Comment se maintenir ?

Ces questions qui sautent aux yeux et inquiètent. Analyse des maux montois sur base des réponses du T1 Christophe Dessy.

Fichue semaine pour Mons. Encore une ! Le président Domenico Leone perd sa mère, 3.500 personnes seulement se déplacent pour le match contre La Gantoise et une nouvelle défaite est au bout du samedi soir. Cruelle parce que scellée dans les dernières minutes. L’équipe reste scotchée dans la zone rouge.

L’équipe a-t-elle le niveau de la D1 ?

Christophe Dessy :  » Nous avons eu moins d’occasions que Gand mais il y en a eu beaucoup quand même. Nous n’avons jamais été dominés outrageusement par un adversaire qui a un bon niveau. Mais il était efficace, alors que nous ne parvenons pas à mettre les ballons au fond. Et nous prenons deux buts qui ne doivent pas entrer. Le premier vient d’un coup franc devant le rectangle. Sur une phase pareille, le ballon doit se retrouver sur le toit du stade ou dans la rue, mais il ne peut pas rester sur le terrain. Le deuxième goal de Gand est inscrit sur corner, sur le genre de phase que nous n’arrêtons pas de travailler à l’entraînement. Nous payons au prix fort le caractère juvénile de l’équipe. Il nous manque des joueurs qui ont beaucoup de matches de D1 au compteur. Il y a un déficit de maturité dans le groupe. Comptez, dans l’équipe qui a joué contre Gand, le nombre de joueurs qui n’ont pas 30 ou 40 matches de première division. Il faudra être patient avec tous ceux-là, mais le problème, c’est que la patience est compliquée à ce niveau.  »

Confronté à ces paroles, on a quand même envie de dire  » Pauvre Michel Preud’homme !  » On parie qu’il rêve encore en Rouche. La Gantoise est loin du peloton de tête de la D1 et ne mérite pas beaucoup mieux. Il y a peu de génie dans cette équipe. Marko Suler est une pâle copie délavée d’ OguchiOnyewu. Randall Azofeifa ne pratique pas le même métier qu’ AxelWitsel. Zlatan Ljubijankic n’a rien à voir avec Dieumerci Mbokani. MPH doit s’en accommoder.

Dessy, lui, peut s’inquiéter. Il y avait dans l’équipe de départ contre Gand plusieurs joueurs qui n’ont pas encore prouvé qu’ils étaient faits pour la D1. Et des gosses sur le banc. Mons marque peu (20 buts), gagne peu (trois matches sur 18) et est englué dans la lutte pour le maintien depuis le début du championnat.

Pourquoi n’y a-t-il pas de transferts ?

Christophe Dessy :  » L’effectif est imposant et ce sera difficile de prendre un nouveau joueur s’il n’y a pas au moins un départ. Le président est devenu strict dans sa gestion : c’est nouveau à Mons. Un renfort expérimenté nous ferait sûrement du bien mais je suis quand même persuadé d’une chose : on doit pouvoir se sauver avec le noyau actuel.  »

Il faudra donc des départs pour qu’il y ait des arrivées. C’est l’un des principaux problèmes du club : la demande pour des Montois est inexistante, ou presque. Qui peut-on monnayer ? Aucune chance de vendre un Frédéric Herpoel de 34 ans. Si on tient compte du ratio âge/talent, Alessandro Cordaro est le mieux placé. Mais le club n’en tirera rien puisqu’il sera fin de contrat en juin. Mohamed Dahmane suscite des convoitises à l’étranger mais c’est toujours la même chose : aucun club n’offre ce que Mons demande. En Belgique, sa réputation de forte tête ne l’aide pas à trouver une grosse équipe. Mounir Diane souffre du même problème – et est de toute façon moins convoité que Dahmane. Hocine Ragued et Fadel Brahami sont suivis : c’est normal, vu leur niveau de jeu. Mais pas au point de faire exploser une tirelire. Antti Okkonen n’est pas mauvais mais il a le profil des joueurs que l’on trouve à beaucoup de coins de rue. Roberto Mirri est trop âgé. Frédéric Jay est un utile pour Mons mais doit prouver qu’il peut l’être pour une meilleure équipe. Cédric Collet a montré de bonnes choses au premier tour mais il a encore tout à confirmer. Idem pour Ludovic Buysens et Kevin Oris. Mustapha Jarju n’est pas encore en phase de confirmation. Même raisonnement pour David Fleurival. Et on voit mal l’un des autres ( Steven De Pauw, Moussa Gueye, Ivica Dzidic, Kevin Hatchi, Francesco Migliore, etc) séduire un bon club. Bref, on a l’impression qu’en transférant Benjamin Nicaise, Wilfried Dalmat et Adriano Duarte l’été dernier, Mons a vendu tout ce qui était vendable.

CQFD : il faudra faire avec l’équipe actuelle jusqu’au bout de cette saison et assumer le bilan très moyen de la campagne des transferts de l’été.

Et qui viendrait s’il y avait un départ avant la fin du mois ? On risquerait à nouveau d’enregistrer l’un ou l’autre transfert panique. Une habitude à Mons, où ça marche environ une fois sur trois ( voir encadré).  » Le problème de ce club est qu’il n’a pas de vision à long terme, pas même à moyen terme « , juge un agent de joueurs.  » Là-bas, on ne prévoit jamais rien, on pare toujours au plus pressé. On prend du jour au lendemain ce qu’on trouve, en espérant que ce sera la bonne pièce pour ajouter au puzzle. Il n’y a pas de prospection organisée, on agit dans l’urgence. C’est tout le contraire d’un club comme Westerlo qui est prêt à tout moment à engager un joueur bien défini et suivi depuis longtemps si une star de l’équipe s’en va aujourd’hui ou en fin de saison. Chaque année ou presque, Westerlo vend un ou deux très bons attaquants. Et chaque fois, le remplaçant est aussi bon. Ce remplaçant ne débarque pas de nulle part, il a été scouté à de multiples reprises et on sait parfaitement ce qu’il vaut. Rien de tout cela à Mons.  »

Le groupe est-il vraiment bizarre ?

Dessy :  » C’est Thierry Pister qui a déclaré que ce groupe était bizarre. Je lui laisse la responsabilité de ses propos. Je ne veux pas répondre. Pour moi, l’état d’esprit est bon et je suis très satisfait du comportement de mes joueurs contre Gand. Par contre, je regrette certaines réactions observées au premier tour. Toutes ces cartes stupides qui nous pénalisent encore aujourd’hui. Des cartes dues à un manque de maîtrise de soi. Nous venons de terminer un match à 11 : ça fait du bien.  »

Samedi dernier, Oris, Collet et Dahmane étaient suspendus. Et cinq autres titulaires potentiels n’étaient plus qu’à une carte d’une suspension. Mons joue la tête des classements des cartes jaunes et rouges. A Tubize, par exemple, on prend beaucoup de jaunes et c’est presque toujours pour des fautes, dont la plupart sont utiles. A Mons, on voit jaune et rouge aussi mais il y a beaucoup de rouspétances ou de mouvements de mauvaise humeur à l’origine de ces cartes.

Pourquoi Dessy reste-t-il T1 ?

Dessy :  » La direction a reçu beaucoup de CV et nous les avons analysés mais aucun ne répond aux attentes. Personne n’a le profil requis. Il faut être très complet pour occuper ce poste, avoir un message fort, être capable de maîtriser le groupe. Je peux comprendre que la direction n’ait pas envie d’engager un nouvel entraîneur. Le club a déjà vécu beaucoup de changements depuis le début de la saison. Je suis le troisième coach : faut-il prendre le risque de confier Mons à un quatrième homme qui ne connaît ni le club, ni l’équipe ? »

Dessy a-t-il vraiment envie de trouver la perle rare et de retourner au centre de formation ? On en doute. S’il s’est bardé de beaux diplômes français, ce n’est probablement pas dans le but de rester éternellement dans l’ombre. Il estime sans doute qu’il a fait le tour de la question dans le domaine de la formation. Il a travaillé dans ce rôle à Nancy, au Standard et à Mons. On pourrait comprendre qu’il soit totalement épanoui comme patron du centre de formation d’un grand club. Il l’était au Standard, jusqu’au jour où la direction a rapatrié Tomislav Ivic et mis Dessy de côté. S’il avait fait profil bas, Dessy aurait sans doute retrouvé sa place de numéro 1 peu de temps après car on savait évidemment qu’Ivic ne ferait qu’un passage éclair, qu’il serait vite rappelé sur son yacht en Croatie ou sollicité par un club exotique. Mais Dessy n’est pas du style à faire des concessions. Il est allé au clash parce qu’il ne voulait pas de belle-mère à l’Académie et il a tourné les talons.

Travailler avec les jeunes de Mons n’a rien à voir avec la même fonction au Standard. Dessy l’a signalé le week-end passé : le centre de formation de Mons est indigne, à l’image du terrain principal et du stade à moitié terminé. Il peut donc paraître logique que Dessy se soit montré intéressé par la place de T1 quand elle s’est libérée. Son premier bilan est cependant insuffisant : il admet que 4 points sur 12 (avec un calendrier très favorable : Dender, Tubize, Zulte Waregem et Gand), c’est peu. Mais le courant semble passer avec les joueurs. Son côté stakhanoviste est accepté, il est très didactique et a recommencé à travailler les fondamentaux. Enfin, la direction le suit. Il est clair que le club ne cherche personne pour le remplacer. Car entendre qu’aucun des CV reçus n’épouse le profil voulu est difficile à croire… Dès qu’un club de D1 vire son entraîneur, 20 ou 30 hommes à la recherche d’une place envoient leur candidature.

par pierre danvoye – photos: belga

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