» Confiance au DESTIN « 

Le formateur va (enfin) diriger une équipe de D1.

A 50 ans, Philippe Saint-Jean, l’intellectuel du foot, le formateur, va prendre en main la destinée d’un club de l’élite et du top, qui plus est, l’Excelsior Mouscron. Cité un peu partout ces dernières semaines, le coach à succès de l’AFC Tubize (D2) a finalement opté pour un cercle qu’il connaît bien puisqu’il y a occupé, voici trois ans, le poste de directeur du centre de formation, le Futurosport.

 » Je vais pouvoir reprendre le travail que j’avais entamé là-bas « , se réjouit celui qui, malgré sa prise en main de Tubize voici trois ans, était resté domicilié dans la cité des Hurlus.  » Mon but sera d’assurer la pérennité du club. Le projet mouscronnois est trop beau pour tomber à l’eau et il est temps de sortir des jeunes de ce fabuleux centre de formation qui ne produit plus rien depuis quelques années. Succéder à Georges Leekens ne sera évidemment pas chose aisée, surtout que Mouscron reste sur une formidable saison. Je ne me fixe d’ailleurs pas d’objectif chiffré. Mon seul but sera de construire quelque chose de solide « .

Votre arrivée à la tête des Hurlus fait dire à certains que Mouscron misera sur les jeunes et ne pourra donc pas être très ambitieux, l’an prochain…

Philippe Saint-Jean : Il est certain que j’aime travailler avec des jeunes joueurs. Mais, ces jeunes doivent être encadrés par des plus anciens. Le transfert de Marc Schaessens et les négociations en cours prouvent que le club a bien l’intention de présenter une équipe ambitieuse à ses supporters. Mon but sera de construire un noyau qui trouve du plaisir dans le travail et qui s’amuse sur le terrain. Le public de Mouscron est sympathique et convivial. Il aime un certain type de football. Un football direct. C’est un public qui aime voir des choses. Je construirai donc mon noyau en fonction de ce public et de ses attentes.

Voici trois ans, vous aviez quitté le club par la petite porte. Aujourd’hui, vous revenez par la grande ?

Je n’aime pas trop cette image. Pour moi, je reviens par la même porte et, j’insiste, sans le moindre esprit de revanche. Mon départ de Mouscron était dû à un problème avec Hugo Broos. Nous n’étions pas sur la même longueur d’ondes. J’avais en charge la formation et j’estimais que celle-ci comprenait l’équipe des Réserves. Pour lui, la Réserve était à lui et il a également voulu m’imposer des choses au niveau de la formation. Or, il avouait ne rien y connaître. Le président Jean-Pierre Detremmerie voulait deux locomotives, Hugo et moi, mais il a dû faire un choix et il a logiquement choisi Hugo. Pour ma part, je n’ai pas pris cela comme une punition. Au contraire, cela m’a motivé dans le challenge que me proposait Tubize.

 » Mon souhait ? Que Mouscron soit mon dernier club  »

Vous revenez donc sans esprit de revanche, mais avec une certaine pression sur les épaules tout de même ?

Quand j’ai quitté Mouscron, il y avait eu, c’est vrai, un petit accrochage avec le président. A l’époque, Enzo Scifo m’avait contacté pour l’aider à Charleroi. Mais, l’homme fort de Mouscron n’avait pas voulu me libérer pour un club concurrent. Par contre, il m’a autorisé à rejoindre Tubize pour pouvoir diriger une équipe Première. Aujourd’hui, il est certain que tout le monde ne va pas m’accueillir à bras ouverts. La D1 est un monde pollué où tous les coups sont permis. Mais, j’ai ma ligne de conduite et je n’y dérogerai pas. On me suivra ou pas. Je ne travaillerai qu’avec ceux qui veulent me suivre. La durée de mon contrat (5 ans) prouve que la volonté des deux parties est de voir à long terme. Je ne cache d’ailleurs pas que mon souhait est que Mouscron soit mon dernier club.

Les contacts avec votre futur employeur datent de quand ?

Depuis la mi-avril. J’ai souvent Roland Louf au téléphone. Au même titre d’ailleurs qu’une cinquantaine d’autres personnes qui me contactent régulièrement pour discuter de joueurs. Mais, Roland ne m’a parlé de l’intérêt de Mouscron que voici un mois. J’ai eu un contact avec le président et, ensuite, tout s’est précipité. Jusque-là, j’avais été contacté par La Louvière et le Brussels. Puis, Gand et Saint-Trond se sont renseignés. Mais, Mouscron a été le plus insistant et, évidemment, le fait que je connaisse la maison m’a poussé vers l’Excel.

Le nouveau manager mouscronnois, Roland Louf, a aussi joué un rôle important dans votre choix ?

Je ne peux pas nier que le fait de travailler avec Roland m’a attiré. D’ailleurs, à l’époque où il n’était pas encore à Mouscron, il m’avait contacté pour succéder à Ariel Jacobs à La Louvière. Mais, j’avais refusé tant qu’Ariel n’avait pas annoncé son départ. Je ne voulais pas qu’il se retrouve sans rien. Ensuite, Roland est passé à Mouscron, dans l’atmosphère que l’on sait, et les contacts avec les Loups ont été rompus.

C’est lui qui était aussi à l’origine de mon arrivée à Tubize. Malheureusement, à l’époque, il a été contacté par La Louvière et nous n’avons pas pu collaborer comme je l’espérais. Il aurait été le relais idéal avec la direction tubizienne. Maintenant, je le rejoins et j’espère que notre collaboration sera fructueuse.

 » La D1, une obsession ? C’est faux !  »

Vous rejoignez un club de l’élite. Beaucoup disent qu’il s’agit, pour vous, d’un aboutissement plus qu’espéré ?

J’ai lu dans un quotidien que diriger une équipe de D1 était, pour moi, une obsession. C’est faux ! Mon idéal est de travailler avec des professionnels, soucieux de toujours progresser et heureux d’exercer leur métier. Quand j’entends des garçons qui ont connu la D1, comme Yves Buelinckx ou Samuel Remy, dire qu’ils réalisent aujourd’hui des choses qu’ils ignoraient être capables de faire, je suis le plus heureux des hommes.

Tubize, où vous avez obtenu d’excellents résultats, a-t-il constitué un excellent tremplin également ?

Oui et je ne les remercierai jamais assez de m’avoir fait confiance. Mais, ce qu’on a réalisé n’était pas l’objectif. Le but était de développer, comme à Mouscron, un centre de formation, de construire un stade digne de la D1 et d’amener l’équipe à ce niveau avant 2009. Quand j’ai pris la direction de l’équipe, ce n’était pas mon noyau. J’ai souffert durant six matches, mais ensuite, les gars ont trouvé le plaisir de jouer ensemble et l’osmose s’est faite pour obtenir les résultats que l’on connaît aujourd’hui.

Vous n’avez pas de regret de quitter une équipe en pleine ascension ?

Bien sûr que oui ! Le projet de Tubize me plaisait, mais les choses commencent seulement à bouger maintenant. Malheureusement ! De mon côté, j’ai toujours fait confiance au destin. Je n’ai jamais forcé les choses. A l’époque où on me citait à la place d’Hugo Broos à Mouscron, je lui avais dit que diriger l’équipe Première ne m’intéresserait qu’après son départ. Aujourd’hui, je reviens et je pense donc que c’est le destin qui le veut. D’ailleurs, au moment où j’ai annoncé à Tubize que je ne restais pas, je n’avais encore rien en main. Je faisais confiance au destin.

Vous allez donc entamer votre première saison en D1 sans la moindre crainte ?

Je reviens pour un challenge qui ne me fait pas peur car j’arrive dans un environnement qui ne m’est pas inconnu. De plus, j’emmène avec moi Jean-Louis Losfeld, un préparateur physique que je connais sur le bout des doigts et qui a réalisé un travail incroyable et très apprécié à Tubize. Je retrouve Roland Louf et ce qui me fait également croire en mes chances, c’est que j’ai revu un président Detremmerie souriant et libéré. Nous sommes sur la même longueur d’ondes.

 » L’objectif du Futurosport est très large  »

Comment pensez-vous avoir convaincu le président mouscronnois ?

Mouscron dispose, avec le Futurosport, d’un outil incroyable. Tout ce qu’il y a à faire là-bas ne peut se résumer en quelques mots. L’objectif, outre celui de présenter une équipe ambitieuse, sera de faire de cette équipe une locomotive pour les jeunes du Futurosport. On analysera tout afin de voir si ce qu’on applique aux joueurs du noyau A peut s’appliquer aux jeunes. Je veux également mettre sur pied un noyau d’aspirants capables de prendre, au pied levé, la place d’un titulaire de l’équipe Première. Je ne parle d’ailleurs pas d’un noyau B, mais plutôt d’un groupe A bis. Il y aura aussi un travail à un troisième niveau afin de préparer les successeurs de ce noyau A bis.

A Tubize, vous avez travaillé de cette façon et certains jeunes ont su saisir leur chance et intégrer l’équipe en D2. Pensez-vous que certains d’entre-eux pourraient vous suivre à Mouscron ?

Dans le groupe que j’ai dirigé cette année, tous sont capables, collectivement ou individuellement, de jouer parmi l’élite. Je pense d’ailleurs que certains ont atteint un niveau insoupçonné. Mais de là à dire que des joueurs me suivront, il y a un pas que je ne ferai pas. Par contre, ce qui m’intéresserait davantage, c’est de développer une collaboration avec mon ancien employeur. L’idéal serait de pouvoir placer dans un club comme Tubize des jeunes qui ne parviennent pas à s’imposer directement en équipe Première et de leur éviter de jouer plus d’un an et demi en Réserve.

Bernard Bolly

 » La D1 est UN MONDE POLLUé où tous les coups sont permis  »

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