COACH LUIS FELIPE SCOLARI

« La presse brésilienne estime que notre groupe est ridiculement faible. Je ne partage pas cet avis. La Turquie, par exemple, a beaucoup progressé en quelques années, ce qui se remarque d’ailleurs aux résultats de ses clubs dans les joutes européennes. Le Costa Rica joue à la brésilienne: fin technicien, il aime les combinaisons courtes. Il n’y a pas d’équipes faibles ni de passe-droit pour une phase finale de la Coupe du Monde.

Je crois toutefois aux chances du Brésil, bien que la France et l’Argentine soient mes favorites. Nous devons atteindre les demi-finales. Sinon, nos supporters auront le droit de réclamer des explications.

Je m’attends à un Uruguay fort: sa conviction dissimule toujours ses points faibles. L’Equateur est susceptible de créer la surprise car il a de bons joueurs. Mais il faut surtout suivre le Portugal. Il n’a jamais eu de meilleure équipe depuis 1966. Je pense qu’il ira très loin.

Le football-samba du Brésil est réputé depuis des lustres mais je ne m’y attarde pas. On joue avec plaisir quand on gagne. Comment être heureux quand on perd? Imaginez que nous disputions trois superbes matches à cette Coupe du Monde mais que nous soyons éliminés. Que nous resterait-il? Il faut se fixer des objectifs. On participe à un Mondial pour être champion. Si nous devons mal jouer pour atteindre cet objectif, nous jouerons mal.

Je veux profiter de l’occasion pour m’exprimer sur la réputation injustifiée du football sud-américain. Comme si l’Europe ne jouait pas d’une manière aussi vicieuse que nous… Seulement, les arbitres visent davantage les footballeurs sud-américains. C’est à cause de la réaction des adversaires. En Europe, le joueur sur lequel on commet une faute fait comme s’il venait de subir une tentative d’assassinat et que l’événement n’était pas conforme à l’éthique sportive. Chez nous, commettre une faute relève presque du mérite. Mais nous en payons le prix quand nous quittons notre continent.

J’ai été très critiqué suite à nos défaites contre le Honduras et la Bolivie. J’ai toujours été un entraîneur de club et je dois m’adapter au poste de sélectionneur. Par exemple au fait qu’il me faille trois mois pour faire connaissance avec mes joueurs. Mais ensuite, c’est un effet boule de neige. Tout le monde a des préférés. Mes fils, âgés de 17 et 10 ans, entendent les remarques, les blagues faites à mon sujet. Un moment donné, ils m’ont demandé si mon job en valait la peine. Maintenant, comme moi, ils sont heureux que je dirige la Seleçao.

Je ne peux pas me plaindre quand je vois les critiques essuyées par mon prédécesseur, Carlos Alberto Parreira, alors qu’il a remporté l’édition 1994. Parreira mérite un coup de chapeau car il croyait en son travail. Seul contre tous, il a répété qu’il atteindrait son objectif. Il y est parvenu. Il a su transmettre sa foi aux joueurs. C’est son plus grand mérite. En 1982, nous avions une équipe spectaculaire, mais alors qu’il aurait suffi de faire match nul contre l’Italie, nous avons continué à soigner notre football et nous avons sombré. Cette année-là, le Brésil n’a pas écrit de page d’histoire. Parreira, lui, l’a fait en 1994″.

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