1er septembre pour se mettre en route. Ils affichent un bilan de 17 points sur 42, soit quatre points en dessous de la fameuse moyenne de 45 points. Irrattrapable ? L’an dernier, après quatorze rencontres, les Gantois d’ Yves Vanderhaeghe affichaient seulement un bilan de seize points. Ils avaient, comme Charleroi, quatre points de retard sur le top 6. Seize journées plus tard, avec un bulletin impressionnant de 34 points sur 48, ils abordaient les play-offs 1 dans la peau du quatrième classé.

Fernando Canesin a permis à Ostende d'empocher les 3 points face aux Zèbres.
Fernando Canesin a permis à Ostende d’empocher les 3 points face aux Zèbres.© belgaimage

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