Christophe Lepoint est un chançard

Vraoum ! Vitesse, java et grosses bagnoles, deux de nos gamins gâtés se sont encore illustrés. Plus de peur que de mal heureusement, vu qu’ils n’ont tué aucun innocent. On ne va quand même pas s’en faire pour un petit tibia qui n’a même pas cassé dans l’exercice de ses fonctions, à savoir soutenir un footballeur galopant pour un ballon.

Stop aux jérémiades de type La guigne ou Vraiment pas de chance : Christophe Lepoint et Sébastien Bruzzese n’ont pas été victimes d’un accident de la route, mais coupables d’un accident de la route. Quelques mois de patience, de rééducation ainsi que de méditation sur le sens de la vie, et Lepoint pas mort retrouvera une jambe, un ballon ainsi qu’un boulot agréable, pour un salaire bien supérieur à celui du commun des mortels. Lepoint reste un chançard, les vrais malchanceux sont les amochés par d’autres ad vitam, les vrais pauvres, les supporters de Gand, et même les simples amateurs de foot : privés d’un joueur agréable à voir évoluer, de polyvalence peu habituelle, car capable de rigueur défensive autant que d’imagination en possession/ballon. Pas d’apitoiement, mais bon rétablissement.

Sont-ce les médias qui évoluent, ou les joueurs de foot qui accumulent les conneries au point qu’elles deviennent difficiles à camoufler ? Toujours est-il que les commentaires entourant l’accident de Lepoint me paraissent différer de ceux ayant entouré l’accident, mortel il est vrai, du regretté François Sterchele voici près de trois ans. Sterchele fut hier un héros tragique, Lepoint provoque aujourd’hui un questionnement plus général : ainsi ? le président gantois Ivan De Witte en arrive-t-il à se demander comment accompagner professionnellement des travailleurs toujours immatures à 25 ans accomplis, et qui constituent selon lui 30 % de nos footballeurs pros. Rappelons qu’après Saint-Trond-Gand, ils furent huit ou neuf Buffalos à partir fêter (le match nul) à Willebroek…

Hasard, le surlendemain de l’accident, j’assistais à Libramont à une conférence-débat organisée par le pouvoir provincial, et consacrée à la problématique de l’alcool en milieu sportif. Les deux conférenciers étaient un psychiatre qui ne m’a pas réconcilié avec la psychiatrie… et mon collègue Stéphane Pauwels, décidément mis à toutes les sauces ! Mais ce sera le témoignage de Georgy Clément, policier de la route et ex-président de petit club, qui me restera en mémoire : par sa description toute en humanité de ce qu’est l’ambiance à casiers jaunes d’un vestiaire d’après-match, puis d’une buvette d’après-vestiaire, puis de départs fréquemment alcoolisés, puis parfois de carambolage au tournant.

Et toujours cette angoisse qui t’oppresse parce que ça peut se passer, ou que ça s’est déjà passé, en sortant de ta buvette ! Car contrairement à ce qui se passe en D1, les responsables de province ne prennent pas congé, après le match, de joueurs encore cleans, qui n’iront picoler qu’ensuite et ailleurs, hors-responsabilité de leur coach ou de leur prési. Rapport à leurs homologues amateurs, De Witte et son coach sont aussi des chançards…

Un Francky Dury qui a eu la décence de regretter que l’alcool fasse  » apparemment partie de la culture du football « . Il ne croit pas si bien dire. Quand les techniciens FIFA élisent le meilleur joueur d’une partie, ils l’appellent l’homme du match Budweiser. A l’UEFA, ça devient l’homme du match Carlsberg. Au Bayern, Louis van Gaal a récemment puni ses joueurs peu performants en les privant d’ Oktoberfest. En Angleterre, Carling sponsorise la Coupe de la Ligue après avoir sponsorisé la Premier League jusqu’en 2001. En Argentine, une bière à étiquette verticale bleue et blanche s’appelle 10 Marado. Dès que fut évoquée l’éventualité que le futur Mondial au Qatar soit un Mondial sans bière, ce furent illico des cris d’orfraie ! Et chez nous, plus personne n’ignore l’appellation de notre D1, qui nous abreuve de pub d’autant plus insidieuse qu’elle est marrante et bien fichue.

C’est à se demander si c’est la bière qui fait partie du foot, ou le foot qui fait partie de la bière. Mais il est sûr que foot et bière vivent une solide histoire d’amour, sans cesse solidifiée par les vendeurs de foot et les vendeurs de bière. Et quoique la convivialité soit souvent au rendez-vous sans dégât, y’a pas de quoi en être fiers.

PAR BERNARD JEUNEJEAN

A se demander si la bière fait partie du foot… ou le foot de la bière.

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