Comment rencontrer Lato et Boniek

Les stars du football fréquentent désormais des palaces et leurs agendas réservent de moins en moins de place à la presse. Les rendez-vous se négocient longuement, parfois en pure perte. En 1982, l’argent ne régnait pas en maître absolu, il suffisait parfois d’un petit coup de pouce, d’un échange sympathique et d’un tuyau pour converser avec des vedettes au prestige de format… mondial. Ainsi, c’est en toute simplicité, et grâce à Paul Van Himst qui avait tourné dans un film avec lui (Escape to Victory) que j’avais pu rencontrer Osvaldo Ardiles avant Argentine-Belgique, match d’ouverture du Mundial 82 à Barcelone. A la fin d’un entraînement, la vedette de Tottenham me parla de la guerre des Malouines, de son frère, pilote de chasse de l’armée argentine, etc. Il n’y avait pas d’attaché de presse pour filtrer ses propos et minuter l’entretien : Ardiles avait tout le temps.

De son côté, Guy Thys nous avait permis de suivre de près les tractations du transfert de Michel Renquin d’Anderlecht au Servette Genève avec, à la clef, interview et photo de l’Ardennais et du coach suisse au bar de l’hôtel des Diables Rouges. J’imagine qu’il n’en sera pas de même le jour où un de nos monstres sacrés actuels quittera son club en pleine Coupe du Monde.

En 1982, un formidable attaquant polonais de Widzew Lodz fit sensation sur le marché des transferts en signant à la Juventus : Zbigniew Boniek. A lui seul, il ridiculisa nos Diables dans un match du 2e tour (Groupe A) de la Coupe du Monde 82 : 3-0, trois buts de Boniek, futur équipier de Michel Platini à Turin. Ce phénomène, il fallait absolument que je l’interviewe, pour souligner son talent et évoquer la vaillance de la Pologne où ma mère, Ukrainienne, était née avant que son univers familial ne soit dévasté par les armées d’Hitler et de Staline.

L’équipe polonaise logeait à Collbato, petit village blotti sur un des flancs de Montjuich. Là, j’ai compris qu’il serait possible de parler football, évidemment, mais pas de politique, de liberté, de la Deuxième Guerre mondiale, des soldats polonais de l’armée anglaise morts pour libérer la Belgique, etc. J’avais un atout pour approcher Boniek : un grand bonjour de René Verheyen et Maurice DeSchrijver pour Gregorz Lato, leur équipier à Lokeren et complément offensif de Boniek. Le divin chauve me demanda de revenir le lendemain et l’entretien se déroula sur la pelouse bordant la piscine où Zibi se désaltérait à côté de nous tout en bronzant. Une demi-heure plus tard, Lato nous présenta Boniek qui évoqua longuement les atouts et les soucis de son équipe nationale. Bingo, bon échange sur ce tapis d’herbe grâce à Lato. Polska, Polska

PAR PIERRE BILIC

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