Coach à NOVOSIBIRSK

Le journaleux de foot contemporain doit de plus en plus faire gaffe à sa prose. Si, dans le but de tendre au général, il ose partir d’un exemple précis pris dans un club précis, pour stigmatiser (ou seulement moquer) les tares de ce sport qu’il persiste à aimer,… il risque le harponnage par le club et ses inconditionnels : désormais, partir d’un exemple, c’est vouloir déstabiliser ! C’est, en version/club de foot, le syndrome du harcèlement moral, dernière trouvaille juridique d’un syndicalisme déliquescent.

Aujourd’hui, chez nous les nantis du monde, tout le monde pleurniche, tout le monde est irréprochable mais persécuté, et tout le monde envisage le recours à un avocat pour pleurnicher plus efficacement. Ça vaut ce que ça vaut, mais j’ai lu ce qui suit sur Internet qui n’est pas la Bible. Aux USA, pour réchauffer son chat, un mec le met dans le micro-ondes. Evidemment Mistigri crame, mais le gars va en justice contre le fabricant du four : arguant du fait que le mode d’emploi avait omis les matous dans la liste de ce qu’il ne fallait PAS mettre au micro-ondes ! ET LE GARS GAGNE ! !

Ce climat n’amuse pas les p’tits marrants comme moi. Supposons que demain, le coude d’un footballeur wallon s’égare par malheur sur la glotte d’un arbitre et l’étende raide mort, me risquerai-je à déstabiliser tout un club en osant gronder l’égarement cubital ?

Non, pour critiquer pareille violence, j’attendrai plutôt sagement que le même fait se reproduise à l’occasion du derby Vladivostok-Novosibirsk : et là, je pourrai y aller franchement avec mes grandes idées pacifistes, ce sera sans grand danger. Mourir pour des idées, d’accord, mais de mort lente, comme chantait l’autre…

Deux précautions valant mieux qu’une, mettons donc que ce soit l’entraîneur de Novosibirsk qui, voici quelque temps, commentait en ces termes le but encaissé ayant précipité la défaite des siens :  » On n’a pas respecté mes consignes « , pestait-il .  » Sur la phase, il y avait deux adversaires libres de tout marquage ! « … J’ai déjà entendu ça mille fois, versant donc mathématiquement mille larmes de crocodile ! Car c’est le genre de réflexion qui sent Ponce Pilate à plein nez, du style je-suis-responsable-de-l’animation-collective-mais-si-mes-joueurs-commettent-des-erreurs-individuelles-je-n’y-suis-pour-rien-je-m’en-lave-les-pieds. Mouais.

Par contre, si tu l’emportes grâce à l’exploit strictement individuel d’un de tes gars, tu plastronneras devant les caméras en laissant entendre que c’est une parfaite organisation collective (c’est-à-dire la tienne) qui a sous-tendu la victoire !

Marquage et démarquage sont les deux mamelles de notre sport joli. Et les deux mamelles sont indissociables, faudrait que certains coaches l’admettent ! En perte de ballon, le marquage de l’adversaire n’est pas une consigne, c’est le b.a.-ba du foot ! Mais sans jamais oublier que simultanément, l’adversaire en question, dont l’équipe est en possession de balle, a pour b.a.-ba d’essayer de se démarquer : c’est le coup du chat et de la souris, de l’arroseur arrosé, du couillonné couillonneur ! Chaque but en foot résulte d’un espace concédé par les uns, en même temps que trouvé par les autres : et il n’y a pas deux poids deux mesures, le coach assume tout ou le coach n’assume rien !

Si ton défenseur a laissé trop de champ, de deux choses l’une. Soit l’adversaire direct était intrinsèquement trop fortiche, et ce serait alors dégueulasse d’engueuler ton gars comme du pus ! Soit ton gars pouvait faire mieux : mais c’est alors aussi que toi, le coach, tu lui as mal expliqué son rôle ! Tu n’as pas trouvé les bons mots, tu t’es montré peu persuasif, tu n’as pas gonflé son moral, tu as mal tapé sur le clou, ou tu n’as pas pressenti une méforme qui aurait dû t’amener à ne pas le sélectionner, bref : dans les erreurs les plus crassement individuelles, comme tout coach, celui de Novosibirsk a sa part de responsabilité.

par Bernard Jeunejean

Il n’y a pas deux poids deux mesures, LE COACH ASSUME TOUT OU le coach n’assume RIEN !

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