Comparer n’est pas jouer

Entre la première période mouscronnoise du médian français il y a quasi dix ans et celle-ci, beaucoup de choses ont changé.

Arrivé lors du mercato de janvier, en provenance de Willem II Tilburg, MathieuAssouEkotto (29 ans) a connu six premiers mois laborieux à l’Excelsior. Mais aujourd’hui, il est devenu incontournable. Il a un rôle essentiel dans la ligne médiane, où il fait office de plaque tournante. SteveDugardein et MustaphaOussalah ont un rôle plus offensif que lui dans le triangle de l’entrejeu. Placé en pare-chocs devant la défense, sa tâche consiste à récupérer un maximum de ballons mais aussi de les redistribuer à bon escient.

Le Français vit son deuxième bail au Canonnier. Au cours du premier, de 1998 à 2000, il était encore très jeune et avait peu joué. Sept ans plus tard, c’est un joueur mature que les Mouscronnois ont retrouvé. Entre ces deux baux, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts. Mathieu a bourlingué dans pas mal de clubs, avec des fortunes diverses. Petit regard dans le rétroviseur, et bilan actuel, sous forme de comparaisons.

 » En 1998, le stade était toujours plein « 

 » En 1998, lorsque je suis arrivé, l’Excelsior se préparait à entamer sa troisième saison en D1. La montée, loupée à plusieurs reprises, avait enfin été acquise et l’équipe avait poursuivi dans cette spirale positive. Elle jouait les premiers rôles parmi l’élite. Le stade était pratiquement toujours rempli et les supporters étaient très enthousiastes. HugoBroos entraînait une équipe composée de GordanVidovic, KoenDeVleeschauwer, YvesVanderhaeghe, StefaanTanghe, TonciMartic, ZoranBan, FrédéricPierre, AxelLawarée et consorts. Mais, pour autant, peut-on affirmer que cette équipe-là était plus forte que l’équipe actuelle ? Rien ne dit qu’elle se classerait encore 4e ou 5e dans le championnat 2007-2008. On ne peut pas comparer les époques. Pour moi, ce premier passage à Mouscron fut difficile sur le plan sportif. J’espérais, au cours de ces deux années, pouvoir faire mes preuves mais j’ai rarement reçu ma chance. Broos obtenait des résultats avec son équipe-type et son système de jeu connu de tous, pourquoi aurait-il dû changer ? Sur le plan humain, en revanche, j’ai conservé un excellent souvenir de ce premier passage. C’est ce qui m’a incité à revenir en décembre, alors que le Brussels et un autre club dont je préfère taire le nom, étaient également intéressés par mes services. Au moment où j’ai signé, en janvier 2007, le président était encore FrancisD’Haese et l’entraîneur, GilVandenbrouck. Depuis lors, point n’est besoin de le rappeler : beaucoup de choses ont changé « .

 » Vandenbrouck n’a plus qu’une casquette « 

 » Le gros changement par rapport à la saison dernière, c’est l’arrivée du président PhilippeDufermont. Il a rassuré tout le monde. On a aussi un directeur sportif à plein temps : Gil Vandenbrouck. Nous avons désormais un interlocuteur ! Lorsque je suis arrivé, en janvier, beaucoup de joueurs arrivaient en fin de contrat. Ils ne savaient pas à qui s’adresser. Ce n’est pas normal dans un club professionnel. Gil avait, en fait, plusieurs casquettes mais aujourd’hui, sa tâche a été clairement définie et c’est beaucoup mieux. Au niveau de l’équipe, en revanche, on ne peut pas parler de bouleversement. On est dans la continuité du deuxième tour de la saison dernière. Si vous comparez l’équipe de base actuelle avec celle de la saison dernière, combien de nouveaux joueurs recensez-vous ? JérémySapina derrière, c’est tout. MickaëlNiçoise était déjà là. Mais, je le concède, c’est un Mickaël transformé que l’on découvre aujourd’hui. Désormais titulaire, il a repris le rôle de DembaBa. Le départ de Demba nous prive d’une arme offensive, mais on possède suffisamment d’attaquants pour pallier son absence. CarlosCoto est nouveau également, mais il ne commence généralement pas les matches : il joue à merveille son rôle de joker. Ce qui est sans doute nouveau, c’est la concurrence dans le groupe. Elle est présente dans tous les secteurs : chaque poste est doublé, parfois triplé. Lorsque la concurrence est saine, c’est bénéfique ? C’est un cliché que l’on ressort souvent, qui me fait bien rire. Dans un club, soit il y a de la concurrence, soit il n’y en a pas. Mais saine ? Je connais peu de clubs où la concurrence est saine. Il y a souvent des aspects autres que le sportif qui entrent en ligne de compte. Je ne vise pas particulièrement Mouscron, c’est valable partout. Mais je n’en dirai pas plus : je ne veux blesser personne « .

 » Ma meilleure période fut au Standard « 

 » J’ai forcément changé, moi aussi. Les différentes expériences que j’ai vécues, bonnes et moins bonnes, m’ont façonné le caractère. J’ai pris de la bouteille, j’ai désormais un vécu et j’ai côtoyé des entraîneurs aux styles totalement différents. Si je dois faire le bilan de ma carrière jusqu’ici, je reconnais que le négatif l’emporte sur le positif. Ma meilleure période fut sans doute celle passée au Standard. Sur le terrain, je prenais énormément de plaisir. Jusqu’au jour où je me suis retrouvé en concurrence avec ChristianNegouai. J’ai demandé à DominiqueD’Onofrio pourquoi je ne jouais pas, il m’a répondu : – J’aibesoind’unjoueurdetêtepourêtreprésentdanslesduelsaériens ! Je pensais que le football se jouait avec les pieds, mais soit. Ensuite, j’ai appris que l’on allait engager SiramanaDembelé. J’ai regardé sa carte de visite et j’ai constaté qu’il était encore plus petit que moi. Là, je n’ai plus rien compris. Les éléments négatifs remontent surtout à ma période française, où j’ai connu le chômage et la D4 avec Valenciennes. Il y a, malheureusement, beaucoup de footballeurs français qui se retrouvent au chômage. On forme trop de joueurs, dans l’Hexagone. Certains viennent en Belgique. Comme moi. Ma période néerlandaise ne fut pas spécialement négative, même si elle s’est mal terminée « .

 » Je suis revenu à mon niveau « 

 » Aux Pays-Bas, j’ai quasiment tout joué : je pense avoir loupé trois matches. Mais il y a eu un clash avec l’entraîneur qui a précipité mon départ. Je suis peut-être apparu en manque de rythme lorsque j’ai débarqué à l’Excelsior, mais c’était surtout lié à la manière dont on conçoit les entraînements outre-Moerdijk. Ils sont beaucoup moins intenses qu’ici, pratiquement toujours avec ballon. J’étais donc en relative méforme lorsque je suis arrivé à Mouscron. Ensuite, des petits ennuis de santé ont contribué au fait que j’ai rarement pu me montrer sous mon meilleur jour. Je suis conscient de ne pas avoir totalement répondu à l’attente. Généralement, lorsqu’on engage des joueurs pendant le mercato, c’est parce qu’il y a un problème et on compte sur les nouveaux pour le résoudre. J’ai livré des prestations moyennes, je n’ai donc pas réussi la mission qui m’avait été confiée et cela m’a foutu les boules. Aujourd’hui, cela va mieux : j’ai effectué une bonne préparation, et physiquement, je suis au point. J’ai pourtant entamé le championnat sur le banc, contre La Gantoise. Je me suis tu, mais je n’en avais pas moins gros sur le c£ur. Est-ce la défaite encaissée ce jour-là, ou les blessures de DaanVanGijseghem et de PacoSanchez qui ont incité (ou obligé) MarcBrys à modifier son équipe ? C’est à lui qu’il faudrait poser la question. A l’entraînement, durant la semaine, je me suis efforcé de démontrer au boss que j’étais capable de jouer dans cette équipe. Pour le déplacement à Saint-Trond, il n’a effectué que deux changements : l’entrée de JeanPhilippeCharlet et la mienne (NDLR : il y eut aussi l’entrée de Jérémy Sapina et la première – et dernière – titularisation de Demba Ba à Saint-Trond). Toujours est-il que mon entrée a coïncidé avec la première victoire. On ne change pas une équipe qui gagne, dit-on. On a l’impression que Brys a trouvé son équipe-type, mais a-t-il une équipe-type ? Dans le système en 4-3-3, je suis obligé de courir beaucoup, au même titre que les autres médians, mais cela ne me dérange pas. J’adore toucher beaucoup de ballons. Avec trois attaquants, on se retrouve forcément avec un joueur de moins dans l’entrejeu, mais comme on ne peut pas jouer à 12, chaque système a son talon d’Achille. Jouerais-je différemment, si j’étais entraîneur ? La question ne se pose pas : je suis joueur ! Comment je vois mon avenir ? Pour moi, l’avenir, c’est le prochain match à Bruges. Je ne regarde pas plus loin. Cela ne signifie pas que je n’ai plus de projets, mais sur le plan sportif, je préfère vivre au jour le jour. A quoi sert-il de tirer des plans sur la comète ? Tu te casses la pipe en rentrant chez toi, et tu peux ranger tous tes projets au placard…  »

par daniel devos – photos: belga

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