Chez les Grégoire, ON LIT

Christophe a aussi 25 ans et a appris à lire avec Sport/Foot Magazine grâce à son grand-père et son père. Ils sont tous deux abonnés de longue date et des gars de terrain. Le gaucher a de qui tenir. Voici trois générations de vrais footeux.

Pour JacquesGrégoire, l’année 1980 fut à marquer d’une pierre blanche : le 20 avril, il célébra la naissance de son premier fils, Christophe.  » Il ne m’a pas fallu longtemps pour m’apercevoir qu’il deviendrait footballeur « , relate-t-il.  » A peine pouvait-il marcher qu’il shootait déjà dans un ballon. Il avait de qui tenir, puisqu’à l’image de mon beau-père, j’ai moi-même été footballeur : j’ai joué à Seraing de 8 à 21 ans, puis je suis parti à Herstal (Provinciale et Promotion), et enfin à Anthisnes. J’ai arrêté de jouer à 35 ans, à cause d’un problème à la hanche. Feu FrancisNicolay, qui dirigeait l’école des jeunes de Seraing, m’a incité à devenir entraîneur. J’ai commencé par les Préminimes, et 15 ans plus tard, je suis toujours aussi passionné et j’entraîne les Cadets Provinciaux « .

Dans une famille de sportifs, et de footballeurs en particulier, le magazine occupa rapidement une place de choix.  » Je me souviens que mon grand-père était un lecteur assidu « , souligne Christophe.  » Chaque mercredi midi, après l’école, je me rendais chez lui pour manger. Comme c’était le jour de sortie du magazine, je le découvrais toujours sur la table. C’est là que j’ai commencé à le feuilleter à mon tour, puis à le lire lorsque j’étais devenu assez grand pour comprendre. Je lisais à peu près tout, mais surtout les articles sur les joueurs qui me fascinaient et sur mes équipes préférées. Comme Seraing, qui vivait une période faste à l’époque, et déjà Anderlecht, dont je suis devenu très vite un supporter. Après avoir lu, je partais jouer au foot avec les copains « .

Le grand-père :  » Christophe joue à Anderlecht alors que j’ai joué en D1 au Standard !  »

JeanVanHerck (71 ans, le grand-père maternel de Christophe Grégoire) est toujours un fidèle abonné et un lecteur toujours aussi assidu qu’au début.  » Je lis à peu près tous les articles, de la première à la dernière page « , explique-t-il.  » Et, le plus étonnant peut-être, c’est que je lis le magazine en pédalant car je continue à entretenir ma condition pour me maintenir en bonne santé. Tous les jours, je me rends dans une salle de sports où, pendant une heure, je parcours le magazine en pédalant. Lorsqu’on est absorbé par la lecture, les efforts se digèrent plus facilement…  » ( ilrit)

Jean Van Herck, c’est un nom qui rappellera peut-être quelque chose aux anciens.  » Mais il faut une bonne mémoire « , sourit-il.  » J’ai commencé à jouer au Standard en 1945. Je n’étais pas titulaire à part entière, mais j’ai tout de même disputé une cinquantaine de matches en D1, éparpillés sur sept saisons (de mes 18 à mes 25 ans). J’officiais comme doublure de HenriThellin, à l’arrière gauche. Eh oui, déjà le flanc gauche, comme Christophe, mais au contraire de lui, j’étais droitier « .

Voir son petit-fils enfiler le maillot d’Anderlecht, alors qu’on a soi-même défendu les couleurs du Standard, n’est-ce pas un dilemme ?

 » Que voulez-vous, j’ai eu le temps de m’y habituer « , rétorque Jean Van Herck.  » Mon beau-fils, déjà, était un supporter d’Anderlecht. Jacques est un amateur de football technique et Christophe lui a emboîté le pas. Lorsqu’il était petit, j’avais placé un but dans mon jardin, pour qu’il puisse s’amuser. Son plaisir, c’était de venir chez moi avec un maillot d’Anderlecht. Je lui faisais fréquemment la remarque : – Christophe, quand on vient chez Papy le mercredi, on ne vient pas avec une vareuse mauve ! Choisis plutôt une autre couleur ! Mais il ne voulait rien entendre. Sébastien (22 ans), le deuxième fils de Jacques, est différent : il a tout de même joué quatre années au Standard. Mais il était surtout supporter du club où jouait MichelPreud’homme : Malines, où lui-même a aussi évolué pendant un petit temps. Maintenant, il est à Seraing en D3 où il évolue en tant qu’avant-centre. C’était sa position de départ mais tant au Standard qu’à Malines on l’a aligné sur le flanc.

C’est sûr, j’aurais préféré que Christophe endosse la même vareuse que celle que j’ai portée jadis, mais je suis très heureux pour lui qu’il ait pu signer dans un club aussi prestigieux qu’Anderlecht. Christophe a plus de talent que je n’en avais à l’époque, mais j’étais plus volontaire. C’est souvent ainsi : lorsqu’on est moins doué, on doit compenser par d’autres qualités : le courage, la combativité. J’en ai fait l’expérience à tous les niveaux, puisque j’ai entraîné des clubs de Provinciale pendant 28 ans : tous les garçons qui ont un peu plus de talent que les autres éprouvent moins le besoin d’aller au combat. Ceux qui combinent toutes les qualités se retrouvent au Real Madrid, mais ne jouent pas dans le championnat de Belgique « .

Et l’évolution de Sport/FootMagazine ?  » Je crois que, comme dans la plupart des autres journaux, les journalistes de votre magazine sont compétents. Ce qui m’irrite parfois, c’est qu’aujourd’hui, on utilise le terme professionnalisme à tort et à travers. La différence, par rapport à mon époque, est qu’autrefois les joueurs travaillaient et jouaient au football. Aujourd’hui, ils gagnent suffisamment d’argent pour se concentrer uniquement sur leur métier. Mais je ne trouve pas qu’ils soient plus professionnels que nous. Simplement, les conditions ont changé. Il fallait être courageux, autrefois, pour travailler à l’usine 48 heures par semaine et s’entraîner encore quatre ou cinq fois en soirée. Mais le terme de professionnel est devenu à la mode : on parle de faute professionnelle, de comportement professionnel. De tous temps, il y a eu des joueurs qui commettaient des fautes, ou qui étaient moins sérieux que d’autres.

Ce qui m’étonne aussi, parfois, c’est tout le foin que l’on fait à propos des dispositifs tactiques. On parle de 4-3-3, de 4-4-2. Il faudrait compter combien de minutes les joueurs passent réellement sur le terrain dans le dispositif énoncé au départ. C’est étonnamment peu. Quoi qu’il en soit, j’espère que votre magazine continuera encore à paraître pendant de nombreuses années : cela me donnera du courage pour pédaler sur mon vélo « .

Le père :  » Christophe m’en avait voulu quand j’avais déclaré à votre magazine qu’il devait se secouer  »

Jacques Grégoire, le père de Christophe, est lui aussi un abonné de longue date :  » Je ne me souviens plus en quelle année je me suis abonné, mais il y a longtemps de cela. Et, auparavant, j’achetais déjà régulièrement le magazine. Cela me permettait de suivre d’un autre £il l’actualité du football. D’avoir des commentaires sur les rencontres auxquelles j’assistais avec mes deux fils, comme les duels Anderlecht-Standard ou Anderlecht-Malines à la fin des années 80 et au début des années 90. D’apprendre à mieux connaître certains joueurs que j’appréciais en les voyant évoluer sur le terrain « .

 » Moi aussi, j’achète régulièrement le magazine « , enchaîne Christophe.  » J’aime bien tout. Cela fait souvent office de référence dans le milieu « .

 » Il y a tout de même une chose qui m’interpelle « , intervient son père.  » Ce sont les fameuses cotations que figurent désormais aussi dans la plupart des journaux. Parfois, un journaliste attribue uniquement des cotations aux joueurs de l’équipe qu’il suit régulièrement. C’est déjà très difficile de cette manière. Mais souvent, un même journaliste doit coter 22 joueurs et je me demande comment c’est possible « .

 » C’est sûr que les joueurs prêtent attention à la manière dont ils sont jugés, mais il faut essayer de relativiser « , tempère Christophe.  » On sait que ce n’est pas facile de juger 22 joueurs. Et on sait aussi que certains joueurs sont mieux appréciés que d’autres par certains journalistes « .

Si, effectivement, Christophe Grégoire relativise facilement les cotations qu’on lui attribue, il est par contre très attentif à la comptabilité des assists. A l’une ou l’autre reprises, il a déjà observé que l’une de ses passes décisives avait été oubliée ou attribuée à un autre joueur. Et d’ajouter, en plaisantant :  » Si vous ne rectifiez pas, je ne vous accorde plus d’interviews !  » Une boutade, car le joueur reste toujours très disponible.

 » Christophe ne peut pas se plaindre du traitement qu’il a reçu de la part des journalistes « , dit son père.  » Je ne sais pas si on le jugera différemment, ou plus sévèrement, maintenant qu’il est à Anderlecht : il est encore trop tôt pour le dire. Dans les interviews, il faut tout de même faire attention à ce que l’on dit. Parfois, on ne mesure pas toujours la portée de certaines déclarations d’apparence anodine. Et cela vaut pour moi également. Ainsi, je me souviens qu’à l’époque où Christophe connaissait un petit passage à vide, j’avais été interrogé sur les raisons de celui-ci et j’avais répondu qu’il était peut-être perturbé par le fait de ne plus avoir MichalZewlakow derrière lui, sur le flanc gauche mouscronnois. Lorsque j’ai revu mon fils, il m’a confié que MarcoCasto avait été vexé par ces propos « .

 » C’est vrai que Marco m’avait un peu charrié à ce sujet « , confirme Christophe.  » Mais il faut le connaître : il a souvent des réactions pareilles et n’est jamais vexé bien longtemps « .

 » En tout cas, Sport/ FootMagazine est lu dans le milieu « , enchaîne son père.  » Lors des débuts de Christophe à Mouscron, j’avais déclaré qu’en le voyant sur le terrain, j’avais parfois envie de le secouer un peu. Christophe m’en a un peu voulu, parce que cette fois-là aussi, on l’avait charrié à la suite de mes déclarations. J’avais simplement dit la vérité, et il savait d’ailleurs très bien ce que je pensais de lui. Finalement, toutes ces remarques ont tout de même servi à quelque chose, car aujourd’hui il a malgré tout appris à se faire violence « .

Christophe :  » Avant, j’allais à l’entraînement en me disant : -On ne va quand même pas se rentrer dedans ?  »

Christophe relativise, il se connaît.  » Ah oui, ce vieux reproche selon lequel je manque de caractère… Il date de mes débuts de footballeur. Combien de fois n’ai-je dû l’entendre ? Mais je savais que pour réussir, je devrais étaler une saine dose d’agressivité. Donc, j’ai essayé de changer. Petit à petit, je suis devenu plus agressif, tout en sachant que je ne le serais jamais vraiment. Mais bon, j’ai tenté de m’améliorer et depuis quelques années, ce reproche se fait plus rare. Comme le fait que je connaisse des hauts et des bas : deux bons matches suivis de deux mauvais. Selon moi, c’est davantage lié à mon âge qu’à mon caractère.

L’agressivité vient de la tête. Je savais que si je n’apprenais pas à mettre le pied, je ne ferais pas carrière mais cela passe par la tête : il faut vouloir le faire. J’ai vraiment fait de mon mieux, quitte à forcer mon naturel. On pourrait dire que je me suis fait violence mais je n’avais pas le choix. Sans cela, je ne serais sans doute jamais devenu professionnel au plus haut niveau. J’ai au moins réussi à afficher une certaine dose de dureté. Je me suis exercé à être moins gentil. A l’entraînement, par exemple. Normalement, je monte sur le terrain en pensant : – On ne vaquand même pas se rentrer dedans ? Mais beaucoup de joueurs n’en ont cure et ne font pas de différence entre un match et un entraînement. Pour eux, c’est la même chose alors que je réservais certains trucs aux matches. Je suis maintenant conscient de la nécessité d’être dur à l’entraînement aussi. Il faut s’imposer. C’est ce que j’essaie de faire. Mes entraîneurs, GeorgesLeekens et Philippe Saint-Jean, ont joué un rôle important dans ce processus de maturation. Maintenant que je suis à Anderlecht, je sais ce qu’on attend de moi.

En dehors du terrain, je suis tout sauf colérique. Peut-être suis-je trop amical et parfois, ça se retourne contre moi mais là aussi, je pense avoir appris à effectuer les bons choix. Par exemple en ce qui concerne mes amis. Quand on est trop amical avec certaines personnes, elles en abusent et se croient tout permis. Parfois, elles racontent des trucs sur vous alors que vous pensiez pouvoir leur faire confiance. Mais bon, j’ai trouvé un bon équilibre.

Mon frère Sébastien, qui est également footballeur, est différent sur un terrain. A chacun son caractère, me dis-je en le voyant. Cependant, en dehors, il est exactement comme moi : calme et gentil. Cela doit être lié à notre éducation et donc à nos parents. Ma mère est secrétaire et mon père employé dans une société de gaz. A la maison, nous avons appris à respecter les autres et à être polis. Quand on se comporte ainsi envers les autres, ils vous le rendent. C’est vrai, quand même ? Et puis, mieux vaut avoir un bon caractère qu’un mauvais ? (Il rit)

Je ne suis pas de ceux qui vous font de longues déclarations. Je n’ai pas non plus d’anecdotes amusantes. Enfin, aucune ne me vient à l’esprit. Je joue au foot. Pour le reste, comme tous les jeunes de mon âge, j’aime internet, le shopping, le tennis, le cinéma et j’adore rencontrer mes copains. Rien de spécial. Je suis comme tout le monde. Qu’y puis-je ? Je n’ai rien d’extraordinaire. Je suis un garçon tout ce qu’il y a de plus banal. J’ai étudié le commerce mais j’ai interrompu ces études quand j’ai été transféré à Mouscron. Ma mère n’était pas ravie mais je voulais saisir la chance qui s’offrait à moi en football et je dois dire que je ne l’ai encore jamais regretté.

Je mène une vie normale. Si ce n’est, peut-être, que mon amie est française. Elle est originaire de Lyon et achève actuellement ses études dans l’Hexagone. Ensuite, elle emménagera avec moi. Une fois de plus, nous ferons comme tous les jeunes. Je vous le disais : je suis on ne peut plus normal « .

Daniel Devos et Jan Hauspie

 » Leekens et Saint-Jean ont été importants dans ma maturation. Maintenant que je suis à Anderlecht, JE SAIS CE QU’ON ATTEND DE MOI  »

 » Le mercredi, chez mon grand-père, je mangeais, je lisais le magazine et PUIS J’ALLAIS JOUER AU FOOT AVEC MES COPAINS  »

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