Coeur pour 2

Face aux problèmes cardiaques de Khalilou, son épouse assure et rassure avec classe.

« Les gens me demandent parfois si les problèmes de santé de Khali ne m’ont pas trop affectée depuis son départ d’Auxerre. Mais je n’ai aucune raison de me plaindre. J’ai un mari qui vit toujours de sa passion pour le football, aujourd’hui, un enfant de cinq ans, Noah, qui respire la santé et moi, qui coule une existence des plus heureuses à leurs côtés. Dans ces conditions, il serait indécent que je me lamente. Car ce que j’ai vécu ne représente rien par rapport à ce que les victimes du tsunami ont enduré. Là-bas, dans le Sud-Est asiatique, des milliers de personnes ont perdu le peu qu’ils possédaient, à savoir un ou plusieurs êtres chers. Moi, en revanche, je ne manque de rien et j’ai toujours l’immense bonheur et privilège de profiter de l’affection de ceux qui comptent pour moi. Tout le monde ne peut en dire autant.

Khali avait un rêve il y a deux ans : devenir le premier joueur sénégalais à s’illustrer chez un ténor du football italien, l’Inter Milan en l’occurrence. Ce rêve n’aura finalement été que de très courte durée puisque des examens médicaux poussés décelèrent sur-le-champ un problème d’arythmie chez lui. Aux dires de la Faculté, cette affection était liée à un virus qui s’était logé à hauteur du c£ur. En principe, son effet aurait dû s’estomper après un laps de temps de six semaines. Un deuxième check-up, effectué après ce délai, n’offrant toujours pas tous les apaisements requis, une nouvelle période de repos de même longueur fut prescrite. Mais toujours sans changement notoire, hélas. Au bout de quelques mois, la direction du club lombard prit petit à petit ses distances par rapport au cas posé par mon mari. De notre propre initiative, nous sommes alors allés aux Etats-Unis, afin de consulter d’autres spécialistes.

Là-bas, les médecins ont mis le doigt sur les véritables causes du mal dont souffrait Khali. Chacun sait que le c£ur humain est constitué de deux oreillettes et d’autant de ventricules. Sur l’un de ces derniers, de petites taches empêchaient un débit sanguin régulier. Par le biais d’une incision à hauteur de l’aine, les praticiens tentèrent d’abord de les geler. Mais cette opération ne se révéla malheureusement pas un succès. Par la suite, ils tentèrent de combattre le mal par une ouverture de la cage thoracique, mais sans résultat probant non plus. En définitive, ce n’est ni à Milan, ni aux States que mon mari a été délivré de ses tourments mais tout bonnement à la clinique d’Alost, à deux pas du domicile familial. Nous avons finalement parcouru des milliers de kilomètres alors que la solution se trouvait non loin de notre porte…  »

 » Le foot est sa raison de vivre  »

 » Une autre question qui revient sans cesse est de savoir si je ne préférerais pas avoir Khali à mes côtés plutôt que sur un terrain, vu les événements avec lesquels il a dû composer ces derniers mois. Là encore, ma réponse est négative. D’un côté, j’ai reçu tous les apaisements du professeur Pedro Brugada, qui a effectué une opération à c£ur ouvert sur mon mari à notre retour des States. Un défibrillateur, placé à ce niveau, veille désormais à ce que le c£ur revienne tout simplement à la normale au cas où il aurait tendance à s’emballer. Jusqu’à présent, ce générateur d’électrochocs n’a pas encore dû intervenir une seule fois depuis que Khali est à Bolton. A la lecture de son activité, on a pu constater clairement l’absence d’extrasystoles. Depuis lors, mon mari et moi avons toujours eu nos apaisements quant aux données fournies. Et ce suivi, pour un sportif de haut niveau, est quand même régulier. Chez Monsieur Tout-le-Monde, un contrôle est effectué tous les six mois. Chez Khali, c’est mensuel. Jusqu’à présent, tous les indicateurs ont toujours été au vert pour lui. Une fois encore, je ne vois pas pour quelle raison je me ferais du mouron. C’est pourquoi je le soutiens pleinement dans son souci de jouer à fond la carte du football.

Au moment où nous nous sommes engagés mutuellement dans la vie, les choses étaient claires : le football allait, dans un premier temps, faire office de priorité et, sitôt la carrière de Khali terminée, je pourrais alors à mon tour privilégier mes intérêts. A 30 ans fraîchement sonnés, mon mari se situe toujours dans cette première phase et il m’appartient de cautionner son choix. Le football, c’est sa vie. Pour rien au monde, je ne voudrais le priver de sa passion. Sauf s’il met son existence en péril, bien sûr. Mais, je le répète, sous cet angle-là, nous avons eu tous nos apaisements. Tant que les médecins ne mettront pas un holà à sa raison de vivre, je serai toujours son premier supporter. Et je sais que lui-même sera mon plus farouche partisan le jour où il aura mis sa propre carrière en veilleuse. Mais ce n’est pas demain la veille, puisque Khali espère encore évoluer sur les pelouses jusqu’à l’âge de 35 ans au moins.

Il va de soi que les événements qu’il a connus l’ont changé. Avant, il était obnubilé de se réaliser un jour dans un grand club appartenant à un championnat huppé. A présent, il a appris à relativiser un certain nombre de choses. Il ne flashe plus sur les noms, comme autrefois. Son souci majeur consiste à être délivré pour de bon de ses ennuis de santé et de prendre son pied sur le terrain. D’accord, il a peut-être été privé d’un avenir radieux dans le Calcio. Mais combien d’Africains, ou de joueurs européens tout court, ne l’envient pas de jouer à Bolton aujourd’hui ? Lui non plus n’a aucun motif de maugréer. D’autant plus que tout va de mieux en mieux pour lui. Je n’en veux pour preuve que son récent appel en sélection représentative du Sénégal, après une absence de 20 mois. C’est un fameux adjuvant moral après la période délicate qu’il a quand même traversée.

Khali est lié à son employeur anglais jusqu’en fin de saison, avec option pour une campagne supplémentaire. Bientôt, il saura si cette clause sera levée. Mes séjours sur place me plaisent, même si je suis appelée à faire régulièrement la navette car nous avons choisi de ne pas trop perturber la scolarité de notre fils, qui va à l’école à Alost. Après Auxerre, Milan et Bolton, je ne serais toutefois pas réfractaire, un jour, à un autre dépaysement. Peu m’importe l’endroit, car je m’adapte partout. Même le Qatar ou Dubaï ne seraient pas pour me déplaire. Mais il n’appartient qu’à Khali de décider si nous déménagerons un jour là-bas. Aussi longtemps qu’il sera joueur, il aura toujours le dernier mot. Par la suite, je me rattraperai « .

Bruno Govers

 » Je ne vois pas POUR QUELLE RAISON je me ferais du mouron  »

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