COMME LITMANEN

Matthias Stockmans
Matthias Stockmans Matthias Stockmans is redacteur van Sport/Voetbalmagazine.

Le joueur de l’AZ a été appelé chez les Diables. Pour leur apporter la créativité qui leur manque ?

Les journaux belges parlent beaucoup moins de lui que de Moussa Dembele (19 ans). Pourtant, Maarten Martens (22 ans-1,76m), capitaine de notre équipe nationale Espoirs, joue un rôle très important à AZ, dont il est le numéro dix.

 » Il y a deux ans, à l’époque de Hugo Broos, Anderlecht m’a cédé à RKC « , explique-t-il.  » Je n’ai pas livré une super saison mais ce n’était pas mauvais. Erwin Koeman m’alignait comme extérieur gauche, ce qui n’était pas ma place favorite : je préfère jouer dans l’axe. Après un an, j’ai voulu retourner au Sporting car le style de jeu du club me convenait mieux. J’ai parlé avec Herman Van Holsbeeck qui m’a dit que le club continuait à me faire confiance mais la proposition qu’il m’a faite contredisait ces paroles : je pouvais resigner, aux mêmes conditions que lorsque j’avais 18 ans. De plus, Anderlecht voulait me louer à un club belge sans intervenir dans mon contrat. Vous appelez ça un signe de confiance ? »

Avouez que votre saison à RKC n’avait pas été terrible.

Maarten Martens : L’an dernier, à Vitesse, Tom De Mul a connu de bons moments mais il a souvent été sur le banc. Cela n’a pas empêché l’Ajax de lui trouver du talent. Pour cela, il fallait évidemment le suivre régulièrement. Le problème, à Anderlecht, c’est que Van Holsbeeck voulait Marius Mitu. Or, dans les grands matches, il n’était jamais présent.

Vous êtes fait pour Anderlecht ?

J’y ai joué pendant 12 ans et c’est là que je retrouve le plus mon style. Mais celui de l’AZ n’est guère différent : on fait circuler le ballon, on bouge beaucoup, on cherche à construire. A Anderlecht, chez les jeunes, la manière a toujours beaucoup compté.

Mais c’était trop facile, non ?

En effet. Ce n’est qu’à RKC que j’ai appris à perdre, à être pressé dans mon camp. Il m’a fallu du temps.

 » Van Gaal me fait énormément progresser  »

Chez les jeunes, on parlait plus de vous que de Mark De Man ou Vincent Kompany… mais vous n’avez joué qu’un match officiel : contre Westerlo. Vous vous en rappelez ?

C’était 4-0 et il restait une demi-heure à jouer quand Frankie Vercauteren est venu me dire que j’allais jouer 20 minutes. Mais Westerlo a marqué, Broos a fait entrer Seol et je n’ai disputé que 10 minutes. Cela ne se passerait jamais comme ça en Hollande. Ici, on lance des gamins en début de match.

Louis Van Gaal vous aligne derrière les attaquants, comme il le faisait avec Jari Litmanen à l’Ajax. Est-ce un honneur ?

Bien sûr. C’est Van Gaal qui a fait de Litmanen un numéro dix. Je joue très différemment de la saison dernière à RKC. Je savais que Van Gaal passait beaucoup de temps à faire progresser les jeunes et c’est pourquoi j’ai signé ici. Shota Arveladze, qui a joué à l’Ajax, me donne beaucoup de conseils également.

Selon Van Gaal, le joueur qui donne une passe doit suivre le mouvement de celui qui reçoit le ballon et pas l’inverse.

Celui qui donne un ballon en profondeur avant même que l’attaquant ait pu se démarquer se fait engueuler, c’est normal.

Y a-t-il d’autres principes ?

Van Gaal accorde beaucoup d’importance aux détails. Il m’a demandé combien de penalties j’avais loupé dans ma carrière. Trois. Pour lui, c’était beaucoup trop. Lorsque Arveladze a loupé le sien contre RKC, il était furieux car c’était Danny Koevermans qui devait tirer mais il avait laissé cet honneur à Arveladze. Il nous protège des médias en interne mais est très dur.

Il ne doit pas être aisé de travailler avec lui.

On s’y fait. C’est un maître tacticien mais il accorde également beaucoup d’importance à l’ambiance. Il s’intéresse à notre vie privée et se montre très humain. Parfois, il se fâche pour nous tenir en éveil. Vercauteren était comme cela aussi, j’ai beaucoup appris avec lui.

Et Broos ?

Il était l’entraîneur du noyau A, je n’en faisais pas partie et il ne parlait pas avec les jeunes.

A Anderlecht, on disait que vous étiez trop petit.

Oui, mais je savais que j’allais prendre du volume avec l’âge. C’est le cas maintenant.

 » Broos a aligné Kompany parce qu’il le fallait  »

Vous ne faisiez pas de musculation ?

Si mais cela ne donnait rien. Mon corps n’était pas prêt. En matière de formation, on ne peut rien reprocher à Anderlecht. Le problème, c’est quand on passe dans le noyau A. Je me rappelle qu’au tour préliminaire de la Ligue des Champions, Kompany a dû entamer le match parce que Glenn De Boeck était blessé. A l’entraînement, Broos avait pourtant tout essayé pour se passer de lui et il ne l’a repris que parce que ça ne fonctionnait pas. On m’a dit cent fois que je devais être patient. Mais les vrais impatients, c’étaient eux ! Il n’a pas été facile de quitter Anderlecht mais, à mon âge, je devais jouer. A RKC, Erwin Koeman n’était pas un mauvais entraîneur mais il s’intéressait peu aux jeunes. Peut-être parce qu’il débutait dans le métier. Il voulait changer mon style de jeu, m’obliger à gagner des duels. Van Gaal, lui, me dit de ne pas aller au duel, de courir entre les lignes. Pour lui, ceux qui parviennent à se faufiler sont les meilleurs.

AZ vous a engagé pour succéder à Kenneth Perez, qui fait fureur à l’Ajax. Est-ce un lourd héritage ?

Oui, d’autant qu’AZ a aussi engagé Simon Cziommer, de Roda. Au début, c’est lui qui jouait car il était plus connu et plus populaire. Ce fut dur car je me sentais prêt puis l’entraîneur n’a plus été satisfait et il m’a dit que j’avais cinq matches pour le convaincre. Cela m’a mis en confiance.

Les deux Belges, vous et Dembele, sont les joueurs les plus créatifs d’AZ. N’est-ce pas paradoxal ?

L’entraîneur dit souvent que nous prenons des risques mais qui ne risque rien n’a rien. Dans une équipe, il y a ceux qui osent et ceux qui équilibrent.

Mais il faut des automatismes. Pourrait-on faire cela en Belgique ?

Peut-être pas, encore qu’on y arrive bien avec les Espoirs, dont je suis le numéro dix. Jean-François de Sart me laisse une certaine liberté et il préfère aussi Tom De Mul à Benji De Ceulaer parce qu’il est plus créatif.

Les Espoirs sont qualifiés pour le championnat d’Europe. C’est une bonne base pour l’avenir ?

Certainement mais l’Union Belge ne s’en occupe pas assez. La saison dernière, nous avons été élus Equipe de l’Année et l’entraîneur n’a même pas reçu de félicitations. Lors de notre match décisif en Bulgarie, il y avait 7.000 spectateurs. En Hollande, ils sont 15.000. Mais chez nous, on ne fait aucune publicité…

Suivez-vous encore Anderlecht ?

Oui, le niveau de jeu hollandais est plus élevé. En Belgique, c’est trop défensif, on n’apprend pas à se défaire d’un pressing. Les clubs belges ne manquent pas de talent mais ils ne sont pas habitués à jouer vite et, sur la scène européenne, cela se paye cash.

MATTHIAS STOCKMANS

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire