Comment rester en D1

Deux ans après l’avoir quittée, l’Albert-Elisabeth retrouve la D1. Voici ce qu’il faut faire pour éviter de reprendre l’ascenseur dans l’autre sens, dans 12 mois.

Après quatre tentatives infructueuses, en saison régulière d’abord puis au tour final, les Dragons sont enfin parvenus à terrasser leur bête noire, Waasland-Beveren. Le coup de tête de NicolasTimmermans, à trois minutes de la fin d’un test-match qui pouvait basculer des deux côtés, propulse l’Albert-Elisabeth en D1.

 » C’est une sensation incroyable ! « , s’extasie le capitaine Tom Van Imschoot.  » Quel stress ! Une énorme pression pesait sur nos épaules. Maintenant, on va enfin pouvoir se lâcher. On a connu des hauts et des bas durant la saison, mais durant le tour final, on a prouvé qu’on avait la meilleure équipe. C’est la première fois que je vis une montée, puisque j’ai… toujours joué en D1 jusqu’ici (NDLR : Saint-Trond et Westerlo). En fait, je suis de retour à la maison.  »

 » Le Doudou débute avec dix jours d’avance « , renchérit le président DomenicoLeone.  » Le plus dur est fait. Maintenant, on va pouvoir travailler sereinement.  »

Travailler, le mot est lâché : comment éviter de prendre l’ascenseur dans l’autre sens, dans 12 mois ?

1. Augmenter le budget : repasser à 5 millions

 » C’est une obligation « , concède le directeur général Alain Lommers. Le budget, qui était de 4,5 millions en 2009-2010, avait été rabaissé à 2,7 millions cette saison-ci. Il est prévu qu’il repasse à 5 millions ou 5,5 millions la saison prochaine. Ce qui en fera toujours l’un des plus faibles de l’élite.  » C’est un budget raisonnable, peut-être pas suffisant pour la D1 « , admet Lommers,  » mais on ne peut pas mettre la pérennité du club en danger.  »

 » J’espère que les sponsors vont nous suivre « , enchaîne Leone.  » Car ce n’est pas évident de réunir un budget conséquent. Mais cette promotion peut faciliter les choses. Les gens aiment avoir du succès, investir dans des entreprises qui marchent. Lorsqu’on est monté pour la première fois en D1, il y a dix ans, on n’avait rien. Pas de stade, rien. J’ai dû subir la rénovation du stade, et il y avait forcément moins d’argent pour renforcer l’équipe. Cette fois, c’est peut-être la première fois qu’on monte en D1 en pouvant se dire qu’on a, au moins, un… demi-stade en ordre. Le reste, les deux autres tribunes, on dira que c’est du complément. On a aussi déjà un bon terrain. Rappelez-vous, autrefois, la pelouse était dans un état pitoyable. Reste à construire une bonne équipe. On ne fera pas de folies. Les joueurs qui veulent venir à Mons devront être attirés par le bon esprit qui règne dans le club, pas par l’argent. L’une de mes fiertés, aujourd’hui, est d’être monté avec des joueurs qui n’étaient pas des mercenaires, mais qui ont défendu les couleurs du club avec dignité. « 

C’est aussi pour une question de budget que la montée était un must.  » On ne s’est pas toujours bien rendu compte de la pression qu’on a dû supporter « , soupire Lommers.  » La souffrance fut telle qu’on n’arrive pas encore à réaliser totalement ce qui a été accompli, mais cette montée est un vrai soulagement. Si on était resté une saison de plus en D2, on aurait encore dû diminuer le budget et on aurait encore eu plus de mal à mettre sur pied une équipe compétitive. J’irai même plus loin : l’Albert est une PME qui emploie 40 personnes, joueurs compris. Avec une saison de plus en D2, il aurait peut-être fallu dire à ces gens : – Désolé, maisilvaencorefalloiropérerdescoupessombres ! Grâce à cette montée, je vais pouvoir faire plaisir à tous les gens qui travaillent chez nous et qui méritent largement d’être récompensés.  »

2. Trouver un entraîneur : van Wijk ou Scifo ?

La pierre angulaire d’un projet est toujours l’entraîneur puisque c’est lui, en principe, qui doit définir de quels joueurs il a besoin pour construire une équipe capable d’évoluer selon le style qu’il préconise. A l’heure actuelle, l’Albert n’a… pas d’entraîneur puisque DennisvanWijk n’avait signé que pour six mois.  » En football, on ne peut jamais prédire combien de temps on restera sur la même longueur d’ondes « , explique le Néerlandais.  » Le club et moi-même avions convenu, pour cette raison, d’un contrat de courte durée, mais après le tour final, nous nous remettrons à table.  »

Effectivement, il était prévu que van Wijk voit une première fois la direction dès lundi matin, juste avant son départ en vacances. Les deux parties devraient se revoir la semaine prochaine, à son retour.  » On espère garder van Wijk, car c’est lui qui nous a fait monter, mais on ne précipitera rien « , avertit Leone. Le nom d’ EnzoScifo avait déjà circulé, il y a quelques semaines.  » C’est un bon entraîneur aussi, mais il faut respecter les gens qui ont effectué du bon travail au club. Le premier avec lequel on va discuter, c’est notre entraîneur actuel.  »

3. Reconstruire l’équipe

Ce n’est pas anodin, car si l’Albert n’a pas d’entraîneur à l’heure actuelle, il n’a pas davantage d’équipe ! Tous les joueurs, à l’exception de SiebeBlondelle, sont en effet arrivés en fin de contrat !

 » Si on n’a pas voulu offrir de contrats de longue durée, c’est encore une fois pour ne pas mettre en péril la pérennité du club « , explique Lommers.  » C’est très difficile, financièrement, de maintenir des joueurs sous contrat durant plusieurs saisons en D2. Et comme, au départ d’une saison, on n’a jamais l’assurance de remonter… « 

Le directeur sportif DimitriMbuyu va donc pouvoir se mettre au travail :  » De ce point de vue, je dois remercier le président, car c’est le premier qui me laisse travailler « , affirme-t-il.  » Ce n’était pas toujours le cas avec JohanVermeersch. J’ai pourtant gardé de bonnes relations avec le patron du FC Brussels, qui m’a d’ailleurs envoyé à deux reprises un sms de félicitations pendant le tour final, mais travailler avec lui n’était pas toujours facile. Il veut toujours avoir le dernier mot. Leone n’est pas un homme qui jette l’argent par les fenêtres, lui non plus, mais il me fait confiance.  »

 » Parce que je constate que Dimitri est un homme compétent « , justifie le président.

Quelle orientation prendra le travail de Mbuyu ?  » Notre équipe, cette saison, était surtout composée de garçons qui aiment jouer au football. Elle regorgeait de techniciens. Il faudrait lui adjoindre un peu de caractère. Une équipe comme Waasland-Beveren, par exemple, possède moins de qualité en ses rangs, mais forme un bloc plus soudé et est plus forte mentalement. Pour la saison prochaine, c’est vers cette direction qu’on lorgnera. « 

Cela a commencé lundi à 10 h. Mbuyu :  » D’abord, il faut mettre le staff en place puisque l’entraîneur des gardiens, Francky Vandendriessche, s’en va à Courtrai, puis s’occuper des joueurs en fin de contrat. La priorité va à la prolongation des joueurs qui étaient titulaires cette saison (NDLR : Mehdi Terki, qui a signé à Gand, ne l’était pas toujours). Si je crains un exode massif ? Après la bonne saison qu’ils ont livrée, nos joueurs majeurs vont être très courtisés. Mais, même si on ne fera pas de folies sur le plan financier, je crois que la majorité d’entre eux a envie de rester. Ils savent qu’ils seront dans les meilleures conditions.  »

Parmi les priorités, il y a évidemment Monsieur Plus d’un but par match, Jérémy Perbet : 22 réalisations en 21 rencontres depuis son arrivée en janvier. Il appartient toujours à Lokeren.  » On a une option d’achat en ce qui le concerne, qu’on compte évidemment lever « , précise Mbuyu.  » Je crois que, même si plusieurs équipes – y compris étrangères – s’intéressent à lui, il a envie de rester. Pourquoi a-t-il explosé à Mons alors qu’il ne jouait pas à Lokeren ? Question de confiance, sans doute. Et puis, quoi qu’on en dise, la D2 ce n’est pas la D1.  »

 » Il ne faut pas oublier que j’ai été blessé pendant trois mois à Lokeren « , rappelle l’intéressé.  » Lorsque je suis revenu, l’équipe tournait très bien sans moi. Après, c’est vrai qu’à Mons j’ai directement trouvé le chemin des filets et que cela m’a mis en confiance. Comme j’ai aussi été épargné par les pépins physiques, j’ai pu continuer sur ce rythme. Je me suis rapidement rendu compte du potentiel que cette équipe recelait et j’ai, effectivement, envie de rester. « 

Tout comme MamoutuoN’Diaye, l’une des révélations de la saison qui, lui, appartient à La Gantoise :  » Rester à Mons est mon souhait le plus cher « , confirme-t-il.  » Si je suis venu à l’Albert, c’est pour monter en D1 et encore jouer avec ce club en D1 la saison prochaine. Je m’y sens chez moi, c’est le club qui m’a permis de me révéler. A Gand, à 19 ans, je n’ai pas réussi à m’imposer. Aujourd’hui, d’autres clubs sont intéressés par mes services, comme Courtrai et Zulte Waregem, mais j’accorderai la priorité à Mons.  »

On sait que, ces dernières années, les promus qui ont le mieux réussi sont ceux qui ont gardé l’ossature de l’équipe qui est montée et qui a simplement apporté les petites retouches nécessaires, sans tout bouleverser.

4. Fidéliser le public

Le public montois semble actuellement plus nombreux et plus enthousiaste qu’il y a quelques années, même à l’époque de la D1. Ce n’est pas qu’une impression.

 » On assiste actuellement à un phénomène, qui s’est confirmé durant plusieurs matches du tour final : ce sont les supporters « , se réjouit Lommers.  » Durant la saison régulière, on a tourné avec 850 abonnés. Jeudi passé, lors de la venue de Lommel, 7.500 Montois avaient rallié le stade Tondreau. Et pour le test-match à Tubize, les 3.200 places qu’on avait reçues ont toutes trouvé preneur. On a l’impression que la région recherchait quelque chose et que le club a su combler ce manque. « 

Il y a cinq ans, le Hainaut comptait encore quatre équipes en D1 : Charleroi, La Louvière, Mouscron et… Mons. Ce mois-ci, les Zèbres et les Dragons se sont croisés dans l’ascenseur, et Mons sera donc l’unique représentant hennuyer parmi l’élite. Sans se réjouir du malheur des autres, les Montois se disent que c’était peut-être la bonne année pour monter. Leone est convaincu que l’Albert peut récupérer du public chez les autres clubs hennuyers :  » Les amateurs de football de la région, qui sont amoureux de la D1, viendront chez nous « , assure-t-il.  » On les accueillera avec plaisir. A nous de ne pas les décevoir. Mons sera, avec le Standard, l’un des deux représentants wallons parmi l’élite. Je pense que l’Albert trouvera sa place dans le paysage du football belge, en tout cas en Wallonie. « 

PAR DANIEL DEVOS – PHOTOS: REPORTERS/ DUBRULE

 » L’équipe actuelle regorgeait de technique. Il faudrait lui adjoindre du caractère.  » (Dimitri Mbuyu)

 » Les amateurs de football hennuyers, amoureux de la D1, viendront chez nous. On les accueillera avec plaisir.  » (Domenico Leone)

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